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30/06/2005 | FRANCE | N°03VE02388

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Formation a cinq, 30 juin 2005, 03VE02388


Vu 1°), sous le n°03VE02388, l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée par la société anonyme COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE, dont le

siège est ..., représentée par son président- directeur généra...

Vu 1°), sous le n°03VE02388, l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée par la société anonyme COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE, dont le siège est ..., représentée par son président- directeur général ;

Vu ladite requête, enregistrée le 12 juin 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle la SA COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n°9806601-9806606-9906064-9907025 en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles, après avoir décidé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés d'office, n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour les périodes du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, du 1er janvier au 31 décembre 1992 et du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995, par avis de mise en recouvrement des 20 janvier 1995, 22 mars 1996, 11 mai 1998 et 17 août 1998 ;

2°) de prononcer la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes qui lui ont été réclamés au titre des périodes du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991, du 1er janvier au 31 décembre 1992 et du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995, par avis de mise en recouvrement des 22 mars 1996, 11 mai 1998 et 7août 1998 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en vertu de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'absence d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés de la société Seatib ne permet pas de retirer à cette société la qualité de redevable de la taxe sur la valeur ajoutée dès lors qu'elle a effectivement exécuté des prestations de services d'intermédiation ; que la taxe mentionnée sur ses factures est donc déductible dans les conditions ordinaires ; que la correspondance commerciale entre les deux sociétés atteste de l'existence réelle des prestations réalisées par la société Seatib ; qu'en ce qui concerne les honoraires versés à M. Y... et M. X..., aux sociétés Sicopar, SISBTPI, Précobat, Socopap et Gerfi, la société requérante ne peut fournir d'autres éléments que ceux qu'elle produit, dès lors que l'activité de ces prestataires s'effectue oralement et de manière informelle à l'occasion de rencontres et de conversations téléphoniques en raison du court laps de temps qui existe entre la date de publication et la date de remise de l'offre ; que s'agissant uniquement de prestations d'intermédiation commerciale, il n'est pas possible de matérialiser l'action de ces intermédiaires par des études ou comptes-rendus techniques ; que la réalité de leurs actions ne peut être démontrée que par la preuve du résultat obtenu ; que le versement de la rémunération n'intervenant qu'une fois le marché signé, il ne saurait être soutenu qu'il n'existe aucune contrepartie ; qu'ainsi la corrélation entre l'obtention des marchés et le versement des commissions suffit à prouver la réalité des prestations effectuées par ces intervenants ; que, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée sur les frais d'hébergement et de logement des dirigeants et salariés, l'illégalité du décret n°89-885 du 14 décembre 1989 ne peut faire revivre les dispositions issues de celui n°67-604 du 27 juillet 1967 ; qu'une analyse inverse violerait le principe de sécurité juridique dans la mesure où la société a été induite en erreur par la demande de dérogation présentée par le gouvernement français aux autorités communautaires le 17 avril 1989, qui laissait à penser que la clause de gel issue du décret de 1967 n'était plus applicable ; qu'en tout état de cause, dans le décret de 1989, la France a renoncé à l'exclusion du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée sur frais d'hébergement ; qu'en l'espèce, les frais concernés sont des frais d'hôtel, donc d'hébergement et non de logement ; que dès lors que le champ des exclusions prévues dans le droit national a été restreint et non étendu par la disparition des frais d'hébergement dans le décret de 1989, on ne peut invoquer à leur sujet le bénéfice de la clause de gel de l'article 17-6 de la sixième directive pour les faire revivre ; que, dans les circonstances de l'espèce, la mauvaise foi n'est pas établie par l'administration ;

................................................................................................................

Vu 2°), sous le n° 03VE03001, l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R.221-3, R.221-4, R.221-7 et R.221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles le recours présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Vu ledit recours, enregistré le 28 juillet 2003 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par lequel le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 2 du jugement n°9806601-9806606-9906064-9907025 en date du 20 mars 2003 qui a déchargé la SA Colas Ile-de-France-Normandie des compléments de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 par avis de mise en recouvrement du 20 janvier 1995 ;

2°) de remettre à la charge de la SA Colas Ile-de-France-Normandie les cotisations supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée, les intérêts de retard et pénalités de mauvaise foi, dont la décharge a été décidée par ce jugement ;

