Vu I°), sous le n° 11PA04091, la requête, enregistrée le 9 septembre 2011, présentée pour la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, dont le siège est au 16 allée Marconi à Luxembourg (L-2120) au Luxembourg, par Me A...et MeB... ; la SAS Cannes Evolution demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0916759/2 du 5 juillet 2011 en tant que, par celui-ci, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt mises à sa charge au titre des années 2002 et 2003, ainsi que des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative ;
.........................................................................................................
Vu II°), sous le n° 11PA04721, le recours, enregistré le 9 novembre 2011, présentée par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ; le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0916759/2 du 5 juillet 2011 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de la société Cannes Evolution, venant au droit de la société Financière Giraudoux Kléber, tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle à cet impôt, ainsi que des pénalités correspondantes, mises à sa charge au titre des années 2002 et 2003 ;
2°) de rétablir la société Cannes Evolution aux rôles des impositions déchargées et des pénalités correspondantes ;
.........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu la directive 90/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 et la directive 2011/96/UE du 30 novembre 2011 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2013 :
- le rapport de M. Paris, premier conseiller,
- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,
- et les observations de MeA... et MeB..., avocats de la SAS Cannes Evolution ;
1. Considérant que la société Financière Giraudoux Kléber, anciennement Vuitton Holding, aux droits de laquelle est venue la SAS Cannes Evolution, a fait l'objet du 13 septembre 2004 au 22 novembre 2005 d'une vérification de sa comptabilité portant sur ses exercices clos au 30 juin 2002 et 30 juin 2003 ; que, par une proposition de rectification en date du 15 décembre 2005, l'administration fiscale l'a informée, selon la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, des rehaussements envisagés de son résultat imposable au titre des exercices concernés ; que ces rehaussements procédaient, d'une part, de la remise en cause d'une opération d'incorporation au capital de la réserve spéciale des plus-values à long terme suivie, peu après, d'une réduction de capital et, d'autre part, de la remise en cause du régime des sociétés mères sous lequel la société Financière Giraudoux Kléber avait placé les dividendes perçus de l'une de ses filiales, la société de droit néerlandais Tourmon NV, avant de constituer une provision pour dépréciation des titres de cette société ; qu'après que la société Financière Giraudoux Kléber se fut désistée de sa demande tendant à la saisine du comité consultatif pour la répression des abus de droit, les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, ainsi que les pénalités correspondantes, ont été mises en recouvrement le 17 décembre 2008 ; qu'à la suite de la décision du 13 août 2009 rejetant la réclamation préalable qu'elle avait formée le
11 février 2009, la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à la décharge de ces impositions et de ces pénalités ; que, par un jugement en date du 5 juillet 2011 le tribunal a, d'une part, fait droit à la demande de la SAS Cannes Evolution en ce qui concerne la remise en cause, opérée par l'administration fiscale, du régime des sociétés mères sous lequel elle avait placé les dividendes perçus de la société Tourmon NV, et a prononcé la décharge des impositions et des pénalités correspondantes ; que le tribunal a, d'autre part, rejeté le surplus de cette demande ; que, sous le numéro 11PA04091, la SAS Cannes Evolution relève appel de ce jugement en tant que, par celui-ci, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande ; que, sous le numéro 11PA04721, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat relève appel de ce jugement en tant que, par celui-ci, le tribunal a partiellement fait droit à la demande de la SAS Cannes Evolution ; que ces deux affaires sont relatives à la situation d'un même contribuable et ont pour objet la contestation d'un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la requête n° 11PA04091 présentée par la SAS Cannes Evolution :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que, alors que les opérations de contrôle sur place de la comptabilité de la société Financière Giraudoux Kléber se sont achevées le 22 novembre 2005, date à laquelle s'est tenue la réunion de synthèse en présence des mandataires de cette société, l'administration fiscale, autorisée par une ordonnance du même jour du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Versailles, a procédé le 24 novembre 2005, dans les locaux, notamment, de la société Financière Giraudoux Kléber à une opération de visite et de saisie sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, soutient que cette procédure de visite et de saisie aurait été détournée de son objet dès lors qu'elle n'avait pour autre but que de consulter des documents auxquels l'administration fiscale n'était pas en droit d'accéder dans le cadre de la vérification de comptabilité, ainsi que d'emporter des documents sans l'accord du contribuable et de soustraire ces documents au débat oral et contradictoire dont elle aurait pu bénéficier dans le cadre de la vérification de comptabilité ;
