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11/12/2001 | FRANCE | N°97PA03126

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 11 décembre 2001, 97PA03126


(2ème chambre B)
VU la requête enregistrée au greffe de la cour le 14 novembre 1997, présentée pour Mme Marylène Y... X..., par Me GRYNER, avocat ; Mme Y... X... demande à la cour :
1°) d'annuler en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses conclusions, le jugement n 9105960/2 et 9201292/2 en date du 11 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1982 dans les rôles de la ville de Paris ainsi que des pénalités

dont il a été assorti, d'autre part, à l'annulation des avis d'impositio...

(2ème chambre B)
VU la requête enregistrée au greffe de la cour le 14 novembre 1997, présentée pour Mme Marylène Y... X..., par Me GRYNER, avocat ; Mme Y... X... demande à la cour :
1°) d'annuler en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses conclusions, le jugement n 9105960/2 et 9201292/2 en date du 11 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à la décharge de l'impôt sur le revenu auquel elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1982 dans les rôles de la ville de Paris ainsi que des pénalités dont il a été assorti, d'autre part, à l'annulation des avis d'impositions relatifs à l'impôt sur le revenu des années 1980 à 1982 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions contestées ;
3°) de condamner l'Etat à lui rembourser les frais exposés tant en première instance qu'en appel en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
4 ) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2001 :
- le rapport de M. BATAILLE, premier conseiller,
- les observations de Me GRYNER, avocat, pour Mme Y... X...,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. et Mme Y... X... ont fait l'objet d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble portant sur les années 1979 à 1982 ; que M. Y... X..., décédé en 1987, qui exploitait à titre individuel plusieurs magasins d'optique en Guyane, Martinique et Guadeloupe, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les mêmes années ; qu'à la suite de ces vérifications, des redressements ont été effectués au titre des années 1980, 1981 et 1982, d'une part, selon la procédure contradictoire pour l'année 1980 et la procédure de taxation d'office pour les années 1981 et 1982 en matière d'imposition globale à l'impôt sur le revenu, d'autre part, selon la procédure d'évaluation d'office pour les trois années en matière de bénéfices industriels et commerciaux ;
Considérant que Mme Y... X... demande l'annulation, en tant qu'il n'a fait que partiellement droit à ses conclusions, du jugement n 9105960/2 et 9201292/2 en date du 11 avril 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'impôt sur le revenu, en droits et pénalités, auquel elle a été assujettie au titre des années 1980 à 1982 dans les rôles de la ville de Paris ainsi que la décharge desdites impositions ; Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision en date du 8 juin 2001, postérieure à l'introduction de la requête, le chef des services fiscaux de Paris Centre a prononcé le dégrèvement en pénalités, à concurrence d'une somme de 40.662 F, de l'impôt sur le revenu auquel Mme Y... X... a été assujettie au titre de l'année 1982 ; que les conclusions de la requête de Mme Y... X... relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la recevabilité de la requête : Considérant qu'il est constant que Mme Y... X..., par lettre du 7 mars 1996 enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 12 mars 1996, a prévenu celui-ci de son changement d'adresse ; que la notification du jugement du 11 avril 1996 a été adressée le 11 puis le 20 août 1996 à son ancienne adresse avant de revenir à son expéditeur avec la mention "n'habite pas à l'adresse indiquée" ; que, par suite, le délai d'appel de deux mois à compter de la notification du jugement prévu par l'article R. 229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable n'a pas commencé à courir et ne peut être opposé à la présente requête enregistrée au greffe de la cour le 14 novembre 1997 ; que, par suite la fin de non-recevoir opposée par l'administration et tirée de la tardiveté de la requête doit être rejetée ;
Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il est constant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que Mme Y... X..., par lettre enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 12 mars 1996, a prévenu celui-ci de son changement d'adresse ; que la convocation à l'audience du 28 mars 1996 de Mme Y... X... a été adressée le même jour , son ancienne adresse, alors qu'il appartenait au tribunal administratif de Paris de procéder à une nouvelle convocation en temps utile à la nouvelle adresse en vertu de l'article R.193 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors en vigueur selon lequel toute partie doit être avertie du jour où l'affaire sera appelée à l'audience ; que par suite l'article 4 du jugement attaqué, seul contesté, est entaché d'irrégularité et doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par Mme Y... X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur la demande d'annulation des avis d'imposition en date du 30 novembre 1988 au titre des années 1980 à 1982 :
Considérant qu'en tout état de cause, les erreurs alléguées de liquidation de l'impôt qui seraient contenues dans les avis d'imposition au titre des années 1980 et 1982 sont sans effet sur la régularité de la procédure d'imposition et le bien-fondé des impositions ; que, par suite, les conclusions tendant à l'annulation de ces avis doivent être rejetées ;
Sur la demande en décharge des impositions au titre des années 1980 à 1982 :
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'évaluation d'office en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 1980, 1981 et 1982 :
Considérant, en premier lieu, que la requérante soutient que la procédure d'évaluation d'office en matière de bénéfices industriels et commerciaux au titre des années 1980 à 1982 serait irrégulière du fait de l'absence de mention de cette procédure sur les notifications de redressement ; que, toutefois, la notification de redressement du 14 décembre 1984 concernant l'année 1980 et la notification de redressement du 26 avril 1985 concernant les années 1981 et 1982 mentionnent explicitement le recours à la procédure d'évaluation d'office sur le fondement de l'art. L.73 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, le moyen précité manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que la requérante soutient d'une part que, si la mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office ne requiert pas une mise en demeure préalable de déposer pour l'année concernée la déclaration spéciale relative aux bénéfices industriels et commerciaux en application de l'article L.73 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur, cette mise en demeure est toutefois recommandée par une instruction 13 L-I-78 du 17 janvier 1978 et d'autre part qu'elle a déposé ses déclarations provisoires et définitives avant les dates limites de dépôt ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que les déclarations définitives relatives aux bénéfices industriels et commerciaux des années 1980, 1981 et 1982 ont été déposées les 4 décembre 1981, 9 septembre 1982 et 8 juillet 1983, soit postérieurement pour chaque année à la date limite de dépôt fixée au 15 mai de chaque année ; que la requérante ne saurait utilement invoquer une instruction en matière de procédure, laquelle en outre n'a fait que procéder à une simple recommandation ;
Considérant, en troisième lieu, que lorsque l'administration fiscale est en mesure d'établir, par d'autres moyens que les constatations qu'elle a effectuées au cours de la vérification de comptabilité d'un contribuable, que celui-ci encourait une imposition par voie d'imposition d'office, en particulier pour ne pas avoir souscrit dans les délais impartis les déclarations auxquelles il était astreint, les moyens tirés, comme en l'espèce, des irrégularités qui auraient pu entacher la vérification de comptabilité demeurent sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition alors même que l'administration, pour déterminer les bases d'imposition, a utilisé des éléments recueillis au cours de ladite vérification ;
Considérant, en quatrième et dernier lieu, que la requérante soutient que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été saisie malgré une demande en ce sens par lettre du 7 août 1985 ; que, toutefois, s'agissant de redressements en matière de bénéfices industriels et commerciaux établis selon la procédure d'évaluation d'office, dont il vient d'être dit ci-dessus qu'elle était régulière, ladite commission n'avait pas à être consultée ;
En ce qui concerne la régularité de la procédure de taxation d'office en matière de revenu global au titre des années 1981 et 1982 :

