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02/10/2006 | FRANCE | N°03PA03817

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 02 octobre 2006, 03PA03817


Vu la requête, enregistrée le 23 septembre 2003, présentée pour la SARL SETIC, dont le siège est 130 rue d'Antibes à Cannes (06000), par Me Saillard ; la SARL SETIC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9605285 en date du 26 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990, ainsi que du supplément d'impôt sur les sociétés sur les distributions auquel elle

a été assujettie au titre de ladite année ;

2°) de prononcer la décharge solli...

Vu la requête, enregistrée le 23 septembre 2003, présentée pour la SARL SETIC, dont le siège est 130 rue d'Antibes à Cannes (06000), par Me Saillard ; la SARL SETIC demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9605285 en date du 26 juin 2003 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990, ainsi que du supplément d'impôt sur les sociétés sur les distributions auquel elle a été assujettie au titre de ladite année ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat au remboursement des droits de timbre et des frais exposés ;

…………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 septembre 2006 :

- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,

- les observations de Me Saillard pour la SARL SETIC,

- les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement,

- et connaissance prise de la note en délibéré présentée le 22 septembre 2006 par Me Saillard pour la SARL SETIC ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort de l'examen du jugement attaqué que celui-ci n'a pas expressément répondu au moyen tiré par la SARL SETIC de ce que la réintégration dans les résultats de son exercice clos en 1990 de l'annuité d'amortissement pour un montant de 225 215 F n'était pas justifiée ; que, dès lors, la société est fondée à demander l'annulation de ce jugement en tant qu'il a omis de statuer sur ce chef de redressement ;

Considérant que, sur ce point, il y a lieu de se prononcer par voie d'évocation et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des conclusions de la requête de la SARL SETIC ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales : « Lorsque la vérification de la comptabilité, pour une période déterminée, au regard d'un impôt ou taxe ou d'un groupe d'impôts ou taxes est achevée, l'administration ne peut procéder à une nouvelle vérification de ces écritures au regard des mêmes impôts ou taxes et pour la même période… » ;

Considérant que si la SARL SETIC, qui exerce une activité de marchand de biens, soutient que l'administration n'a pas respecté les dispositions de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales dans la mesure où l'administration, après avoir engagé une première vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 1989 au 31 décembre 1990, qui s'est déroulée du 1er octobre 1991 au 22 juillet 1992, aurait effectué, le 26 mai 1992, deux autres vérifications de comptabilité au titre de la même période, il résulte de l'instruction que ces deux vérifications ont été effectuées alors que la première était en cours et ont concerné non la SARL SETIC en propre mais l'indivision ou la société de fait constituée entre la SARL SETIC et la société SIVMI dans le cadre de la réalisation de deux programmes d'acquisition immobilière ; que, par suite, les redressements notifiés à la SARL SETIC le 7 octobre 1992 ne procédaient pas d'une vérification irrégulière au regard des dispositions de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, que dans la notification de redressements du 7 octobre 1992, qui est suffisamment motivée, le vérificateur a mentionné que « la comptabilisation à l'actif du bilan de la somme de 4 415 457 F constitue un actif fictif qui doit être diminué d'autant. La SARL SETIC devra maintenir à l'actif de son bilan, à hauteur de sa participation dans la SCI, 10 % des sommes avancées qui seront portées au compte courant d'associés dans la SCI. Ces 10 % correspondront aux travaux d'aménagement effectués au 6ème étage de l'immeuble… Cette rectification comptable est sans incidence sur le résultat de la SARL SETIC pour les exercices vérifiés, à l'exception des amortissements pratiqués sur cet actif qui font l'objet d'un rejet de charge pour des motifs identiques » ; qu'en constatant que la SARL SETIC, qui a pris en location auprès de la SCI « Rond Point Duboys d'Angers » des locaux sis 130 rue d'Antibes à Cannes, ne détenait que 10 % des droits de celle-ci et que les travaux effectués dans lesdits locaux ne pouvaient être inscrits à l'actif du bilan de la SARL SETIC qu'à hauteur de cette participation, l'administration qui n'a écarté aucun acte juridique, ne s'est pas placée, même implicitement, sur le terrain de l'abus de droit et n'a dès lors pas privé la société requérante des garanties qui s'attachent à la procédure de répression des abus de droit prévue par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les provisions pour risques :

