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12/10/2000 | FRANCE | N°96PA03380

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5e chambre, 12 octobre 2000, 96PA03380


(5ème Chambre)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 23 octobre 1996, la requête présentée pour Melle Anne-Carole Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ; Melle Y..., venant en sa qualité de légataire universel aux droits de M. Christian Y..., demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du 14 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. Y... a été assujetti au titre des années 1978 à 1982, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2 ) de prononcer la décharge demandée ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verse...

(5ème Chambre)
VU, enregistrée au greffe de la cour le 23 octobre 1996, la requête présentée pour Melle Anne-Carole Y..., demeurant ..., par Me X..., avocat ; Melle Y..., venant en sa qualité de légataire universel aux droits de M. Christian Y..., demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du 14 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels M. Y... a été assujetti au titre des années 1978 à 1982, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de prononcer la décharge demandée ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser les intérêts moratoires visés à l'article L.208 du livre des procédures fiscales, ainsi qu'une somme de 30.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 septembre 2000 :
- le rapport de M. DUPOUY, premier conseiller,
- les observations de la SCP MARTINET-BARSUS, avocat, pour Melle Y...,
- et les conclusions de M. BOSSUROY, commissaire du Gouvernement ;

Sur la procédure d'imposition :
En ce qui concerne les dates d'achèvement de la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble :
Considérant que si l'article L.50 du livre des procédures fiscales interdit à l'administration, lorsqu'elle a procédé à une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, et quels qu'aient été les résultats de cette vérification, de procéder à de nouveaux redressements pour la même période et pour le même impôt, il résulte des termes de cet article, combinés avec le principe de l'annualité de l'impôt, qu'il ne fait pas obstacle, en cas de vérification portant sur une période couvrant plusieurs années d'imposition, à ce que l'administration procède à des notifications successives concernant des années distinctes, notamment lorsque ces notifications ont pour but d'interrompre, au cours de la vérification, la prescription courant à l'encontre des impositions dues au titre de certaines des années sur lesquelles porte cette vérification ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Y..., décédé en 1988 et aux droits duquel vient Melle Y..., a été informé, par deux avis en date des 14 octobre 1982 et 2 mai 1983, qu'il serait procédé à la vérification de sa situation fiscale d'ensemble au titre respectivement des années 1978 à 1981 et de l'année 1982 ; que si l'intéressé a été destinataire, le 22 décembre 1982, d'une notification de redressements portant sur les revenus de l'année 1978, cette notification, qui avait pour objet d'interrompre la prescription en ce qui concerne ladite année et qui ne comportait aucune mention relative aux autres années vérifiées, n'a pas eu pour effet, contrairement à ce que soutient la requérante, de mettre un terme à la vérification en ce qui concerne les années 1979 à 1981 ; qu'ainsi, le vérificateur a pu, sans méconnaître les dispositions de l'article L.50 du livre des procédures fiscales, notifier des redressements le 13 décembre 1983 en ce qui concerne l'année 1979 et le 18 décembre 1984 en ce qui concerne les années 1980, 1981 et 1982 ; qu'en outre, contrairement à ce qu'affirme la requérante, la notification de redressements en date du 22 juillet 1983, qui était consécutive à la vérification de la comptabilité d'une des sociétés contrôlées par M. Y... et ne portait que sur des revenus catégoriels, ne pouvait en tout état de cause, dès lors que les deux procédures sont distinctes, avoir pour effet de clôturer définitivement la procédure de vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble engagée à l'égard du contribuable ;
En ce qui concerne la nature des demandes adressées aux salariés de la société Ingeco :

Considérant que si le vérificateur a adressé aux salariés de la société civile professionnelle d'ingénieur-conseil Ingeco, dont M. Y... était le gérant associé, des demandes d'information portant sur le lieu d'exercice et la nature de leur emploi, cette circonstance n'est pas de nature à entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, dès lors que les personnes interrogées, non soumises au droit de communication, n'étaient pas tenues de répondre aux questions posées ; qu'il ressort de leur examen que ces demandes ne comportaient aucune référence aux dispositions relatives au droit de communication de l'administration et ne contenaient aucune formule risquant d'induire en erreur leurs destinataires sur l'étendue de leurs obligations à l'égard de l'administration ; qu'aucune disposition n'impose au vérificateur, lorsqu'il adresse de telles demandes à des tiers, de les informer du caractère non contraignant de sa démarche ;
En ce qui concerne la notification à la SCI La Criolla des redressements relatifs à des travaux de chauffage pris en charge par la société Quintet :
Considérant que l'administration indique, sans que cette affirmation soit sérieusement contestée par les requérants, avoir notifié à la SCI La Criolla, par lettre du 12 décembre 1983, les redressements liés à des travaux d'installation de chauffage central et de régulation thermique effectués dans la villa La Criolla, pris en charge par la société Quintet et non refacturés par celle-ci à la SCI propriétaire, et avoir porté à la connaissance de M. Y..., gérant associé de la SCI, ces redressements par une notification de redressements en date du 13 décembre 1983 ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'absence de notification d'un rappel à la SCI préalablement à l'imposition de M. Y... dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers manque en fait ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :

