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06/12/2001 | FRANCE | N°99PA01993

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5e chambre, 06 décembre 2001, 99PA01993


(5ème chambre)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 25 juin 1999, la requête présentée pour Mme Marie-Annick X..., par Me CHEVALLIER, avocat ; Mme X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9408884/7 du 17 mars 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 30 juillet 1992 par laquelle le président de la commission nationale de l'informatique et des libertés lui a fait savoir, en réponse à sa demande de communication des informations la concernant contenues dans les fichiers des services des renseignements

généraux, que l'un des membres de cette commission avait procédé a...

(5ème chambre)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 25 juin 1999, la requête présentée pour Mme Marie-Annick X..., par Me CHEVALLIER, avocat ; Mme X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9408884/7 du 17 mars 1999 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 30 juillet 1992 par laquelle le président de la commission nationale de l'informatique et des libertés lui a fait savoir, en réponse à sa demande de communication des informations la concernant contenues dans les fichiers des services des renseignements généraux, que l'un des membres de cette commission avait procédé aux vérifications prévues à l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et que la procédure devant la commission était désormais terminée ;
2 ) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision, s'analysant comme un refus de communication opposé par le ministre de l'intérieur ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10.000 F au titre des frais irrépétibles ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
VU la loi n 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ;
VU le décret n 91-1051 du 14 octobre 1991 portant application aux fichiers informatisés, manuels ou mécanographiques gérés par les services des renseignements généraux des dispositions de l'article 31, alinéa 3, de la loi n 78-17 du 6 janvier 1978 ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2001 :
- le rapport de M. DUPOUY, premier conseiller,
- les observations de Me CHEVALLIER, avocat, pour Mme X...,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que Mme X... a, le 5 décembre 1991, saisi la commission nationale de l'informatique et des libertés d'une demande tendant à ce que lui soient communiquées les informations la concernant contenues dans les fichiers des services des renseignements généraux ; que, par une lettre du 30 juillet 1992, le président de cette commission a avisé Mme X... que l'un des membres de la commission chargé de l'exercice du droit d'accès indirect avait procédé aux vérifications demandées en application des dispositions de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et du décret du 14 octobre 1991 relatif aux fichiers des renseignements généraux, et que la procédure auprès de la commission était désormais terminée ; que Mme X... a déféré au Conseil d'Etat, lequel a transmis la requête au tribunal administratif de Paris, la décision de refus de communication directe qui lui a ainsi été opposée par le ministre de l'intérieur et dont l'informait la lettre du 30 juillet 1992 ; que le tribunal administratif, après avoir par jugement avant dire droit du 4 mars 1998 ordonné au ministre de produire au juge les éléments du fichier des renseignements généraux comportant des informations concernant Mme X..., a, par jugement du 17 mars 1999, rejeté au fond sa demande ; que Mme X... fait appel de ce jugement ;
Sur la légalité du refus de communication :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 6 janvier 1978 : "Toute personne justifiant de son identité a le droit d'interroger les services ou organismes chargés de mettre en oeuvre les traitements automatisés dont la liste est accessible au public en application de l'article 22 ... en vue de savoir si ces traitements portent sur des informations nominatives la concernant et, le cas échéant, d'en obtenir communication" ; qu'aux termes de l'article 39 de la même loi : "En ce qui concerne les traitements intéressant la sûreté de l'Etat, la défense et la sécurité publique, la demande est adressée à la commission qui désigne l'un de ses membres appartenant ou ayant appartenu au Conseil d'Etat, à la Cour de cassation ou à la Cour des comptes pour mener toutes investigations utiles et faire procéder aux modifications nécessaires ...Il est notifié au demandeur qu'il a été procédé aux vérifications" ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 du décret n 91-1051 du 14 octobre 1991 : "Les informations mentionnées à l'article 2 ne pourront être collectées, conservées et traitées dans les fichiers des renseignements généraux, à l'exclusion de toute autre finalité, que dans les cas suivants : 1 Lorsqu'elles concernent des personnes qui peuvent, en raison de leur activité individuelle ou collective, porter atteinte à la sûreté de l'Etat ou à la sécurité publique, par le recours ou le soutien actif apporté à la violence ainsi que les personnes entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec celles-ci ; 2 Lorsque ces informations concernent des personnes ayant obtenu ou sollicitant une autorisation d'accès à des informations protégées en application du décret n 81-514 du 12 mai 1981 et qu'elles sont nécessaires pour apprécier la vulnérabilité de ces personnes à des pressions exercées par des personnes physiques ou morales susceptibles de porter atteinte à la sûreté de l'Etat ou à la sécurité publique ... 