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30/12/2011 | FRANCE | N°10PA01196

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 30 décembre 2011, 10PA01196


Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2010, présentée pour M. Waldo Moises A, demeurant ...), par Me Lepretre ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000034/9 en date du 11 janvier 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 janvier 2010, par lequel le préfet de Seine et Marne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination de sa reconduite ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre audit préfet

de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un dél...

Vu la requête, enregistrée le 8 mars 2010, présentée pour M. Waldo Moises A, demeurant ...), par Me Lepretre ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000034/9 en date du 11 janvier 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 5 janvier 2010, par lequel le préfet de Seine et Marne a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination de sa reconduite ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) d'ordonner le réexamen de son dossier dans un délai d'un mois ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son profit d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu la loi nº 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er décembre 2011 par laquelle le président de la Cour a désigné M. Piot, magistrat, pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Après avoir au cours de l'audience publique du 14 décembre 2011, présenté son rapport et entendu :

- les conclusions de M. Rousset, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du même code : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention étudiant (...) ;

Considérant que M. A, de nationalité chilienne, ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire français, ni être en possession d'un titre de séjour en cours de validité ; que s'il se prévaut de la durée de son séjour en France il ne justifie pas, contrairement à ce qu'il soutient, de dix ans de présence en France, dès lors que le premier document qu'il produit à cet égard date de 2001 et qu'il indique lui-même qu'il serait entré en France le 20 septembre 2000 ; qu'ainsi le requérant était dans le cas où, en application des dispositions législatives précitées, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant, en premier lieu, que par un arrêté n° 09/BCIA/25 du 1er septembre 2009 publié à cette même date au recueil des actes administratifs de la préfecture de Seine-et-Marne, le préfet de Seine-et-Marne a modifié l'article 3 de l'arrêté n° 07/ BCIA/ du 23 juillet 2007 donnant délégation à Mme B et a donné délégation pour signer tous actes dans la limite de ses attributions à Mme Martine Maligne, chef du bureau des étrangers, et en cas d'absence ou d'empêchement de celle-ci, à Mme Christiane C ; qu'il n'est pas établi que le chef du bureau des étrangers n'aurait pas été absent ou empêché lors de la signature de l'arrêté litigieux ; que le moyen tiré de ce que Mme Christiane C, signataire de l'arrêté litigieux aurait été incompétente pour signer l'acte attaqué doit, dès lors, être écarté comme manquant en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, que si l'obligation de motiver les mesures portant reconduite à la frontière d'un étranger, implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ; qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de police a suffisamment motivé l'arrêté ordonnant la reconduite à la frontière de M. A en indiquant notamment que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, l'intéressé ne se trouvait pas exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des arrêtés de reconduite à la frontière ; que, par suite, M. A ne peut utilement invoquer une méconnaissance des procédures instituées par l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger, ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles ouvrant droit au regroupement familial, dont les liens personnels ou familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ;

Considérant que M. AX fait valoir qu'il est marié avec une compatriote et qu'il est père de deux enfants dont un est mineur et scolarisé en France depuis 2002 ; que le couple dispose d'un logement ; qu'il est parfaitement intégré dans la société française et qu'il déclare ses revenus ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'épouse du requérant est en situation irrégulière ; qu'il n'est dépourvu de toute attache dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 43 ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté aux droits de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être rejeté ;

Considérant, en cinquième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux qui viennent d'être exposés, l'arrêté attaqué n'est entaché d'aucune erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ;

Considérant que M. A soutient qu'il bénéficie d'une promesse d'embauche pour un poste de boiseur-coffreur au sein d'une entreprise du secteur du bâtiment, qu'un tel emploi n'est pas au nombre des métiers figurant, pour la région Ile-de-France, sur la liste annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 ; que les circonstances qu'il dispose d'une promesse d'embauche, qu'il ait occupé des différents emplois dans le cadre des missions d'intérim depuis 2004 et qu'il y soit très bien intégré, ne suffisent pas à établir que le préfet de Seine-et-Marne, en ne procédant pas à la régularisation à titre exceptionnel de sa situation administrative au regard du droit au séjour en application des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aurait méconnu ces dispositions ;

Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

Considérant que si M. A fait valoir qu'il vit en France depuis plusieurs années avec son épouse et ses deux enfants, dont l'un est mineur et y est scolarisé depuis 2002, cette circonstance ne suffit pas à établir que l'intérêt supérieur des enfants n'ait pas été pris en compte dans la décision attaquée ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention précitée par la mesure ordonnant la reconduite à la frontière de M. A ne peut qu'être écarté ;

Considérant, enfin, que si aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susmentionné : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants , le requérant ne fournit aucune justification probante de l'existence de risques personnels que comporterait pour lui un retour au Chili ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt qui rejette la requête de M. A n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de délivrer à M. A un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 10PA01196 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 10PA01196
Date de la décision : 30/12/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marie PIOT
Rapporteur public ?: M. ROUSSET
Avocat(s) : LEPRETRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-12-30;10pa01196 ?
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