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13/09/2023 | FRANCE | N°23TL00283

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 13 septembre 2023, 23TL00283


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public à caractère industriel et commercial Port sud de France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, la condamnation des sociétés Eurocrane-equipamentos de elevaçao et Arcen Engenharia à lui verser une provision d'un montant total de 10 491 436,08 euros.

Les sociétés Eurocrane equipamentos de elevaçao et Arcen Engenharia ont demandé au juge des référés précité, sur l

e fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de verser à la prem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'établissement public à caractère industriel et commercial Port sud de France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, la condamnation des sociétés Eurocrane-equipamentos de elevaçao et Arcen Engenharia à lui verser une provision d'un montant total de 10 491 436,08 euros.

Les sociétés Eurocrane equipamentos de elevaçao et Arcen Engenharia ont demandé au juge des référés précité, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de verser à la première d'entre elles une provision de 770 549,93 euros hors taxes.

Par une ordonnance n° 2002321-2106753 du 11 janvier 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, notamment, condamné la société Eurocrane equipamentos de elevaçao à verser à Port Sud de France, à titre de provision, la somme totale de 4 971 850,81 euros, dont la somme de 172 136,08 toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2023, et des pièces enregistrées le 20 février 2023, la société Eurocrane equipamentos de elevaçao, qui a fait appel de cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier par une requête enregistrée sous le n° 23TL00282, représentée par Me Holterbach, demande au juge d'appel des référés d'en ordonner le sursis à exécution en ce qu'elle la condamne à verser à Port sud de France une provision d'un montant total de 4 971 850,81 euros et de mettre à la charge de cet établissement public la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne dispose aucunement des capacités financières lui permettant de s'acquitter du montant de la condamnation en cause et son assureur n'a pas donné suite à sa demande de prise en charge de cette dernière ; ainsi, l'exécution de l'ordonnance attaquée est de nature à la placer en situation de cessation immédiate de paiement

- les moyens par lesquels elle conteste le jugement sont sérieux ;

- ainsi, le premier juge a statué ultra petita en la condamnant à verser une somme au titre des travaux de réparation des deux grues alors que Port sud de France ne le demandait pas, concluant au contraire à l'inutilité de ces réparations ;

- par ailleurs, Port sud de France n'a pas démontré la réalité de son préjudice d'exploitation commerciale, notamment au titre des exercices 2020 à 2022, en se prévalant du rapport d'une société de conseil établi de manière non contradictoire et daté du 24 avril 2019 ;

- en outre, sa responsabilité dans la survenance des désordres a été retenue à tort par l'expert et, à sa suite, le premier juge ;

Par un mémoire, enregistré le 11 avril 2023, l'établissement public à caractère industriel et commercial Port sud de France conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société appelante et de la société Arcen engenharia à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée ne statue pas ultra petita puisque le montant de la provision au paiement de laquelle elle condamne l'appelante est inférieur à celui de la somme demandée en première instance ;

- la société appelante ne critique pas utilement les constats opérés par l'expert judiciaire ;

- ses comptes sont publics et il appartenait à l'appelante de contester l'étude effectuée par la société Mensia ;

- le montant des frais d'expertise doit être mis à la charge de la société appelante et de la société Arcen engenharia.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du 1er septembre 2022 par laquelle le président de la cour a désigné M. Éric Rey-Bèthbéder, président de la 3ème chambre, pour statuer sur les demandes en référé en application des dispositions de l'article L. 555-1 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Selon l'acte d'engagement du 21 août 2012, l'établissement public à caractère industriel et commercial Port sud de France, ci-après Port sud de France, a retenu, l'offre de 8 400 000 euros hors taxes présentée par la société de droit portugais Eurocrane equipamentos de elevaçao, ci-après Eurocrane, pour la tranche ferme et 9 173 100 euros HT, en incluant les six options, du marché public industriel destiné à la conception, la fabrication, le montage et aux essais de deux grues identiques (EC1 et EC2) avec trémie portée, leur transport sur site à Sète et leur mise en place sur rails du quai I du port de Sète, y compris les interventions annexes éventuelles sur le transporteur continu existant, leurs raccordements et leur mise en service. La société Aquass a, quant à elle, été retenue dans le cadre d'un contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage. La réception est intervenue avec une réserve consistant en l'exécution de prestations, notamment, de l'anti-balancement. Les deux grues ont été mises en service en mai 2014, mais, le 30 décembre 2017, la poutre supportant la crémaillère de la grue EC2 a lâché, conduisant à son arrêt et également à celui de la grue EC1, sur conseil du constructeur. Ainsi la grue EC2 est demeurée arrêtée depuis cette date et la grue EC1 a été arrêtée jusqu'à la mi-juillet 2018 puis au début d'avril 2019 et, enfin, définitivement, à la suite de l'apparition de nouvelles fissures.

