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20/06/2005 | FRANCE | N°02PA01536

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 20 juin 2005, 02PA01536


Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2002, présentée pour Mlle Flavie X, élisant domicile ..., par Me Thibault ; Mlle X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-3278 en date du 7 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 550 euros au titr

e de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la requête, enregistrée le 29 avril 2002, présentée pour Mlle Flavie X, élisant domicile ..., par Me Thibault ; Mlle X demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 00-3278 en date du 7 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 1 550 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 juin 2005 :

- le rapport de M. Pailleret, rapporteur,

- les observations de Me Thibault, pour Mlle X,

- et les conclusions de M. Adrot, commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mlle X a fait l'objet d'un examen contradictoire de situation fiscale personnelle au titre des années 1992, 1993 et 1994 ; que pour l'année 1992, les redressements initialement envisagés dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée pour un montant de 275 750 F et dans celle des revenus fonciers pour un montant de 159 840 F ont été notifiés le 26 décembre 1996 selon la procédure de la taxation d'office prévue par l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; que, dans sa réponse en date du 6 décembre 1996 aux observations du contribuable, le service a abandonné le redressement portant sur la somme de 275 750 F considérée comme justifiée et maintenu celui portant sur la somme de 159 840 F effectué dans la catégorie des revenus fonciers ; que, pour l'année 1993, il a été demandé à la requérante, en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, par lettre du 12 avril 1996, de justifier de l'origine et de la nature de certaines sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires ; qu'après avoir été mise en demeure de compléter sa réponse par lettre du 10 juin 1996, les crédits restés inexpliqués ont été taxés d'office, pour un montant de 451 896 F, par notification du 27 septembre 1996 ; que pour l'année 1994, Mlle X n'ayant pas déposé de déclaration de revenus malgré une mise en demeure du 29 novembre 1995, le service l'a taxée d'office en rattachant à son revenu global les crédits bancaires restés injustifiés pour un montant de 137 530 F et en imposant la somme de 159 840 F dans la catégorie des revenus fonciers ; que Mlle X relève appel du jugement en date du 7 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles elle a été assujettie au titre des années 1992, 1993 et 1994 à raison de ces redressements ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne l'imposition supplémentaire établie au titre de l'année 1994 :

Considérant que l'administration, après avoir notifié à Mlle X, le 27 juin 1995, un avis de vérification d'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, l'a mise en demeure, le 22 novembre 1995, de déposer la déclaration de son revenu global au titre de l'année 1994 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la situation de taxation d'office, prévue par les articles L. 66-1° et L. 67 du livre des procédures fiscales, dans laquelle s'est placée Mlle X en ne donnant pas suite à cette mise en demeure, ait été révélée à l'administration par cet examen de situation fiscale personnelle ; que, dès lors, le moyen tiré par Mlle X de l'irrégularité de ce dernier est inopérant à l'appui de sa demande en décharge de l'imposition à laquelle elle a été assujettie d'office, au titre de l'année 1994, par application des dispositions susrappelées du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'en cas de taxation d'office fondée sur les dispositions précitées des articles L. 66-1° et L. 67 du livre des procédures fiscales, l'administration, lorsque l'origine des revenus n'est pas identifiée, n'est pas tenue de rattacher à une catégorie particulière de revenus les sommes qu'elle retient comme bases d'imposition ; qu'elle n'est pas davantage tenue, dans cette hypothèse, de procéder à l'envoi d'une demande de justification prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, l'administration a pu réintégrer au revenu imposable de l'année 1994, les apports inexpliqués faits la même année aux comptes bancaires de Mlle X sans être tenue d'établir à quelle catégorie de bénéfices ou de revenus ressortissaient les sommes correspondant à ces apports ; que la circonstance, que l'administration ait adressé à l'intéressée, alors qu'elle n'y était pas tenue, une demande de justifications sans lui impartir de délai de réponse, est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition ;

En ce qui concerne l'imposition supplémentaire établie au titre de l'année 1993 :

