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02/07/2013 | FRANCE | N°11PA05001

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 02 juillet 2013, 11PA05001


Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2011, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me C... ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0915726/5-2 du 29 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, en premier lieu à l'annulation de la décision du 30 avril 2009 refusant le renouvellement de son contrat à compter du 1er septembre 2009, en deuxième lieu, à la condamnation de l'État à lui verser une somme de 36 000 euros en réparation du préjudice subi à raison de son licenciement sans cause réelle et

sérieuse, en troisième lieu, à la condamnation de l'État à lui verser un...

Vu la requête, enregistrée le 4 décembre 2011, présentée pour Mme B...A..., demeurant..., par Me C... ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0915726/5-2 du 29 septembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant, en premier lieu à l'annulation de la décision du 30 avril 2009 refusant le renouvellement de son contrat à compter du 1er septembre 2009, en deuxième lieu, à la condamnation de l'État à lui verser une somme de 36 000 euros en réparation du préjudice subi à raison de son licenciement sans cause réelle et sérieuse, en troisième lieu, à la condamnation de l'État à lui verser une somme de 82 000 euros en réparation de l'absence d'augmentation de son salaire depuis 2004 et, enfin, à la condamnation de l'État à lui verser une somme de 15 000 euros au titre des indemnités légales de licenciement ;

2°) de faire droit aux mêmes demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

Vu la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

Vu le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2013 :

- le rapport de M. Paris, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public ;

1. Considérant qu'à compter du 8 octobre 2000, Mme A...a été recrutée en qualité de vacataire à temps complet, par le ministère de la justice, pour exercer les fonctions de secrétaire de documentation au sein de la sous-direction de la statistique, des études et de la documentation ; que les contrats au titre desquels elle a été employée ont ensuite été successivement renouvelés, d'abord en cette même qualité de vacataire à temps complet, puis en qualité de vacataire à temps incomplet et, enfin, en qualité d'agent non titulaire ; que par une décision du 30 avril 2009 le ministre de la justice a néanmoins informé l'intéressée que son contrat ne serait pas renouvelé au-delà du 1er septembre 2009 ; que Mme A...a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision au motif que le dernier contrat dont elle était titulaire devait être regardé comme un contrat à durée indéterminée et, d'autre part, à la condamnation de l'État à lui verser une somme totale de 133 000 euros en réparation des divers préjudices subis par elle du fait, tant de l'illégalité de cette décision, que de celle des contrats au titre desquels elle avait été employée ; qu'elle relève appel du jugement du 29 septembre 2011 par lequel le tribunal a rejeté ces demandes ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant que Mme A...fait valoir que la décision du 30 avril 2009 par laquelle le Garde des sceaux, ministre de la justice, a refusé le renouvellement de son contrat à compter du 1er septembre 2009 est illégale, dès lors qu'ayant été employée pendant plus de six ans par la voie de contrats à durée déterminée, elle devait alors être regardée comme étant titulaire d'un contrat à durée indéterminée en application de l'article 6 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents non titulaires de l'État, dans sa rédaction issue du décret n° 2007-338 du 12 mars 2007, ou de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa rédaction issue de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique ; que Mme A...ajoute à cet égard que les contrats par lesquels elle a été recrutée en qualité de vacataire, soit du 8 octobre 2000 au 31 octobre 2004, doivent être regardés comme des contrats de recrutement d'agent non titulaire ;

En ce qui concerne la nature des contrats de recrutement au titre de la période du 8 octobre 2000 au 31 octobre 2004 :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Sauf dérogation prévue par une disposition législative, les emplois civils permanents de l'État, (...) sont (...) occupés (...) par des fonctionnaires régis par le présent titre " ; qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des agents contractuels peuvent être recrutés dans les cas suivants : 1° Lorsqu'il n'existe pas de corps de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A et, dans les représentations de l'État à l'étranger, des autres catégories, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient." ; que l'article 6 de cette dernière loi, dans sa rédaction applicable au présent litige disposait que : " Les fonctions qui, correspondant à un besoin permanent, impliquent un service à temps incomplet d'une durée n'excédant pas 70 % d'un service à temps complet, sont assurées par des agents contractuels./ Les fonctions correspondant à un besoin saisonnier ou occasionnel sont assurées par des agents contractuels, lorsqu'elles ne peuvent être assurées par des fonctionnaires titulaires " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, du 8 octobre 2000 au 31 décembre 2001, Mme A...a été recrutée, par cinq contrats successifs en date des 11 octobre 2000, 24 janvier 2001, 14 juin 2001, 26 septembre 2001 et 17 octobre 2001, en qualité d'agent vacataire occasionnel à temps complet, sur le fondement du second alinéa de l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984, pour exercer les fonctions de secrétaire de documentation ; que, sur le fondement de ces mêmes dispositions, elle a ensuite été recrutée pour exercer les mêmes fonctions par deux contrats successifs en date des 11 janvier 2002 et 6 janvier 2003, couvrant la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2003, en qualité de vacataire à temps incomplet puis, du 1er janvier au 31 mai 2004, en qualité de vacataire à temps complet ; qu'elle a ensuite exercé les mêmes fonctions, jusqu'au 1er septembre 2009, sous couverts de sept contrats successifs conclus en application de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ;

