VU, enregistrée le 18 décembre 2000 au greffe de la cour, la requête présentée pour la COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ dont le siège social est ..., par Me X..., avocat ; La COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 9502518/1 en date du 17 octobre 2000 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en réduction des indemnités de retard mises à sa charge par avis de mise en recouvrement du 20 octobre 1992 ;
2°) de prononcer la réduction demandée et la restitution des indemnités versées assortie de l'intérêt légal ;
Classement CNIJ : 19-01-04-01
C
3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 25 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
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VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 octobre 2003 :
- le rapport de M. BOSSUROY, premier conseiller,
- et les conclusions de M. MAGNARD, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'à la suite de vérifications de sa comptabilité au titre des exercices 1983, 1984, 1985 et 1986, la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ a fait l'objet de trois redressements en matière de taxe sur la valeur ajoutée pour un montant total de 10 820 936 F, auquel a été ajoutée, par application de l'article 1728 du code général des impôts, l'indemnité de retard prévue par l'article 1727 dont le montant s'est élevé à un total de 1 154 062 F lors de la mise en recouvrement de ces rappels de droits le 4 octobre 1988 ; que le paiement de ces droits, assortis des indemnités de retard, étant intervenu le 2 juin 1992, l'administration a mis en recouvrement, le 20 octobre 1992, un complément d'indemnité de retard de 6 280 553 F, ramené par mesure gracieuse, en appliquant un taux mensuel de 0,75 % et non celui de 1 % résultant des dispositions de l'article 1727, à 4 710 416 F ; que la société requérante demande que les intérêts de retard institués par l'article 2 de la loi du 8 juillet 1987 soient substitués aux indemnités de retard dont ont été assortis les droits de taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées de l'article 1727, et ne soient par suite pas calculés sur la période courant des notifications de redressement à l'avis de mise en recouvrement concernant les droits en principal ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières : Lorsqu'une personne physique ou morale... tenue de souscrire ou de présenter une déclaration... déclare ou fait apparaître une base ou des éléments d'imposition insuffisants... ou effectue un versement insuffisant, le montant des droits éludés est majoré soit de l'indemnité de retard prévue à l'article 1727 s'il s'agit des versements, impôts ou taxes énumérés dans ledit article... ; qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts, également dans sa rédaction antérieure à la loi du 8 juillet 1987 : Tout retard dans le paiement des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques qui doivent être versés aux comptables de la direction générale des impôts donne lieu à l'application d'une indemnité égale, pour le premier mois, à 3 % du montant des sommes dont le versement a été différé et, pour chacun des mois suivants, à 1 % dudit montant. Pour le calcul de cette indemnité, qui ne peut être inférieure à 5 F, toute période d'un mois commencée est comptée entièrement. ; que sur le fondement de ces dispositions, qui ne font aucune distinction, en cas de déclaration faisant apparaître une base d'imposition insuffisante, entre la période courant de la date à laquelle l'impôt aurait dû être payé et la date de notification de redressement et la période courant de la date de la notification de redressement à celle de l'avis de mise en recouvrement des droits en principal, les indemnités de retard doivent être calculées à raison du montant des sommes dont le versement a été différé et en retenant, pour l'application des prescriptions susmentionnées de l'article 1727 du code général des impôts, le nombre de mois compris entre la date à laquelle les droits auraient dû au plus tard être acquittés et la date du paiement effectif ;
Considérant, en premier lieu, que les indemnités de retard prévues par les dispositions précitées de l'article 1727 du code général des impôts sont dues de plein droit sur la base de l'imposition à laquelle elles s'appliquent et n'impliquent ainsi aucune appréciation par l'administration fiscale du comportement du contribuable ; qu'elles n'ont, par suite, pas le caractère d'une sanction mais celui d'une réparation du préjudice pécuniaire subi par le Trésor en cas de paiement insuffisant ou tardif ou en cas de défaut de paiement de l'impôt ; qu'il suit de là que la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ ne saurait valablement soutenir qu'en raison du principe d'application immédiate et rétroactive par le juge de la loi répressive nouvelle plus douce, le régime des intérêts de retard prévu par les dispositions de la loi du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières doit être substitué au régime antérieur appliqué par l'administration ;
