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01/03/2011 | FRANCE | N°09PA02775

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 01 mars 2011, 09PA02775


Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2009, présentée pour Mme Jeane A, domiciliée ..., par Me Dhalluin ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319727/2 du 19 février 2009 du Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 et des pénalités y afférentes;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en app

lication de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 14 mai 2009, présentée pour Mme Jeane A, domiciliée ..., par Me Dhalluin ; Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0319727/2 du 19 février 2009 du Tribunal administratif de Paris qui a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1995, 1996 et 1997 et des pénalités y afférentes;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 février 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient, en premier lieu, que la procédure d'imposition est régulière car l'avis de vérification de l'Eurl MMD et la notification de redressements du 18 décembre 1998 ont été expédiés à une adresse qui figurait sur des documents de la société elle-même et notamment sur la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée du 31 mars 1998 et d'ailleurs il est constant que la société a reçu ses documents, en deuxième lieu, que l'Eurl MMD n'a pas prouvé, comme cela lui incombe, son option expresse pour l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, en troisième lieu, que la proportion de moitié retenue pour la détermination du préjudice salarial dans l'indemnité reçue de la société de spectacle Camus et Camus est justifiée, en dernier lieu, que dès lors que Mme A n'avait pas déposé ses déclarations de bénéfices non commerciaux dans les délais malgré une mise en demeure, la pénalité de l'article 1728 du code général des impôts est justifiée ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 avril 2010, présenté pour Mme A qui maintient ses conclusions ;

Elle reprend les moyens de sa requête ;

Vu le mémoire de production, enregistré le 12 janvier 2011, par lequel le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'État produit des pièces en réponse à la demande faite par la Cour le 6 janvier 2011 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er février 2011, par lequel le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État maintient ses conclusions ;

Il reprend sa précédente argumentation ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 février 2011, présenté pour Mme A qui maintient ses conclusions ;

Elle reprend les moyens de sa requête :

Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 février 2011 :

- le rapport de M. Pagès, rapporteur,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me Dhalluin, pour Mme A ;

Considérant que Mme A, artiste du spectacle, a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle au titre des années 1995 à 1997, concomitamment à deux vérifications de comptabilité, pour la même période, respectivement de son activité professionnelle et de la société à responsabilité limitée (Sarl) Morning Music Development, société dont elle est l'unique associée ; que l'intéressée s'est vue réclamer, à la suite de ces contrôles, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1995, 1996 et 1997 et les pénalités y afférentes ; que Mme A interjette appel du jugement susvisé par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge desdites impositions ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable en l'espèce : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte. En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil ; qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable en l'espèce : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ;

Considérant que Mme A soutient que la procédure de vérification de comptabilité de la société à responsabilité limitée Morning Music Development, société dont elle est l'unique associée, est irrégulière dès lors que l'administration fiscale a notifié l'avis de vérification du 16 septembre 1998 et la notification de redressements du 18 décembre 1998, relative à l'exercice clos en 1995, à une adresse, ... à Paris -19ème, qui n'est pas celle du siège social mais celle de l'adresse personnelle de la secrétaire de Mme A ; qu'il résulte, toutefois de l'instruction que si la société avait déclaré dans ses statuts lors de sa création un siège social au 7 villa Rimbaud à Paris-19ème, cet immeuble a été cédé le 27 janvier 1997, soit avant le début de la vérification de comptabilité ; que si l'avis de vérification et la notification de redressements susvisés ont été adressés à l'adresse du ..., cette adresse figurait notamment sur la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée souscrite par la société le 31 mars 1998, document joint en annexe au mémoire en défense de l'administration ; qu'en outre par lettre du 26 octobre 1998 la société a accusé réception de l'avis de vérification litigieux ; que, de même, Mme A, unique associée de la Sarl, ne conteste pas avoir reçu la notification de redressements du 18 décembre 1998 en main propre le jour même ; que le moyen tiré de l'envoi de l'avis de vérification du 16 septembre 1998 et de la notification de redressements du 18 décembre 1998 à une adresse erronée doit donc être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les redressements établis dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux :

Considérant que le moyen tiré de ce que la société à responsabilité limitée Morning Music Development aurait opté pour l'impôt sur les sociétés doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, Mme A, qui admet expressément qu'elle ne peut justifier avoir exercé l'option, n'apportant pas d'éléments nouveaux qui n'aient été débattus devant le tribunal administratif ;

En ce qui concerne les redressements établis dans la catégorie des traitements et salaires :

