Vu la requête, enregistrée le 30 novembre 2000, présentée pour
M. Hugues X, demeurant ..., par Me Grassin Delyle ; M. X demande à la Cour :
1() d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 septembre 2000 en ce qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 16 juin 1999 par lequel le Préfet de l'Essonne l'a mis en demeure, conjointement avec M. Leluc, de réaliser des travaux de mise en sécurité des ouvrages du moulin d'Echarcon au plus tard le 30 septembre 1999 ;
2() d'annuler ledit arrêté, subsidiairement d'ordonner à la charge du Préfet de l'Essonne la désignation de tel expert qu'il plaira à la Cour avec pour mission d'observer le fonctionnement des ouvrages et d'indiquer si les travaux prévus par l'arrêté attaqué sont nécessaires ;
3() de condamner le Préfet de l'Essonne à lui verser la somme de 14 000 F au titre des frais irrépétibles ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 janvier 2005 :
- le rapport de Mme Brotons, rapporteur,
- et les conclusions de M. Coiffet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que, par un arrêté du 16 juin 1999, le Préfet de l'Essonne a mis en demeure MM. X et Leluc, propriétaires indivis du moulin d'Echarcon, de réaliser les travaux de confortement de l'ancien moulin et de remise en état des vannages pour maintenir le niveau réglementaire de l'eau tant en période de crue qu'en période d'étiage, de faire procéder, à cette fin, à une étude, et d'en communiquer les résultats à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt au plus tard le 30 septembre 1999, faute de quoi une exécution d'office des travaux serait mise en oeuvre ; que, par un second arrêté du 12 janvier 2000, le Préfet de l'Essonne a mis MM. X et Leluc en demeure de consigner solidairement, entre les mains du trésorier-payeur général, la somme de 750 000 F correspondant aux travaux urgents à effectuer ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles, saisi par M. X a, d'une part, rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 16 juin 1999, d'autre part, annulé l'arrêté du 12 janvier 2000 ; que M. X demande la réformation de ce jugement en ce qu'il rejette une partie de ses demandes et que, par la voie du recours incident, le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement demande l'infirmation du même jugement en ce qu'il a annulé l'arrêté du 12 janvier 2000 ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 18 de la loi du 3 janvier 1992 sur l'eau, dont les dispositions sont désormais reprises à l'article L. 211-5 du code de l'environnement : Le préfet et le maire intéressés doivent être informés, dans les meilleurs délais par toute personne qui en a connaissance, de tout incident ou accident présentant un danger pour la sécurité civile, la qualité, la circulation ou la conservation des eaux. La personne à l'origine de l'incident ou de l'accident et l'exploitant ou, s'il n'existe pas d'exploitant, le propriétaire, sont tenus, dès qu'ils en ont connaissance, de prendre ou faire prendre toutes les mesures possibles pour mettre fin à la cause de danger ou d'atteinte au milieu aquatique, évaluer les conséquences de l'incident ou de l'accident et y remédier. Le préfet peut prescrire aux personnes mentionnées ci-dessus les mesures à prendre pour mettre fin au dommage constaté ou en circonscrire la gravité et, notamment les analyses à effectuer. En cas de carence, et s'il y a un risque de pollution ou de destruction du milieu naturel, ou encore pour la santé publique et l'alimentation en eau potable, le préfet peut prendre ou faire exécuter les mesures nécessaires aux frais et risques des personnes responsables (...) ; qu'aux termes de la première phrase de l'article 27 de la même loi dont les dispositions sont désormais reprises au I de l'article L. 216-1 du code de l'environnement : Indépendamment des poursuites pénales, en cas d'inobservation des dispositions prévues par la présente loi ou les règlements et décisions individuelles pris pour son application, le préfet met en demeure d'y satisfaire dans un délai déterminé. Si, à l'expiration du délai fixé, il n'a pas été obtempéré à cette injonction par l'exploitant ou par le propriétaire de l'installation s'il n'y a pas d'exploitant, le préfet peut : l'obliger à consigner entre les mains d'un comptable public une somme correspondant à l'estimation du montant des travaux à réaliser, laquelle sera restituée au fur et à mesure de leur exécution (...), faire procéder d'office, sans préjudice de l'article 18 (...) aux frais de l'intéressé, à l'exécution des mesures prescrites. Les sommes consignées en application des dispositions ci-dessus peuvent être utilisées pour régler les dépenses entraînées par l'exécution d'office ;
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que le mauvais état des ouvrages du moulin d'Echarcon était à l'origine d'un dommage constaté ; que, de ce fait, ces ouvrages ne constituaient pas, par eux-mêmes, un incident présentant un danger pour la sécurité civile, la qualité, la circulation ou la conservation des eaux au sens des dispositions précitées de l'article 18 de la loi sur l'eau ; que, par suite, le Tribunal administratif de Versailles a jugé à bon droit que les articles 18 et 27 de la loi sur l'eau ne pouvaient servir de fondement légal aux deux arrêtés attaqués ; que, dès lors, le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a annulé, pour ce motif, l'arrêté du Préfet de l'Essonne en date du 12 janvier 2000 ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 103 du code rural : L'autorité administrative est chargée de la conservation et de la police des cours d'eaux non domaniaux. Elle prend toutes dispositions pour assurer le libre cours des eaux (...) et qu'aux termes de l'article 115 du même code : Il est pourvu au curage des cours d'eau non domaniaux ainsi qu'à l'entretien des ouvrages qui s'y rattachent de la manière prescrite par les anciens règlements ou d'après les usages locaux (...) ;
Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que l'état des ouvrages du moulin d'Echarcon engendrait un risque sérieux d'inondation justifiant la mise en oeuvre, par le préfet, des pouvoirs généraux de police qu'il tient de l'article 103 du code rural, alors même qu'il est constant que M. X maintenait le niveau des eaux du bief à 30 cm en-dessous du niveau légal de la retenue, qu'il avait fait procéder, avant l'intervention de l'arrêté du 16 juin 1999, à la remise en état de la vanne guillotine et que, par lettre du 15 mars 1999, la direction départementale de l'agriculture et de la forêt avait constaté que ces travaux, qu'elle avait définis comme les plus urgents à réaliser, permettaient la fermeture des autres vannes ; que, par ailleurs, dès lors qu'il n'est pas contesté que le niveau des eaux était maintenu en-dessous du niveau légal de la retenue, le respect des prescriptions du règlement applicable à la rivière de l'Essonne était nécessairement assuré et qu'il n'y avait, par suite, pas lieu à la mise en oeuvre des pouvoirs définis par l'article 115 du code rural ; qu'il suit de là que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a considéré que les articles 103 et 115 du code rural avaient pu servir de fondement légal à l'arrêté du 16 juin 1999 et rejeté, par voie de conséquence, sa demande dirigée contre ledit arrêté ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler l'article 1er dudit jugement, d'annuler l'arrêté du 16 juin 1999 et de rejeter le recours incident du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement ;
Sur l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de condamner l'Etat à verser à M. X, la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Versailles en date du 26 septembre 2000 est annulé.
Article 2 : L'arrêté du Préfet de l'Essonne en date du 16 juin 1999 est annulé.
Article 3 : Le recours incident du ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement est rejeté.
Article 4 : L'Etat versera à M. X la somme de 2 000 euros (deux mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 00PA03632