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23/01/2001 | FRANCE | N°98PA02309

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3e chambre, 23 janvier 2001, 98PA02309


(3ème chambre A)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 juillet 1998, présentée pour la société HERVE, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la société HERVE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95384 du 13 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 29 novembre 1994 ayant notamment annulé sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté par la société HERVE contre la décision de l'inspecteur du trav

ail des Yvelines ayant refusé le licenciement de M. Freire Y... et ayant a...

(3ème chambre A)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 10 juillet 1998, présentée pour la société HERVE, dont le siège est ..., par Me X..., avocat ; la société HERVE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 95384 du 13 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle en date du 29 novembre 1994 ayant notamment annulé sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique présenté par la société HERVE contre la décision de l'inspecteur du travail des Yvelines ayant refusé le licenciement de M. Freire Y... et ayant accordé le licenciement de ce dernier ;
2 ) d'autoriser le licenciement de M. Freire Y... ;
3 ) de condamner M. Freire Y... à lui payer la somme de 10.000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;
VU le code du travail ;
VU le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 janvier 2001 :
- le rapport de M. RATOULY, président,
- et les conclusions de M. DE SAINT GUILHEM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par décision implicite en date du 23 octobre 1994, le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, saisi d'un recours hiérarchique formé par la société HERVE contre une décision en date du 11 mai 1994 prise par l'inspecteur du travail des Yvelines, a refusé d'autoriser le licenciement de M. Freire Y..., membre du comité d'entreprise, et qu'après avoir rapporté sa décision implicite de refus, il a annulé la décision de l'inspecteur du travail et autorisé le licenciement pour faute de l'intéressé par une nouvelle décision prise le 29 novembre 1994 ;
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R.436-6 du code du travail dans sa rédaction issue des dispositions du décret du 8 juin 1983 relatives au licenciement des représentants du personnel, des représentants syndicaux et des salariés assimilés : "Le ministre compétent peut annuler ou réformer la décision de l'inspecteur du travail sur le recours de l'employeur, du salarié ou du syndicat que ce salarié représente ou auquel il a donné mandat à cet effet. Ce recours doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de l'inspecteur" ; qu'il résulte de ce texte que la décision de l'inspecteur du travail accordant ou refusant l'autorisation de licencier un salarié protégé est soumise au contrôle hiérarchique dans les conditions du droit commun ; que, dans le cas où l'inspecteur a refusé l'autorisation de licenciement, la décision ainsi prise, qui a créé des droits au profit du salarié intéressé, ne peut être annulée ou réformée par le ministre compétent que pour des motifs de légalité, compte tenu des circonstances de fait et de droit existant à la date à laquelle s'est prononcé l'inspecteur du travail ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui ... retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ..." ; qu'en vertu de l'article 3 de la même loi : "La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ;

Considérant que l'inspecteur du travail s'étant fondé, dans sa décision du 11 mai 1994 refusant l'autorisation de licencier M. Freire Y..., sur l'intérêt général qui s'attachait, pour les salariés de l'entreprise, au maintien de l'intéressé dans ses fonctions de membre du comité d'entreprise, il appartenait au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle de se prononcer expressément sur ce motif dans sa décision du 29 novembre 1994 annulant le refus du 11 mai 1994 et autorisant la société Hervé à licencier M. Freire Y... ; que cette obligation s'imposait au ministre alors même que ce motif aurait été examiné et estimé non fondé à l'occasion de l'examen du recours hiérarchique de la société contre la décision de l'inspecteur du travail qui avait conduit au rejet implicite de ce recours ; qu'il est constant que le motif tiré de l'intérêt général n'est pas évoqué dans la décision ministérielle du 11 mai 1994 ; que, par suite, c'est à bon droit que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle pour insuffisance de motivation au regard des dispositions précitées de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant, toutefois, que l'annulation de ladite décision par le tribunal administratif de Versailles, confirmée par le présent arrêt, a pour effet de faire revivre la décision en date du 11 mai 1994 de l'inspecteur du travail des Yvelines ayant refusé le licenciement de M. Freire Y... et dont la société HERVE demande également l'annulation ;
Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la loi susvisée du 3 août 1995 : "Sont amnistiés les faits commis avant le 18 mai 1995 en tant qu'ils constituent des fautes passibles de sanctions disciplinaires ou professionnelles ... Sauf mesure individuelle accordée par décret du Président de la République, sont exceptés du bénéfice de l'amnistie prévu par le présent article les faits constituant des manquements à la probité, aux bonnes moeurs ou à l'honneur ..." et qu'aux termes de l'article 15 de la même loi "Sont amnistiés, dans les conditions prévues à l'article 14, les faits retenus ou susceptibles d'être retenus comme motifs de sanctions prononcées par un employeur ..." ;
Considérant que les faits reprochés à M. Freire Y... qui, contrairement à ce que soutiennent la société HERVE et la ministre de l'emploi et de la solidarité ne constituent pas un manquement à l'honneur et à la probité au sens des dispositions précitées de l'article 14 de la loi du 3 août 1995, sont amnistiés en application des dispositions également citées de l'article 15 de ladite loi ; que, par suite, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la société HERVE tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail des Yvelines en date du 11 mai 1994 ;
Sur les conclusions de la société HERVE tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. Freire Y..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, soit condamné à payer à la société HERVE la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société HERVE tendant à l'annulation de la décision de l'inspecteur du travail des Yvelines en date du 11 mai 1994.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société HERVE est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 98PA02309
Date de la décision : 23/01/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - MODALITES DE DELIVRANCE OU DE REFUS DE L'AUTORISATION - RECOURS HIERARCHIQUE.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE - EXISTENCE D'UNE FAUTE D'UNE GRAVITE SUFFISANTE.


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code du travail R436-6
Décret du 08 juin 1983
Loi du 03 août 1995 art. 14, art. 15
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1, art. 3


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. RATOULY
Rapporteur public ?: M. de SAINT GUILHEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2001-01-23;98pa02309 ?
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