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05/10/2010 | FRANCE | N°09VE03130

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites à la frontière, 05 octobre 2010, 09VE03130


Vu la requête enregistrée le 14 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Youssouph A, demeurant ..., par Me Amiri, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0907757 du 20 juillet 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 7 juillet 2009 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour tem...

Vu la requête enregistrée le 14 septembre 2009 au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles, présentée pour M. Youssouph A, demeurant ..., par Me Amiri, avocat à la Cour ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0907757 du 20 juillet 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 7 juillet 2009 décidant sa reconduite à la frontière ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été régulièrement convoqué à l'audience ; qu'il n'a pas signé l'avis de réception du pli dont s'agit ; qu'aucun courrier ni avis d'audience n'ont davantage été transmis à son avocat et qu'il a été, dès lors, porté atteinte à son droit à un procès équitable, n'étant ni présent ni représenté à l'audience ; qu'un mémoire complémentaire ainsi que des pièces ont été transmises au tribunal alors que l'affaire avait été mise en délibéré ; que ce mémoire n'a pas été visé dans le jugement ; qu'en outre, il vit habituellement en France depuis 2000 et justifie d'une entrée régulière dans ce pays ; que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues dès lors qu'il justifie d'une présence stable et continue en France, qu'il y travaille et s'y acquitte de ses impôts ; qu'une erreur manifeste d'appréciation a été commise et que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été respectées dès lors qu'il vit avec une compatriote sénégalaise depuis mai 2008 et qu'un enfant est né de cette relation le 26 avril 2009 ; qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Riou, magistrat désigné,

- et les conclusions de M. Brunelli, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant sénégalais né le 31 décembre 1969, relève appel du jugement en date du 20 juillet 2009 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 7 juillet 2009 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement attaqué ;

Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'audience est publique. Elle se déroule sans conclusions du commissaire du gouvernement, en présence de l'intéressé, sauf si celui-ci, dûment convoqué, ne se présente pas (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui a formé un recours contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière doit, même s'il est assisté d'un avocat, être personnellement convoqué à l'audience ;

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la lettre adressée le 10 juillet 2009 à M. A par les services du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, le convoquant à l'audience du 10 juillet 2009, aurait été remise à l'intéressé, dès lors qu'il n'est pas justifié que cette convocation aurait été envoyée par lettre recommandée avec avis de réception ; que, par suite, le requérant est fondé à soutenir que le jugement qu'il attaque a été rendu à la suite d'une procédure irrégulière et à en demander, pour ce motif, l'annulation ;

Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée devant le tribunal administratif par M. A ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite à la frontière :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : II. L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ; que, si M. A déclare être entré régulièrement en France le 13 octobre 2000, il ne l'établit pas ; qu'en outre, et en tout état de cause, il ne résulte pas des mentions de l'arrêté attaqué que le préfet aurait fait de l'entrée régulière de l'intéressé une condition de son droit au séjour ; que, par suite, le requérant entrait dans le champ d'application de la disposition précitée du 1° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui pouvait légalement fonder l'arrêté attaqué ;

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant, en premier lieu, que Monsieur Olivier Nollen justifie d'une délégation de signature qui lui a été consentie le 18 juin 2009, délégation régulièrement publiée au Bulletin d'informations administratives du 23 juin 2009 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte attaqué manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de M. A comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de cette décision ; qu'ainsi, alors même qu'il a été rédigé à l'aide d'un formulaire stéréotypé, il répond aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant, en premier lieu, que M. A soutient qu'il vit habituellement en France depuis 2000, que le centre de ses intérêts personnels et familiaux se situe désormais dans ce pays, qu'il travaille régulièrement et est intégré à la société française, qu'il vit avec une compatriote depuis mai 2008 et qu'un enfant est né de leur relation en 2008 ; que, toutefois, M. A n'établit pas que sa compagne serait en situation régulière ni qu'il serait dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 31 ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet acte a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, les moyens tirés de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ne peuvent être accueillis ;

Considérant, en deuxième lieu, que les stipulations de l'article 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que M. A ne peut donc utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation de l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant aux termes desquelles : Dans toutes les instances qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'en l'absence de circonstances empêchant M. A d'emmener avec lui sa compagne et son enfant, l'arrêté attaqué du 5 juillet 2004, qui ne fait pas obstacle à ce que cet enfant soit élevé par ses parents, ne méconnaît pas les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ; que si M. A soutient que, compte tenu notamment de la durée et de la stabilité de son séjour en France, il pouvait bénéficier, selon lui, d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, celles-ci ne prévoient pas, en tout état de cause, la délivrance de plein droit d'un titre de séjour qui entraînerait une protection à l'égard des mesures de reconduite à la frontière ; qu'en outre, le préfet n'était pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si M. A remplissait les conditions prévues par cet article ; que, dès lors, le requérant, qui, au demeurant, ne justifie pas avoir déposé une demande de délivrance de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14, n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu ces dispositions ;

Considérant, en cinquième lieu, que la circonstance que M. A ne constitue pas une menace pour l'ordre public est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 7 juillet 2009 décidant sa reconduite à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à M. A un titre de séjour ou de se prononcer à nouveau sur sa situation doivent être rejetées ;

Sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. A demande au titre des frais exposés par luiX et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0907757 du 20 juillet 2009 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise et le surplus de ses conclusions présentées devant la Cour sont rejetés.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 09VE03130
Date de la décision : 05/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine RIOU
Rapporteur public ?: M. BRUNELLI
Avocat(s) : AMIRI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2010-10-05;09ve03130 ?
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