(2ème chambre B)
VU la requête, enregistrée le 12 mai 2000 au greffe de la cour, présentée pour la société anonyme INTER FORUM, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la société INTER FORUM demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 984637 en date du 9 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990, dans les rôles de la commune de Gentilly, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de la décharger de l'imposition contestée ;
3 ) de condamner l'Etat à lui payer 20.000 F en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
C+ VU le code général des impôts ;
VU le livre des procédures fiscales ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 26 juin 2001 :
- le rapport de M. HEU, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'à l'issue de la vérification de sa comptabilité des années 1990 à 1992, le service a assigné à la société INTER FORUM, qui a pour activité la distribution de livres, un complément d'impôt sur les sociétés procédant de la réintégration dans ses bénéfices d'une fraction de la provision pour retour d'ouvrages invendus qu'elle avait constituée à la clôture de l'exercice 1990 ; que la société INTER FORUM fait appel du jugement en date du 9 mars 2000 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge de cette cotisation supplémentaire ;
Sur les conclusions tendant à la décharge de l'imposition litigieuse :
Considérant qu'au terme d'une vérification de comptabilité antérieure, portant sur les résultats des exercices 1979 à 1981, le vérificateur avait, en date du 14 mars 1983, notifié à la société INTER FORUM un rehaussement d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 1981, par suite de la réintégration dans ses bénéfices imposables d'une "provision pour traitement des retours" d'ouvrages invendus, au motif que les sommes en cause correspondaient en réalité, selon lui, à des "charges annuelles et normales" inhérentes à l'activité et à l'organisation de l'entreprise ; que dans cette notification, le vérificateur avait également indiqué que la "provision pour retour" que la contribuable avait constituée à la clôture du même exercice 1981, était "par ailleurs jugée normale" ; qu'à l'appui de sa demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés présentement litigieuse, qui lui a été assignée au titre de l'année 1990 à raison de la réintégration d'une fraction de la provision pour retour d'invendus constituée au titre de cet exercice, la société INTER FORUM entend exclusivement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de cette dernière mention, relative à la déductibilité de la provision pour retour des ouvrages invendus ;
Sur le terrain de la loi fiscale :
Considérant qu'il ne ressort pas de l'instruction, et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué par la contribuable, que les modalités de calcul de la provision pour retour comptabilisée par elle à la clôture de l'exercice 1990 permettaient de liquider le montant de la dotation avec une approximation suffisante, dès lors que, comme il ressort de la notification du 16 décembre 1993, la méthode retenue par la contribuable a consisté en l'application d'un taux moyen sur un chiffre d'affaires ayant déjà enregistré un taux de retour entraînant une baisse de marge bénéficiaire, tandis que la correction apportée par le service a eu pour effet de liquider la provision sur un chiffre d'affaires non retraité en fonction du retour des invendus ;
Sur le terrain de la doctrine administrative :
Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration" ; que l'article L.80 B du même livre dispose que : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1 Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ..." ;
Considérant, en premier lieu, que la notification de redressement en date du 14 mars 1983 se borne, dans l'entame de la motivation du rappel procédant de la remise en cause du principe de la provision pour traitement des retours, à mentionner que la provision pour retour d'ouvrages invendus que la contribuable avait aussi constituée à la clôture du même exercice 1981 avait été, quant à elle, en revanche "jugée normale" ; que la société INTER FORUM ne peut soutenir que cette seule mention constituerait, au sens des dispositions précitées de l'article L.80 B du livre des procédures fiscales, une prise de position formelle par l'administration sur l'appréciation d'une situation de fait, dont elle puisse en l'espèce utilement se prévaloir, dès lors qu'elle n'est explicitée par l'énoncé d'aucune considération susceptible de faire estimer qu'au delà de l'admission du principe de la déductibilité d'une pareille provision, l'administration aurait encore entendu reconnaître le bien-fondé des modalités du calcul par la contribuable de la dotation correspondante, dont il n'est au demeurant pas établi qu'elles seraient restées depuis lors les mêmes ;
Considérant, en second lieu, que si la société INTER FORUM soutient que l'administration a donné, dans sa documentation de base n 13-L-1343 en date du 15 août 1994, une interprétation de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales qui, relative aux prises de position contenues dans une notification de redressement et portant sur les conditions de déductibilité de provisions, conduirait en l'espèce à la décharger de l'imposition litigieuse, cette interprétation ne concerne que la mise en uvre des articles L. 80 A et L. 80 B eux-mêmes et n'a pas pour objet d'interpréter le texte fiscal d'assiette qui constitue le fondement de la cotisation d'impôt sur les sociétés en cause ; que, dès lors, la requérante ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir, sur le terrain de la doctrine administrative, des paragraphes n 50 et 51 de la documentation de base susindiquée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société INTER FORUM n'est pas fondée à se plaindre de ce, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande en décharge ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société INTER FORUM la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la société INTER FORUM est rejetée.