5. Considérant qu'il résulte directement de ces circonstances et, en particulier, de la durée pendant laquelle les fonctions de secrétaire de documentation ont été pourvues au sein de la sous-direction de la statistique, des études et de la documentation du ministère de la justice, ainsi que de la nature de ces fonctions, que celles-ci correspondaient à un besoin permanent de l'État ; qu'ainsi, le ministre de la justice ne pouvait légalement pourvoir à ces fonctions en recrutant MmeA..., du 8 octobre 2000 au 31 mai 2004, au moyen d'un contrat passé en application du deuxième alinéa de l'article 6 de la loi du 11 janvier 1984 qui, ainsi qu'il a été dit, ne permet le recrutement d'agents contractuels que pour les fonctions correspondant à un besoin saisonnier ou occasionnel ; que, toutefois, dès lors qu'il n'existait pas de corps de fonctionnaires rattaché au ministère de la justice susceptible d'assurer ces mêmes fonctions, le ministre de la justice, en faisant appel de manière constante au même agent, a en fait instauré avec Mme A..., dès son recrutement, un lien contractuel qui présentait les caractéristiques énoncées au 1° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État ; que par suite, et ainsi, d'ailleurs, que les contrats conclus avec l'intéressée à compter du 1er juin 2004 en ont fait état, Mme A...doit être regardée comme ayant eu, dès le 8 octobre 2000, la qualité d'agent non titulaire de l'État recrutée en application de ces mêmes dispositions ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que les quatrième et cinquième alinéas de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984, dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce, issue de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique prévoit que les agents recrutés en application de cet article " sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée " ; que le I de l'article 13 de la même loi du 26 juillet 2005 prévoit en outre que lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent est en fonction à la date de publication de cette loi le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues, notamment, aux quatrième et cinquième alinéas de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ;

7. Considérant ainsi qu'il a été dit, que Mme A...doit être regardée comme ayant été recrutée, dès le 8 octobre 2000, sur un emploi permanent en application du 1° de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ; qu'il est en outre constant que l'intéressée était en fonction à la date de la publication de la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ; que, par suite, Mme A...doit être regardée, lors du premier renouvellement de son contrat intervenu à l'expiration d'une période de six ans à compter de son recrutement, comme ayant été titulaire d'un contrat à durée indéterminée ; qu'il en résulte que le Garde des sceaux, ministre de la justice, ne pouvait légalement refuser à Mme A...le renouvellement de son contrat ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du Garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 30 avril 2009, lui refusant le renouvellement de son contrat à durée déterminée ;

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision " ;

10. Considérant que Mme A...soutient avoir adressé au Garde des sceaux, ministre de la justice, par deux courriers électroniques en date des 19 janvier 2009 et 12 février 2009, des demandes tendant à l'indemnisation du préjudice subi par elle du fait de l'illégalité des contrats dont elle était titulaire et de celle de la décision du 30 avril 2009 lui refusant le renouvellement de son contrat à durée déterminée ; qu'il ressort toutefois des termes mêmes de ces courriers électroniques que, par ceux-ci, l'intéressée se bornait à demander une modification des fonctions exercées dans son futur contrat ainsi que la requalification de son contrat et une revalorisation de son salaire ; que, par suite, ils ne peuvent être regardés comme ayant fait naître une décision du ministre rejetant une demande tendant à l'indemnisation des préjudices que Mme A...estime avoir subis ; que, dès lors que le Garde des sceaux, ministre de la justice, a conclu devant les premiers juges, à titre principal, à l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires présentées par MmeA..., pour un motif tiré de l'absence de demande préalable, et dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A...aurait, par la suite, adressé une telle demande, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le contentieux indemnitaire formé par Mme A... n'était pas lié et, par voie de conséquence, que les conclusions à fin d'indemnisation formées par l'intéressée devaient être rejetées comme irrecevables ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation ;

12. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La décision du Garde des sceaux, ministre de la justice, en date du 30 avril 2009, refusant à Mme A...le renouvellement de son contrat à durée déterminée est annulée.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 29 septembre 2011 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Mme A...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.

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N° 11PA05001


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 11PA05001
Date de la décision : 02/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Timothée PARIS
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : COMPOINT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2013-07-02;11pa05001 ?
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