Considérant, en premier lieu, que Mme Y... X... fait valoir que la notification de redressement du 26 avril 1985 comporte en première page la mention non rayée, comme y invite pourtant le renvoi (3) en cas de procédure d'office, l'informant d'un délai de 30 jours pour acceptation ou observations conformément à l'article L.55 du livre des procédures fiscales en cas de procédure contradictoire ; que, toutefois, selon ledit renvoi, cette mention ne doit être rayée que si les redressements sont notifiés uniquement à la suite d'une imposition d'office ; qu'en l'espèce, cette notification de redressement comporte également des redressements de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période correspondant aux années 1981 et 1982 effectués selon la procédure contradictoire ; qu'ainsi ladite mention n'avait pas à être rayée par le vérificateur qui, au surplus, a mentionné en haut de chaque page qu'il était procédé à une taxation d'office en matière de redressements du revenu global ; que, par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure de taxation d'office du fait du maintien de ladite mention doit en tout état de cause être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la requérante soutient qu'elle a déposé en métropole des déclarations au titre de 1981 et 1982, même si celles-ci ont été tardivement présentées en raison de l'état de santé de M. Y... X..., il lui appartient d'apporter la preuve, indépendamment de l'ancienneté dudit dépôt, de ses allégations, notamment quant au lieu et la date de dépôt de ces déclarations prétendues ; qu'une telle preuve n'étant pas fournie par la requérante, le moyen précité doit être écarté ;
Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'en vertu du 1 de l'article L.66 et de l'article L.67 du livre des procédures fiscales sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus et n'ont pas régularisé leur situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure ;
Considérant que la requérante soutient qu'en l'espèce la taxation d'office est irrégulière du fait de la souscription des déclarations avant toute mise en demeure pour les années 1980 et 1981 et du fait, pour l'année 1982, de l'inexistence, contrairement aux allégations de l'administration, de la mise en demeure en date du 15 avril 1983, laquelle serait en outre antérieure à la date de dépôt légal de la déclaration pour l'année 1982 ; que la requérante entend se prévaloir non seulement des dispositions légales susrappelées des article L.66 et L.67 du livre des procédures fiscales mais également d'une instruction 13 L-7-88 du 6 mai 1988 ; que toutefois, la requérante ne peut utilement se prévaloir, s'agissant de la procédure, de ladite instruction ;
Considérant, d'une part, que, s'agissant de l'année 1980, la procédure de redressement en matière de revenu global a revêtu un caractère contradictoire ;

