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13/05/2003 | FRANCE | N°99PA03428

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2eme chambre, 13 mai 2003, 99PA03428


VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

VU le code justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2003 :

- le rapport de M. MAGNARD, premier conseiller,

- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du jugement en date du 1er juin 1999 par lequel le tribunal ad

ministratif de Paris a ordonné le remboursement au profit de la société Steeple Contree du crédit de...

VU les autres pièces du dossier ;

VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

VU le code justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 avril 2003 :

- le rapport de M. MAGNARD, premier conseiller,

- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du jugement en date du 1er juin 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a ordonné le remboursement au profit de la société Steeple Contree du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait au 31 mars 1994 pour un montant de 550 000 F ;

En ce qui concerne le moyen tiré du caractère frauduleux de l'opération pilotée par la société Steeple Contree :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel et qu'aux termes du I de l'article 271 du même code : La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ; qu'il résulte de ces dispositions qu'une activité soumise à la taxe sur la valeur ajoutée donne droit à la déduction ou, le cas échéant, au remboursement de la taxe ayant grevé les éléments du prix de revient de cette activité, dès que celle-ci a été entreprise, et sans qu'il y ait lieu d'attendre la réalisation du fait générateur de la taxe due à raison des affaires faites par le contribuable dans l'exercice de cette activité ; que, sauf dans le cas de situations frauduleuses ou abusives, le droit à déduction et à remboursement reste acquis lorsque, en raison de circonstances étrangères à sa volonté, l'assujetti n'a jamais fait usage desdits biens et services pour réaliser des opérations taxées ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société Steeple Contree a été constituée le 25 avril 1991 pour assurer le pilotage d'un programme immobilier à Viuz-en-Sallaz (Haute-Savoie) ; qu'après délibération du Conseil municipal de la commune en date du 7 décembre 1990 prévoyant la révision générale du plan d'occupation des sols, une convention d'autorisation d'études a été signée le 17 mai 1991 entre la commune et la société Steeple Contree ; que des études ont été entreprises à l'initiative de cette société pour la constitution d'un dossier d'autorisation de création d'une unité touristique nouvelle ; que ce dossier a été approuvé le 10 décembre 1993 par le Conseil municipal de la commune ; que le refus en date du 26 avril 1994 du préfet de la région Rhône-Alpes d'approuver la création d'une unité touristique nouvelle a été attaqué par la commune de Viuz-en-Sallaz devant le tribunal administratif de Grenoble ; que les travaux de révision du plan d'occupation des sols se sont par ailleurs poursuivis, aboutissant le 2 février 1995 à une délibération du Conseil municipal approuvant sa révision partielle sur le secteur concerné ; qu'un dossier de constitution d'une zone d'aménagement concerté a été établi en mars 1995 par la direction départementale de l'équipement de la Haute-Savoie ; que les procédures nécessaires aux acquisitions foncières impliquées par le projet ont été engagées ; qu'ainsi, nonobstant l'abandon du projet au cours de l'année 1995 suite à l'élection d'une nouvelle municipalité, la réalité du projet de programme immobilier doit être regardée comme établie ; que l'administration ne prouve pas que les démarches et les procédures susmentionnées aient été entreprises dans un cadre frauduleux en se bornant à invoquer un courrier d'une association de protection de l'environnement hostile au projet, le caractère imprécis de certaines factures produites, et le fait que la société ait changé de siège social ; qu'enfin la double circonstance que la société Steeple Contree ait été créée après le lancement du projet et qu'il existerait des incertitudes sur l'origine des fonds ayant permis de financer les charges comptabilisées n'est pas de nature à remettre en cause le caractère sérieux de l'opération projetée ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'application du régime d'imposition des marchands de biens :

Considérant que si le ministre fait valoir que les marchands de biens sont imposables à la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge réalisée au titre de la vente d'immeubles, sans pouvoir déduire la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux acquisitions immobilières, il est constant qu'aucune acquisition immobilière n'a été effectuée par la société Steeple Contree ; qu'ainsi, le moyen est inopérant ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'irrégularité des factures produites :

Considérant qu'aux termes de l'article 271 du code général des impôts : 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération ; qu'aux termes de l'article 223 de l'annexe II au même code, pris sur le fondement des dispositions de l'article 273 pour l'application de l'article 271 précité : 1. La taxe dont les entreprises peuvent opérer la déduction est... celle qui figure sur les factures d'achat qui leur sont délivrées par leurs fournisseurs, dans la mesure où ces derniers étaient légalement autorisés à la faire figurer sur lesdites factures... 2. La déduction ne peut être opérée si les entreprises ne sont pas en possession... desdites factures... ; que, par facture , au sens de ces dispositions, il faut entendre tout document, suffisamment précis et détaillé, permettant de connaître la nature des fournitures et prestations, l'identité du débiteur et celle du créancier ;

