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20/06/2005 | FRANCE | N°02PA02084

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 20 juin 2005, 02PA02084


Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2002, présentée pour M. Lionel X, élisant domicile ..., par Me Naim ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9607320 en date du 9 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1991, 1992 et 1993, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au t

itre des frais exposés ;

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Vu la requête, enregistrée le 11 juin 2002, présentée pour M. Lionel X, élisant domicile ..., par Me Naim ; M. X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9607320 en date du 9 avril 2002 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1991, 1992 et 1993, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2005 :

- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité de l'association AFATRO, l'administration a remis en cause le caractère désintéressé de sa gestion et l'a assujettie, en conséquence, à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1991 à 1993 ; que concomitamment à cette vérification, le service a procédé à un examen de la situation fiscale personnelle de M. X, son président, et lui a assigné, pour les mêmes années, des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui procèdent de la taxation, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, de revenus réputés distribués par l'association ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation au président du tribunal administratif d'ordonner le renvoi d'une affaire en état d'être jugée ni d'aviser la partie du refus opposé à sa demande ; qu'il ressort des pièces du dossier que le directeur des vérifications de la région d'Ile-de-France Ouest a produit un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif de Paris le 28 février 2002 et communiqué à M. X le même jour ; que l'affaire étant venue à l'audience le 12 mars 2002, M. X a disposé d'un délai suffisant pour prendre connaissance de ce mémoire et éventuellement y répondre ; que, dans ces conditions, M. X n'est pas fondé à soutenir que le principe du caractère contradictoire de la procédure n'aurait pas été respecté à son égard ;

Sur la régularité de la procédure :

En ce qui concerne la vérification de comptabilité de l'association AFATRO :

Considérant qu'eu égard au principe de l'indépendance des procédures, l'irrégularité qui aurait entaché la procédure de vérification de comptabilité de l'association AFATRO est sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'égard de M. X que l'administration a regardé comme étant le bénéficiaire des revenus distribués par ladite association, dès lors que cette irrégularité a été en l'espèce sans effet sur la valeur probante des éléments recueillis ;

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition suivie à l'encontre de M. X :

Considérant, en premier lieu, qu'il incombe à l'administration fiscale d'informer le contribuable de la teneur des renseignements qu'elle a pu recueillir dans l'exercice de son droit de communication et qu'elle a effectivement utilisés pour procéder aux redressements, afin que l'intéressé ait la possibilité de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X a été informé, par les notifications de redressements des 24 novembre 1994 et 19 janvier 1995, de l'exercice par l'administration du droit de communication prévu à l'article L. 101 du livre des procédures fiscales auprès de l'autorité judiciaire ; que les informations concernant le compte bancaire ouvert par l'association AFATRO au Crédit du Nord ayant servi à fonder les redressements notifiés à l'association AFATRO selon la procédure d'évaluation d'office, prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales et considérés comme des revenus distribués au profit de M. X, ont été obtenues dans le cadre de ce droit de communication et ont été détaillées dans lesdites notifications ; que si, d'une part, M. X soutient que certains éléments relatifs à ce compte bancaire étaient contenus dans un document de la procédure judiciaire cité dans un procès verbal d'audition, dont il a obtenu copie, et que, faute pour le vérificateur de s'être expressément référé à ce document dans les notifications de redressements, il n'aurait pu exercer pleinement son droit de communication, il résulte de l'instruction que M. X a été suffisamment informé de la teneur des renseignements recueillis par le service et a été ainsi mis à même de demander la communication du document en cause, dont il n'est au demeurant pas établi qu'il ait été utilisé par le service, avant la mise en recouvrement des impositions ; que si, d'autre part, M. X soutient qu'un procès verbal d'audition du 9 décembre 1993, sur lequel le vérificateur aurait implicitement fondé les redressements litigieux, ne figurait pas parmi les procès verbaux d'audition fournis par le service, il ne résulte cependant pas de l'instruction qu'un tel document, à supposer qu'il existe, aurait effectivement été utilisé par le vérificateur ni que M. X en aurait expressément demandé communication ;

Considérant, en second lieu que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est pas compétente pour apprécier les questions de fait relatives à la détermination des revenus de capitaux mobiliers, dès lors qu'il ne s'agit pas des rémunérations excessives visées au d) de l'article 111 du code général des impôts ; que, par suite, M. X ne peut utilement se prévaloir du refus opposé par l'administration fiscale à ce que cette commission fût saisie du litige relatif aux redressements qui lui ont été notifiés dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, sur le fondement des dispositions de l'article 109- 1-1° du code général des impôts ; que M. X ne saurait, en tout état de cause utilement invoquer, sur ce point, les stipulations inapplicables aux procédures administratives, de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant que les redressements litigieux ont été établis sur le fondement des dispositions de l'article 109 du code général des impôts, qui en vertu de l'article 108, est applicable aux revenus distribués par les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés, et aux termes duquel : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1 Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital ... ; qu'aux termes de l'article 110 du même code : Pour l'application de l'article 109-1-1, les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ;