Il soutient que la société Colas Ile-de-France-Normandie n'a produit aucun document afin de justifier la réalité d'une intervention effective de la société Urbatechnic, ce qui est en totale contradiction avec les clauses de la convention datée du 15 décembre 1988 produite devant les premiers juges ; que, pourtant, l'administration avait relevé des faits qui apportaient des éléments sérieux susceptibles de faire douter de la réalité des services fournis ; qu'aucun élément justificatif n'étaye l'affirmation selon laquelle la société aurait obtenu le marché du centre commercial de la ville de Tourville ; qu'en tout état de cause, cette circonstance, à la supposer même établie, ne démontre nullement que la société Urbatechnic aurait pu faciliter l'obtention du marché ; que les premiers juges ont méconnu les règles ayant trait à la dévolution de la charge de la preuve, dès lors que l'administration a réuni un faisceau d'indices suffisamment sérieux pour contester la réalité des prestations en cause ; que, dans ces conditions, il appartient à la société Colas Ile-de-France-Normandie de démontrer que les sommes facturées constituent la contrepartie de services effectivement rendus, ce qu'elle ne fait pas ;

................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive n°77/388/CEE du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 2005 :

- le rapport de Mme Brin, président-assesseur ;

- et les conclusions de Mme Le Montagner, commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE et le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE sont dirigés contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux honoraires d'assistance commerciale :

Considérant que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE, qui exerce une activité de construction de bâtiments et de travaux publics, a fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée à la suite de la remise en cause par l'administration de la déduction de la taxe ayant grevé diverses factures d'honoraires d'assistance commerciale au motif que ces facturations porteraient sur des prestations dépourvues de caractère effectif ; que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE fait appel du jugement en date du 20 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions de ses demandes relatives aux factures établies par la société Seatib, M. Y... et M. X... portant sur la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 ainsi qu'à celles établies par les sociétés Sicopar, SISBTPI, Précobat, Socopap et Gerfi portant sur la période du 1er janvier 1992 au 31 décembre 1995 ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du même jugement en tant qu'il a déchargé la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 à raison d'une facture établie par la société Urbatechnic ;

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 271-1, 272-2 et 283-4 du code général des impôts, ainsi que de l'article 223-1 de l'annexe II au même code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ou qui n'était pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée ; que, dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ces factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir que la société facturière n'avait pas d'activité réelle ou qu'elle n'a pas effectivement fourni de marchandise ou de prestation de services et que les factures qu'elle émettait étaient des factures fictives ou de complaisance ; que, dans ce cas, il revient au redevable de justifier que la facture qu'il a reçue correspond néanmoins à une marchandise réellement fournie ou à une prestation réellement exécutée ;

Considérant, en premier lieu, que la facture d'un montant de 1 500 000 francs HT établie le 29 décembre 1989 par la société Urbatechnic a été acquittée par la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE le 16 janvier 1990 ; qu'elle est régulière en la forme ; qu'il n'est pas contesté que la société Urbatechnic était, à la date de la facturation, régulièrement inscrite au registre du commerce et des sociétés ; que l'administration n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'absence de prestation en se bornant à faire valoir que la société Urbatechnic n'a pas remis à la société requérante de rapport d'exécution relatif à sa mission d'assistance commerciale et que cette société n'a pu apporter aucun élément de nature à justifier de la matérialité de la prestation, alors que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE fait valoir que la facture litigieuse correspond à l'exécution d'une convention du 15 décembre 1988 conclue pour une durée d'un an avec la société Urbatechnic et stipulant le versement d'honoraires d'un montant mensuel de 125 000 francs HT ; que, compte tenu de la nature immatérielle des prestations rendues par la société Urbatechnic, la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE fait valoir que son activité s'opérait par le biais d'entretiens, de réunions ou de conversations téléphoniques qui n'avaient pas à donner lieu à l'établissement d'un rapport d'exécution, et que la convention conclue avec la société Urbatechnic lui a permis l'attribution de plusieurs marchés ; qu'il s'ensuit que l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve, dont elle supporte la charge, de l'absence de prestation effective ; que, par suite, le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 2 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 par avis de mise en recouvrement du 20 janvier 1995 ;

Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant des factures adressées le 11 juillet 1990 et le 14 avril 1991 par la société Seatib, l'administration fait valoir que celle-ci n'est pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés, qu'elle est inconnue de l'administration fiscale et que son établissement en France n'est qu'une adresse de domiciliation ; que la production par la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE de diverses correspondances échangées avec la société Seatib ne suffit pas à démontrer que les prestations d'assistance commerciale qui lui ont été facturées ont été effectivement exécutées dès lors qu'aucun élément n'établit qu'elle aurait obtenu un marché grâce à l'intervention de cette société ; que le ministre doit, dans ces conditions, être regardé comme apportant la preuve de l'absence de prestation ouvrant droit à déduction ; que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté les conclusions de sa demande en tant qu'elle portait sur ces factures ;