Considérant que l'administration a réintégré au revenu imposable de Mme A, dans la catégorie des traitements et salaires, la moitié de l'indemnité de 573 878,22 francs (87 487,17 euros) qui lui avait été accordée par le juge judiciaire en réparation de la rupture d'une promesse d'engagement que lui avait consentie la société des spectacles Camus et Camus ; que Mme A soutient que son préjudice économique, seul imposable, doit être évalué à la somme de 50 000 francs (7 622,45 euros) ; que, toutefois, contrairement à ce qu'elle soutient, la Cour d'appel de Paris dans son arrêt du 29 septembre 1994 n'a pas fixé le préjudice économique à 50 000 francs (7 622,45 euros) mais a confirmé le jugement du conseil de prud'hommes qui avait condamné la société de spectacles Camus et Camus à verser à l'intéressée une indemnité globale de 500 000 francs (76 224,50 euros) tous chefs de préjudice confondus ; que si dans les motifs de son arrêt, la cour d'appel a évalué sa rémunération à 5 000 francs (762,25 euros) par représentation, cette appréciation n'implique pas que le montant du préjudice économique soit justement apprécié comme le fait Mme A par la multiplication du montant moyen du cachet de celle-ci par le nombre de représentations effectivement tenues dans le cadre du spectacle monté sans la participation de la requérante dès lors qu'elle n'établit pas que ce nombre s'est limité à dix et que la cour d'appel a fondé sa décision sur l'importance du préjudice économique subi par l'artiste ; qu'au surplus, dans sa requête devant ladite cour d'appel, Mme A a elle-même évalué son préjudice matériel au deux tiers du préjudice global ; que dans ces conditions, en se fondant sur la répartition entre le préjudice économique et le préjudice moral exposée par Mme A dans ses conclusions devant le Conseil de prud'hommes de Paris, plus favorable à l'intéressée, l'administration, doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant justement apprécié la part de l'indemnité réparant une perte de revenus ;

Sur les pénalités :

Considérant que, d'une part, aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction applicable en l'espèce : 1. Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 p. 100. (...) 3. La majoration visée au 1 est portée à : 40 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai (...) ; que, d'autre part, aux termes de l'article 7 du décret du 16 février 2010 portant application de la loi organique n° 2009-523 du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution : Le présent décret entre en vigueur le 1er mars 2010. Dans les instances en cours, une question prioritaire de constitutionnalité doit, pour être recevable, être présentée sous la forme d'un mémoire distinct et motivé produit postérieurement à cette date (...) ;

Considérant que la pénalité de 40 % qui a été appliquée à Mme A résulte de la requalification par l'administration des sommes, que l'intéressée avait préalablement déclarées dans la catégorie des traitements et salaires, en bénéfices non commerciaux par application des dispositions combinées des articles L. 761-1 et L. 762-2 du code du travail alors applicable et non, comme le soutient la requérante, en conséquence de la remise en cause de l'option prétendument exercée par la société Morning Music pour le régime d'imposition à l'impôt sur les sociétés ; que le bien-fondé de cette requalification n'est ainsi pas sérieusement contesté ; qu'il est constant que Mme A n'a pas souscrit ses déclarations de bénéfices non commerciaux dans les délais légaux malgré l'envoi d'une mise en demeure ; que, dès lors, elle ne saurait utilement contester les pénalités mises à sa charge en conséquence, sur le fondement des dispositions de l'article 1728 du code général des impôts, et dont ont été assortis les seuls droits rappelés au titre des bénéfices non commerciaux, en invoquant la circonstance que les sommes litigieuses avaient été déclarées dans une autre catégorie d'imposition ; que, par ailleurs, si Mme A invoque l'inconstitutionnalité de l'article 1728 précité du code général des impôts au motif de sa contrariété à l'article 15 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen auquel renvoie le préambule de la Constitution du 4 octobre 1958, Mme A ne justifie pas, en tout état de cause, avoir présenté une question prioritaire de constitutionnalité dans les formes requises par l'article 7 précité du décret du 16 février 2010 ; que, par suite, faute d'avoir été présenté selon ces modalités, après le 1er mars 2010, le moyen tiré de la méconnaissance, par les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts, de l'article 15 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle renvoie le préambule de la Constitution, est irrecevable ; que, dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à demander la décharge des pénalités litigieuses ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse une somme à la Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

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N° 09PA02775


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 09PA02775
Date de la décision : 01/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : DHALLUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2011-03-01;09pa02775 ?
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