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04/12/2003 | FRANCE | N°00PA02632

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ere chambre - formation a, 04 décembre 2003, 00PA02632


Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 17 juillet 2000 et le 21 novembre 2000 au greffe de la cour, présentés pour le PORT AUTONOME DE PAPEETE, dont le siège est situé à Motu Uta ... (Polynésie Française), par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et la Cour de cassation ; le PORT AUTONOME DE PAPEETE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 16 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Papeete a, à la demande de la société Sat Nui, annulé l'arrêté n° 428/CM du conseil des ministres en date du 17 mars 1999, la délibération n° 0

03/99 du conseil d'administration du Port Autonome du 9 février 1999 et la d...

Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés le 17 juillet 2000 et le 21 novembre 2000 au greffe de la cour, présentés pour le PORT AUTONOME DE PAPEETE, dont le siège est situé à Motu Uta ... (Polynésie Française), par Me X..., avocat au Conseil d'Etat et la Cour de cassation ; le PORT AUTONOME DE PAPEETE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 16 mai 2000 par lequel le tribunal administratif de Papeete a, à la demande de la société Sat Nui, annulé l'arrêté n° 428/CM du conseil des ministres en date du 17 mars 1999, la délibération n° 003/99 du conseil d'administration du Port Autonome du 9 février 1999 et la décision n° 99-161 du directeur du Port Autonome du 30 avril 1999 et a rejeté sa demande tendant à ce qu'il soit ordonné à cette société de cesser son occupation irrégulière du domaine public portuaire ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Sat Nui devant le tribunal administratif de Papeete ;

3°) d'ordonner son expulsion du domaine public ;

Classement CNIJ : 24-01-01-01

C : 24-01-02-01-01-02

4°) de condamner la société Sat Nui à lui verser une somme de 20 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi organique N°96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie Française ;

Vu la loi N°96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie Française ;

Vu la délibération N°97-231/APF du 22 décembre 1997 relative au Port Autonome de Papeete ;

Vu l'arrêté N°1061/CM du conseil des ministres de la Polynésie Française en date du 10 novembre 1987 approuvant le cahier des charges type applicable aux entreprises d'acconage exerçant dans le port autonome de Papeete

Vu l'arrêté N°1473/CM du 26 décembre 1997 du conseil des ministres de la Polynésie Française relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'établissement public à caractère industriel et commercial dénommé Port Autonome de Papeete ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2003 :

- le rapport de M. LENOIR, premier conseiller,

- les observations de Me Y..., avocat, pour le PORT AUTONOME DE PAPEETE ;

- et les conclusions de M.HEU, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article R.195 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur à la date à laquelle a été rendu le jugement critiqué : Les audiences des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont publiques ; qu'aux termes de l'article R.200, 1er alinéa, du même code : Les jugements et arrêts mentionnent que l'audience a été publique ;

Considérant qu'il ne ressort d'aucune des mentions du jugement attaqué du tribunal administratif de Papeete que l'audience du 2 mai 2000, à laquelle l'affaire concernant le PORT AUTONOME DE PAPEETE a été portée, a été publique ; qu'ainsi, ce jugement ne fait pas la preuve que la procédure à l'issue de laquelle il a été prononcé a été régulière ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, le PORT AUTONOME DE PAPEETE est fondé à en demander l'annulation ;

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par la société Sat Nui devant le tribunal administratif de Papeete ;

Sur la recevabilité de la demande :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de première instance a été présentée au nom de la société Sat Nui par son président-directeur général ; que, par suite, elle est recevable ;

Sur la légalité des décisions du 9 février 1999, du 17 mars 1999 et du 30 avril 1999 :