3. Considérant que l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales institue une procédure de nature fiscale qui habilite les agents de l'administration des impôts, recherchant la preuve d'agissements par lesquels des contribuables cherchent à se soustraire à l'établissement ou au paiement de certains impôts, à effectuer, s'ils sont dûment autorisés à cette fin par l'autorité judiciaire, des visites en tous lieux, même privés, et à saisir les pièces et documents qui se rapportent à ces agissements ; qu'il en résulte que la procédure de visite et de saisie instituée par cet article doit nécessairement être combinée avec la procédure de vérification concernant le même contribuable, de sorte que ces procédures qui constituent deux étapes de la procédure d'imposition, concourent à la décision d'imposition de l'intéressé qui sera prise par l'administration ;
4. Considérant ainsi, en premier lieu, et alors qu'il résulte de l'instruction que, par un arrêt en date du 14 mars 2007, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé, notamment, par la société Financière Giraudoux Kléber à l'encontre de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Versailles ayant autorisé la visite domiciliaire, que les dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne faisaient pas obstacle, par principe, à ce que l'administration procède à des opérations de visite et de saisie aux fins d'établissement de l'impôt et emporte des documents, alors même qu'une vérification de comptabilité était en cours et que les opérations de contrôle sur place étaient achevées ;
5. Considérant, il est vrai, en deuxième lieu, que le paragraphe VI du même article prévoit que l'administration " ne peut opposer au contribuable les informations qu'elle a recueillies " à l'occasion d'une procédure de visite et de saisie qu'en engageant à l'égard de l'intéressé un examen contradictoire de l'ensemble de sa situation personnelle ou une vérification de sa comptabilité ; qu'il en résulte que l'administration fiscale ne peut, aux fins d'établissement de l'imposition, opposer à un contribuable les documents et informations saisis à l'occasion d'une procédure diligentée sur le fondement de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales, sans avoir accordé à l'intéressé le bénéfice des garanties attachées à la vérification de comptabilité et, notamment, celui d'un débat oral et contradictoire sur ces documents et sur ces informations ;
6. Considérant, toutefois, que le ministre fait valoir sans être contesté qu'aucun des éléments recueillis lors de la procédure d'enquête et de saisie litigieuse n'a été utilisé pour fonder les rectifications opérées dans le cadre de la vérification de comptabilité ; qu'ainsi, alors que la société requérante ne précise pas la nature des documents et des informations saisis à l'occasion de la visite dont elle a fait l'objet, les informations recueillies lors de la procédure de visite et de saisie n'ont pas été " opposées " au contribuable au sens du paragraphe VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ; que, par suite, la SAS Cannes Evolution n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'établissement des impositions en litige serait irrégulière, faute pour le service d'avoir soumis ces informations au débat oral et contradictoire auquel elle avait droit dans le cadre de la vérification de comptabilité dont elle faisait l'objet ;
7. Considérant, enfin, que la SAS Cannes Evolution n'apporte pas la preuve, qui lui incombe dès lors que les opérations de vérification se sont déroulées, à la demande des mandataires de la société Financière Giraudoux Kléber, dans les locaux de l'expert comptable où était conservée sa comptabilité, que l'agent vérificateur se serait refusé à tout échange de vues au cours des opérations de contrôle sur place ;
