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11/04/2006 | FRANCE | N°02PA02389

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ere chambre - formation b, 11 avril 2006, 02PA02389


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2002, présentée pour M. André X, élisant domicile ... par Me Atiaoui ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0107244/7 en date du 14 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part, à ce que soit enjoint à l'administration pénitentiaire de produire l'entier dossier de M. X, et d'autre part, à l'annulation du refus opposé le 26 février 2001 par le ministre de la justice à sa demande d'indemnisation, et enfin à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 250 000

F en réparation du préjudice global subi du fait de son transfèrement, ...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2002, présentée pour M. André X, élisant domicile ... par Me Atiaoui ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0107244/7 en date du 14 mars 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part, à ce que soit enjoint à l'administration pénitentiaire de produire l'entier dossier de M. X, et d'autre part, à l'annulation du refus opposé le 26 février 2001 par le ministre de la justice à sa demande d'indemnisation, et enfin à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 250 000 F en réparation du préjudice global subi du fait de son transfèrement, sauf à parfaire avec des intérêts de droit à compter de la réception de la demande préalable, ainsi qu'une somme de 30 000 F au titre des frais irrépétibles ;

2°) d'annuler le refus d'indemnisation et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 250 000 F ( 38 112 euros ) à titre de dommages et intérêts ;

3°) de condamner l'Etat à la lui verser la somme de 4 573 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n°79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2006 :

- le rapport de Mme Appèche-Otani, rapporteur,

- les observations de Me Atiaoui, pour M. X ;

- et les conclusions de Mme Giraudon, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R.711-2 du code de justice administrative : « Toute partie est avertie, par une notification faite conformément aux articles R. 611-3 ou R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la convocation à l'audience du 14 février 2002 a été envoyée au conseil régulièrement désigné par M. X, et à la dernière adresse indiquée par ledit conseil ; que ce courrier a été envoyé avec accusé de réception et a été retourné au Tribunal administratif de Paris avec la mention non réclamé retour à l'envoyeur ; que, dans ces conditions, M. X n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait intervenu au terme d'une procédure irrégulière ;

Sur le bien-fondé des conclusions indemnitaires présentées par M. X :

Considérant que M. X, qui faisait l'objet de plusieurs condamnations à des peines de réclusion criminelle devenues définitives, était également en 2000 mis en accusation devant la Cour d'assises de Bordeaux pour une autre cause et incarcéré à la maison d'arrêt de Bordeaux Gradignan ; que sur décision du Garde des Sceaux, ministre de la Justice en date du 31 octobre 2000, prise en application de l'article D 300 du code de procédure pénale, M. X a fait l'objet d'un transfèrement administratif opéré le 3 novembre 2000 de la maison d'arrêt de Bordeaux-Gradignan (GIRONDE) vers la maison d'arrêt de Bois-d'Arcy (YVELINES) ; qu'il a demandé au ministre de la justice à être indemnisé du préjudice qu'il estimait avoir subi du fait des fautes résultant des illégalités qu'aurait commises l'administration en décidant son transfèrement ; que M. X a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant d'une part, à l'annulation du refus opposé par le ministre à sa demande indemnitaire et d'autre part, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 250 000 F à titre de réparation ; qu'il fait appel du jugement rejetant sa demande et reprend en appel ses conclusions indemnitaires ;

Considérant qu'aux termes de l'article D.82 du code susvisé « l'affectation peut-être modifiée soit à la demande du condamné soit à la demande du chef de l'établissement dans lequel il exécute sa peine.-Hors le cas où le condamné a été mis à la disposition d'un directeur régional dans les conditions prévues par les articles D.81 et D.81-1, la décision de changement d'affectation appartient à l'autorité qui a décidé de l'affectation initiale -l'affectation ne peut être modifiée que s'il survient un fait ou un éléments d'appréciation nouveau. » ; que l'article D.82-1 du même code précise : « Que la demande émane du condamné ou du chef d'établissement, ce dernier constitue un dossier qui comprend les éléments permettant d'établir la motivation de la demande (…) La décision d'affectation est prise, sauf urgence, après avis du juge de l‘application des peines et du procureur de la République du lieu de détention. » ; qu'en vertu des dispositions de l'article D.300 du même code, les transfèrements de caractère administratif sont ordonnés par le ministre dont la compétence est exclusive en ce qui concerne le transfèrement à titre administratif de tout détenu d'une région pénitentiaire à une autre ;