Considérant qu'aux termes de l'article 39-1 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : « Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant… notamment… 5°) Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables… » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision, et déduire des bénéfices imposables d'un exercice, des sommes correspondant à des pertes ou charges qu'elle ne supportera qu'ultérieurement, à la condition que ces pertes ou charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptibles d'être évaluées avec une approximation suffisante, qu'elles apparaissent en outre comme probables eu égard aux circonstances de fait constatées à la date de la clôture de l'exercice et qu'enfin elles se rattachent aux opérations de toute nature déjà effectuées à cette date par l'entreprise ;

Considérant que la SARL SETIC a constitué une indivision avec la société SIVMI pour acquérir deux immeubles sis respectivement 12 rue Oudinot et 72 rue Saint Dominique à Paris 7ème ; que des promesses de vente assorties d'une caution à première demande ont été consenties à l'indivision les 9 avril et 15 octobre 1990 ; que les prix d'acquisition de ces immeubles étaient fixés à 125 000 000 F et 61 500 000 F et les cautions bloquées à la banque du Crédit de l'Arche à 12 500 000 F et 6 150 000 F ; que les options d'achat n'ayant pas été levées, les vendeurs ont saisi l'établissement bancaire afin d'obtenir le paiement des cautions à première demande ; que la SARL SETIC a constitué à la clôture de l'exercice 1990 une provision de 13 500 000 F composée de la caution et de frais annexes estimés à 1 000 000 F au titre la première opération et une provision de 6 150 000 F au titre de la seconde opération, correspondant à la totalité des cautions versées à l'établissement bancaire en estimant que la société SIVMI serait insolvable ; que le service a considéré qu'à défaut de justificatifs relatifs à l'insolvabilité de la société SIVMI, la SARL SETIC devait supporter uniquement la part du risque correspondant à son taux de participation dans l'indivision, et a réintégré à hauteur de 50 % de leur montant lesdites provisions ;

Considérant que si la société requérante soutient que le défaut de solvabilité de la société SIVMI était réel dès le 31 décembre 1990, elle ne justifie pas ses allégations contestées par l'administration qui fait valoir que la société SIVMI disposait au 31 décembre 1990 de réserves financières importantes et facilement mobilisables, à savoir 4 000 000 F de valeurs mobilières de placement, 2 952 100 F de disponibilités ainsi que des créances et marchandises pour 1 924 483 F ; que la mise en liquidation judiciaire de la société SIVMI prononcée le 31 mars 1994 ne permet pas de considérer que la société était insolvable à la clôture de l'exercice 1990 ; que, par suite, et à défaut de circonstances précises et d'évènements survenus au cours dudit exercice de nature à établir l'insolvabilité de la société SIVMI et le risque pour la société requérante de devoir supporter l'intégralité des sommes correspondant aux cautions susmentionnées du fait d'une défaillance probable ou avérée de la société SIVMI, c'est à bon droit que le service a procédé au redressement litigieux ;

En ce qui concerne la réintégration de l'annuité d'amortissement afférente aux travaux réalisés dans l'appartement sis au 6ème étage de l'immeuble situé au 130 rue d'Antibes à Cannes :

Considérant qu'au cours de l'exercice 1990, la SARL SETIC a loué deux appartements d'une superficie de 252 m2 et de 249 m2 sis aux 5ème et 6ème étages d'un immeuble appartenant à la SCI « Rond Point Duboys d'Angers » situé au 130 rue d'Antibes à Cannes, dont elle détient 10 % des parts et dont son gérant et associé, M. X et son épouse également associée, détenaient 90 % des parts ; que les locaux à usage respectivement de bureau et d'appartement de fonction ont été loués « brut de décoffrage » ; que la SARL SETIC a réalisé en 1990 des travaux d'un montant de 939 542 F dans l'appartement du 5ème étage et de 4 415 457 F dans l'appartement du 6ème étage ; que le service a admis le caractère professionnel des locaux sis au 5ème étage et accepté les charges de loyers et d'amortissement des travaux s'y rapportant ; qu'il a en revanche refusé la déduction de l'annuité d'amortissement relatif aux travaux supportés par la société requérante pour l'aménagement des locaux sis au 6ème étage ; qu'il a en effet estimé que la société n'avait apporté aucun élément de nature à justifier l'utilisation à titre professionnel de ces locaux et que l'appartement était en fait mis à la disposition des époux X ; qu'il a, en conséquence, réintégré l'annuité d'amortissement afférente auxdits travaux pour un montant de 225 215 F ;