8. Considérant, par suite, que la SAS Cannes Evolution n'est pas fondée à soutenir que la procédure de visite et de saisie dont a fait l'objet la société Financière Giraudoux Kléber, aux droits de laquelle elle est venue, serait entachée d'un détournement de procédure, ni que les informations recueillies par le service dans le cadre de cette procédure auraient été utilisées en méconnaissance du VI de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ou qu'elle aurait été privée des garanties auxquelles elle avait droit dans le cadre de la vérification de comptabilité dont elle faisait l'objet ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la date des impositions en litige : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (...) qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus (...). L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel. Si l'administration ne s'est pas conformée à l'avis du comité, elle doit apporter la preuve du bien-fondé du redressement " ;
10. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que lorsque l'administration use des pouvoirs que lui confère ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif ; qu'elle peut également se fonder sur ces dispositions pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
11. Considérant qu'il résulte de l'instruction que figurait au bilan d'ouverture du premier exercice soumis à vérification de la société Financière Giraudoux Kléber, une somme de 25 428 814 euros inscrite à la réserve spéciale prévue par les dispositions alors en vigueur de l'article 209 quater du code général des impôts, à laquelle étaient portées les plus-values soumises à l'impôt au taux réduit de 19 % prévu par le a du I de l'article 219 du code général des impôts, diminuées du montant de cet impôt ; que, réunis en assemblée générale le 24 juin 2002, les associés de la société Financière Giraudoux Kléber ont décidé de prélever sur cette réserve spéciale, en vue de son incorporation au capital, une somme de 25 428 784 euros ; qu'en application des dispositions alors en vigueur du 2 et du b du 3 de l'article 209 quater du code général des impôts, les sommes ainsi prélevées sur cette réserve pour être incorporées au capital n'ont pas été rapportées au résultat imposable de l'exercice en cours de la société Financière Giraudoux Kléber ; que, postérieurement à l'entrée, le 2 décembre 2002, des sociétés Tampico et Bunbury au capital de la société Financière Giraudoux Kléber, les associés de cette dernière ont décidé, au terme d'une assemblée générale en date du 23 décembre 2002, de procéder à une réduction de capital d'un montant de 22 356 000 euros et à la distribution de la somme correspondante ;
12. Considérant, en premier lieu, que pour rapporter la preuve qui lui incombe, en l'absence d'avis émis par le comité consultatif pour la répression des abus de droit, de ce que l'opération d'incorporation au capital de la somme prélevée sur la réserve spéciale des plus-values à long terme, suivie d'une réduction de capital et de la distribution des sommes correspondantes, était constitutive d'un abus de droit, le ministre, qui ne soutient pas que les opérations ainsi réalisées auraient eu un caractère fictif, fait néanmoins valoir que ces opérations n'ont pu être inspirées par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que la société Financière Giraudoux Kléber, si elle n'avait pas réalisé ces opérations, aurait normalement supportées eu égard à sa situation réelle ;
13. Considérant que le ministre soutient à cet égard que ces opérations étaient constitutives d'un montage artificiel, dépourvu de toute substance économique, exclusivement destiné à permettre le prélèvement et la distribution, aux actionnaires de la société Financière Giraudoux Kléber, des sommes portées à la réserve spéciale des plus-values à long-terme, sans que cette société ne s'acquitte sur les sommes ainsi distribuées, conformément aux dispositions alors en vigueur du 2 de l'article 209 quater du code général des impôts, de l'imposition sur les sociétés au taux normal, sous déduction de l'impôt perçu lors de la réalisation des plus-values correspondantes ; qu'à cette fin, le ministre fait valoir, sans être contesté, que, dès l'augmentation de capital décidée à la suite de l'entrée de la société Desroches au capital de la société Financière Giraudoux Kléber, cette dernière société ne disposait d'aucun moyen matériel, ni humain ; que la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, ne conteste pas, non plus, les constatations opérées par l'agent vérificateur, qui ressortent de la proposition de rectification du 15 décembre 2005, aux termes desquelles la société Financière Giraudoux Kléber ne réalisait plus de chiffre d'affaires et que les seuls actifs inscrits en immobilisations étaient constitués par des titres de participation dans des sociétés qui, elles-mêmes, n'exerçaient aucune activité et dont les actifs étaient, hormis le capital social, entièrement liquides ; que le ministre fait également valoir, sans être contesté, que la réduction de capital à laquelle ont procédé les associés de la Société Financière Giraudoux Kléber, qui, conformément aux actes ayant fait l'objet d'un enregistrement, était motivée par des pertes et devait être effectuée sans remboursement aux associés, s'est néanmoins traduite par des distributions aux actionnaires de sommes issues, tant de l'incorporation au capital de la réserve spéciale des plus-values à long terme qui avait précédemment opérée moins de six mois auparavant, que, notamment, de sommes prélevées sur la réserve légale et sur le report à nouveau créditeur ;