2. À la demande de Port Sud de France, le président du tribunal administratif de Montpellier a désigné, le 11 juillet 2018, un expert, qui a déposé son rapport le 1er mars 2022, aux fins, notamment, de décrire les désordres et malfaçons affectant les grues, de réunir les éléments d'information permettant au tribunal de dire si elles sont de nature à compromettre leur solidité ou à les rendre impropres à leur destination, de définir les mesures et travaux à réaliser pour assurer une mise en sécurité et permettre une remise en service provisoire ou définitive, de donner un avis motivé sur les causes et origines des désordres et malfaçons et d'indiquer la nature des travaux nécessaires pour remédier à la situation actuelle, en prévoir la durée et en chiffrer le coût. Port Sud de France a demandé au juge des référés du tribunal administratif précité de condamner solidairement les sociétés Eurocrane et Arcen Engenharia (Arcen) à lui verser, à titre de provision, les sommes de 8 400 000 euros hors taxes au titre du remboursement du coût d'achat des grues, 1 919 300 euros à raison des pertes d'exploitations subies et 172 136,08 euros toutes taxes comprises au titre des frais d'expertise, d'autre part, la société Eurocrane a demandé au même juge des référés de condamner Port Sud de France à lui verser une provision de 770 549,93 euros hors taxes, augmentés des intérêts moratoires, au titre des sommes restant dues en exécution du marché et que la société Aquass soit condamnée à la garantir à hauteur de 25 % des sommes qui seraient mises à sa charge.

3. Par la présente requête la société Eurocrane relève appel de l'ordonnance du 11 janvier 2023 par laquelle le juge des référés précité l'a condamnée solidairement avec la société Aquass à verser à Port sud de France une provision d'un montant total de 4 971 850,81 euros.

4. Aux termes de l'article R. 541-6 du code de justice administrative : " Le sursis à l'exécution d'une ordonnance du juge des référés accordant une provision peut être prononcé par le juge d'appel ou par le juge de cassation si l'exécution de cette ordonnance risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés à son encontre paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier son annulation et le rejet de la demande ".

5. Ainsi qu'il a été exposé au point 2 ci-dessus, Port de France a sollicité, notamment, le versement d'une provision correspondant au coût de remplacement des deux grues livrées par la société appelante, pour un montant total de 8 400 000 euros, et le premier juge a mis à la charge de cette dernière, outre une somme au titre des pertes d'exploitation et une autre correspondant aux frais d'expertise - alors d'ailleurs qu'il ne pouvait lui échoir, en tant que juge des référés, de statuer sur la mise à la charge définitive d'une des parties des frais de cette nature - une somme de 3 288 707,07 au titre des frais de réparation de ces équipements, bien que cela n'était plus demandé dans le dernier état des écritures de première instance de Port sud de France. Toutefois et compte tenu de ce que la limite des conclusions indemnitaires s'apprécie au regard du montant total de l'indemnisation demandée pour la réparation de l'entier dommage, soit, en l'espèce, 10 491 436,08 euros, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ne peut être regardé comme ayant statué ultra petita.

6. Par ailleurs, aucun des moyens soulevés par la société Eurocrane, qui ne critique pas la compétence du juge des référés pour mettre à sa charge définitive les dépens, n'apparaît, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier l'annulation de l'ordonnance attaquée.

4. Dès lors, l'une des conditions auxquelles est subordonné l'octroi du sursis prévu par les dispositions précitées de l'article R. 541-6 du code de justice administrative n'est pas satisfaite. Il suit de là que la société Eurocrane n'est pas fondée à demander qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance litigieuse.

5. Port sud de France n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la société Eurocrane présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette société la somme que demande Port Sud de France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

ORDONNE :

Article 1er : La requête de la société Eurocrane est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de Port sud de France relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Eurocrane equipamentos de elevaçao et à l'établissement public industriel et commercial Port sud de France.

Fait à Toulouse, le 13 septembre 2023.

Le juge d'appel des référés,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23TL00283


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 23TL00283
Date de la décision : 13/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Avocat(s) : HOLTERBACH

Origine de la décision
Date de l'import : 17/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-09-13;23tl00283 ?
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