3 Lorsque ces informations sont relatives à des personnes physiques ou morales qui ont sollicité, exercé ou exercent un mandat politique, syndical ou économique ou qui jouent un rôle politique, économique, social ou religieux significatif ..." ; et qu'aux termes de l'article 7 du décret du 14 octobre 1991 : "Le droit d'accès aux informations figurant dans les fichiers constitués par les services des renseignements généraux s'exerce auprès de la commission nationale de l'informatique et des libertés. Le droit d'accès s'exerce conformément aux dispositions de l'article 39 de la loi n 78-17 du 6 janvier 1978. Toutefois, lorsque des informations sont enregistrées conformément aux finalités prévues au 2 ou au 3 de l'article 3, la commission nationale de l'informatique et des libertés, en accord avec le ministre de l'intérieur, peut constater que ces informations ne mettent pas en cause la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique et qu'il y a donc lieu de les communiquer à l'intéressé ... Le ministre de l'intérieur peut s'opposer à la communication au requérant de tout ou partie des informations le concernant lorsque cette communication peut nuire à la sûreté de l'Etat, à la défense ou à la sécurité publique. Dans ce cas, la commission nationale de l'informatique et des libertés informe le requérant qu'il a été procédé aux vérifications" ;
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 et de l'article 7 du décret du 14 octobre 1991 que la communication directe aux demandeurs des informations les concernant figurant dans les fichiers des renseignements généraux ne peut éventuellement avoir lieu que lorsque ces informations ont été enregistrées au titre du 2 ou du 3 de l'article 3 du décret du 14 octobre 1991 ; que lorsque l'enregistrement des informations est intervenu dans le cadre du 1 de l'article 3 de ce décret, le droit d'accès à ces informations s'exerce exclusivement de façon indirecte, conformément aux dispositions de l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 et des alinéas 1 et 2 de l'article 7 du décret ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas sérieusement contesté que les informations contenues dans les fichiers des renseignements généraux concernant Mme X..., membre de l'Eglise de scientologie, ont été collectées au titre du 1 de l'article 3 du décret du 14 octobre 1991 ; que, dès lors, le ministre de l'intérieur était tenu de s'opposer à la communication directe de ces informations à l'intéressée ; qu'est, par suite, inopérant le moyen soulevé par la requérante tiré du défaut de motivation de la décision de refus ; que, contrairement à ce que soutient Mme X..., le refus de lui communiquer directement lesdites informations n'est pas contraire aux stipulations des articles 8, 9 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors, d'une part, que ces articles prévoient qu'il peut être dérogé par la loi auxdites stipulations lorsqu'une telle mesure est nécessaire à la protection de la sécurité de l'Etat et de la sûreté publique et, d'autre part, que les modalités d'accès prévues par l'article 39 de la loi du 6 janvier 1978 ne sont pas, eu égard à la finalité pour laquelle les informations visées au 1 de l'article 3 du décret du 14 octobre 1991 sont enregistrées, incompatibles avec les stipulations conventionnelles susmentionnées ; que si, par ailleurs, Mme X... soutient que sa seule appartenance à l'Eglise de scientologie ne saurait justifier l'enregistrement d'informations la concernant dans les fichiers des renseignements généraux, ce moyen est inopérant à l'appui d'un litige de communication ;
Considérant que, compte tenu de ce qui précède, le tribunal administratif n'avait pas, avant de se prononcer sur le litige porté devant lui, à demander au ministre de l'intérieur de lui communiquer les éléments du fichier des renseignements généraux comportant des informations concernant Mme X... ; qu'ainsi, en s'abstenant de communiquer à la requérante le mémoire produit par le ministre de l'intérieur en réponse à la mesure d'instruction ordonnée avant dire droit, le tribunal n'a pas porté atteinte au principe du caractère contradictoire de la procédure visé par l'article 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de Mme X... tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme X... la somme de 10.000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 99PA01993
Date de la décision : 06/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

26-06-02 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ACCES AUX DOCUMENTS ADMINISTRATIFS - COMMUNICATION DE TRAITEMENTS INFORMATISES D'INFORMATIONS NOMINATIVES (LOI DU 6 JANVIER 1978)


Références :

Code de justice administrative L761-1
Décret 91-1051 du 14 octobre 1991 art. 3, art. 7
Loi 78-17 du 06 janvier 1978 art. 39, art. 34


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DUPOUY
Rapporteur public ?: M. BOSSUROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-12-06;99pa01993 ?
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