14. Considérant, il est vrai, que pour contester la circonstance que ces opérations n'auraient été inspirées par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que la société Financière Giraudoux Kléber aurait supportées, si elle ne les avait pas effectuées, la SAS Cannes Evolution soutient que les actionnaires de cette société ayant décidé de l'incorporation au capital des sommes prélevées sur la réserve spéciale des plus-values à long terme n'étaient pas, compte tenu de la cession de leurs parts sociales, les mêmes que ceux ayant ultérieurement décidé de la réduction de capital et de la distribution des sommes correspondantes ;
15. Considérant toutefois, d'une part, que l'économie fiscale réalisée au travers des opérations litigieuses a bénéficié, d'abord, à la société Financière Giraudoux Kléber, indépendamment de l'identité de ses actionnaires ; que, d'autre part, à supposer même que l'identité des actionnaires d'une société puisse être regardée comme ayant une incidence sur l'appréciation du caractère exclusivement fiscal d'une opération réalisée par cette personne morale, la SAS Cannes Evolution qui, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, est la seule à même de pouvoir disposer des informations nécessaires à cet égard, n'apporte aucun commencement de contestation des allégations du ministre, étayées par un faisceau d'indices concordants, selon lesquelles les deux opérations en litige étaient dépourvues de toute substance économique ;
16. Considérant, par suite, que le ministre rapporte la preuve que l'incorporation au capital de la somme prélevée sur la réserve spéciale des plus-values à long terme, suivie de la réduction de capital opérée moins de six mois après et du désinvestissement des sommes correspondantes, était constitutif d'un montage artificiel inspiré par aucun autre motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que la société Financière Giraudoux Kléber aurait supportées, si elle n'avait pas effectué ces opérations ;
17. Considérant, en second lieu, que pour établir que les opérations litigieuses seraient constitutives d'un abus de droit, le ministre fait également valoir qu'il résulte de l'article 209 quater du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur, que le législateur a entendu ne faire bénéficier du taux réduit d'imposition des plus-values à long terme que les sommes laissées investies dans l'entreprise et que, par suite, en réalisant les opérations litigieuses, la société Financière Giraudoux Kléber recherchait le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ;
18. Considérant que le dispositif prévu par l'article 209 quater du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur subordonnait le maintien d'une imposition des plus-values à long terme au taux réduit de 19 % à la condition que le montant de ces plus-values soit porté par l'entreprise, sans limitation de durée, à une réserve spéciale ; que, parmi les exceptions prévues par ce dispositif à l'imposition au taux normal des plus-values en cas de prélèvement sur la réserve spéciale figure, notamment, celle en litige, tenant à l'exigence que les sommes ainsi prélevées soient incorporées au capital ;
19. Considérant, en outre, que les travaux préparatoires de la loi n° 65-566 du
12 juillet 1965 modifiant l'imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers, dont était issu le régime spécial d'imposition des plus values applicable à la date des impositions en litige, font état, d'une part, de ce que la réforme de ce régime devait " permettre aux entreprises de dégager des ressources propres qu'elles pourront affecter à des investissements productifs " (exposé général des motifs du projet de loi, JOAN documents, deuxième session ordinaire de 1964-1965, annexe n° 1390) et, d'autre part, de ce que " L'excédent des plus-values sera taxé au taux de 10 p 100 et leur montant net, après application de l'impôt, devra être porté à une réserve spéciale au passif du bilan./En principe, en effet, l'objet de telles plus values est d'être réinvesties dans l'entreprise [...] Il a donc été prévu que l'impôt ferait l'objet d'une nouvelle liquidation, en vue d'amener la charge fiscale au niveau de celle qu'aurait entraînée l'application du taux [normal] dans la mesure où les sommes portées à cette réserve seraient détournées de leur destination normale " (Rapport de M. Vallon, rapporteur général, député, fait au nom de la Commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur le projet de loi modifiant l'imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers ; JOAN documents, deuxième session ordinaire de 1964 - 1965, annexe n° 1349) ;
