Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 13 avril 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2202689 du 9 mai 2023, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 mai 2023, le 7 septembre 2023 et le 17 décembre 2023, ce dernier n'ayant pas été communiqué, Mme A... B..., représentée par Me Machado Torres, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du 13 avril 2022 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de supprimer, dès la notification de la décision à intervenir, son signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, en lui remettant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
5°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées des articles 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat prévue en la matière.
Elle soutient que :
La décision portant refus de séjour :
- est entachée d'un défaut de motivation ;
- est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
La décision portant obligation de quitter le territoire français :
- est entachée d'un défaut de motivation ;
- est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- est entachée d'une erreur de fait ;
- méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ainsi que des conséquences de la décision sur celle-ci ;
La décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours :
- est entachée d'un défaut de motivation en fait ;
- est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;
- est entachée d'une erreur de droit, le préfet de la Haute-Garonne s'étant cru lié par les dispositions des 2° et 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 612-3 du même code ;
La décision fixant le pays de destination :
- est entachée d'un défaut de motivation ;
- a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu et du principe du contradictoire, garantis par les articles L. 211-2 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration ;
La décision portant exécution de l'arrêté :
- méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2023, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme A... B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 27 novembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 18 décembre 2023.
Mme A... B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 octobre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chalbos,
- et les observations de Me Machado Torres, représentant Mme A... B....
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... B..., ressortissante brésilienne née le 18 novembre 1999, est entrée en France le 11 décembre 2018. Le 1er décembre 2021, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 13 avril 2022, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... B... demande à la cour d'annuler le jugement du 9 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'un tel arrêté.
Sur l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Par une décision du 18 octobre 2023, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé l'aide juridictionnelle totale à Mme A... B.... Ses conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle sont ainsi devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
3. En premier lieu, il ressort des termes de la décision attaquée que celle-ci mentionne les éléments de droit et de fait sur lesquels elle est fondée. Le moyen tiré de son insuffisante motivation doit donc être écarté.
4. En deuxième lieu, contrairement à ce que soutient la requérante, il ressort des termes mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Garonne n'a pas omis d'examiner sa situation au regard de son état de santé.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" (...) ".
6. Mme A... B..., qui se borne à produire des éléments faisant état du suivi d'un programme d'éducation thérapeutique dans un contexte de chirurgie bariatrique, laquelle s'est déroulée en novembre 2021 sans complications, n'apporte aucun élément susceptible de remettre en cause l'avis du 21 mars 2022 du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration aux termes duquel l'état de santé de l'intéressée nécessite un traitement médical dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais dont elle pourra effectivement bénéficier dans son pays d'origine. Il s'ensuit qu'elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet de la Haute-Garonne aurait méconnu les dispositions précitées en ne lui délivrant pas le titre de séjour demandé.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour (...) ". La décision attaquée, qui vise les dispositions précitées sur lesquelles elle est fondée, n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision portant refus de séjour qu'elle assortit, laquelle était suffisante ainsi qu'il a été dit au point 3.
8. En deuxième lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté attaqué que le préfet de la Haute-Garonne se serait abstenu de procéder à un examen réel et sérieux de la situation de la requérante avant de décider de l'obliger à quitter le territoire français. Il ne saurait, en particulier, être reproché au préfet de ne pas avoir tenu compte de l'annulation des mesures d'éloignement prononcées à l'encontre de la mère et de la sœur majeure de la requérante, une telle annulation étant postérieure à la date d'édiction de l'arrêté litigieux et n'impliquant d'ailleurs que le réexamen de leur situation. Il ne saurait davantage être reproché au préfet d'avoir indiqué que la requérante était célibataire, cela étant conforme à ses propres déclarations.
9. En troisième lieu, en estimant que les liens personnels et familiaux en France de Mme A... B... n'étaient pas suffisamment anciens, stables et intenses, le préfet de la Haute-Garonne a porté une appréciation sur la situation de la requérante qui ne révèle pas, par elle-même, d'erreur de fait.
10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
11. Mme A... B..., qui est entrée en France en décembre 2018, à l'âge de dix-neuf ans, se prévaut notamment de la présence en France de ses parents ainsi que de ses sœurs. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le père de la requérante, titulaire d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " et valable jusqu'en novembre 2022, n'a pas vocation à s'installer durablement en France, pas plus que sa mère et ses sœurs, qui ne sont titulaires d'aucun droit au séjour. Par ailleurs, si Mme A... B... fait état de sa relation amoureuse avec un ressortissant français, celle-ci n'apparaît pas suffisamment stable et durable, la requérante s'étant présentée comme " célibataire " lors du dépôt de sa demande. Enfin, la présence sur le territoire français de certains membres de sa famille non nucléaire ainsi que de quelques relations amicales ne suffit à démontrer que l'intéressée y aurait fixé le centre de ses attaches personnelles. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour en France de la requérante et en dépit de ses efforts d'insertion notamment au travers de ses études, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas, en prenant la décision attaquée, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, la requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ :
12. En premier lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".
13. Mme A... B... ne fait état d'aucune circonstance, à la date de la décision attaquée, qui aurait justifié que le préfet de la Haute-Garonne lui accorde un délai de départ volontaire supérieur au délai de droit commun de trente jours. Il n'apparaît pas, en particulier, que l'éventualité d'un mariage à la fin de l'été 2022 correspondait à un projet concret. Il s'ensuit que la décision litigieuse, qui accorde à la requérante le délai de départ de droit commun, n'appelait pas de motivation particulière et n'apparaît pas entachée d'un défaut d'examen de sa situation au regard des dispositions précitées.
14. En second lieu, il ne ressort ni des pièces du dossier, ni des termes de la décision attaquée, que le préfet, qui n'a pas fait application des dispositions des articles L. 612-2 et L. 612-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se serait cru en situation de compétence liée pour fixer à trente jours le délai de départ volontaire de la requérante.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
15. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la décision litigieuse aurait été prise en méconnaissance des articles L. 122-1 et L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 25 de leur jugement.
16. En second lieu, la décision attaquée, qui vise les articles L. 721-3 à L. 721-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne la nationalité de la requérante et précise que cette dernière n'établit pas être exposée à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans son pays d'origine. Elle est ainsi suffisamment motivée en droit et en fait.
En ce qui concerne la décision portant exécution de l'arrêté :
17. En tout état de cause, pour les mêmes motifs de fait que ceux indiqués au point 6, la décision portant exécution de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne, à supposer qu'elle existe indépendamment des décisions précédentes, ne méconnaît pas les dispositions alors en vigueur du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
19. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution particulière, les conclusions à fin d'injonction de la requête ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser à Mme A... B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A... B..., à Me Gil Machado Torres et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 6 juin 2024, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président,
Mme Restino, première conseillère,
Mme Chalbos, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 juin 2024.
La rapporteure,
C. Chalbos
Le président,
A. BarthezLe greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23TL01247