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02/06/2008 | FRANCE | N°07PA01829

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Juge des reconduites à la frontière, 02 juin 2008, 07PA01829


Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2007 par télécopie et le 29 mai 2007 en original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-2838/9 du 16 avril 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 11 avril 2007 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Rasime ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu...

Vu la requête, enregistrée le 25 mai 2007 par télécopie et le 29 mai 2007 en original, présentée par le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS ; le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 07-2838/9 du 16 avril 2007 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 11 avril 2007 décidant la reconduite à la frontière de Mlle Rasime ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mlle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2008 :

- le rapport de M. Pailleret, magistrat désigné,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle , de nationalité turque, ne peut justifier d'une entrée régulière sur le territoire ni d'un titre de séjour l'autorisant à séjourner sur le territoire ; que, par suite, l'intéressée se trouvait dans le cas où le préfet peut décider la reconduite à la frontière d'un étranger sur le fondement des dispositions précitées ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente » ; qu'aux termes de l'article L. 742-6 du même code : « L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L. 741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mlle , entrée le 9 avril 2007 dans l'espace Schengen par la Grèce, selon ses déclarations, a été interpellée le 10 avril 2007 à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle à l'arrivée d'un vol en provenance de Grèce en possession d'un passeport turc falsifié au nom de Mlle Kara Eda et revêtu d'un titre de séjour allemand signalé volé ; que lors de son audition par les forces de police le 10 avril 2007 et le 11 avril 2007, l'intéressée s'est bornée à indiquer que son fiancé réside sur le territoire national et être venue en France pour se marier, sans manifester son intention de demander l'asile politique en France ; qu'au surplus, Mlle qui, dès son placement en rétention administrative, le 11 avril 2007, a été informée de ses droits et en particulier de la possibilité de présenter une demande d'asile, n'a jamais usé de cette possibilité durant les 48 heures qu'a duré sa rétention administrative ; qu'il est constant que l'intéressée n'a manifesté pour la première fois sa volonté de solliciter l'asile qu'à l'occasion du recours contentieux introduit le 12 avril 2007 auprès du tribunal administratif dirigé contre la mesure de reconduite à la frontière qui, contrairement aux mentions du jugement attaqué, n'a pas été prise à l'encontre de l'intéressée « immédiatement après son interpellation, » mais plus de 24 heures après celle-ci ; qu'en outre depuis sa libération par ordonnance du juge des libertés et de la détention du 13 avril 2007, il est constant qu'elle ne s'est jamais manifestée en préfecture afin de solliciter l'asile ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, la demande d'asile politique formée par Mlle doit être regardée comme ayant un caractère dilatoire au sens des dispositions précitées ; que, par suite, le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort, que pour annuler son arrêté en date du 11 avril 2007, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a jugé « qu'en décidant de la reconduite à la frontière immédiatement après son interpellation », il « a méconnu son droit à déposer une demande d'asile » ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle devant le Tribunal administratif de Melun ;

Sur la légalité de l'arrêté de reconduite :

En ce qui concerne la légalité externe :

Considérant que l'arrêté de reconduite à la frontière pris à l'encontre de Mlle a été précédé d'un examen de la situation personnelle de l'intéressée et comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'il est, par suite, suffisamment motivé ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué a été signé par Mme Magne, directrice des étrangers à la préfecture de la Seine-Saint-Denis, qui avait reçu délégation de signature à cet effet par arrêté du 31 janvier 2007 publié au bulletin d'informations administratives du même jour ; que le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit dès lors être écarté comme manquant en fait ;

En ce qui concerne la légalité interne :

Considérant que le moyen tiré de ce que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences pour Mlle de son arrêté de reconduite à la frontière n'est assorti d'aucune précision ;

Considérant que si Mlle , qui est célibataire et sans charge de famille, fait valoir, sans toutefois en justifier, qu'elle est venue rejoindre son fiancé en France, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays où elle a vécu jusqu'à l'âge de 19 et où résident ses parents ; que dans ces conditions, alors qu'elle n'a jamais séjourné en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté attaqué n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cet arrêté a été pris ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'il méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut être accueilli ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) « Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 » ;

Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'égard d'une décision portant reconduite à la frontière, dès lors qu'une telle décision ne fixe en elle-même aucun pays de destination ; que, par suite, le moyen doit être écarté en tant qu'il est dirigé contre l'article 1er de l'arrêté contesté ; qu'au demeurant l'intéressée n'assortit ses allégations d'aucune justification propre à établir la réalité des risques personnels que comporterait pour elle son retour dans son pays d'origine ;

En ce qui concerne la décision de placement en rétention administrative de Mlle :

Considérant que, contrairement à ce que soutient Mlle la décision de placement en rétention administrative qui vise notamment les articles L. 551-1° et L. 551-2° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et précise que l'intéressée « n'est pas en mesure de quitter immédiatement le territoire français eu égard à l'absence de moyen de transport disponible » comporte les considérations de droit et de fait sur lesquels elle se fonde ; que dès lors le moyen tiré de son insuffisante motivation ne saurait être accueilli ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DE LA SEINE-SAINT-DENIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 11 avril 2007 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement en date du 16 avril 2007 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Melun est annulé.
Article 2 : La demande présentée par devant le Tribunal administratif de Melun est rejetée.

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N° 07PA01829


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Juge des reconduites à la frontière
Numéro d'arrêt : 07PA01829
Date de la décision : 02/06/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2008-06-02;07pa01829 ?
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