20. Considérant, ainsi, eu égard à l'économie même du dispositif alors prévu par l'article 209 quater du code général des impôts et aux travaux préparatoires des dispositions législatives ayant conduit à son adoption, que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que l'intention des auteurs des textes régissant la réserve spéciale des plus-values à long terme était de ne faire bénéficier du taux réduit d'imposition de ces plus-values que celles restant investies dans l'entreprise ;
21. Considérant, par conséquent, que le ministre établit, d'une part, que les opérations réalisées par la société Financière Giraudoux Kléber, consistant en l'incorporation au capital de la réserve spéciale des plus-values à long terme, suivie d'une réduction de capital et de la distribution des sommes correspondantes, étaient constitutives d'un montage artificiel dépourvu de toute substance économique et n'avaient d'autre objectif que d'atténuer les charges fiscales que cette société aurait supportées si elle n'avait pas réalisé ces opérations ; qu'il est en outre fondé à soutenir, d'autre part, qu'en réalisant ces opérations, la société Financière Giraudoux Kléber recherchait le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ; que, par voie de conséquence, le ministre rapporte la preuve que ces opérations revêtaient la nature d'un abus de droit ;
22. Considérant que la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, soutient à titre subsidiaire que le rappel d'imposition dont elle a fait l'objet aurait dû lui être assigné, non au titre de l'année 2003, mais au titre de l'année 2002, dès lors que le prélèvement opéré sur la réserve spéciale des plus-values à long terme aux fins d'incorporation de la somme correspondante au capital a été décidé par une assemblée générale des actionnaires antérieure au 30 juin 2002, date de la clôture de son exercice social, et que les dispositions de l'article 209 quater du code général des impôts alors en vigueur prévoyaient que les sommes prélevées sur la réserve spéciale des plus-values à long terme devaient être rapportées aux résultats de l'exercice en cours lors de ce prélèvement ; que, toutefois, dès lors que l'administration est fondée à écarter l'incorporation au capital de la réserve spéciale des plus-values à long terme suivie d'une réduction de capital et de la distribution des sommes correspondantes comme ne lui étant pas opposable, ainsi qu'il a été dit au point 21, les sommes à l'origine du litige ne doivent être regardées comme ayant été prélevées sur cette réserve qu'à l'occasion de leur distribution aux associés, qui n'a eu lieu qu'au cours de l'exercice clos en 2003 ; que c'est dès lors à bon droit que les rectifications procédant de la remise en cause, sur le terrain de l'abus de droit, des opérations imputables à la société ont été assignées au contribuable au titre de l'année 2003 ;
23. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande ;
Sur le recours n° 11PA04721 formé par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat :
En ce qui concerne le bien-fondé du recours :
24. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Financière Giraudoux Kléber, aux droits de laquelle est venue la SAS Cannes Evolutions, a, postérieurement à son acquisition par la société Sapi, procédé à l'acquisition, le 27 décembre 2001, auprès de la société Cadanor, de l'intégralité du capital de la société de droit néerlandais Tourmon NV, pour un montant de 17 988 484 euros ; que, le 28 décembre 2001, la société Financière Giraudoux Kléber a perçu de la société Tourmon NV des dividendes d'un montant de 17 074 307 euros ; qu'en application des dispositions alors en vigueur des articles 145 et 216 du code général des impôts, qui définissent le régime fiscal des sociétés mères pour lequel avait opté la société Financière Giraudoux Kléber, les produits nets des participations ainsi perçus par cette société ont été retranchés du bénéfice total net de l'exercice alors en cours, déduction faite d'une quote-part de frais et charges de 5 % ; qu'au cours de l'exercice clos en 2003, la société Financière Giraudoux Kléber a de nouveau reçu, à concurrence de 1 550 000 euros, des produits issus des participations qu'elle détenait dans la société Tourmon NV ; que ces produits ont, dans les mêmes conditions, été retranchés du bénéfice total net de l'exercice alors en cours ; que, à la clôture de chacun des exercices correspondants, la société Financière Giraudoux Kléber a déduit de son résultat imposable une provision pour dépréciation des titres de la société Tourmon NV qu'elle détenait, pour des montants, respectivement, de 16 218 936 euros et de 1 646 175 euros ; que, estimant que ces opérations étaient constitutives d'un abus de droit, l'administration fiscale a assigné à la société Financière Giraudoux Kléber le montant des impositions que celle-ci aurait acquittées si elle n'avait pas réalisé ces opérations ;
