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12/10/2010 | FRANCE | N°08PA06099

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 12 octobre 2010, 08PA06099


Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2008 présentée pour la société GM GROUPE PARIS, dont le siège est 56/57 rue du Moulin Vert à Villeneuve-la-Garenne (92390), par Me Alexandre ; la société GM GROUPE PARIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0315728 du 8 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2000 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer

la décharge de l'imposition litigieuse ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somm...

Vu la requête, enregistrée le 11 décembre 2008 présentée pour la société GM GROUPE PARIS, dont le siège est 56/57 rue du Moulin Vert à Villeneuve-la-Garenne (92390), par Me Alexandre ; la société GM GROUPE PARIS demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0315728 du 8 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2000 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge de l'imposition litigieuse ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'État qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la procédure d'imposition est régulière car la société ne justifie pas avoir demandé la saisine de l'interlocuteur départemental avant la mise en recouvrement des impositions, que, s'agissant des rappels de TVA sur les achats effectués en franchise de taxe, elle n'a produit aucun élément justifiant de la sortie du territoire français des achats litigieux, qu'il n'y a pas prise de position formelle sur une situation de fait au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, que l'instruction invoquée publiée le 6 août 2004 n'était pas applicable rationae temporis, que, s'agissant des rappels de TVA déduites sur les factures fournisseurs, elle a bien apporté assez d'éléments permettant de conclure au caractère fictif ou de complaisance des factures en litige et la société n'apporte pas la preuve que ces factures correspondent à des marchandises réellement fournies, que les pénalités sont justifiées pour les motifs retenus par le tribunal ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 24 septembre 2009, présenté pour la société GM GROUPE PARIS qui maintient ses conclusions par les mêmes moyens que précédemment ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2010 :

- le rapport de M. Pagès, rapporteur,

- et les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

Considérant que la société GM GROUPE PARIS, qui a pour activité principale la fabrication et la vente de parfums et de produits pour la toilette et qui exerce également à titre secondaire un négoce de produits divers, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000, à l'issue de laquelle elle s'est vue notifier des rappels en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Paris du 8 octobre 2008 qui a rejeté sa requête tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1998 au 31 décembre 2000 et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que la société requérante se prévaut de l'article 5 du chapitre III de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, opposable à l'administration en vertu de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, en soutenant qu'elle aurait sollicité en vain un entretien avec l'interlocuteur départemental par courrier du 28 décembre 2002 ; que, toutefois, elle ne produit aucun élément de nature à démontrer l'existence de ce courrier, au demeurant postérieur à la date de mise en recouvrement des impositions le 20 décembre 2002 ; que ce moyen ne peut donc qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des achats effectués en franchise de taxe :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article 275 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'espèce : Les assujettis sont autorisés à recevoir ou à importer en franchise de la taxe sur la valeur ajoutée les biens qu'ils destinent à une livraison à l'exportation (...) ainsi que les services portant sur ces biens, dans la limite du montant des livraisons de cette nature qui ont été réalisées au cours de l'année précédente et qui portent sur des biens passibles de cette taxe. Pour bénéficier des dispositions qui précèdent, les intéressés doivent, selon le cas, adresser à leurs fournisseurs, remettre au service des douanes ou conserver une attestation, visée par le service des impôts dont ils relèvent, certifiant que les biens sont destinés à faire l'objet, en l'état ou après transformation, d'une livraison mentionnée au premier alinéa ou que les prestations de services sont afférentes à ces biens. Cette attestation doit comporter l'engagement d'acquitter la taxe sur la valeur ajoutée au cas où les biens et les services ne recevraient pas la destination qui a motivé la franchise (...) ; que l'article 284 du même code dispose : I. Toute personne qui a été autorisée à recevoir des biens ou services en franchise (...) est tenue au payement de l'impôt ou du complément d'impôt, lorsque les conditions auxquelles est subordonné l'octroi de cette franchise (...) ne sont pas remplies (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que c'est à l'exportateur de justifier que les conditions de fond auxquelles est subordonnée l'admission en franchise de taxe ont été remplies et, à défaut, de payer la taxe non acquittée ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société GM GROUPE PARIS, qui a acquis au cours des années litigieuses des biens destinés à l'exportation en franchise de TVA, n'a pas donné à l'ensemble de ces biens la destination ayant motivé la franchise, mais les a, pour partie, revendus sur le territoire français pour les sommes de 1 022 758 F (155 918,45 euros), 612 377 F (93 356,26 euros) et 1 245 795 F (189 827,67 euros) au titre respectivement des exercices clos en 1998, 1999 et 2000 ; qu'en méconnaissance de l'engagement figurant sur l'attestation adressée à ses fournisseurs, elle a omis d'acquitter la TVA dont elle était redevable en application des dispositions combinées des articles 275-1 et 284 du code général des impôts, dans les cas où les biens ou les services ne recevaient pas la destination qui avait motivé la franchise ; que, dans ces conditions, et alors que la société requérante ne justifie pas davantage devant la Cour que devant le juge de première instance de la sortie du territoire français des achats litigieux, l'administration était fondée à procéder au rappel de taxe y afférent sur le fondement des dispositions du I de l'article 275 du code général des impôts précité ;