Considérant, d'autre part, que, s'agissant des années 1981 et 1982, le dépôt non contesté de déclarations provisoires ne dispensait pas la contribuable de déposer en temps utile les déclarations définitives ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration a mis en demeure, par lettre en date du 15 avril 1983, la contribuable, qui en a accusé réception le 18 avril 1983, de produire les déclarations de revenu global, ainsi d'ailleurs que les déclarations concernant les bénéfices industriels et commerciaux ; qu'il est constant, s'agissant de l'année 1982, que le délai pour déposer la déclaration de revenu global expirait le 16 mai 1983 et que la mise en demeure susdite était prématurée ; que toutefois le revenu global n'a été redressé que par suite du redressement du bénéfice industriel et commercial, régulièrement redressé, ainsi qu'il a été dit ci-dessus selon la procédure d'évaluation d'office ; que, par suite, la référence à une procédure de taxation d'office est à cet égard sans incidence ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant que la requérante soutient que les impositions ne sont pas fondées, concernant la remise en cause du taux d'amortissement des immeubles situés outre-mer retenu par M. Y... X... en application de la doctrine administrative 4 D - 143, la remise en cause de la déduction des frais d'entretien et de réparation, des fournitures de bureau, des dépenses de cadeaux, enfin la réintégration des frais financiers et produits accessoires ; qu'il lui appartient d'apporter la preuve, s'agissant d'une évaluation d'office, de l'exagération des bases d'imposition retenues ;
Considérant que la requérante n'apporte aucun élément permettant de retenir un taux d'amortissement de 5% plutôt que de 2% s'agissant des immeubles situés dans les départements d'outre-mer ; que les travaux d'entretien et de réparation de l'immeuble situé en Martinique à la suite d'un cyclone en 1981 ne sont également pas justifiés ; que ne sont pas fournies les factures justifiant des dépenses en matière de fournitures de bureau et de cadeaux allégués ; qu'il n'est également pas prouvé que les frais et charges des emprunts aient été supportés dans l'intérêt de l'entreprise alors que le solde du compte de l'exploitant était débiteur pour les trois années litigieuses ; que M. Y... X... a pris la décision de gestion qui lui est opposable d'inscrire à l'actif du bilan de son entreprise individuelle des installations en déduisant en contrepartie les amortissements afférents à ces immeubles et qu'en conséquence, l'administration a réintégré à bon droit dans les résultats de l'entreprise les produits équivalents à la valeur locative des locaux d'habitation en cause, en les assimilant à des produits accessoires de l'exploitation, la requérante n'apportant pas la preuve que partie de ces locaux était affectée à la conservation des archives de l'entreprise et au logement du personnel d'outre-mer ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme Y... X... n'apporte pas la preuve de l'exagération des bases d'imposition retenues;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'Etat à verser une somme à Mme Y... X... au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 40.662 F, en ce qui concerne les pénalités afférentes à l'impôt sur le revenu auquel Mme Y... X... a été assujettie au titre de l'année 1982, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de Mme Y... X....
Article 2 : L'article 4 du jugement n 9105960/2 et 9201292/2 en date du 11 avril 1996 du tribunal administratif de Paris est annulé..
Article 3 : Le surplus des conclusions des demandes de Mme Y... X... et de sa requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA03126
Date de la décision : 11/12/2001
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT OU INSUFFISANCE DE DECLARATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - BENEFICE REEL - RECTIFICATION ET TAXATION D'OFFICE.

PROCEDURE - JUGEMENTS - TENUE DES AUDIENCES - AVIS D'AUDIENCE.

PROCEDURE - VOIES DE RECOURS - APPEL - RECEVABILITE - DELAI D'APPEL.


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L73, L55, L67, L66
Code de justice administrative L761-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R229, R193
Instruction du 06 mai 1988 13L-7-88


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BATAILLE
Rapporteur public ?: Mme KIMMERLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-12-11;97pa03126 ?
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