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16/11/2006 | FRANCE | N°04PA03999

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation a, 16 novembre 2006, 04PA03999


Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2004, présentée pour la société AUTONABIL, dont le siège est ..., par Me X... ; la société AUTONABIL demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9806413/2 du 4 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de con

damner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de ...

Vu la requête, enregistrée le 22 décembre 2004, présentée pour la société AUTONABIL, dont le siège est ..., par Me X... ; la société AUTONABIL demande à la cour :

1°) de réformer le jugement n° 9806413/2 du 4 novembre 2004 par lequel le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 1991 au 31 décembre 1993 et des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………...

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses protocoles additionnels ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 octobre 2006 :

- le rapport de M. Vincelet, rapporteur,

- les observations de Me Y..., pour la société AUTONABIL,

- et les conclusions de M. Jardin, commissaire du gouvernement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par décision du 8 juillet 2005 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur des services fiscaux de Paris-Est a, en application de l'article 1740 octies du code général des impôts, prononcé en faveur de la requérante, placée en règlement judiciaire le 28 décembre 2004, un dégrèvement de 1 652 644 euros qui s'est imputé sur les intérêts de retard qui assortissaient le principal des droits rappelés ; que la requête est, par suite, devenue sans objet à concurrence du montant de ce dégrèvement ;

Sur le bien fondé des impositions demeurant en litige :

S'agissant du principal des droits :

Au regard de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 275 du code général des impôts, pris pour l'application de l'article 16 de la sixième directive du Conseil des communautés européennes, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « Les assujettis sont autorisés à recevoir ou à importer en franchise de taxe sur la valeur ajoutée les biens qu'ils destinent à l'exportation, (…) dans la limite du montant des livraisons à l'exportation d'objets passibles de cette taxe, réalisées au cours de l'année précédente. Pour bénéficier de ces dispositions, les intéressés doivent, selon le cas, adresser à leurs fournisseurs ou remettre au service des douanes une attestation, visée par le service des impôts dont ils relèvent, certifiant que les biens sont destinés à être exportés en l'état ou après transformation (…) Cette attestation doit comporter l'engagement d'acquitter la taxe (…) au cas où les biens (…) ne recevraient pas la destination ayant motivé la franchise, sans préjudice des pénalités prévues aux articles 1725 à 1740 » et que ce même article, dans sa rédaction applicable à la période correspondant à l'année 1993, dispose : « Les assujettis sont autorisés à recevoir ou à importer en franchise de taxe sur la valeur ajoutée les biens qu'ils destinent à une livraison à l'exportation, à une livraison exonérée en vertu du I de l'article 262 ter ou (…) quater ou à une livraison dont le lieu est situé sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté (…), dans la limite du montant des livraisons de cette nature qui ont été réalisées au cours de l'année précédente et qui portent sur des biens passibles de cette taxe. Pour bénéficier des dispositions qui précédent, les intéressés doivent, selon le cas, adresser à leurs fournisseurs, remettre au service des douanes ou conserver une attestation, visée par le service des impôts dont ils relèvent, certifiant que les biens sont destinés à faire l'objet, (…) d'une livraison mentionnée au premier alinéa. Cette attestation doit comporter l'engagement d'acquitter la taxe sur la valeur ajoutée au cas où les biens et les services ne recevraient pas la destination qui a motivé la franchise, sans préjudice des pénalités prévues aux articles 1725 à 1740 » ; qu'enfin, aux termes de l'article 284 du même code : « Toute personne qui a été autorisée à recevoir des biens … en franchise … est tenue au paiement de l'impôt ou du complément d'impôt, lorsque les conditions auxquelles est subordonné l'octroi de cette franchise ne sont pas remplies » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que seuls peuvent bénéficier du régime de l'acquisition en franchise de taxe de biens destinés à l'exportation, institué par l'article 275 susvisé du code, les exportateurs directs de ces biens ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société AUTONABIL a, au cours des années 1991 à 1993, acquis auprès de la société Sodexa, en franchise de taxe sur la valeur ajoutée, des véhicules de marque Peugeot qu'elle revendait à des sociétés exportatrices ayant leur siège en France ; qu'ainsi elle ne réalisait pas elle-même directement les opérations d'exportation et ne pouvait, dès lors, légalement acquérir ces véhicules pour leurs montants hors taxes ; que les circonstances selon lesquelles, d'une part, lesdits véhicules ont été finalement exportés et n'étaient au demeurant pas conçus pour le marché européen, d'autre part, la contribuable bénéficiait d'une dispense de visa des attestations d'achat en franchise de taxe, sont, en l'espèce, inopérantes ; que c'est par suite à bon droit que le vérificateur, qui n'a pas donné du texte fiscal une interprétation restrictive, a assujetti la contribuable à des rappels de taxe correspondant au montant des droits éludés ; qu'enfin le moyen tiré de ce que le redressement litigieux procéderait d'une définition de l'exportateur contraire à celle du droit communautaire manque en fait ;