25. Considérant que, dans les conditions précédemment rappelées, lorsque l'administration use des pouvoirs que lui confère, dans sa rédaction en vigueur au cours des années d'imposition en litige, l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, elle peut toujours écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors qu'elle établit que ces actes ont un caractère fictif ; qu'elle peut également se fonder sur ces dispositions pour écarter les actes qui, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
26. Considérant, en premier lieu, que pour apporter la preuve de ce que les opérations en litige étaient constitutives d'un abus de droit, le ministre, qui n'invoque pas le caractère fictif des actes passés par la société Financière Giraudoux Kléber, fait valoir que ces opérations étaient constitutives d'un montage dépourvu de toute substance économique et, par suite, n'étaient inspirées par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que la société Financière Giraudoux Kléber, si elle n'avait réalisé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;
27. Considérant que le ministre soutient à cet égard qu'à la date de son acquisition par la société Financière Giraudoux Kléber, la société Tourmon NV ne disposait plus, hormis son capital social, d'aucun actif corporel ou incorporel autre que les liquidités distribuées à son actionnaire unique le lendemain de l'acquisition de ses titres et qu'elle n'employait plus aucun salarié, ni n'exerçait d'activité économique ; qu'il fait en outre valoir que la société Financière Giraudoux Kléber n'employait, elle-même, aucun personnel, ni n'exerçait la moindre activité économique et que l'intégralité de ses actifs liquides ont, eux aussi, été distribués, au cours des exercices clos en 2002 et 2003, à la société Bunburry, après que celle-ci fut entrée à son capital social ;
28. Considérant que si, ainsi que l'indique la SAS Cannes Evolution, aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obstacle à ce que des sociétés commerciales aient une activité purement financière, elle ne conteste pas utilement, par cette seule allégation vague et peu circonstanciée, les allégations du ministre qui viennent d'être rappelées ; que, la société requérante ne conteste pas, non plus, les éléments invoqués par le ministre, selon lesquels les distributions opérées par la société Tourmon NV au profit de la société Financière Giraudoux Kléber dès le lendemain de l'acquisition de l'intégralité de ses titres par cette dernière, ont eu pour effet de distribuer l'intégralité de l'actif dont elle disposait, à l'exception du capital social et d'une décote correspondant à 4, 33 % des actifs liquides disponibles ; que la société Tourmon NV a, de plus, ainsi qu'il a été dit, procédé à une nouvelle distribution, à concurrence de 1 550 000 euros, en faveur de la société Financière Giraudoux Kléber, du surplus des actifs liquides dont elle avait pu disposer au cours de l'exercice suivant ; qu'en outre, la société Financière Giraudoux Kléber, a inscrit, à la clôture de chacun des exercices 2002 et 2003, une provision correspondant à la dépréciation de la quasi-intégralité de la valeur des titres de la filiale qu'elle avait acquise, manifestant ainsi la probabilité qu'elle escomptait que sa filiale ne soit pas à même de poursuivre une activité économique susceptible de générer des bénéfices ultérieurs ; qu'en outre, si l'achat des titres de la société Tourmon NV a permis à la société contribuable d'améliorer sa trésorerie, ce gain de trésorerie était négligeable et sans commune mesure avec l'avantage fiscal retiré de ces opérations ; qu'ainsi, le ministre apporte la preuve qui lui incombe que l'acquisition, par la société Financière Giraudoux Kléber, de l'intégralité des droits sociaux de la société Tourmon NV, suivie, en application du régime des sociétés mères, de la distribution en franchise d'impôt, à l'exception d'une quote-part de frais et charges de 5 %, de l'intégralité des actifs liquides disponibles de cette société, alors d'ailleurs que la société a ensuite constitué une provision pour dépréciation des titres de sa filiale, était constitutive d'un montage poursuivant un but exclusivement fiscal ;
29. Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'ensemble des travaux préparatoires du régime fiscal des sociétés mères, en particulier des travaux préparatoires de l'article 27 de la loi du 31 juillet 1920 portant fixation du budget général de l'exercice 1920, de l'article 53 de la loi du 31 décembre 1936 portant réforme fiscale, de l'article 45 de la loi n° 52-401 du 14 avril 1952 portant loi de finances pour 1952, des article 20 et 21 de la loi n° 65-566 du 12 juillet 1965 modifiant l'imposition des entreprises et des revenus de capitaux mobiliers et de l'article 9 de la loi de finances pour 2001, ainsi que de la circonstance que le bénéfice de ce régime fiscal a toujours été subordonné à une condition de détention des titres depuis l'origine ou de durée minimale de détention, et, depuis 1936, à une condition de seuil de participation minimale dans le capital des sociétés émettrices, que le législateur, en cherchant à supprimer ou à limiter la succession d'impositions susceptibles de frapper les produits que les sociétés mères perçoivent de leurs participations dans des sociétés filles et ceux qu'elles redistribuent à leurs propres actionnaires, a eu comme objectif de favoriser l'implication de sociétés mères dans le développement économique de sociétés filles pour les besoins de la structuration et du renforcement de l'économie française ; que le fait d'acquérir des sociétés ayant cessé leur activité initiale et liquidé leurs actifs dans le but d'en récupérer les liquidités par le versement de dividendes exonérés d'impôt sur les sociétés en application du régime de faveur des sociétés mères, sans prendre aucune mesure de nature à leur permettre de reprendre et développer leur ancienne activité ou d'en trouver une nouvelle, va à l'encontre de cet objectif ;
30. Considérant, par ailleurs, que cette interprétation du régime fiscal des sociétés mères qui résulte des articles 145 et 216 du code général des impôts n'est pas, contrairement à ce que soutient la société requérante, incompatible avec les objectifs de la directive 90/435/CEE, devenue la directive 2011/96/UE, dont elles assurent la transposition en ce qui concerne les transferts de dividendes réalisés entre sociétés mères et filiales basées dans des Etats membres différents de l'Union européenne ; que cette directive, dont les objectifs visent à assurer, dans l'Union européenne, " l'établissement et le bon fonctionnement du marché commun " et à " permettre aux entreprises de s'adapter aux exigences du marché commun, d'accroître leur productivité et de renforcer leur position concurrentielle sur le plan international ", ne saurait en effet avoir entendu permettre le bénéfice des avantages qu'elle prévoit à des montages purement artificiels destinés à éluder l'impôt normalement dû ;
31. Considérant, ainsi, que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est fondé à soutenir que la société Financière Giraudoux Kléber, en acquérant l'intégralité des droits sociaux de la société Tourmon NV, puis en procédant, en application du régime des sociétés mères, à la distribution à son profit, en franchise d'impôt à l'exception d'une quote-part de frais et charges de 5 %, des actifs liquides disponibles de cette société, a, ce faisant, recherché le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs ;
32. Considérant que le moyen de défense invoqué en appel par la SAS Cannes Evolution, tiré de ce que l'interprétation de l'intention des auteurs des textes fiscaux relatifs au régime des sociétés mères, eu égard à l'ancienneté de ces textes, méconnaîtrait son droit à un procès équitable garanti par l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté, en ce qui concerne les droits, dès lors que le présent litige, qui est relatif à l'assiette d'un impôt, ne relève pas, au sens des stipulations de cet article, de contestations sur des droits et obligations à caractère civil, ni du bien-fondé d'une accusation en matière pénale ;
33. Considérant qu'il en résulte que le ministre est fondé à soutenir que les opérations précédemment décrites, réalisées par la société Financière Giraudoux Kléber, recherchaient le bénéfice d'une application littérale des textes à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs et qu'il établit que ces opérations n'ont pu être inspirées par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que cette société, si elle ne s'était pas placée sous le bénéfice du régime des sociétés mères, aurait normalement supportées à raison de la perception des dividendes de sa filiale ; qu'ainsi, le ministre, qui rapporte la preuve que ces opérations étaient constitutives d'un abus de droit, est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de la SAS Cannes Evolution, venant aux droits de la société Financière Giraudoux Kléber ;
34. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par la SAS Cannes Evolution devant le Tribunal administratif de Paris et devant elle ;
