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22/04/2003 | FRANCE | N°98PA00066

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4eme chambre, 22 avril 2003, 98PA00066


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 janvier 1998, présentée pour le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANÇAISE, représenté par le président du Gouvernement, dont le siège est ..., par la SCP de CHAISEMARTIN-COURJON, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANÇAISE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° s 96-177 et 97-36 en date du 21 octobre 1997 par lequel le tribunal administratif de Papeete a annulé les délibérations n°s 96-84 et 96-88 du 25 juin 1996 de l'assemblée de la Polynésie française, régle

mentant la pratique des jeux de hasard et instituant une taxe sur lesdits j...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 janvier 1998, présentée pour le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANÇAISE, représenté par le président du Gouvernement, dont le siège est ..., par la SCP de CHAISEMARTIN-COURJON, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANÇAISE demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° s 96-177 et 97-36 en date du 21 octobre 1997 par lequel le tribunal administratif de Papeete a annulé les délibérations n°s 96-84 et 96-88 du 25 juin 1996 de l'assemblée de la Polynésie française, réglementant la pratique des jeux de hasard et instituant une taxe sur lesdits jeux ainsi que l'arrêté n° 452/PR du 8 juillet 1997 du président du gouvernement autorisant l'association sportive Dragon à organiser une tombola,

2°) de rejeter le déféré et la requête présentés devant le tribunal administratif de Papeete, respectivement, par le haut-commissaire de la République en Polynésie française et par Mme Y... ;

3°) de condamner l'Etat et Mme Y... à lui verser la somme de 20.000 F sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

........................................................................................................

VU les autres pièces du dossier ;

VU la loi organique n° 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la POLYNESIE FRANCAISE ;

VU la loi du 21 mai 1836 modifiée portant prohibition des loteries ;

VU la loi n° 83-628 du 12 juillet 1983 modifiée relative aux jeux de hasard ;

VU la loi n° 96-313 du 12 avril 1996 complétant le statut d'autonomie de la POLYNESIE FRANCAISE ;

VU le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2003 :

- le rapport de Mme REGNIER-BIRSTER, premier conseiller,

- les observations de Me de X..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le TERRITOIRE DE LA POLYNESIE FRANCAISE,

- et les conclusions de M. HEU, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que pour contester la régularité du jugement attaqué, le territoire requérant soutient que les premiers juges auraient méconnu l'article 113 de la loi organique du 12 avril 1996 susvisée aux termes duquel : Lorsqu'un recours pour excès de pouvoir invoque l'illégalité de délibérations de l'assemblée de la Polynésie française (...) fondée sur l'inexacte application de la répartition des compétence entre l'Etat, le territoire et les communes ou si ce moyen est soulevé d'office, le tribunal administratif transmet le dossier sans délai pour avis au Conseil d'Etat, par un jugement qui n'est susceptible d'aucun recours... , dès lors que, pour annuler les actes attaqués, ils se seraient fondés, en définitive, sur un motif mettant en cause la répartition des compétences entre l'Etat et les collectivités territoriales ; qu'une telle argumentation manque en fait, dès lors que le tribunal n'a finalement fondé l'annulation qu'il a prononcée, d'une part, de la délibération n° 96-84 que sur la méconnaissance de la seule répartition des compétences entre l'assemblée et le conseil des ministres et, d'autre part, de l'arrêté du 30 juillet 1997 que sur un vice de forme tenant à l'absence d'intervention d'un décret en Conseil d'Etat à la date d'adoption dudit arrêté ;

Considérant, en second lieu, que si le requérant soutient que les dispositions de l'article R. 94 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel applicable lors de l'instruction de la demande auraient été méconnues, Mme Y... ayant omis de joindre copie de l'arrêté du 30 juillet 1997 dont elle demandait l'annulation, il ressort de l'examen des pièces jointes au dossier de première instance, que ce moyen, en tout état de cause, manque en fait ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance de Mme Y... :

Considérant que Mme Y..., résidente en Polynésie française, est susceptible d'être sollicitée pour participer aux différents jeux de hasard réglementés par les actes dont elle entend contester la base légale ; que, par suite, cette simple qualité suffisait, ainsi que l'a retenu le tribunal, à lui donner intérêt pour contester la légalité des actes attaqués ;

Sur la légalité de la délibération n° 96-84 :

Considérant que, par la délibération attaquée portant réglementation des jeux de hasard proposés à l'occasion, pendant la durée et dans l'enceinte des fêtes foraines ou des fêtes traditionnelles, l'assemblée de la Polynésie française a précisé que ces activités ne pouvaient être organisées durant les périodes d'activité scolaire et a renvoyé au conseil des ministres le soin de fixer par arrêté, pris après avis du maire concerné, la délimitation de ces enceintes ainsi que la période d'ouverture de ces jeux ;

Considérant qu'aux termes de l'article 65 de la loi organique susvisée du 12 avril 1996 : Dans le respect de la législation applicable en Polynésie française en matière de jeux de hasard et des décrets en Conseil d'Etat qui fixent, en tant que de besoin, les règles relatives au contrôle par l'Etat de l'installation et du fonctionnement des casinos, cercles, jeux et loteries, l'assemblée de la Polynésie française détermine, par délibération, les autres règles applicables à ces jeux et notamment les circonstances dans lesquelles ils peuvent être offerts au public ; qu'aux termes de l'article 28 de la même loi : Le conseil des ministres : ... 22° Autorise l'ouverture des cercles et des casinos dans les conditions fixées par l'article 65... ; qu'il résulte de ces dispositions que seule l'assemblée est compétente pour fixer l'ensemble des règles qui président au déroulement des jeux de hasard en litige ; que, par suite, l'assemblée a méconnu sa propre compétence en confiant au conseil des ministres le soin de déterminer lesdites règles ;