Considérant qu'ainsi qu'il est dit ci-dessus, l'administration a remis en cause le caractère désintéressé de la gestion de l'association AFATRO et l'a assujettie, en conséquence, à l'impôt sur les sociétés au titre des années 1991 à 1993 ; que si M. X, qui ne conteste pas le principe de l'assujettissement de l'association AFATRO à l'impôt sur les sociétés, en raison du caractère non désintéressé de sa gestion, reconnaît avoir appréhendé les sommes correspondant aux chèques débités par l'association pour l'entretien de sa résidence et le retrait d'une somme de 120 000 F par an correspondant au montant du loyer de sa résidence principale, il conteste, par contre, avoir appréhendé l'intégralité des autres revenus réputés distribués et dont le montant n'est pas sérieusement contesté ;

Considérant que l'administration doit être regardée comme apportant la preuve de l'appréhension des sommes litigieuses par le requérant, dès lors qu'elle établit, en se fondant notamment sur les procès verbaux d'audition des intéressés, que M. X et son épouse, qui disposaient d'une procuration bancaire sur le compte de l'association, avaient la maîtrise totale de l'association AFATRO, que l'établissement gestionnaire du compte de l'association ne pouvait remettre d'espèces prélevées sur ce compte qu'aux époux X et qu'il existait entre l'association et M. X une confusion de patrimoine ;

Sur les pénalités :

Considérant, en premier lieu, que les cotisations à l'impôt sur le revenu mises à la charge de M. X ont été assorties des pénalités de mauvaise foi prévues à l'article 1729 du code général des impôts ; que si l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales prévoit que la décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts doit être prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur divisionnaire qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités, il ne résulte ni de ces dispositions ni d'aucun autre texte que ce visa doive être renouvelé sur la réponse aux observations du contribuable quand un autre document contient, comme en l'espèce, la motivation des pénalités ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les pénalités de mauvaise foi ont été infligées au requérant suivant une procédure irrégulière doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1 - Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle... ; que les dispositions I de l'article 1729 qui proportionnent les pénalités aux agissements commis par le contribuable et prévoient des taux de majoration différents selon la qualification qui peut être donnée au comportement de l'intéressé, sont compatibles avec les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même qu'elles ne confèrent pas au juge un pouvoir de modulation du taux de ces pénalités ; que ces dispositions, qui ne prévoient d'infliger une majoration d'impôt que lorsque les faits reprochés à l'intéressé ont été légalement constatés par l'autorité investie du pouvoir de sanction, ne portent pas atteinte au principe de la présomption d'innocence édicté par le paragraphe 2 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, que contrairement à ce que soutient M. X, les conditions dans lesquelles s'exerce le contrôle du juge de l'impôt sur les pénalités appliquées par l'administration ne sont pas contraires au principe du double degré de juridiction figurant à l'article 14, alinéa 5 du pacte international relatifs aux droits civils et politiques ;

Considérant, en quatrième lieu, que le requérant soutient que le maintien desdites pénalités violerait la règle non bis in idem prévue par l'article 14-7 du pacte des Nations Unies relatif aux droits civiques et politiques et par l'article 4-(1) de la convention européenne des droits de l'homme ; qu'il résulte, toutefois, des termes de ces stipulations que la règle non bis in idem qu'elles énoncent ne trouve à s'appliquer que dans le cas où une même infraction pénale ayant déjà donné lieu à un jugement définitif de condamnation ou d'acquittement ferait l'objet d'une nouvelle poursuite et, le cas échéant, d'une condamnation devant ou par une répression répressive et ne font pas obstacle à ce que le contribuable qui, ayant fait l'objet de poursuites du chef de fraude fiscale, se voit appliquer, s'il y a lieu, par l'administration, les sanctions fiscales susrappelées ; que, dès lors, le moyen invoqué doit, en tout état de cause, être rejeté ; que si le requérant soutient que ce cumul de sanctions serait contraire à un principe rappelé par le Conseil constitutionnel, il ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer devant le juge administratif les motifs d'une décision rendue par le Conseil constitutionnel ;

Considérant, enfin, que l'intérêt de retard institué par les dispositions de l'article 1727 du code général des impôts vise essentiellement à réparer les préjudices de toute nature subis par l'État à raison du non-respect par les contribuables de leurs obligations de déclarer et payer l'impôt aux dates légales ; que si l'évolution des taux du marché a conduit à une hausse relative de cet intérêt depuis son institution, cette circonstance ne lui confère pas pour autant la nature d'une sanction, dès lors que son niveau n'est pas devenu manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié ; que le juge de l'impôt saisi d'une contestation sur les intérêts de retard, lesquels ne constituent pas une sanction mais la seule réparation du préjudice subi par le Trésor du fait du défaut d'acquittement par le redevable, dans le délai légal, des impositions au paiement desquelles il était tenu, ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas de contestation sur des droits et obligations de caractère civil ; qu'ainsi, M. X ne peut utilement invoquer la méconnaissance de la règle non bis in idem prévue par les stipulations susmentionnées de conventions internationales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des impositions et pénalités litigieuses ;

Sur la suppression de certains passages contenant des propos injurieux ou diffamatoires figurant dans les mémoires de première instance de M. X :

Considérant que les passages du mémoire introductif d'instance déposé devant le Tribunal administratif de Paris commençant par il s'agit en fait d'une vengeance et finissant par comme indiqué sur notre devise et commençant par précisons que de toute façon et finissant par et l'appliquent présentent un caractère injurieux et diffamatoire ; que, dès lors, M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris en a prononcé la suppression ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

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N° 02PA02084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA02084
Date de la décision : 20/06/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : NAIM

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-06-20;02pa02084 ?
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