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08/07/2011 | FRANCE | N°11PA00523

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 08 juillet 2011, 11PA00523


Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2011, présentée pour M. Jundeng A, demeurant au ... par Me Dahhan ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100020/9 du 10 janvier 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 janvier 2011 pris à son encontre par le préfet du Val-d'Oise qui a ordonné sa reconduite à la frontière ainsi que l'arrêté décidant de son placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler lesdites décisions pour excès d

e pouvoir ;

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Vu la requête, enregistrée le 31 janvier 2011, présentée pour M. Jundeng A, demeurant au ... par Me Dahhan ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1100020/9 du 10 janvier 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 janvier 2011 pris à son encontre par le préfet du Val-d'Oise qui a ordonné sa reconduite à la frontière ainsi que l'arrêté décidant de son placement en rétention administrative ;

2°) d'annuler lesdites décisions pour excès de pouvoir ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du 1er décembre 2010 par laquelle le président de la Cour a désigné M. Lercher, président assesseur, pour statuer notamment sur les appels dirigés contre les décisions juridictionnelles rendues en application de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2011 :

- le rapport de M. Lercher, magistrat désigné,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public ;

Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 3º Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français exécutoire prise depuis au moins un an ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A, ressortissant chinois né en 1972, a fait l'objet, le 28 août 2009, d'un rejet de sa demande de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois, notifié le 2 septembre 2009 ; que l'obligation de quitter le territoire français étant exécutoire depuis au moins un an, il entrait ainsi dans le champ d'application des dispositions précitées du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté de reconduite à la frontière à la frontière :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 susvisée relatif au départ volontaire : 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les Etats membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les Etats membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. (...) / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les Etats membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours ; qu'aux termes de l'article 8 de la même directive : 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un État membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) ; qu'enfin, aux termes de l'article 12 de la même directive : Les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles. Les informations relatives aux motifs de fait peuvent être limitées lorsque le droit national permet de restreindre le droit à l'information, en particulier pour sauvegarder la sécurité nationale, la défense et la sécurité publique, ou à des fins de prévention et de détection des infractions pénales et d'enquêtes et de poursuites en la matière ;

Considérant que M. A soutient que l'arrêté ordonnant sa reconduite aurait dû prévoir un délai de retour, conformément aux dispositions précitées du paragraphe 1° de l'article 7 de la directive du 16 décembre 2008 ; que contrairement à ce que soutient le juge en première instance, le préfet ne peut se prévaloir des dispositions dérogatoires du 4° l'article 7 de ladite directive puisqu'elles n'ont pas fait l'objet d'une transposition en droit interne ; que, toutefois, les dispositions de l'article 8 de la même directive rappelées ci-dessus prévoient que les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7, une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement pouvant alors être adoptée ; qu'ainsi, l'application de la directive ne fait pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers, sans être assortie d'un nouveau délai, dans le cas prévu au 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à la condition que la décision d'obligation initiale de quitter le territoire ait été prise conformément aux exigences de forme et de fond prévues par les dispositions susvisées des articles 7 et 12 de la directive ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a fait l'objet d'une décision de refus de séjour, assortie d'une obligation de quitter le territoire français le 28 août 2009 ; que cette décision qui comportait un délai de retour d'un mois à compter de sa notification à l'intéressé ainsi que les voies et délais de recours a été régulièrement notifiée le 2 septembre 2009 ; que l'obligation de retour faite à M. A par cette décision n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7 ; qu'ainsi, en application des dispositions précitées de l'article 8 de la directive du 16 décembre 2008, le préfet du Val-d'Oise n'était pas tenu d'accorder un nouveau délai de départ volontaire à M. A ; que par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que M. A se prévaut de sa vie privée et familiale sur le territoire et fait valoir qu'il est entré en France en 2001, qu'il s'y maintient depuis cette date, qu'il vit avec son épouse, Mme B et son enfant né sur le territoire en 2005 et scolarisé à l'école maternelle ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'épouse de M. A séjourne également en situation irrégulière sur le territoire français ; que M. A ne fait état d'aucune circonstance particulière qui empêcherait son retour au pays avec l'ensemble de sa famille ; que dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le requérant n'est dès lors pas fondé à soutenir que cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur les conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté de placement en rétention :

Considérant qu'aux termes de l'article 15 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée : À moins que d'autres mesures suffisantes, mais moins coercitives, puissent être appliquées efficacement dans un cas particulier, les États membres peuvent uniquement placer en rétention le ressortissant d'un pays tiers qui fait l'objet de procédures de retour afin de préparer le retour et/ou de procéder à l'éloignement, en particulier lorsque : a) il existe un risque de fuite, ou b) le ressortissant concerné d'un pays tiers évite ou empêche la préparation du retour ou de la procédure d'éloignement. ; que ces dispositions n'ont ni pour objet ni pour effet de limiter les possibilités de retenir un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement à l'hypothèse d'un risque de fuite ; que si M. A fait valoir que la décision de placement en rétention est insuffisamment motivée dès lors qu'elle ne fait pas mention des motifs pour lesquels il n'a pu bénéficier d'autres mesures moins coercitives , il ressort toutefois des termes mêmes de la décision contestée qu'elle indique que l'intéressé qui n'est pas en mesure de déférer à la décision de reconduite à la frontière en l'absence de moyens de transport immédiats et de document de circulation transfrontière, doit être placé en rétention administrative ; que dès lors le moyen tiré de l'insuffisance de motivation au regard des dispositions précitées doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 10 janvier 2011, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en annulation de l'arrêté contesté du 4 janvier 2011 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

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N° 11PA00523


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 11PA00523
Date de la décision : 08/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Communautés européennes et Union européenne - Portée des règles de droit communautaire et de l'Union européenne - Directives communautaires.

Communautés européennes et Union européenne - Règles applicables.

Étrangers - Reconduite à la frontière - Légalité externe - Procédure.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain LERCHER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : DAHHAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-07-08;11pa00523 ?
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