Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SCM Cerix a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision n° 2020-2457 du 27 août 2020 du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie rejetant sa demande d'installation d'un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique du Vallespir à Céret, ensemble la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique, d'enjoindre à l'agence régionale de santé Occitanie de procéder à un réexamen de sa demande et d'en tirer toutes les conséquences de droit et de mettre à la charge de l'agence régionale de santé Occitanie et du ministre des solidarités et de la santé une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2103346 du 22 mai 2023, le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie du 27 août 2020, ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé à son encontre, enjoint au directeur général de l'agence régionale de santé d'Occitanie de réexaminer la demande d'autorisation présentée par la SCM Cerix pour l'installation d'un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la Clinique du Vallespir à Céret, dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement, mis à la charge de l'agence régionale de santé d'Occitanie une somme de 1 500 euros à verser à la SCM Cerix au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 3 juillet 2023, et un mémoire en réplique enregistré le 17 novembre 2023, l'agence régionale de santé Occitanie, représentée par Me Porte, de la Selarl d'avocats Houdart et associés, demande à la cour :
1°) d'ordonner, à titre principal sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution de ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de la SCM Cerix la somme de 3000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a écarté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir de la SCM Cerix ; elle n'a jamais prétendu que le dossier de la société requérante était incomplet au regard des dispositions de l'article R 6122-32-1 du code de la santé publique mais fait valoir qu'elle avait été trompée par la SCM Cérix qui n'avait pas l'accord de la clinique du Vallespir pour implanter sur son site l'équipement matériel lourd ; sa demande d'autorisation présentait donc un caractère frauduleux dès lors que l'adossement à un établissement de santé constituait un élément essentiel dans l'appréciation des trois demandes concurrentes dans le département des Pyrénées orientales ; il s'agit de l'un des objectifs qualitatifs du volet imagerie médicale du schéma régional de santé d'Occitanie ; sans ces déclarations mensongères, elle n'avait aucune chance d'obtenir l'autorisation sollicitée ; si elle avait obtenu cette autorisation, elle aurait pu être retirée ou abrogée à tout moment après la découverte de la fraude ; la fraude de la SCM Cérix prive celle-ci de son intérêt à agir inhérent à sa qualité de candidate évincée ; cette fraude entache également la décision par laquelle son dossier a été déclaré complet à la date du 6 mars 2020 ; elle entend donc la retirer de l'ordonnancement juridique ; l'accord donné par la clinique du Vallespir en juillet 2023 ne permet pas d'établir qu'il aurait été donné en 2020 ; un nouveau projet devra être déposé par la SCM Cerix selon les dispositions du nouveau schéma régional de santé 2023-2028 ;
- c'est à tort que le tribunal a retenu le moyen tiré de l'erreur de droit dont serait entaché le refus d'autorisation contesté dans la mesure où les trois éléments de motivation retenus allaient au-delà de ce que prévoient les objectifs qualitatifs du schéma régional de santé occitan ; c'est à bon droit que la décision mentionne que la clinique du Vallespir et les établissements voisins de son bassin de vie n'exercent pas des activités de soins de traitement du cancer, des pathologies neurologiques et cardiologiques en tant que détenteur de l'autorisation de l'activité de soins ; la SCM Cerix n'a jamais soutenu, ni dans sa requête introductive d'instance, ni dans son mémoire en réplique que la décision litigieuse était entachée d'erreur de droit, au motif que l'ARS ne peut légalement estimer que la demande ne permet pas de répondre aux principaux objectifs qualitatifs de l'offre de soins en invoquant une recherche insuffisante d'un partenariat ou d'une coopération public privé ; en estimant que le schéma régional de santé n'exige nullement, au titre des objectifs qualitatifs de l'offre de soins, que l'adossement à des structures réalisant des activités fortement demandeuses d'imagerie en coupe soit organisé dans un cadre public-privé, le tribunal administratif a violé le principe de l'immutabilité du litige en statuant sur un moyen qui n'a pas été soulevé par la requérante ; en outre, même si elle ne figure pas formellement dans la rubrique " Objectifs qualitatifs " du schéma régional de santé, l'organisation de la mutualisation dans un partenariat public-privé n'en demeure pas moins un objectif qualitatif du schéma ; en estimant que l'organisation des mutualisations et des partenariats dans un cadre public-privé ne figure parmi les objectifs qualitatifs du schéma régional de santé d'Occitanie, le tribunal administratif de Montpellier a méconnu les dispositions des articles L 1434-4 et R 1434-7 du code de la santé publique et commis une erreur de droit ;
- en tout état de cause, l'agence régionale de santé Occitanie aurait immanquablement pris la même décision si elle avait eu connaissance du caractère frauduleux de la demande de la SCM Cerix et elle est fondée à demander une substitution de motifs sur ce point qui ne prive celle-ci d'aucune garantie.
