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28/08/2023 | FRANCE | N°23TL00447

France | France, Cour administrative d'appel de Toulouse, 28 août 2023, 23TL00447


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à titre de provision, une somme de 49 550 euros en réparation des préjudices résultant de son accident de travail du 7 mars 2019 reconnu imputable au service, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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ar une ordonnance n°2300340 du 20 février 2023, le juge des référés du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à titre de provision, une somme de 49 550 euros en réparation des préjudices résultant de son accident de travail du 7 mars 2019 reconnu imputable au service, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n°2300340 du 20 février 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à verser à Mme C... une provision de 5 000 euros ainsi qu'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 22 février 2023 et le 13 avril 2023, Mme A... C..., représenté par Me Betrom, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 20 février 2023 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 49 550 euros à titre de provision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a condamné l'Etat à ne verser que la somme de 5 000 euros à titre de provision ; le simple fait qu'il existe une procédure au fond ne saurait justifier la faiblesse du montant accordé ;

- la créance n'est pas sérieusement contestable dès lors que, victime le 7 mars 2019 d'un accident de service, son taux d'incapacité permanente partielle (IPP) a été fixé à 5% pour les séquelles psychologiques et à 10% pour chacune des séquelles physiques par la commission départementale de réforme ;

- eu égard à son âge au moment de la fixation du taux d'IPP, elle est en droit de demander la somme de 49 550 euros en application du barème Mornet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 avril 2023, le garde des sceaux, ministre de la justice conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que l'ordonnance doit être confirmée et que les moyens ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 mai 2023, la date de clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 24 mai 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., surveillante pénitentiaire en fonction à la maison d'arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone (Hérault) a été victime, le 7 mars 2019, d'un accident qui a été reconnu imputable au service par une décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse, le 13 janvier 2020. Par un courrier du 15 novembre 2022, l'intéressée a formé auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, une réclamation préalable indemnitaire restée sans réponse. Mme C... a alors demandé au juge des référés du tribunal administratif de Montpellier de condamner l'Etat à lui verser, sur le fondement des dispositions de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, à titre de provision, une somme de 49 550 euros en réparation des préjudices résultant de son accident de travail du 7 mars 2019 reconnu imputable au service, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mme C... relève appel de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 20 février 2023 en tant qu'elle s'est bornée à condamner l'Etat à lui verser une provision de 5 000 euros et a rejeté le surplus de sa demande.

Sur la demande de provision :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie ". Il résulte de ces dispositions que pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude. Dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état. Dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant.

3. D'autre part, les dispositions qui instituent, en faveur des fonctionnaires victimes d'accidents de service ou de maladies professionnelles, une rente d'invalidité en cas de mise à la retraite et une allocation temporaire d'invalidité en cas de maintien en activité, déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les intéressés peuvent prétendre, au titre des conséquences patrimoniales de l'atteinte à l'intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des dommages ne revêtant pas un caractère patrimonial, tels que des souffrances physiques ou morales, un préjudice esthétique ou d'agrément ou des troubles dans les conditions d'existence, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien lui incomberait.

En ce qui concerne l'obligation non sérieusement contestable :

4. Il résulte des expertises médicales menées par le docteur D... le 15 janvier 2020 et par le docteur B... le 17 mai 2021 que Mme C..., dont l'état a été consolidé au 8 avril 2021, reste atteinte d'une pathologie lombaire, d'une blessure à l'épaule gauche et d'un état de stress post-traumatique du fait de son accident de service du 7 mars 2019, conduisant les médecins experts à fixer un taux d'incapacité permanente partielle de 10% pour chacune des séquelles physiques et de 5% pour les séquelles psychologiques. Ce taux a été entériné par la commission départementale de réforme dans un avis émis le 24 février 2022. Dans ces conditions, le taux de déficit fonctionnel permanent relatif aux séquelles directes et certaines de l'accident de service du 7 mars 2019 dont Mme C... reste atteinte postérieurement à la date de consolidation, évalué à 10% pour chacune des séquelles physiques et à 5% pour les séquelles psychologiques par les médecins experts et qui possède un caractère non sérieusement contestable, est susceptible de faire l'objet d'une provision.

En ce qui concerne le montant de la provision :

5. Eu égard à la situation de la requérante, âgée de 39 ans à la date de la consolidation, de son état de santé, au taux d'incapacité fixé à 10% pour chacune des séquelles physiques et à 5% pour les séquelles psychologiques par les médecins experts, et au caractère simplement indicatif du barème Mornet, il sera fait une juste appréciation de ce préjudice en fixant sa réparation à hauteur de 34 073euros. Il y a lieu de condamner l'Etat à lui verser une provision de ce montant.

6. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de porter à 34 073euros le montant de la provision mise à la charge de l'Etat et de réformer en ce sens l'ordonnance attaquée du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme C... d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

ORDONNE :

Article 1er : La somme de 5 000 euros que l'Etat a été condamné à verser à Mme C... par l'ordonnance n°2300340 du 20 février 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est portée à 34 073 euros.

Article 2 : L'ordonnance n°2300340 du 20 février 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier est réformée en ce qu'elle est contraire à la présente ordonnance.

Article 3 : L'Etat versera à Mme C... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme A... C... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Fait à Toulouse, le 28 août 2023.

La juge d'appel des référés,

A. Geslan-Demaret

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente ordonnance.

2

N°23TL00447


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Toulouse
Numéro d'arrêt : 23TL00447
Date de la décision : 28/08/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-03-015 Procédure. - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. - Référé-provision.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : BETROM

Origine de la décision
Date de l'import : 03/09/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.toulouse;arret;2023-08-28;23tl00447 ?
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