Considérant qu'il s'ensuit que la POLYNESIE FRANCAISE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a annulé la délibération n° 96-84 ;

Sur la légalité de la délibération n° 96-88 :

Considérant qu'aux termes de l'article 47 de la loi organique du 12 avril 1996 : L'assemblée de la Polynésie française... se réunit de plein droit le deuxième jeudi qui suit l'élection de ses membres ; qu'aux termes de l'article 48 de ladite loi : L'assemblée de la Polynésie française tient chaque année deux sessions ordinaires qui s'ouvrent de plein droit dans les conditions précisées ci-après. La première, dite session administrative, s'ouvre le deuxième jeudi du mois d'avril et dure soixante jours ... Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, la date d'ouverture de la session ordinaire est celle de la réunion de plein droit qui suit les élections, lorsque celles-ci ont lieu pendant la période normale d'une session ordinaire ; qu'enfin l'article 49 dispose que : L'assemblée de la Polynésie française se réunit en session extraordinaire sur convocation de son président conformément à la demande qui lui est présentée par écrit, soit par le président du gouvernement de la Polynésie française, soit par la majorité absolue des conseillers territoriaux, soit, en cas de circonstances exceptionnelles, par le haut-commissaire. La demande fixe la date d'ouverture et l'ordre du jour de la session ; qu'en l'absence de toute disposition transitoire ayant organisé la succession de l'assemblée de la Polynésie française à l'assemblée territoriale précédemment instituée par la loi organique n° 84-820 du 6 septembre 1984, le régime des sessions de la nouvelle assemblée élue, après l'entrée en vigueur de la loi du 12 avril 1996, se trouvait exclusivement régi par ces dispositions ;

Considérant que les élections de l'assemblée de la Polynésie française ayant eu lieu le 12 mai 1996, soit durant la période de la session ordinaire dite administrative, cette session s'est trouvée ouverte, pour une durée de soixante jours, le deuxième jeudi qui a suivi l'élection, soit le 23 mai 1996 ; que, par suite, il n'y avait pas lieu, pour le président de l'assemblée de la Polynésie française, d'ouvrir, par arrêté du 30 mai 1996, une session extraordinaire à compter du 5 juin 1996 ; que, toutefois, il ressort du compte rendu de la séance de l'assemblée du 25 juin 1996 que celle-ci a, préalablement à l'examen de la décision attaquée, délibéré sur l'ordre du jour complémentaire présenté par le président du gouvernement et, par son vote, en a repris la teneur, en application de l'article 53 de la loi du 12 avril 1996 applicable aux sessions ordinaires aux termes duquel : L'assemblée fixe l'ordre du jour de ses délibérations... ; que, c'est dès lors à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur le caractère irrégulier de la session extraordinaire au cours de laquelle la délibération contestée a été adoptée pour l'annuler ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Y... devant le tribunal administratif de Papeete ;

Considérant, d'une part, que la circonstance que les décrets en Conseil d'Etat auxquels l'article 65 de la loi organique susvisée du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française renvoie le soin de fixer, en tant que de besoin, les règles relatives au contrôle par l'Etat de l'installation et du fonctionnement de ces jeux et loteries, n'existaient pas à la date de la délibération attaquée, n'est pas de nature à entacher la délibération attaquée d'un vice d'incompétence dès lors que ladite délibération s'est bornée à instituer une taxe sur les jeux de hasard ;

Considérant, d'autre part, que l'illégalité entachant la délibération n° 96-84 par laquelle l'assemblée de la Polynésie française a réglementé la pratique des jeux de hasard est sans incidence sur la légalité de la délibération n° 96-88 susvisée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la POLYNESIE FRANÇAISE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a annulé la délibération n° 96-88 ;

Sur la légalité de l'arrêté du 8 juillet 1997 :

Considérant que l'arrêté du 8 juillet 1997 autorisant le président de l'association sportive Dragon à organiser une tombola a été nécessairement pris sur le fondement de la délibération n° 96-84 de l'assemblée de la Polynésie française portant réglementation des jeux de hasard ; que l'illégalité de cette délibération entache, par voie de conséquence, d'illégalité ledit arrêté ; qu'il s'ensuit que la POLYNESIE FRANCAISE n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Papeete a annulé l'arrêté en cause ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que LA POLYNESIE FRANÇAISE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à Mme Y... la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat et Mme Y..., par application des mêmes dispositions, à payer à LA POLYNESIE FRANÇAISE la somme qu'elle demande, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Papeete du 21 octobre 1997 est annulé en tant qu'il annule la délibération n°96-88 du 25 juin 1996 de l'assemblée de la Polynésie française.

Article 2 : Les conclusions présentées par Mme Y... devant le tribunal administratif de Papeete et tendant à l'annulation de la délibération n° 96-88 du 25 juin 1996 de l'assemblée de la Polynésie française sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de LA POLYNESIE FRANCAISE est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme Y... tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

2

N° 98PA00066


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4eme chambre
Numéro d'arrêt : 98PA00066
Date de la décision : 22/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JANNIN
Rapporteur ?: Mme REGNIER-BIRSTER
Rapporteur public ?: M. HEU
Avocat(s) : SCP DE CHAISEMARTIN-COURJON ;

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2003-04-22;98pa00066 ?
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