Considérant, en troisième lieu, que l'administration a remis en cause les factures établies en 1990 par M. Y... et par M. X..., ainsi que celles établies en 1993 et 1994 par les sociétés Gerfi et Précobat ; qu'elle fait valoir que, tandis que les factures sont libellées en termes très généraux, aucune convention précisant la mission ou la rémunération de ces prestations n'a été présentée ; que la société requérante ne produit aucun élément de nature à établir que les prestations d'assistance commerciale facturées par M. Y... et par M. X... ont été effectivement exécutées ; que, s'agissant des facturations d'honoraires par la société Gerfi, la production d'un contrat de courtage du 29 novembre 1990 ne suffit pas à justifier de l'existence des prestations dès lors que, ainsi qu'il résulte des notifications de redressement, l'objet des factures en cause n'est pas précisé ; qu'en ce qui concerne les factures établies par la société Précobat, la requérante ne fait état d'aucun élément de nature à justifier l'effectivité de l'intervention de cette société ; que l'administration rapportant ainsi la preuve qui lui incombre, la société n'est par suite pas non plus fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions en tant qu'elles portaient sur ces factures ;

Considérant, en quatrième lieu, que s'agissant des factures établies en 1992 par la société SISBTPI et de celles établies en 1993 et 1994 par la société Socopap, l'administration fait valoir que ces factures sont libellées en termes très généraux et qu'aucune précision n'a été apportée au vérificateur sur la nature des prestations alléguées ; que, toutefois, la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE, en ce qui concerne la facturation de la société SISBTPI, produit devant la Cour un protocole d'accord conclu avec cette société le 1er novembre 1991, ainsi que des factures suffisamment précises quant à leur relation avec l'obtention non contestée d'un marché ; que, s'agissant des honoraires versés à la société Socopap, même si la société requérante ne produit pas de document définissant les relations contractuelles entre elles, les factures fournies font référence avec précision à un marché obtenu par la requérante ; que, dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe ; que dès lors la société requérante est fondée à demander la déduction du complément de taxe litigieux en tant qu'il correspond au refus du service d'admettre la déduction de la taxe ayant grevé ces factures ;

Considérant, en dernier lieu, que, s'agissant des factures émises par la société Sicopar entre 1992 et 1994 dont la remise en cause a fait l'objet de rappels mis en recouvrement le 7 août 1998, l'administration soutient que la société requérante n'a pu apporter aucun élément de nature à justifier de la matérialité des prestations ; que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE produit toutefois devant la Cour un protocole d'accord général du 5 janvier 1984 conclu avec cette société, une convention particulière de mise en oeuvre de ce protocole en date du 8 février 1990 et cinq avenants à celui-ci faisant référence à des opérations précises, ainsi qu'un protocole d'accord général du 1er janvier 1984 et trois avenants à ce dernier faisant référence à plusieurs opérations, dont celle de l'assainissement Val Pompadour à Valenton pour lequel l'acte d'engagement est fourni ; qu'elle indique que les honoraires sont proportionnels au montant du marché, que leur versement est la condition d'obtention des marchés et que l'importance de ces derniers rendait nécessaire l'intervention de la société Sicopar sans laquelle elle n'aurait pas été en mesure de soumissionner ; qu'elle fait également valoir que, compte tenu de la nature immatérielle des prestations rendues par la société Sicopar, l'activité de cette dernière s'opérait par le biais d'entretiens, de réunions ou de conversations téléphoniques ; que, dans ces conditions, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve, dont elle supporte la charge, de l'absence de prestation effective ; que, par suite, la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE est fondée à demander la déduction de la taxe ayant grevé les factures émis par la société Sicopar ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'accorder à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et pénalités ainsi qu'intérêts de retard, qui lui ont été réclamés par les avis de mise en recouvrement en date du 11 mai 1998 et 7 août 1998 qui résultent de la remise en cause de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures émises en 1992, 1993 et 1994 par les sociétés SISBTPI, Socopap et Sicopar ;

Sur la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux dépenses de logement ou d'hébergement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 236 de l'annexe II au code général des impôts dans sa rédaction issue du décret n°89-885 du 14 décembre 1989 pris sur le fondement d'une dérogation aux dispositions de l'article 17, § 6, 2° alinéa de la sixième directive accordée à la République française par une décision du conseil des communautés européennes en date du 28 juillet 1989 : A titre temporaire, la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les dépenses de logement, de restaurant, de réception et de spectacles est exclue du droit à déduction. Toutefois, cette exclusion n'est pas applicable : 1° Aux dépenses supportées par un assujetti relatives à la fourniture à titre onéreux par cet assujetti de logements, de repas, d'aliments ou de boissons (...) ;