Considérant, en premier lieu, que l'administration fait valoir que certaines factures mentionnent une adresse inexacte ou ne mentionnent pas d'adresse du débiteur ; qu'il résulte toutefois de l'examen de ces factures qu'elles ont été établies à l'ordre de la société Steeple Contree ; que la circonstance que l'adresse n'ait pas été précisée sur certaines factures et que d'autres aient été envoyées à l'adresse d'un ancien siège social ou à une adresse où le gérant de la société, M. Bernard X..., exerçait des activités professionnelles ne saurait faire obstacle à la déduction et au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée y figurant ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'administration soutient que certaines factures ne mentionnent pas le nom de la société ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les factures établies par la Safer sont libellées au nom de M. Bernard X..., gérant de la société Steeple Contree ; qu'elles doivent par suite être regardées comme ayant été établies au nom de la société Steeple Contree ; que contrairement à ce que soutient le ministre, la facture Zurfluh Pringault en date du 9 juillet 1991 a bien été établie au nom de la société Steeple Contree ; qu'en revanche il résulte de l'instruction que les six factures mensuelles de Zurfluh Pringault des 30 avril, 31 mai, 1er juillet, 1er août, 2 septembre et 1er octobre 1991 ont été établies à l'ordre de M. X... lequel exerçait d'autres activités professionnelles que celles de gérant de la société Steeple Contree ; que la facture Saint James du 27 janvier 1991 n'a pas été établie au nom de la société ; qu'il en est de même de la facture France Télécom en date du 22 janvier 1993 et des factures Dublanchy en date des 15 janvier 1991, 25 août 1993, 1er septembre 1993 et 7 mars 1994, cette dernière facture ayant d'ailleurs été produite deux fois ; que ces treize factures ne sauraient par suite ouvrir à la société Steeple Contree un droit à déduction à hauteur de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elles mentionnent ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il est constant que les factures Zurfluh Pringault du 15 avril 1991 et Figec du 6 octobre 1991 ont été établies par des prestataires permanents de la société Steeple Contree en matière d'assistance comptable et juridique ; que le seul fait que l'intitulé desdites factures ne fasse état que de vacations d'assistance sans en préciser la nature, ne saurait, dans les circonstances de l'espèce, faire obstacle au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée correspondante ;

Considérant, en quatrième lieu, que la facture Figec reçue par la société Steeple Contree le 9 novembre 1991 n'est pas datée ; que par suite elle ne peut être regardée comme un document par lequel le prestataire de services concerné se reconnaît comme débiteur du montant de taxe sur la valeur ajoutée correspondant et ne saurait par suite ouvrir droit à déduction ;

Considérant, en cinquième lieu, que l'argument selon lequel la facture de déménagement Interdean en date du 27 janvier 1993 correspondrait à de l' électroménager n'est pas de nature à justifier le refus de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur cette facture ;

Considérant en sixième lieu qu'en faisant valoir de manière générale que le libellé des factures ne retracerait pas précisément la nature des prestations fournies et ne permettrait pas de s'assurer que les charges litigieuses ont été engagées pour les besoins de l'exploitation, le ministre ne met pas la Cour en mesure d'apprécier la portée de son argumentation dès lors qu'il n'identifie pas avec précision les factures contestées pour ce motif et qu'une grande partie des prestations de conseil facturées l'ont été à partir de contrats-cadre déterminant la nature des services à fournir pour l'élaboration du programme immobilier susmentionné ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures produites au dossier et ouvrant droit à déduction de la part de la société Steeple Contree s'élève à 324 637,23 F ; que le ministre est par suite fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont ordonné le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée litigieuse à hauteur de 225 362,77 F correspondant aux quatorze factures susmentionnées n'ouvrant pas droit à déduction ; que, pour le surplus, son recours ne peut qu'être rejeté ;

D E C I D E

Article 1er : La somme que l'Etat doit rembourser à la société SOFRA qui a acquis la créance correspondant au crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont la société Steeple Contree disposait à l'issue du premier trimestre de l'année 1994 est limitée à 324 637,23 F.

Article 2 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.

Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 1er juin 1999 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent jugement.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE, à la SARL Steeple Contree et à la société Sofra.

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N° 99PA03428


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2eme chambre
Numéro d'arrêt : 99PA03428
Date de la décision : 13/05/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés FARAGO
Rapporteur ?: M. MAGNARD
Rapporteur public ?: M. BOSSUROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-05-13;99pa03428 ?
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