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17/03/2005 | FRANCE | N°02VE04309

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3eme chambre, 17 mars 2005, 02VE04309


Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Carmen X, héritière de M. Gilbert X, décédé, demeurant ..., par Me Wenisch

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Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2002 au greffe de...

Vu l'ordonnance en date du 16 août 2004, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Versailles le 1er septembre 2004, par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Paris a, en application du décret n°2004-585 du 22 juin 2004 portant création d'une cour administrative d'appel à Versailles et modifiant les articles R. 221-3, R. 221-4, R. 221-7 et R. 221-8 du code de justice administrative, transmis à la Cour administrative d'appel de Versailles la requête présentée pour Mme Carmen X, héritière de M. Gilbert X, décédé, demeurant ..., par Me Wenisch ;

Vu la requête, enregistrée le 23 décembre 2002 au greffe de la Cour administrative d'appel de Paris, par laquelle Mme Carmen X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9800652 en date du 3 octobre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande de M. X tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que les intérêts de retard et les pénalités y afférents qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994 par avis de mise en recouvrement du 10 janvier 1996 et à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auquel il a été assujetti au titre de l'année 1992 ;

2°) de prononcer la décharge et la réduction demandées ;

Elle soutient que les années vérifiées sont antérieures à l'entrée en vigueur du dispositif de l'article 23 de la loi n°93-1363 du 30 décembre 1993 sur lequel l'administration s'est fondée pour procéder aux rappels de taxe sur la valeur ajoutée ; que seul l'article 261-4-4° du code général des impôts issu de la loi du 29 novembre 1982 est opposable ; que cet article limite l'exonération de taxe aux organismes de droit public, ce qui est incompatible avec l'article 13 de la sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ; qu'il convient donc de faire application des stipulations de cette dernière ; que le Conseil d'Etat par la décision n°219715 du 10 avril 2002 a précisé la jurisprudence pour un cas similaire à celui d'espèce, laquelle infirme la solution retenue par le jugement attaqué ; que le redevable dont il n'est pas contesté qu'il exerçait bien une activité de formation professionnelle continue, avait dès le 31 mai 1989 souscrit une déclaration préalable conformément aux exigences de l'article L. 920-4 du code du travail ; que l'établissement de M. X se situe dans l'hypothèse prévue par l'article 13 A de la sixième directive et ne peut donc avoir d'activité soumise à la taxe sur la valeur ajoutée au sens de l'article 256 du code général des impôts ; qu'en sollicitant l'attestation exclusive de l'exonération le 11 juillet 1995, le redevable ne faisait que répondre aux nouvelles exigences légales ; que l'attestation du centre d'information et de formation de Gonesse et la copie de la facture justifient la rétrocession d'honoraires effectuée en 1992 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive n°77 /388/ CEE du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 en matière d'harmonisation des législations des Etats membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu la loi n° 82-1126 du 29 décembre 1982 portant loi de finances pour 1983 ;

Vu la loi n°93-1353 du 30 décembre 1993 portant loi de finances rectificative pour 1993 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2005 :

- le rapport de Mme Brin, président assesseur ;

- et les conclusions de Mme Barnaba, commissaire du gouvernement ;

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

Considérant que M. X, dont la requérante est l'héritière, a soutenu, pour contester les rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre des prestations de formation qu'il a assurées au cours de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994, que ces prestations devaient être exonérées de taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) ; que sont toutefois exonérées de cette taxe, selon le a) du 4° du 4 de l'article 261 de ce même code dans sa rédaction issue de la loi n°82-1126 du 29 décembre 1982, seule applicable à la période en cause : Les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectuées dans le cadre : (...). De la formation professionnelle continue assurée par les personnes morales de droit public dans les conditions prévues par les articles L. 900-1 et suivants du code du travail (livre IX) relatifs à la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente (...) ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes du A de l'article 13 de la sixième directive n°77-388 du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, relatif aux exonérations de taxe sur la valeur ajoutée en faveur de certaines activités d'intérêt général : I. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent, dans des conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : (...) i) l'éducation de l'enfance ou de la jeunesse, l'enseignement scolaire ou universitaire, la formation ou le recyclage professionnel, ainsi que les prestations de services et les livraisons de biens qui leur sont étroitement liées, effectués par des organismes de droit public de même objet ou par d'autre organisme reconnu comme ayant des fins comparables par l'Etat membre concerné (...) ; que ces dispositions imposent aux Etats membres d'accorder l'exonération qu'elles prévoient aux organismes privés de formation continue susceptibles d'être reconnus comme poursuivant des fins comparables à celles des personnes publiques assurant de telles prestations ; que s'il appartient à chaque Etat membre, lors de la transposition de ces dispositions, de prévoir un système de reconnaissance ou de fixer les critères permettant de déterminer ceux des organismes privés qui poursuivent effectivement des fins comparables à celles des organismes publics de formation continue, ces règles doivent être propres à garantir qu'il n'y ait pas, entre personnes publiques et personnes privées assurant de telles prestations, une différence de traitement incompatible avec les objectifs définis par l'article 13 de la sixième directive ; que tant que de telles règles n'ont pas été édictées, il appartient aux autorités nationales de décider au cas par cas, sous le contrôle du juge de l'impôt, si un organisme privé de formation continue peut être regardé comme poursuivant des fins comparables à celle des personnes publiques assurant de telles prestations ; que les dispositions des articles 256 et 256 A du code général des impôts ne sauraient constituer le fondement légal de l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée d'un organisme privé assurant des prestations de formation professionnelle continue dès lors qu'il est établi qu'un tel organisme poursuit des fins comparables à celles des organismes publics ;