Considérant que, par un arrêt en date du 19 septembre 2000, la Cour de justice des communautés européennes, estimant que le conseil des communautés européennes avait autorisé la France à étendre le champ des exclusions du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, prévues par les textes français applicables à la date d'entrée en vigueur de la directive et régulièrement maintenues en vertu de l'article 17, § 6, 2° alinéa de celle-ci, dans une mesure incompatible avec les objectifs et les principes de la directive, a déclaré invalide la décision du 28 juillet 1989 ; que cet arrêt a eu pour effet de restreindre le champ légal des exclusions du droit à déduction prévues par l'article 236 précité issu du décret du 14 décembre 1989 à celles d'entre elles que prévoyaient les dispositions des articles 236 et 239 de l'annexe II au code général des impôts et qui résultaient du décret du 27 juillet 1967, applicable lors de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1979, de la sixième directive ; qu'au nombre de ces exclusions figurait celle prévue par l'article 7 dudit décret aux termes duquel : La taxe afférente aux dépenses exposées pour assurer le logement ou l'hébergement des dirigeants ou du personnel des entreprises n'est pas déductible (...) ; que cette exclusion a été maintenue par l'article 236 de l'annexe II au code général des impôts dans ses rédactions successives issues du décret n°79-1163 du 29 décembre 1979, puis du décret n°89-885 du 14 décembre 1989 ayant abrogé le décret du 29 décembre 1979 ;

Considérant que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêt susmentionné de la Cour de justice des communautés européennes aurait eu pour effet de priver de fondement juridique l'exclusion du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée prévue par l'article 236 de l'annexe II au code général des impôts en ce qui concerne les dépenses exposées pour le logement ou l'hébergement des dirigeants et du personnel des entreprises ; que, dès lors, c'est inutilement que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE se prévaut de la méconnaissance du principe de sécurité juridique qui résulterait du fait qu'elle aurait été induite en erreur par la demande de dérogation présentée le 17 avril 1989 par le gouvernement français aux autorités communautaires ;

Considérant, en second lieu, que si l'article 4 du décret précité du 14 décembre 1989 reproduisant les termes de la décision susmentionnée du conseil des communautés européennes du 28 juillet 1989, a substitué le seul mot de logement à ceux de logement ou hébergement qui figuraient dans la rédaction de l'article 236 de l'annexe II issue du décret du 27 juillet 1967, cette modification n'a eu ni pour objet ni pour conséquence d'excepter du champ des exclusions prévues par cet article les dépenses exposées par les entreprises en vue d'assurer à leurs dirigeants et salariés, notamment à l'occasion de leurs déplacements professionnels, le logement occasionnel antérieurement désigné comme hébergement ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les dispositions de l'article 4 du décret précité du 14 décembre 1989 emportent renonciation d'une exclusion du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée non prévue par l'article 236 de l'annexe II au code général des impôts ;

Sur les pénalités restant en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;

Considérant que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE conteste l'application aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents aux honoraires d'assistance commerciale qu'elle avait acquittés auprès de diverses sociétés entre le 1er janvier 1990 et le 31 décembre 1995 de la majoration de 40 % pour mauvaise foi prévue par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'administration d'apporter la preuve de l'intention du contribuable d'éluder l'impôt ; qu'elle ne saurait être regardée comme rapportant une telle preuve en se bornant à faire valoir que la redevable a déduit en toute connaissance de cause, de manière répétée, des commissions ne correspondant à aucune prestation, alors qu'un certain nombre de factures que le service avait écartées du droit à déduction correspondaient à des prestations effectives ; qu'il y a donc lieu d'accorder à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE la décharge de la totalité des pénalités de mauvaise foi restant en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles ne lui a accordé qu'une décharge insuffisante des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférente aux honoraires d'assistance commerciale, ainsi que des pénalités appliquées à ces rappels, et à demander la réformation sur ce point dudit jugement, d'autre part, que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le Tribunal administratif de Versailles a accordé à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis en recouvrement le 20 janvier 1995 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application desdites dispositions, de condamner l'Etat à payer à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE est déchargée des compléments de taxe sur la valeur ajoutée, en droits et intérêts de retard, mis à sa charge pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1992 par avis de mise en recouvrement du 11 mai 1998 et pour la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1995 par avis de mise en recouvrement du 7 août 1998, à concurrence de ceux qui résultent de la remise en cause de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les factures émises par les sociétés SISBTPI, Socopap et Sicopar ; elle est également déchargée de la totalité des pénalités de mauvaise foi restant en litige.

Article 2 : Le jugement n°980660-9806606-9906064-9907025 en date du 20 mars 2003 du Tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : L'Etat versera à la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société COLAS ILE-DE-FRANCE-NORMANDIE et le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE sont rejetés.

03VE02388 - 03VE03001 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Formation a cinq
Numéro d'arrêt : 03VE02388
Date de la décision : 30/06/2005
Sens de l'arrêt : Réduction de l'imposition
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BELAVAL
Rapporteur ?: Mme Dominique BRIN
Rapporteur public ?: Mme LE MONTAGNER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-06-30;03ve02388 ?
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