Considérant que les conditions dans lesquelles l'administration peut décider qu'il sera procédé au changement d'affectation et au transfèrement d'un détenu sont définies, même dans le cas d'un transfèrement d'une maison d'arrêt à une autre maison d'arrêt, par les dispositions précitées du code de procédure pénale et notamment par les articles D 82 et suivant dudit code ; que par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a estimé que l'illégalité d'une telle décision ne pouvait engager la responsabilité de l'administration au motif que cette décision de transfèrement constituerait une mesure d'ordre intérieur dont la légalité ne serait pas susceptible d'être contestée devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'il y a lieu pour la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les moyens invoqués par M. X devant le tribunal et dans sa requête pour soutenir que l'administration aurait commis à son encontre des illégalités fautives ;

Considérant en premier lieu que M. X ne peut utilement soutenir que la décision de transfèrement serait insuffisamment motivée dès lors que le défaut de motivation allégué, à le supposer établi, n'est pas à l'origine du préjudice qu'il invoque ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 24 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix. (…) / Les dispositions de l'alinéa précédent ne sont pas applicables : (…) 2° Lorsque leur mise en oeuvre serait de nature à compromettre l'ordre public ; qu'il résulte de l'instruction que dans les circonstances de l'espèce, et eu égard à la nécessité de maintenir l'ordre public au sein de l'établissement pénitentiaire et d'assurer la sécurité du transfèrement du requérant, les dispositions du 1er alinéa n'étaient pas applicables à la décision de transfèrement de M. X ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la décision de transfèrement a été prise après consultation du procureur général près la Cour d'appel de Bordeaux ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l' exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; que l'exercice du droit de M. X de mener une vie familiale était légalement restreint par la mesure d'incarcération dont il était objet ; que si M. X soutient que la mesure de transfèrement qui lui a été appliquée était de nature à rendre plus malaisées les visites qu'il pouvait recevoir des membres de sa famille installés en région bordelaise, cette circonstance ne saurait, en l'espèce suffire à établir que ladite mesure aurait méconnu les stipulations susénoncées ;

Considérant, en cinquième lieu, que contrairement à ce que soutient M. X, ladite mesure n'a pas mis celui-ci dans l'impossibilité d'organiser sa défense en vue du procès d'assises qui s'est tenu le 9 mars 2001 ;

Considérant, en sixième lieu, que M. X n'établit pas que son transfèrement aurait constitué une sanction déguisée et qu'il ne résulte pas de l'instruction que le transfèrement serait de ce fait entaché de détournement de pouvoir ;

Considérant enfin que M. X ne peut utilement soutenir que la décision de transfèrement aurait été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que celles-ci ne sont applicables qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions pénales ;

Considérant que M. X n'établissant pas que le ministre de la justice aurait, en décidant son transfèrement, commis une illégalité, la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée en raison de la faute que constituerait une telle illégalité ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que la responsabilité de l'administration serait engagée à son égard sur un autre fondement ;

Considérant que de tout ce qui précède il résulte que M. André X n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. » ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées à ce titre par M. X qui est, dans la présente instance, la partie perdante ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

4

NN 02PA02389


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ere chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA02389
Date de la décision : 11/04/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MARTEL
Rapporteur ?: Mme Sylvie APPECHE-OTANI
Rapporteur public ?: Mme GIRAUDON
Avocat(s) : ATIAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2006-04-11;02pa02389 ?
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