Considérant, en deuxième lieu, que si la requérante se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction BODGI 3 D-5-04, cette instruction publiée le 6 août 2004 était, en tout état de cause, inapplicable à la date de la mise en recouvrement des impositions litigieuses le 20 décembre 2002 ;

Considérant, en dernier lieu, que dès lors qu'il résulte de ce qui précède que la société GM GROUPE PARIS n'a pas respecté les conditions de fond auxquelles est subordonnée l'admission en franchise de taxe, elle ne saurait en tout état de cause se prévaloir de ce que l'autorisation, accordée au vu du relevé des achats de l'année écoulée, puisse constituer une prise de position formelle de l'administration sur une situation de fait au regard d'un texte fiscal au sens des dispositions de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne les rappels de taxe déduite sur les factures fournisseurs :

Considérant qu'en vertu des dispositions combinées des articles 272-2 et 283-4 du code général des impôts et de l'article 223-1 de l'annexe II à ce code, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la TVA dont il est redevable, à raison de ses propres opérations, la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui ne lui a fourni aucune marchandise ou prestation de services ou qui n'était pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée ; que, dans le cas où l'auteur de la facture était régulièrement inscrit au registre du commerce et des sociétés et se présentait à ses clients comme assujetti à la TVA, sans qu'il soit manifeste qu'il n'aurait pas rempli les obligations l'autorisant à faire figurer cette taxe sur ses factures, il appartient à l'administration, si elle entend refuser à celui qui a reçu la facture le droit de déduire la taxe qui y était mentionnée, d'établir qu'il s'agissait d'une facture fictive ou d'une facture de complaisance ; que, dans ce cas, il revient au redevable de justifier que la facture qu'il a reçue correspond néanmoins à une marchandise réellement fournie ou à une prestation réellement exécutée ;

Considérant que pour refuser la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur les factures émises en 1998 respectivement par la société Afrique Asie Trading pour un montant de 1 510 201,44 F (230 228,73 euros), par la société Aver Distribution Service pour un montant de 1 602 947,66 F (244 367,80 euros), par la société Data Computer pour un montant de 1 601 536,65 F (244 152,69 euros) et par la société Orient Express Trading pour un montant de 1 457 757,32 F (222 233,67 euros), l'administration a notamment relevé que la société requérante, qui n'a pas produit les documents pouvant justifier que les marchandises achetées à ces sociétés lui avaient été livrées, n'a jamais effectué le règlement desdites factures et que malgré l'importance des sommes, aucune correspondance émanant de ces prétendus fournisseurs et réclamant leur paiement n'a été adressée à cette dernière ; que le service fait en outre valoir que les fournisseurs en cause ne possédaient pas de moyens réels d'exploitation ni des moyens financiers, humains et matériels pour acquérir elles-mêmes les marchandises par la suite refacturées à la société requérante ; qu'enfin, l'administration relève qu'au cours d'une perquisition effectuée par le service le 5 juillet 2001 au siège de la société GM GROUPE PARIS, il a été procédé à la saisie de disquettes contenant des fichiers de facturation à en tête des fournisseurs en cause ;

Considérant qu'en présence des indices précis ainsi apportés par l'administration du caractère fictif ou de complaisance des factures en litige, la société GM GROUPE PARIS, qui n'a produit devant le service aucun bon de commande ou de livraison de nature à justifier de la réalité des opérations ou de l'identité des fournisseurs se borne, pour contester les faits rapportés par l'administration, à de simples allégations, sans produire aucune pièce probante de nature à étayer ses dires ; que, ce faisant, elle ne justifie pas que les factures émises par les sociétés susmentionnées auraient correspondu à des prestations qui lui auraient effectivement été rendues par ces sociétés ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration n'a pas admis la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée portée sur ces factures de la taxe dont elle-même était redevable à raison de ses propres opérations ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l'intéressé est établie (...) ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, l'administration a établi, d'une part, que la quasi-totalité des achats réalisés en franchise de taxe a été revendue en France et, d'autre part, que la société requérante a déduit des achats fictifs de la taxe sur la valeur ajoutée dont elle était redevable ; qu'en raison du montant des achats en cause et de leur caractère répété l'administration doit être regardée comme établissant la volonté de la société GM GROUPE PARIS d'éluder l'impôt ; que par suite, c'est à bon droit que le service a appliqué aux impositions litigieuses les pénalités prévues par les dispositions précitées de l'article 1729 du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société GM GROUPE PARIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à la société GM GROUPE PARIS une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société GM GROUPE PARIS est rejetée.

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N° 08PA06099


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 08PA06099
Date de la décision : 12/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LOOTEN
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : ALEXANDRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2010-10-12;08pa06099 ?
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