( 5ème Chambre )
VU, enregistrée au greffe de la cour le 30 juillet 1997, la requête présentée pour M. Léon X..., par Me MAUMY, avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9215317/1 du 7 février 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge du complément d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre de l'année 1987 ;
2 ) de prononcer la décharge de ce complément d'impôt ;
3 ) de condamner l'Etat à lui payer 12.060 F sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 22 novembre 2001 ;
- le rapport de M. VINCELET, premier conseiller,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que M. X... s'est vu notifier, au titre de l'année 1987, des redressements à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, résultant notamment de la remise en cause par le vérificateur, du régime d'imposition des plus-values à long terme sous lequel le contribuable avait déclaré le montant des redevances d'exploitation de brevets qu'il avait perçues d'une société concessionnaire ; que, par la présente requête, l'intéressé interjette appel du jugement du 7 février 1997 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande de décharge des impositions litigieuses ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que les visas de la minute du jugement attaqué mentionnent expressément les mémoires du requérant en date des 11 janvier, 9 février et 3 octobre 1994 ; que, par suite, l'omission du visa de ces mémoires dans l'expédition du jugement adressé au requérant est sans incidence sur la régularité de ce jugement ; qu'en outre, en statuant sur la régularité des notifications de redressement, le tribunal a implicitement mais nécessairement statué sur le moyen tiré de la prescription ; qu'ainsi, le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission à statuer ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant que les redressements notifiés à M. X... procèdent du contrôle, dans les locaux du service, de l'exactitude des déclarations de bénéfices non commerciaux spontanément souscrites par l'intéressé, ainsi que de celles souscrites par l'indivision formée entre ce dernier et un tiers en vue de l'exploitation de brevets ; qu'un tel contrôle ne nécessitait aucune confrontation des déclarations avec des pièces comptables tenues par l'indivision, et pouvait légalement intervenir dans le cadre des prérogatives conférées à l'administration par l'article L.10 du livre des procédures fiscales ; que le service n'ayant pas procédé à la vérification de comptabilité du contribuable, il n'était pas tenu de lui adresser au préalable l'avis prévu par l'article L.47 du même livre, l'informant notamment de ce qu'il pouvait se faire assister d'un conseil de son choix ; que M. X... ne saurait utilement se prévaloir de la réponse ministérielle à M. Y..., qui, relative à la procédure d'imposition et au surplus postérieure à l'année d'imposition, ne contient aucune interprétation formelle du texte fiscal ;
Sur le bien fondé des impositions contestées :
S'agissant de la prescription :
Considérant qu'aux termes de l'article L.189 du livre des procédures fiscales : "La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement ..." ; que l'article L.57 dispose en outre que : "l'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la première notification de redressement adressée à M. X... le 14 septembre 1988 indiquait le motif et la base des redressements envisagés, ainsi que leur fondement légal et l'année d'imposition ; que ce document indiquant expressément la catégorie de revenus envisagés, soit les bénéfices non commerciaux, il doit être regardé comme suffisamment motivé et interruptif de prescription à l'égard du contribuable, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ne figurait pas l'expression "impôt sur le revenu des personnes physiques" ;
S'agissant du régime d'imposition des redevances :
Considérant qu'aux termes de l'article 93 quater du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : "I. Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies. Ce régime est également applicable aux produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies quelle que soit la qualité de leur bénéficiaire. Le taux des plus-values à long terme est cependant ramené à 11 % dans le cas particulier des contribuables exerçant une profession non commerciale. I bis. Lorsqu'un inventeur, personne physique, concède une licence exclusive d'exploitation de brevets qu'il a déposés à une entreprise créée à cet effet à compter du 1er janvier 1984, les dispositions du 1 bis de l'article 39 terdecies ne s'appliquent pas l'année de la création de cette entreprise et les deux années suivantes à condition que, pendant cette période, l'exploitation des droits concédés représente au moins la moitié du chiffre d'affaires de l'entreprise" ; qu'aux termes de l'article 39 terdecies du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : "1. Le régime des plus-values à long terme est applicable, dans les conditions et limites qui pourront être fixées par décret, aux produits des cessions de brevets, de procédés et de techniques, ainsi qu'aux concessions de licences exclusives d'exploitation ...1 bis. Le montant des redevances tirées de l'exploitation des droits de propriété industrielle ou des droits assimilés est exclu du régime des plus-values à long terme prévu au 1, lorsque ces redevances ont été admises en déduction pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés et qu'il existe des liens de dépendance entre l'entreprise concédante et l'entreprise concessionnaire. Des liens de dépendance sont réputés exister entre deux entreprises : Lorsque l'une détient directement ou par personne interposée la majorité du capital social de l'autre ou y exerce en fait le pouvoir de décision ; Lorsqu'elles sont placées l'une et l'autre, dans les co nditions définies à l'alinéa précédent, sous le contrôle d'une même tierce entreprise" ;
Considérant que le 28 décembre 1984, M. X... a conclu avec M. Z..., pharmacien, une convention d'indivision en vue du dépôt et de l'exploitation d'un brevet afférent à une invention commune ; que ce brevet a été déposé le 5 mars 1985 et a fait l'objet, le 18 avril suivant, d'une concession d'exploitation exclusive au profit d'une société tierce, spécialement créée à cet effet et dont M. X... détenait 61,5 % des parts ; que, simultanément, ce dernier était gérant de l'indivision dont il détenait 75 pour cent des droits ;
Considérant que nonobstant le caractère conventionnel de ladite indivision, celle-ci ne jouissait pas de la personnalité morale ; que si elle souscrivait des déclarations de résultats soumis à contrôle, elle n'avait pas la qualité de redevable légal de l'impôt ; que le copropriétaire indivis de biens affectés à un usage professionnel acquiert, du fait même de cette qualité, celle de coexploitant au regard de la loi fiscale, et qu'il doit être assujetti directement à l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices réalisés, à raison du pourcentage de ses droits dans l'indivision ; qu'il s'en suit que bien que la concession d'exploitation du brevet ait été signée par l'indivision, l'existence des liens de dépendance entre concédant et concessionnaire doit être envisagée dans le cadre des rapports existant entre ce dernier et chacun des membres de l'indivision, et que l'appréciation de ces liens doit être faite par référence au pourcentage du capital du concessionnaire détenu par chaque coindivisaire, sans opérer de réfaction au prorata de ses droits dans l'indivision concédante ;
Considérant qu'il est constant que le pourcentage du capital de la société Ethnodex détenu par M. X..., son gérant, est majoritaire et que celle-ci a été admise à déduire le montant des redevances versées pour l'assiette de l'impôt sur le revenu ou des sociétés auquel elle a été assujettie ; que, par suite, c'est à bon droit que le vérificateur a estimé, qu'eu égard aux liens de dépendance existant entre la société concessionnaire du brevet et M. X..., les redevances perçues par ce dernier en contrepartie de la concession exclusive d'une licence d'exploitation du brevet étaient exclues du régime des plus-values à long terme et devaient être soumises à l'impôt sur le revenu, dans les conditions de droit commun, sous déduction du seul abattement de 30 pour cent prévu par l'alinéa 2 de l'article 93 du code général des impôts ;
Considérant en outre que l'instruction administrative "4B2311" n'a pas pour effet de limiter le champ d'application de l'article 39 terdecies aux seules redevances versées à l'intérieur d'un même groupe d'entreprises ; que l'instruction du 14 mars 1972 publiée sous le numéro "B04B272" n'a pas davantage réservé aux seules personnes morales la qualité de détenteur par personne interposée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Considérant enfin que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative fait obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser à M. X... la somme de 12.060 F que celui-ci demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.