Considérant, en deuxième lieu, que la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ soutient que le complément d'indemnité de retard mis en recouvrement le 20 octobre 1992 aurait la nature d'une pénalité de recouvrement, distinct de la pénalité d'assiette initiale et dont le fait générateur serait intervenu après l'entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 1987 ; que les indemnités de retard appliquées à la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ constituent un accessoire des impositions litigieuses et sont, en conséquence, régies par la législation en vigueur à la date du fait générateur de la pénalité ; que le complément d'indemnité de retard mis en recouvrement le 20 octobre 1992 en raison du retard constaté dans le paiement du rappel de droits, trouve, comme ce dernier, son fondement dans l'inobservation, par ladite société, antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 1987, des règles légales d'assiette de la taxe sur la valeur ajoutée et résulte seulement d'une nouvelle liquidation, en raison du temps écoulé depuis la mise en recouvrement initiale, de l'indemnité de retard alors assignée et mise en recouvrement le 4 octobre 1988, et dont le montant ne peut être définitivement calculé qu'en fonction de la date du paiement intégral des droits en principal auxquels elle correspond ; que ledit complément ne saurait, par suite, être regardé comme relevant d'un fait générateur intervenu après l'entrée en vigueur de la loi du 8 juillet 1987 ; qu'il suit de là que le moyen soulevé par la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales et en particulier de la référence faite à un rehaussement d'imposition , que le droit qu'elles reconnaissent au contribuable, de se prévaloir, à l'encontre de l'administration, de l'interprétation donnée par celle-ci d'un texte fiscal, a pour seul objet de lui permettre de contester le bien-fondé d'une imposition à l'établissement de laquelle l'administration a procédé en faisant usage de ses pouvoirs de contrôle et de reprise, et ne peut, en revanche, fonder une contestation du bien-fondé propre des intérêts de retard ou majorations dont a été assortie cette imposition ; que le moyen tiré de la doctrine contenu dans la documentation administrative de base 13 N-1121 n° 4 à jour au 1er janvier 1985 ne peut, par suite, qu'être également écarté ;
Considérant, en quatrième lieu, que contrairement à ce que soutient la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ, les dispositions de la loi du 8 juillet 1987 qui définissent le nouveau régime de pénalités applicable aux insuffisances de déclarations, pénalités dont le fait générateur est intervenu après l'entrée en vigueur de ladite loi, ne contiennent aucune garantie de procédure nouvelle applicable au 20 octobre 1992, date de mise en recouvrement des impositions contestées ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le complément d'indemnité de retard litigieux trouve son fondement dans les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières ; qu'il suit de là que la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ n'est en tout état de cause pas fondée à se plaindre de ce que l'avis de mise en recouvrement du 20 octobre 1992 n'aurait pas fait référence aux dispositions du code général des impôts postérieures à l'entrée en vigueur de ladite loi ;
Considérant, en sixième lieu, que les impositions contestées ont été mises en recouvrement conformément aux dispositions légales et réglementaires en vigueur ; qu'il suit de là que la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ ne saurait utilement soutenir de ce que l'administration se prévaudrait, pour justifier le maintien de ces impositions, de sa propre turpitude ;
Considérant, en septième lieu, que les impositions litigieuses ne sauraient être regardées, du fait qu'elles ont été calculées sur la période courant des notifications de redressement à la mise en recouvrement des rappels de droit en principal, comme faisant obstacle à la bonne administration, à l'accès à la justice ou à la portée utile des dispositions existantes ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que, pour ces raisons, les principes généraux du droit communautaire et les principes généraux du droit auraient été méconnus ne peut en tout état de cause qu'être écarté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ doivent dès lors être rejetées ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société COMPAGNIE DES GAZ DE PETROLE PRIMAGAZ est rejetée.
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N° 00PA03810