Considérant que si l'administration a admis « dans un souci de conciliation » la déduction des loyers relatifs aux locaux sis au 6ème étage de l'immeuble dont s'agit, elle n'a pas admis pour autant leur utilisation pour les besoins de l'exploitation ; qu'elle a constaté au contraire que la SARL SETIC disposait de deux salariés domiciliés à Cannes, qui, s'ils exerçaient leur activité dans les locaux à usage de bureau sis au 5ème étage de l'immeuble, n'avaient nul besoin d'occuper l'appartement de fonction sis au 6ème étage ; qu'elle soutient, en outre, que la société requérante n'a pas été en mesure de justifier que le personnel affecté en Ile-de-France aurait effectué des déplacements réguliers ou même occasionnels à Cannes pour le compte de la société qui auraient pu justifier qu'ils y soient hébergés ; que, par ailleurs, l'administration fait valoir que le coût de ces travaux, qui excède très largement la valeur locative annuelle des locaux, est particulièrement élevé ; qu'au regard de ces constatations, la société requérante ne justifie ni de la réalité et de la nature desdits travaux ni de ce qu'ils auraient été exposés dans le but de permettre le logement de ses préposés et auraient été utiles à son exploitation ; que par, suite, ces travaux ne peuvent être regardés comme ayant été engagés dans l'intérêt de l'entreprise et l'administration était fondée à réintégrer la somme de 225 215 F dans les résultats de l'exercice clos en 1990 ;

En ce qui concerne le supplément d'impôts sur les sociétés sur les distributions :

Considérant qu'aux termes de l'article 54 bis du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209, les contribuables imposés d'après leur bénéfice réel doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel ; qu'aux termes de l'article 111 dudit code : Sont notamment considérés comme revenus distribués ... c les rémunérations et avantages occultes. ;

Considérant qu'il résulte de ce qui a été indiqué ci-dessus que l'administration établit que les travaux effectués dans l'appartement du 6ème étage de l'immeuble sis à Cannes utilisé à usage d'habitation par M. et Mme X et l'accroissement corrélatif des valeurs d'actif de l'entreprise, n'étaient pas justifiés, pour le montant non contesté remis en cause par le service, et qui, à défaut d'avoir été déclarés, contrairement aux dispositions de l'article 54 bis du code général des impôts, constituaient pour ces derniers un avantage occulte au sens de l'article 111 c) du dudit code ; que, par suite, l'administration était fondée à considérer que cet avantage était constitutif d'un revenu réputé distribué à M. et Mme X dans la proportion de leur quote-part dans les droits de la SCI « Rond Point Duboys d'Angers » passible du supplément d'impôt sur les sociétés institué par l'article 219.-I.c) du code général des impôts ;

En ce qui concerne les pénalités de mauvaise foi relatives aux revenus réputés distribués soumis au supplément d'impôts sur les sociétés sur les distributions :

Considérant que les conclusions susvisées de la société requérante sont sans objet dès lors que les pénalités en cause initialement envisagées par le service n'ont pas été mises en recouvrement ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation » ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat sur le fondement des dispositions précitées ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris en date du 26 juin 2003 est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur la réintégration dans les résultats de la SARL SETIC de la somme de 225 215 F.

Article 2 : La demande présentée par la SARL SETIC devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

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N° 03PA03817


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 03PA03817
Date de la décision : 02/10/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : SAILLARD

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-10-02;03pa03817 ?
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