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25/04/2024 | FRANCE | N°22TL22066

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 1ère chambre, 25 avril 2024, 22TL22066


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2201933 du 1er juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour :

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Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 octobre 2022 et le 4 décembre 2023, M. A..., représentée par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2201933 du 1er juillet 2022, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 octobre 2022 et le 4 décembre 2023, M. A..., représentée par Me Bazin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2021 par lequel le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à verser à son conseil, en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors qu'il était muni d'un récépissé de demande de carte de séjour temporaire valable jusqu'au 21 janvier 2022, de sorte que le préfet de l'Hérault avait déjà statué favorablement sur sa demande de séjour et devait, en conséquence, recourir à la procédure de retrait de titre de séjour et non pas à la procédure de refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du même code ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet ne pouvait lui opposer l'absence de visa pour rejeter sa demande de titre de séjour en tant que salarié ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet ne pouvait lui opposer l'absence de visa pour rejeter sa demande de titre de séjour en tant qu'étudiant ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'erreur de droit ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2023, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 juin 2023.

Par ordonnance du 5 décembre 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 8 janvier 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Restino a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 6 octobre 1998, relève appel du jugement du 1er juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2021 du préfet de l'Hérault rejetant sa demande de titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, la décision portant refus de séjour vise les stipulations et dispositions applicables pertinentes, mentionne la situation personnelle de l'intéressé depuis son arrivée en France, notamment le fait qu'il est engagé dans un parcours d'accompagnement contractualisé vers l'emploi et l'autonomie, et examine la demande de titre de séjour au regard des différents fondements invoqués par lui. Elle comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. La circonstance que l'intéressé s'était vu délivrer un récépissé de demande de carte de séjour valable jusqu'au 21 janvier 2022 était sans incidence pour apprécier son droit au séjour, de sorte que l'absence de mention de cette circonstance ne caractérise pas en tout état de cause un défaut de motivation. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté.

3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment eu égard à la motivation rappelée au point 2, que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de prendre la décision contestée.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La détention d'un document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour, d'une attestation de demande d'asile ou d'une autorisation provisoire de séjour autorise la présence de l'étranger en France sans préjuger de la décision définitive qui sera prise au regard de son droit au séjour (...) ". Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été muni, pendant l'examen de sa demande de titre de séjour, de récépissés de demande de carte de séjour autorisant l'exercice d'une activité professionnelle, valables du 5 mai au 4 novembre 2021, puis du 22 octobre 2021 au 21 janvier 2022. Toutefois, d'une part, contrairement à ce qui est soutenu, la délivrance d'un récépissé de demande de carte de séjour ne constitue pas une décision d'octroi d'un titre de séjour mais autorise seulement la présence en France de son titulaire pendant l'examen de sa demande. D'autre part, le rejet de la demande du titre de séjour emporte nécessairement le retrait du récépissé de cette demande. Enfin, la lettre du 24 février 2021 par laquelle le préfet de l'Hérault a, par erreur, à cause d'une confusion avec un homonyme, informé le maire de Grabels de sa décision de délivrer un titre de séjour à M. A... ne constitue pas davantage une telle décision. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que, lui ayant déjà accordé un titre de séjour, la décision critiquée s'analyse en réalité comme une décision de retrait, de sorte que le préfet de l'Hérault était tenu de respecter les exigences de la procédure de retrait de titre de séjour. Le moyen doit être écarté.

5. En quatrième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Montpellier au point 8 du jugement attaqué.

6. En cinquième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal administratif de Montpellier au point 8 du jugement attaqué.

7. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui exerce une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " d'une durée maximale d'un an. / La délivrance de cette carte de séjour est subordonnée à la détention préalable d'une autorisation de travail, dans les conditions prévues par les articles L. 5221-2 et suivants du code du travail (...) ". Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'était pas titulaire du visa requis par l'article L. 5221-2 du code du travail pour obtenir un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de l'Hérault a pu refuser, pour ce motif, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 421-1. La circonstance que la détention d'un visa de long séjour n'était pas requise pour la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 435-1 du même code, au titre de l'admission exceptionnelle, est sans incidence à cet égard.

8. En septième lieu, aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ". D'une part, comme exposé au point 7, il ressort des pièces du dossier que M. A... n'était pas titulaire du visa de long séjour mentionné à l'article L. 412-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, il ne justifie pas d'une entrée régulière en France. Par suite, le préfet de l'Hérault a pu refuser, pour ces motifs, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 422-1. La circonstance que la détention d'un visa de long séjour n'était pas requise pour la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du même code, au titre de l'admission exceptionnelle, est sans incidence à cet égard, ces dispositions ne permettant pas en tout état de cause la délivrance d'un titre de séjour en tant qu'étudiant.

9. En dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en prenant la décision critiquée, le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A.... Par suite, le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

10. En premier lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. / Dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour (...) ". La décision portant refus de titre de séjour étant suffisamment motivée, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte.

11. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Hérault n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A... avant de prendre la décision contestée.

12. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 5 du présent arrêt.

13. En dernier lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont serait entachée la décision portant obligation de quitter le territoire au regard de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 9.

En ce qui concerne la décision fixant le délai pour exécuter l'obligation de quitter le territoire français :

14. Le préfet de l'Hérault a cité, dans son arrêté du 23 novembre 2021, les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au délai laissé à l'étranger pour exécuter la mesure d'éloignement dont il fait l'objet. Il a, en outre, indiqué que la situation personnelle de M. A... ne justifiait pas qu'un délai supérieur à celui de trente jours lui soit, à titre exceptionnel, accordé. Le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision fixant le délai pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français doit donc, en tout état de cause, être écarté.

15. Si M. A... soutient que la décision fixant le délai pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit, il n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier la portée. Par suite le moyen doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

16. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants (...) " et aux termes du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

17. M. A... soutient qu'en cas de retour en Guinée, il risque de subir des traitements inhumains et dégradants en raison des représailles subies par les membres de sa famille, qui ont conduit à l'assassinat de son frère. Toutefois, alors d'ailleurs que la demande d'asile présentée par l'intéressé a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 18 décembre 2019, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 16 septembre 2020, il ne fait état d'aucun élément susceptible de justifier de la réalité de craintes personnelles et actuelles en cas de retour en Guinée. Par suite, le moyen doit être écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Judith Bazin.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2024, où siégeaient :

- M. Barthez, président,

- M. Lafon, président assesseur,

- Mme Restino, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 avril 2024.

La rapporteure,

V. Restino

Le président,

A. Barthez

Le greffier,

F. Kinach

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°22TL22066 2


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22TL22066
Date de la décision : 25/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : M. Barthez
Rapporteur ?: Mme Virginie Restino
Rapporteur public ?: M. Clen
Avocat(s) : BAZIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2024-04-25;22tl22066 ?
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