35. Considérant que le moyen tiré, par la SAS Cannes Evolution, de l'irrégularité de la procédure d'imposition du fait de la procédure de visite et de saisie diligentée par le service sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 B du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté pour les mêmes motifs que ceux précédemment mentionnés ;
36. Considérant que la SAS Cannes Evolution soutient que le service aurait dû faire droit à sa demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires sur la question de l'intérêt pour la société Financière Giraudoux Kléber de procéder à l'acquisition des titres de la société Tourmon NV, du fait du gain financier dont elle a bénéficié sous l'effet de cette opération ; que, toutefois, alors d'ailleurs que la SAS Cannes Evolution s'était bornée, dans ses observations, à demander la saisine " de la commission ou du comité compétent " et que l'administration fiscale avait initialement fait droit à sa demande de saisine du comité de l'abus de droit fiscal, il résulte de l'instruction que le désaccord qui opposait la société et le service à l'issue de la réponse aux observations du contribuable portait sur la qualification de fraude à la loi des opérations litigieuses ; que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'était pas compétente pour apprécier si ces opérations étaient constitutives d'une telle fraude ; qu'ainsi, le moyen invoqué ne peut qu'être écarté ;
37. Considérant que la SAS Cannes Evolution soutient qu'en renonçant à l'imposition, sur le fondement des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, de montages fiscaux similaires à ceux qu'elle avait mis en oeuvre, l'administration fiscale devrait être regardée comme ayant formellement pris position sur sa situation de fait au regard de la loi fiscale, au sens des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que, toutefois, d'une part, la société requérante n'établit pas que les montages fiscaux auxquels elle se réfère auraient eu la même nature que ceux à l'origine des rectifications dont elle a fait l'objet ; qu'elle n'établit pas non plus, d'autre part, que l'abandon des rectifications envisagées par le service à l'égard des tiers auxquels elle se réfère aurait été motivé par le fait que les opérations ainsi réalisées n'auraient pas revêtu la nature d'un abus de droit ; qu'ainsi, le moyen invoqué par la SAS Cannes Evolution ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;
38. Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts dans sa rédaction alors applicable : " 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration (...) de 80 % s'il s'est rendu coupable (...) d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales " ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, la circonstance que l'intention des auteurs du régime des sociétés mères et filiales sur laquelle se fonde la qualification d'abus de droit retenue en l'espèce n'aurait été révélée que par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 17 juillet 2013 n'est pas de nature à remettre en cause, l'application à son encontre de la pénalité de 80 % prévue par ces dispositions, dès lors, ainsi qu'il a été dit, que la SAS Cannes Evolution, qui était à l'origine des opérations litigieuses, s'est rendue coupable d'abus de droit au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;
39. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat est, d'une part, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit à la demande de la SAS Cannes Evolution et est, d'autre part, fondé à demander le rétablissement de la SAS Cannes Evolution au rôle des impositions et des pénalités dont la décharge a été prononcée par ce tribunal ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
40. Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, verse à la SAS Cannes Evolution les sommes que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête n° 11PA04091 présentée pour la SAS Cannes Evolution est rejetée.
Article 2 : L'article 1er du jugement n° 0916759/2 du Tribunal administratif de Paris en date du 5 juillet 2011 est annulé.
Article 3 : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et, de contribution additionnelle à cet impôt, ainsi que les pénalités correspondant à ces impositions, initialement mises à la charge de la SAS Cannes Evolution au titre des années 2002 et 2003, dont la décharge a été prononcée par le Tribunal administratif de Paris, sont rétablies.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées pour la SAS Cannes Evolution dans le dossier enregistré sous le numéro 11PA04721 est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Cannes Evolution et au ministre de l'économie et des finances. Copie en sera adressée à la direction du contrôle fiscal Île-de-France Ouest.
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Nos 11PA04091, 11PA04721