Considérant que, par une convention du 10 novembre 1987, le directeur du Port Autonome de Papeete a autorisé la société SAT NUI à exercer, pour une durée de vingt ans, une activité d'acconage sur le site du port de Papeete en tant que bénéficiaire d'une concession d'outillage privé avec obligation de service public ; qu'il était mentionné que cette convention était régie par les dispositions du cahier des charges applicables à cette activité adopté par un arrêté du conseil des ministres de la Polynésie Française du même jour ; que la société Sat Nui a procédé à l'acquisition puis à la mise en service, au cours de l'année 1998, d'un matériel de levage autopropulsé de grande dimension qu'elle a fait stationner sur l'aire jouxtant le quai de débarquement dit quai au long cours situé sur le zone sous douane du Port de Papeete ; que, par la délibération critiquée du 9 février 1999, approuvée par un arrêté du conseil des ministres de la Polynésie Française en date du 17 mars 1999, le conseil d'administration du Port Autonome de Papeete a décidé de soumettre les matériels stationnant en zone douanière ne pouvant faire l'objet d'une mise sous hangar au paiement d'une redevance mensuelle de 500 F CFP le mètre carré occupé ; que, par l'arrêté également critiqué du 30 avril 1999, le directeur du PORT AUTONOME DE PAPEETE a assujetti la société Sat Nui au paiement d'une redevance de 2 511 000 F CFP correspondant à l'utilisation, pour la période du 1er avril au 31 décembre 1999, d'un terrain de 558 mètres carrés situé en zone douanière ; que la société SAT NUI demande l'annulation de ces trois décisions ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du cahier des charges applicable aux entreprises d'acconage exerçant sur le Port de Papeete : Conformément à l'article 6 de la délibération n° 87/113/AT du 29 octobre 1987 de l'Assemblée Territoriale, le présent Cahier des Charges définit les obligations de service public de l'entreprise d'acconage titulaire d'une autorisation d'outillage privé avec obligation de service public et autorisée a exercer son activité dans la zone relevant du Port Autonome de Papeete ; qu'aux termes de l'article 2 du même document : L'autorisation d'outillage privé avec obligation de service public, délivrée par le Directeur du Port Autonome...concerne les opérations de chargement et de déchargement des navires à l'importation et à l'exportation, à quai, sur chaland ou à flot, l'arrimage et le désarrimage des marchandises..., leur transfert de cale ou pont à quai, sur chaland ou à l'eau et vice-versa, leur transfert de navire à navire, leur transport sur terre-plein ou sous hangar, leur stockage, leur tri et leur classement ainsi que, sur ordre de la compagnie maritime, la délivrance des marchandises aux destinataires... ; qu'aux termes de l'article 3 du même document : L'autorisation d'outillage privé avec obligation de service public permet, sous réserve des nécessités du service général du Port, l'usage de la bande de circulation et de travail bord à quai, ainsi que les espaces compris entre les docks qui sont exclusivement réservés aux entreprises d'acconage pour l'accomplissement des opérations de manutention et de transport des marchandises. Cette bande doit toujours rester libre à la circulation et affectée à l'usage du public sous l'autorité exclusive des agents chargés de la police du Port ; qu'aux termes de l'article 4 du même document : Il est mis à la disposition du bénéficiaire de l'autorisation, pour l'accomplissement de ses fonctions, sous forme de convention, l'usage des équipements suivants : - hangar sous douane (par décision du Conseil d'Administration),...terre-pleins. Cette mise à disposition donne lieu à paiement de redevances fixées par le Port Autonome de Papeete... ; qu'aux termes de l'article 16 du même document : A l'expiration de l'autorisation, si elle n'a pas été renouvelée ou en cas de retrait, le bénéficiaire est tenu d'enlever tout matériel lui appartenant... ; qu'aux termes de l'article 17 du même document : Le bénéficiaire de l'autorisation est responsable de la bonne utilisation et de la conservation des hangars, terre-pleins et installations mis a sa disposition dans les conditions fixées par la réglementation en vigueur ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le titulaire d'une autorisation d'outillage privé sur le Port de Papeete est titulaire d'une autorisation d'occupation des parcelles du domaine public portuaire mises à sa disposition pour l'exercice de son activité ;

Considérant que la convention susmentionnée du 10 novembre 1987 indiquait que la société Sat Nui devait exercer son activité dans la zone douanière à proximité du quai au long cours ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'à cette occasion, le Port Autonome a mis à sa disposition un hangar d'entreposage dit hangar n° 3 d'une surface utile de 3 845 mètres carrés ainsi que l'aire située entre ce hangar et le quai de débarquement ;

