(5ème chambre)
VU, enregistrés au greffe de la cour les 27 janvier 1998 et 9 mars 1999, la requête et le mémoire ampliatif, présentés par M. Ferdinand X..., ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9404287 du 20 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1989 et 1990 ;
2 ) de prononcer le sursis à exécution du jugement et la décharge des cotisations d'impôt en litige ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 décembre 2001 :
- le rapport de M. VINCELET, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. X... a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 1989 et 1990 ; que, par la présente requête, il demande l'annulation du jugement du 20 novembre 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de ces impositions ;
Sur le prétendu désistement du ministre :
Considérant que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie étant défendeur dans la présente instance, il ne saurait, en toute hypothèse, être regardé comme s'étant désisté ; que, par suite, la circonstance qu'il n'ait pas produit d'observations en défense dans les six mois de la communication de la requête de M. X... est sans incidence ;
Sur les conclusions en décharge des impositions contestées :
En ce qui concerne le moyen tiré de l'inopposabilité du livre des procédures fiscales et du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 5 novembre 1870 : "Les lois et décrets seront obligatoires, à Paris, un jour franc après la promulgation, et partout ailleurs, dans l'étendue de chaque arrondissement, un jour franc après que le Journal Officiel qui les contient sera parvenu au chef-lieu de cet arrondissement" ;
Considérant que ces dispositions, contenues dans un texte qui, en son article premier, a institué le Journal Officiel de la République française, n'ont pu avoir pour objet et pour effet, en déterminant les règles applicables de publication et d'opposabilité des lois et décrets, que de se substituer à celles de l'article 12 du décret de la Convention nationale du 12 vendémiaire an IV (4 octobre 1795) qui, créant le bulletin des lois, avait défini ces règles une première fois ; qu'il suit de là que le requérant ne peut utilement invoquer l'inopposabilité du livre des procédures fiscales au motif que l'arrivée du Journal officiel le contenant à Paris n'aurait pas été portée sur le registre prévu à l'article 12 du décret du 12 vendémiaire an IV précité ;
Considérant que si le requérant soutient que le décret du 5 novembre 1870 aurait été pris par une autorité incompétente, il résulte des circonstances exceptionnelles dans lesquelles il est intervenu que ce texte a pu être pris régulièrement par le Gouvernement de la défense nationale ;
En ce qui concerne le moyen tiré de la validité de la codification effectuée par le livre des procédures fiscales :
Considérant que l'article 78 de la loi de finances du 21 décembre 1961 a habilité le Gouvernement à procéder par décrets en Conseil d'Etat à une refonte du code général des impôts ; que le livre des procédures fiscales qui s'est borné à codifier des dispositions contenues dans l'ancien code général des impôts est issu de cette codification ; que celle-ci a été régulièrement effectuée par voie des décrets en Conseil d'Etat, n s 81-859 et n 81-860 du 15 septembre 1981 publiés au Journal Officiel de la République française du 18 septembre 1981 et 81-866 du 15 septembre 1981, publié au Journal Officiel de la République française du 20 septembre 1981, décrets pris après décision du Conseil Constitutionnel ; que, dès lors, le moyen tiré de l'absence de loi d'habilitation et de l'inexistence du livre des procédures fiscales manque en fait ; que, par suite, M. X... ne peut utilement soutenir qu'aucun texte législatif ne fonde la codification réalisée par le livre des procédures fiscales et que celui-ci ne lui serait en conséquence pas opposable ;
En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de recours à l'interlocuteur départemental :
Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L.10 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue des articles 8-I et 8-II de la loi n 87-502 du 8 juillet 1987 et applicable à compter du 1er janvier 1988 : "Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L.12 et L.13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration" ; que le 5 du chapitre III de ladite charte indique : "Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal ... Si après ces contacts, des divergences importantes subsistent, vous pouvez faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur" ;
Considérant que les redressements assignés à M. X... procèdent, ainsi qu'il résulte de l'instruction, d'un contrôle sur pièces de son dossier ; que l'intéressé n'ayant fait l'objet d'aucune des vérifications prévues par les articles L.12 et L.13 du livre des procédures fiscales, le moyen tiré de ce qu'il aurait été irrégulièrement privé du bénéfice de l'interlocution départementale est inopérant ;
