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26/04/2005 | FRANCE | N°05VE00025

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, Juges des reconduites a la frontiere, 26 avril 2005, 05VE00025


Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405140 du 7 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 16 juin 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme Fatna X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que la décision implicite de rejet du recours gracieux d

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Vu la requête, enregistrée le 10 janvier 2005, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0405140 du 7 octobre 2004 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté du 16 juin 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme Fatna X ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme X devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ;

Il soutient que la décision implicite de rejet du recours gracieux de Mme X n'est pas entachée d'un vice de procédure ; que son arrêté de reconduite en date du 16 juin 2004 ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu les pièces du dossier, desquelles il ressort que le recours du PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS a été communiqué le 11 janvier 2005 à Mme Fatna X, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la décision du Président de la Cour administrative d'appel de Versailles, en date du 3 janvier 2005, donnant délégation à M. Bresse pour l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article R. 776-19 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2005 :

- le rapport de M. Bresse, magistrat délégué ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du I de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée : Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants (...) : 3° Si l'étranger, auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X, de nationalité marocaine, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 5 mars 2004, de la décision du préfet du 5 mars 2004 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'elle entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que pour annuler en ce qu'il serait contraire à l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales l'arrêté préfectoral pris à l'encontre de Mme X, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a relevé qu'elle est venue en France à la suite du décès de son époux pour rejoindre sa fille qui a acquis la nationalité française et qui la prend en charge financièrement ; que ses seules circonstances ne sont pas suffisantes, eu égard au caractère récent du séjour en France de Mme X et au fait qu'elle n'est pas dépourvue de toutes attaches dans son pays d'origine où elle est demeurée plusieurs années après le décès de son mari et où vivent six de ses enfants, pour caractériser une violation des dispositions précitées ; que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour annuler l'arrêté litigieux ;

Considérant toutefois qu'il y a lieu, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens présentés par Mme X à l'appui de sa demande d'annulation ;

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué énonce les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ; qu'alors même que Mme X a formé un recours gracieux contre cet arrêté, le préfet n'était pas dans l'obligation de réitérer les motifs fondant sa décision ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 15 de l'ordonnance précitée : Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 2° A l'enfant étranger d'un ressortissant de nationalité française si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents ainsi qu'aux ascendants d'un tel ressortissant et de son conjoint qui sont à sa charge. ;

Considérant qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, qu'il s'agisse d'un arrêté d'expulsion pris selon la procédure normale ou d'un arrêté de reconduite à la frontière, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière ;

Considérant que Mme X, âgée de 65 ans fait valoir qu'elle ne perçoit aucune pension de réversion depuis le décès de son mari en janvier 1998 et qu'un acte de kafala du 29 août 2002, authentifié par le tribunal de première instance d'Oujda, établit que sa fille, de nationalité française, subvient à ses besoins ; que toutefois, il n'est démontré ni qu'elle soit dépourvue de toutes ressources, ni que sa fille subvenait à ses besoins durant la période précédent son arrivée sur le territoire français en septembre 2003 ; qu'en outre, il n'est pas contesté qu'elle a six autres enfants restés au Maroc dont il n'est pas établi qu'ils ne pourraient pas pourvoir aux besoins de leur mère ; que, dès lors, Mme X ne peut prétendre à la délivrance de plein droit d'une carte de résident sur le fondement de l'article 15-2° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;

Considérant, en troisième lieu, qu'eu égard notamment à la durée du séjour de Mme X en France, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 16 juin 2004 décidant la reconduite à la frontière de Mme X ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 0405140 en date du 7 octobre 2004 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise par Mme Fatna X est rejetée.

N°05VE00025

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : Juges des reconduites a la frontiere
Numéro d'arrêt : 05VE00025
Date de la décision : 26/04/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: Mme BARNABA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-04-26;05ve00025 ?
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