Considérant que si, initialement, le Port Autonome n'a, selon un tarif établi par une délibération du conseil d'administration du Port Autonome en date du 16 avril 1993, fixé de redevance, pour un montant mensuel de 1000 F CFP le mètre carré, qu'en ce qui concerne l'utilisation du hangar d'entreposage, il était toujours en droit, sans méconnaître les dispositions du cahier des charges, de subordonner l'utilisation future de l'aire extérieure utilisée par la société au paiement d'une redevance spécifique ; que, toutefois, l'institution d'un tarif de redevance d'occupation de cette surface concédée n'est légal qu'à la condition que ledit tarif ne soit pas exagéré, qu'il soit proportionné aux services rendus par le concédant aux usagers et qu'il n'entrave pas le bon fonctionnement du service public confié au concessionnaire ; qu'en l'espèce, le Port Autonome indique avoir volontairement établi à un niveau élevé le montant de la redevance en cause dans le but de dissuader l'entreprise d'acconage de laisser stationner son matériel sur le terre-plein situé face aux quais de débarquement ; que cette mesure, qui n'était pas justifiée par des considérations de sécurité ou de police de la circulation, ne pouvait, du fait des contraintes de transbordement de son matériel de levage ainsi imposées à l'entreprise Sat Nui et de l'allongement des opérations de déchargement et de chargement des navires en découlant, contribuer à l'amélioration du service rendu à une entreprise usagère et n'avait pas été prise dans un but d'intérêt général ; qu'elle est donc, pour ce motif, entachée d'illégalité et ne saurait, en conséquence, justifier la demande de paiement présentée par le PORT AUTONOME DE PAPEETE à la société Sat Nui ; que, par suite, la société Sat Nui est fondée à demander l'annulation de la délibération critiquée du 9 février 1999 instituant ladite redevance, de l'arrêté du 17 mars 1999 procédant à son approbation et de la décision du directeur du Port Autonome du 30 avril 1999 demandant à la société Sat Nui de procéder au paiement des sommes dues au titre de la période du 1er avril au 31 décembre 1999 ;

Sur les conclusions tendant à ce que la cour ordonne à la société Sat Nui de procéder à l'enlèvement de son matériel :

Considérant que, conformément aux dispositions précitées de l'article 3 du cahier des charges approuvé le 10 novembre 1987, l'autorisation d'outillage privé avec obligation de service public consentie à la société Sat Nui le même jour mettait à sa disposition l'usage de la bande de circulation et de travail bord à quai jouxtant le hangar n° 3 ; que la société Sat Nui est, de ce fait, en droit, sous réserve des nécessités de la police de la circulation et de la sécurité des installations portuaires, d'utiliser l'espace en question pour y faire stationner les engins de levage nécessaires à l'exercice de ses activités ; que, pour contester ce droit au stationnement, le PORT AUTONOME DE PAPEETE ne saurait se référer ni aux dispositions de la délibération du 13 mars 1968, dont l'article 6-3 autorise le stationnement des professionnels sur les terre-pleins relevant du domaine public portuaire, ni à la circonstance que la société Sat Nui utiliserait le matériel de levage à des fins commerciales, cette dernière utilisation n'étant pas incompatible avec l'octroi d'une autorisation d'outillage privé dès lors que le bénéficiaire s'acquitte des obligations de service public mises à sa charge ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, il y a lieu de rejeter les conclusions du PORT AUTONOME DE PAPEETE tendant à ce que le juge ordonne à la société Sat Nui de procéder à l'enlèvement de son matériel de levage ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que la société Sat Nui, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer au PORT AUTONOME DE PAPEETE la somme que ce dernier demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de condamner le PORT AUTONOME DE PAPEETE à payer à la société Sat Nui une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Papeete en date du 16 mai 2000 est annulé.

Article 2 : La délibération N°03/99 du 9 février 1999 du conseil d'administration du PORT AUTONOME DE PAPEETE, l'arrêté N°428 CM du 17 mars 1999 du conseil des ministres de la Polynésie Française et la décision N°99/161 du 30 avril 1999 du directeur du PORT AUTONOME DE PAPEETE sont annulés.

Article 3 : Le surplus des conclusions du PORT AUTONOME DE PAPEETE est rejeté.

Article 4 : Le PORT AUTONOME DE PAPEETE versera à la société Sat Nui une somme de 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

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N° 00PA02632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ere chambre - formation a
Numéro d'arrêt : 00PA02632
Date de la décision : 04/12/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JANNIN
Rapporteur ?: M. LENOIR
Rapporteur public ?: M. HEU
Avocat(s) : SCP DELAPORTE-BRIARD-TRICHET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-12-04;00pa02632 ?
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