S'agissant de la durée de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales : (...) Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant au contribuable, et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L. 16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L. 16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : Un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...). L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut normalement s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification prévu par les dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ; que, cependant, lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de produire ses relevés de compte dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration, ce délai peut être prorogé des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte ; que le point de départ des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte court alors dès le 61ème jour suivant la demande faite au contribuable par l'administration, sauf lorsque le contribuable a produit avant cette date les coordonnées exactes de l'intégralité de ses comptes, auquel cas le point de départ des délais ne court qu'à compter de la date à laquelle l'administration demande aux établissements teneurs de ces comptes que ces relevés lui soient remis ; que la prorogation des délais, que l'administration n'est pas tenue de notifier au contribuable, cesse à la date à laquelle l'administration reçoit l'intégralité des relevés demandés ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mlle X a reçu le 4 juillet 1995 un avis d'examen contradictoire de situation personnelle avec demande de communication de l'ensemble de ses relevés bancaires ; que Mlle X était titulaire de deux comptes bancaires, l'un ouvert à la BRED, l'autre ouvert à La Poste ; que les premiers relevés concernant le compte ouvert auprès de la BRED n'ont été produits que le 21 février 1996, soit postérieurement au 5 septembre 1995, date à laquelle expirait le délai de soixante jours institué par les dispositions précitées ; que les relevés du compte ouvert à La Poste, dont les coordonnées n'avaient pas été communiquées à l'administration dans ledit délai de soixante jours et dont l'administration a demandé, le 6 février 1996, la production à l'établissement bancaire, ont été produits le 25 mars 1996 ; qu'il résulte de ce qui précède que la durée de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, qui avait débuté le 5 juillet 1995, date de réception de l'avis de vérification, et qui s'est achevé le 27 septembre 1996, date à laquelle les redressements litigieux ont été notifiés à l'intéressée, n'a pas excédé, compte tenu des délais nécessaires à la production de l'intégralité des relevés de comptes bancaires, le délai autorisé par les dispositions précitées ;

S'agissant de la régularité de la procédure de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales :

Considérant que le caractère contradictoire que doit revêtir l'examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu en vertu des articles L. 47 à L. 50 du livre des procédures fiscales interdit au vérificateur d'adresser la notification de redressement qui, selon l'article L. 48, marquera l'achèvement de son examen, sans avoir au préalable engagé un dialogue contradictoire avec le contribuable sur les points qu'il envisage de retenir ; qu'en outre, dans sa version remise à Mlle X, la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, rendue opposable à l'administration par l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, exige que le vérificateur ait recherché un tel dialogue avant même d'avoir recours à la procédure écrite et contraignante de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que la méconnaissance de cette exigence a le caractère d'une irrégularité substantielle portant atteinte aux droits et garanties reconnus par la charte du contribuable vérifié ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mlle X a reçu le 5 juillet 1995 un avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle ; que cet avis a été suivi d'un entretien avec le vérificateur le 21 février 1996 ; qu'ainsi, lorsque le vérificateur lui a adressé, le 12 avril 1996, une demande de justifications sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales relative à l'année 1993, Mlle X avait été mise à même de discuter avec le service des discordances que celui-ci s'apprêtait à relever à partir des éléments dont il disposait ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le redressement portant sur les revenus d'origine indéterminée perçus par elle au cours de l'année 1993, aurait été opéré en méconnaissance du dialogue exigé par les dispositions susmentionnées de la charte du contribuable vérifié ;

Sur le bien-fondé des impositions supplémentaires établies au titre des années 1992 à 1994 :

En ce qui concerne les revenus rattachés au revenu global de l'année 1994 :

Considérant qu'en se bornant à soutenir, comme devant les premiers juges, que le compte ouvert auprès de la BRED était exclusivement utilisé par son beau-père et que les crédits inscrits sur ce compte comporteraient des sommes taxées en revenus fonciers, sans apporter le moindre commencement de justification à l'appui de ces affirmations, Mlle X ne peut être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe de l'exagération du redressement notifié à hauteur de 137 530 F ;

En ce qui concerne les revenus fonciers des années 1992 et 1994 :

Considérant que la seule circonstance invoquée par l'administration et tirée de ce que Mlle X ait déclaré des revenus fonciers au titre de l'année 1993 pour des appartements dont elle est propriétaire, ne permet pas de considérer que ces appartements étaient loués et productifs de revenus fonciers au titre des années 1992 et 1994 ; que, dès lors, l'administration ne peut être regardée comme apportant la preuve de l'existence des revenus imposés dans la catégorie des revenus fonciers pour des montants de 159 840 F au titre de chacune de ces deux années ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mlle X est seulement fondée à demander, d'une part, la décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes maintenue à sa charge au titre de l'année 1992 à raison de la réintégration dans ses revenus fonciers de la somme de 159 840 F, soit 24 367,45 euros, et, d'autre part, la réduction de sa base imposable de l'année 1994, à concurrence également de la somme de 159 840 F, soit 24 367,45 euros, imposée dans la catégorie des revenus fonciers ; que le surplus de sa demande doit, en revanche, être rejeté ;

Sur les conclusions de Mlle X tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions susmentionnées de Mlle X ;

D É C I D E :

Article 1er : La base du complément d'impôt sur le revenu maintenu à la charge de Mlle X au titre des années 1992 et 1994 est réduite de 159 840 F, soit 24 367,45 euros.

Article 2 : Mlle X est déchargée des droits supplémentaires et pénalités mis à sa charge au titre des années 1992 et 1994 correspondant à la réduction de la base d'imposition définie à l'article 1 ci-dessus.

Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Melun en date du 7 février 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

2

N° 02PA01536


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 02PA01536
Date de la décision : 20/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés SOUMET
Rapporteur ?: M. Bruno PAILLERET
Rapporteur public ?: M. ADROT
Avocat(s) : THIBAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2005-06-20;02pa01536 ?
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