Au regard de la doctrine administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : « Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été à l'époque, formellement admise par l'administration » ; que l'article L. 80 B dispose en outre que : « La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable :1° lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal… » ;

Considérant que la société AUTONABIL entend opposer au service, sur le fondement de ces dispositions, la position formellement prise, selon elle, par l'interlocuteur départemental dans le cadre d'un précédent contrôle et exprimée dans une correspondance de ce dernier en date du 3 juillet 1991, par laquelle, après lui avoir rappelé que le régime des achats en franchise de taxe ne pouvait bénéficier qu'à l'exportateur réel, cette autorité envisageait toutefois l'abandon des redressements initialement notifiés pour des considérations d'équité tout en l'invitant à respecter à l'avenir ses obligations fiscales sur ce point ; que la société fait valoir que les termes de cette lettre impliquaient nécessairement que, pour les acquisitions antérieures à sa réception, elle était autorisée à acquitter un prix hors taxe, ainsi que le lui aurait rappelé son correspondant en lui donnant son accord oral à cette pratique le 3 avril 1990 ;

Considérant, toutefois, que la correspondance précitée, intervenue dans le cadre d'un litige afférent à des années d'imposition différentes, ne fait que rappeler à sa destinataire la nécessité pour elle de se conformer à l'avenir au droit en vigueur et n'implique aucune acceptation, même tacite, par le service, qui a dégrevé les redressements initiaux pour des motifs étrangers à la loi fiscale, de ses errements passés ; qu'ainsi cette lettre ne contient en elle-même aucune prise de position du service qui lui serait opposable ; que la société ne peut en outre revendiquer le bénéfice d'un accord oral dont elle n'apporte aucun commencement de preuve ;

S'agissant des intérêts de retard :

Considérant qu'au soutien de ses conclusions en décharge du reliquat d'intérêts de retard maintenu à sa charge, la société fait valoir, d'une part, que ceux-ci ont été calculés sur une base excédant les seuls droits éludés, d'autre part, que le principal des droits ayant été acquitté par compensation avec les crédits de taxe dont elle disposait, le Trésor n'a subi aucun préjudice susceptible d'être compensé par la mise à sa charge d'intérêts, laquelle constitue une atteinte à ses biens au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les intérêts en litige ont été assis sur le seul montant des droits effectivement éludés, c'est à dire après prise en compte des crédits de taxe dont disposait la contribuable lors du redressement ; que ledit redressement a eu pour objet de mettre à la charge de la contribuable le montant de la taxe qu'elle aurait du verser à la société Sodexa, redevable légale de la taxe ; que, du fait de cette absence de versement, la taxe litigieuse n'est pas devenue exigible chez la redevable et, contrairement à ce qu'elle soutient, la société AUTONABIL n'a acquis du redressement aucun droit supplémentaire et simultané à déduction susceptible d'être imputé sur le rappel litigieux ; qu'elle ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir, pour augmenter le montant de sa taxe déductible, de la similarité entre les effets du redressement subi et ceux résultant d'une facturation conforme à la loi ; que, par suite, le Trésor a subi un préjudice égal à l'insuffisance de taxe collectée par le redevable que les intérêts de retard ont eu pour objet de réparer ; qu'il suit de là que l'atteinte aux biens au sens des stipulations conventionnelles susrappelées n'est pas établie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société AUTONABIL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris n'a pas intégralement fait droit à sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête de la société AUTONABIL à concurrence du montant du dégrèvement prononcé en cours d'instance par l'administration.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société AUTONABIL est rejeté.

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N° 05PA00938

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N° 04PA03999


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 04PA03999
Date de la décision : 16/11/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme LACKMANN
Rapporteur ?: M. Alain VINCELET
Rapporteur public ?: M. JARDIN
Avocat(s) : CABINET BERNARD LAGARDE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-11-16;04pa03999 ?
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