En ce qui concerne le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires :
Considérant qu'aux termes de l'article L.59 A du livre des procédures fiscales : "La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient : 1 Lorsque le désaccord porte soit sur le montant du bénéfice industriel et commercial, du bénéfice non commercial, du bénéfice agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition, soit sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 257 du 6 et du 1 du 7 du code général des impôts ; 2 Lorsqu'il s'agit de différends portant sur l'application du 1 du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du code général des impôts relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du bénéfice des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du code précité" ;
Considérant que les redressements en litige, qui ont trait à la remise en cause de frais réels exposés par un salarié et déductibles dans la catégorie des traitements et salaires, ainsi qu'à la détermination de revenus fonciers, échappent à la compétence de l'instance susmentionnée ; qu'ainsi est également inopérant le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission avant la mise en recouvrement des impositions contestées ;
En ce qui concerne les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi :
Considérant que M. X... ne justifie pas que les frais afférents à son activité salariée ont dépassé, pour les années en cause, le montant de la déduction forfaitaire de dix pour cent prévue par l'article 83 du code général des impôts en faveur des contribuables bénéficiaires de traitements et salaires ; que l'intéressé ne peut ainsi bénéficier d'une déduction supplémentaire de ces mêmes frais selon le mode réel ; que l'absence de remise en cause par le service d'une telle déduction pour les années antérieures ne peut constituer une interprétation formelle par le service de la loi fiscale, au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ; que si M. X... invoque le bénéfice de la réponse ministérielle au secrétaire du syndicat de défense des intérêts professionnels des travailleurs des Halles, il ne fournit à la cour aucune précision permettant d'identifier cette réponse ;
En ce qui concerne les revenus fonciers :
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des disposition du II de l'article 15 du code général des impôts que les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu ; qu'il s'ensuit que les charges afférentes à ces logements ne peuvent pas, dans ce cas, venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu net global imposable ; que M. X..., dont la propriété de Chateaurenard est restée vacante depuis l'année 1977 et dont il est constant qu'il n'a pas pris toutes les dispositions utiles pour la louer, doit être regardé comme s'étant réservé la jouissance des locaux et ne peut, par suite, déduire de son revenu foncier imposable les dépenses de réparation et d'entretien desdits locaux ;
Considérant, en second lieu, que si, d'après le 1 de l'article 13 du code général des impôts le revenu imposable est déterminé sous déduction "des dépenses effectuées en vue de l'acquisition et de la conservation du revenu", ces dispositions ne s'appliquent, en vertu du 3 du même article, qu'aux dépenses de cette nature dont la déduction n'est pas prévue par les dispositions particulières relatives aux diverses catégories de revenus ; qu'en particulier, elles ne peuvent pas être utilement invoquées lorsque le code a prévu pour une catégorie de revenus, un régime forfaitaire de déduction exclusif de la déduction des dépenses réelles ; qu'aux termes de l'article 31 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux revenus fonciers des années 1989 et 1990 : "I. Les charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net comprennent : - 1 Pour les propriétés urbaines : ... - e. une déduction forfaitaire fixée à 10 % des revenus bruts et représentant les frais de gestion, l'assurance et l'amortissement" ; que ce texte, fixant forfaitairement à 10% des revenus bruts le montant de certaines charges déductibles, parmi lesquelles figurent les "frais de gestion" fait obstacle à ce que les contribuables se prévalent du montant réel de cette catégorie de charges, en particulier des frais de procès exposés à l'occasion de différends avec les locataires de leurs immeubles ; que, dès lors, les frais de procès intentés par le requérant contre les locataires de sa propriété doivent être exclus des charges de la propriété susceptibles d'être déduites pour leur montant réel sur le fondement de l'article 13 du code ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.