Par des mémoires en défense enregistrés le 14 septembre 2023 et le 4 décembre 2023, la SCM Cerix, représentée par Me Contis conclut au rejet de la requête de l'agence régionale de santé Occitanie et à ce que soit mise à sa charge une somme de 2500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- son intérêt à agir est constitué dès lors qu'un refus d'autorisation lui a été opposé ; la commission médicale d'établissement de la clinique du Vallespir avait approuvé son projet dans sa séance du 14 février 2018 ; le dirigeant du groupe Elsan n'a jamais fait connaître son opposition au projet ;
- la demande de l'agence régionale de santé Occitanie tendant à ce qu'il lui soit donné acte de ce qu'elle entend retirer de l'ordonnancement juridique, en application de l'article L.242-1 du code des relations entre le public et l'administration, la décision par laquelle elle a déclarée recevable et complète la demande présentée par la SCM Cerix ne pourra qu'être rejetée ;
- aucun moyen n'est de nature à justifier l'annulation du jugement contesté ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé, après avoir rappelé les termes du schéma régional de santé, que pour répondre aux objectifs qualitatifs du schéma, il n'était exigé ni expressément, ni implicitement, que la structure demanderesse ou celle sur laquelle elle était adossée soit titulaire d'une autorisation d'activité de soins ; la Clinique du Vallespir, à laquelle la demande de la SCM Cerix est adossée, détient une autorisation de médecine polyvalente et en outre, des cabinets de consultation peuvent être fortement pourvoyeurs d'imagerie ;
- c'est à bon droit que le tribunal administratif a jugé qu'il n'était nullement exigé par le plan, au titre des objectifs qualitatifs du schéma régional de santé, que l'adossement à des structures fortement pourvoyeuses d'imagerie soit organisé dans un cadre public-privé et ce moyen avait bien été soulevé dans le mémoire en réponse de la SCM Cerix en date du 13 octobre 2022 que le tribunal pouvait requalifier au besoin ;
- l'agence régionale de santé Occitanie ne conteste pas l'erreur de droit quant au dernier motif ;
- la demande de substitution du motif de fraude sera écartée comme non fondée.
Par une ordonnance en date du 17 novembre 2023 la date de clôture d'instruction de l'affaire a été reportée au 8 décembre 2023 à 12 heures.
Vu :
- la requête au fond enregistrée sous le n° 23TL01577 ;
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Armelle Geslan-Demaret, présidente de la 2ème chambre,
- et les observations de Me Porte, représentant l'agence régionale de santé Occitanie, et de Me Contis, représentant la SCM Cerix.
Considérant ce qui suit :
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
1. Aux termes de l'article R. 222-25 du code de justice administrative : " Les affaires sont jugées soit par une chambre siégeant en formation de jugement, soit par une formation de chambres réunies, soit par la cour administrative d'appel en formation plénière, qui délibèrent en nombre impair. Par dérogation à l'alinéa précédent, le président de la cour ou le président de chambre statue en audience publique et sans conclusions du rapporteur public sur les demandes de sursis à exécution mentionnées aux articles R. 811-15 à R. 811-17. ".
2. Aux termes de l'article R. 811-15 du code de justice administrative : " Lorsqu'il est fait appel d'un jugement de tribunal administratif prononçant l'annulation d'une décision administrative, la juridiction d'appel peut, à la demande de l'appelant, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement si les moyens invoqués par l'appelant paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement. ".
3. En application de ces dispositions, lorsque le juge d'appel est saisi d'une demande de sursis à exécution d'un jugement prononçant l'annulation d'une décision administrative, il lui incombe de statuer au vu de l'argumentation développée devant lui par l'appelant et par le défendeur et en tenant compte, le cas échéant, des moyens qu'il est tenu de soulever d'office. Après avoir analysé dans les visas ou les motifs de sa décision les moyens des parties, il peut se borner à relever qu'aucun des moyens n'est de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué et rejeter, pour ce motif, la demande de sursis. Si un moyen lui paraît, en l'état de l'instruction, de nature à justifier l'annulation ou la réformation du jugement attaqué, il lui appartient de vérifier si un moyen est de nature, en l'état de l'instruction, à infirmer ou à confirmer l'annulation de la décision administrative en litige, avant, selon le cas, de faire droit à la demande de sursis ou de la rejeter.
4. En l'état de l'instruction, les moyens soulevés par l'agence régionale de santé Occitanie, et sus analysés, ne paraissent pas de nature à justifier l'annulation du jugement n° 2103346 du 22 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé la décision du directeur général de l'agence régionale de santé Occitanie du 27 août 2020 rejetant la demande présentée par la SCM Cerix d'installation d'un équipement matériel lourd de type IRM sur le site de la clinique du Vallespir à Céret, ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique formé à son encontre. Il en résulte que l'agence régionale de santé Occitanie n'est pas fondée à demander le sursis à exécution de ce jugement.
Sur les frais liés au litige :
5. D'une part, les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par l'agence régionale de santé Occitanie soit mise à la charge de la SCM Cerix, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la SCM Cérix à l'encontre de l'agence régionale de santé Occitanie sur le même fondement.
D É C I D E :
Article 1er : La requête l'agence régionale de santé Occitanie est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la SCM Cerix tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence régionale de santé Occitanie et à la SCM Cerix.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 avril 2024.
La présidente de la 2ème chambre,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°23TL01578 2