Considérant que les dispositions précitées du a) du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts issues de la loi du 29 décembre 1982, en réservant l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée aux prestations de formation professionnelle continue assurées par les seules personnes de droit public et en excluant de cette exonération celles assurées par tout organisme privé, sont incompatibles avec les objectifs prévus par les dispositions précitées de la sixième directive ;

Considérant que, dans le cadre de son activité de formation, dont la consistance n'est pas sérieusement contestée par le ministre, M. X a déposé la déclaration préalable prévue par l'article L. 920-4 du code du travail et a fourni les documents et bilans justificatifs de son action prévus par l'article L. 920-5 du même code ; qu'il doit, par suite, être regardé comme ayant exercé son activité de formation professionnelle continue dans des conditions telles que définies par les articles L. 900-1 et suivants dudit code et comparables à celles dans lesquelles les assurent les organismes de droit public ; que, par ailleurs, il établit ne pas avoir mentionné la taxe sur la valeur ajoutée sur les factures afférentes aux années 1993 et 1994 ; que, dans ces conditions, en invoquant les dispositions précitées de la sixième directive, la requérante est fondée à soutenir qu'au regard des dispositions du a) du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts issues de la loi du 29 décembre 1982 les rappels de taxe sur la valeur ajoutée contestés sont dépourvus de base légale ; que le ministre ne saurait utilement s'opposer aux effets de l'incompatibilité des dispositions de la loi du 29 décembre 1982 avec les objectifs prévus par la sixième directive ni en invoquant la méconnaissance des dispositions des articles 256 et 256 A du code général des impôts, compte tenu de ce qui a précédemment été indiqué, ni en se prévalant de celles de l'article 283-3 du code général des impôts, dès lors que, comme il vient d'être dit, la taxe sur la valeur ajoutée n'était pas mentionnée sur les factures ;

Considérant, il est vrai, que le ministre fait également valoir qu'à la date du contrôle diligenté à l'encontre de M. X, soit le 25 avril 1995, l'incompatibilité du droit interne avec les objectifs définis par les dispositions précitées de la sixième directive avait cessé en raison de l'entrée en vigueur des dispositions de l'article 23 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 1993 et que l'intéressé n'avait pas sollicité jusqu'au 15 octobre 1995, par demande expresse, une attestation d'exonération avec effet rétroactif au 1er janvier 1994 ainsi que le prévoient l'instruction du 3 février 1995 publiée au bulletin officiel des impôts le 15 février suivant sous la référence 3A-2-95 et l'instruction du 28 juillet 1995 publiée au bulletin officiel des impôts le 7 août 1995 sous la référence 3A-8-95 ; que, toutefois, ainsi que le fait valoir également le ministre, les rappels litigieux de taxe sur la valeur ajoutée, qui portent sur la période couverte par les années 1993 et 1994, sont fondés sur les dispositions du a) du 4° du 4 de l'article 261 du code général des impôts issues de la loi du 29 décembre 1982, et non sur celles issues de l'article 23 de la loi du 30 décembre 1993 dont le dispositif, ainsi que le précise le ministre, n'est entré en vigueur qu'après que les conditions d'application de l'exonération prévue par les nouvelles dispositions ont été définies par la publication de l'arrêté interministériel du 30 décembre 1994 ; qu'il ne saurait donc être opposé à M. X de ne pas s'être conformé aux dispositions transitoires contenues aux paragraphes 23 et 24 de l'instruction susvisée du 3 février 1995 complétée par celle du 7 août 1995, lesquelles, au surplus, ne peuvent pas concerner l'année d'imposition 1993 ;

Considérant qu'il suit de là que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux sont dépourvus de base légale ; qu'il y a donc lieu d'accorder la décharge des droits de taxe sur la valeur ajoutée, des intérêts de retard appliqués, ainsi que de la majoration de 40 % de l'article 1728 du code général des impôts mis à la charge de M. X au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994 ;

Sur le rehaussement d'impôt sur le revenu au titre de l'année 1992 :

Considérant qu'aux termes de l'article 93 du code général des impôts, applicable en matière de bénéfices non commerciaux : 1. Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt sur le revenu est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession. (...) ; que, pour l'application de ces dispositions, il appartient dans tous les cas au contribuable titulaire de bénéfices non commerciaux de justifier tant du montant de ses charges que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si Melle Auger est effectivement intervenue comme formatrice vacataire pour le compte de M. X au titre de l'année 1992, il ressort, d'une part, des notes d'honoraires à l'entête de cette personne produites par la requérante qu'elles n'indiquent pas leur destinataire et sont dépourvues de date certaine et, d'autre part, des extraits de relevés bancaires professionnels du contribuable également produits, d'un montant de 21 750 francs en date du 12 août 1992 et de 6 400 francs en date du 29 décembre 1992, qu'ils ne concordent pas avec les notes d'honoraires en cause ; que, par suite, Mme X ne justifie pas les rétrocessions d'honoraires d'un montant de 35 188 francs TTC dont elle demande la prise en compte pour la détermination du complément d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. X dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 1992 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme X est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté les conclusions de la demande de M. X tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994 ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n°986520 en date du 3 octobre 2002 du Tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. X tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités y afférents.

Article 2 : M. X est déchargé des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 1993 au 31 décembre 1994, ainsi que des intérêts de retard et des pénalités dont les droits ont été assortis ;

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.

02VE04309 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3eme chambre
Numéro d'arrêt : 02VE04309
Date de la décision : 17/03/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BELAVAL
Rapporteur ?: Mme Dominique BRIN
Rapporteur public ?: Mme BARNABA
Avocat(s) : WENISCH

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2005-03-17;02ve04309 ?
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