Considérant, en premier lieu, qu'à la suite de la vérification de comptabilité de la société Ingeco, des redressements en matière de bénéfices non commerciaux ont été notifiés à M. Y..., résultant notamment de la réintégration dans les résultats imposables de la société des frais et charges afférents à la villa La Criolla, propriété de la SCI La Criolla et donnée en location à la société Ingeco ; que le tribunal administratif, qui a retenu un pourcentage d'utilisation professionnelle des locaux de 50 %, non contesté par la requérante, a prononcé à due concurrence le dégrèvement des compléments d'imposition correspondant aux frais de gardiennage, de location, de chauffage, d'eau, de gaz, d'électricité et d'assurance de l'immeuble ; que Melle Y... demande, en outre, qu'il soit tenu compte, à hauteur de ce même pourcentage, des dépenses d'entretien et des frais d'expertise de la villa La Criolla ; que s'il y a lieu de prendre en compte les dépenses d'entretien, liées à l'utilisation de la villa et de même nature que les frais déjà admis, en revanche, la requérante ne produit aucun élément de nature à établir que les frais d'expertise exposés ont été nécessités par l'exercice de la profession d'ingénieur-conseil de la société Ingeco ; qu'il y a lieu, dès lors, de réduire les bases de l'impôt sur le revenu auquel M. Y... a été assujetti à hauteur de 4.335 F au titre de l'année 1979, de 8.416 F au titre de l'année 1980, de 1.617 F au titre de l'année 1981 et de 3.150 F au titre de l'année 1982 ;
Considérant, en second lieu, que la requérante n'est pas fondée à demander que les dotations annuelles aux amortissements concernant le véhicule privé de Mme Z..., coassociée de la société Ingeco, soient admises en déduction des résultats imposables de cette société, dès lors que ladite société n'a pas justifié de ces dotations ;
En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :
Considérant que l'administration a considéré comme revenus distribués au profit de la SCI La Criolla, imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, notamment entre les mains de M. Y..., gérant associé de la société, le montant de travaux d'installation de chauffage central et de régulation thermique effectués dans la villa La Criolla, qui avaient été pris en charge, comme il a été dit, par la société Quintet et que l'administration a réintégré aux résultats de cette société au titre de l'année 1979 ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'identité du bénéficiaire de la distribution résultait sans ambiguïté des circonstances de l'affaire elle-même, et notamment des termes d'une lettre du 23 janvier 1981 émanant de la société Bevilaqua Thermicad ayant réalisé les travaux ;
Sur les pénalités :
Considérant, d'une part, que la lettre adressée par l'administration à M. Y... le 18 septembre 1984 comporte une motivation des pénalités pour mauvaise foi qui, faisant référence aux circonstances particulières de l'affaire, répond aux exigences de la loi n 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Considérant, d'autre part, que l'administration justifie l'application de ces majorations aux impositions maintenues à la charge de M. Y... en matière de bénéfices non commerciaux en faisant valoir à juste titre que l'intéressé a sciemment fait supporter à la société Ingeco, dont il était gérant, des dépenses qui incombaient à la SCI La Criolla en sa qualité de propriétaire d'un immeuble faisant l'objet d'une occupation partiellement privative ;
Considérant, enfin, que si la requérante demande, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 CA du livre des procédures fiscales, la décharge des pénalités de mauvaise foi, il résulte de ces dispositions que le juge ne peut prononcer la décharge des majorations ou amendes qui ont été appliquées que lorsqu'une erreur a été commise dans la procédure d'imposition ; que la preuve d'une telle erreur n'ayant pas été apportée, ces conclusions ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Melle Y... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande à concurrence de la réduction des bases d'imposition susmentionnée ;
Sur les conclusions tendant au versement par l'Etat d'intérêts moratoires :
Considérant que les intérêts dus au contribuable, en vertu de l'article L.208 du livre des procédures fiscales, en cas de dégrèvements prononcés à la suite de l'introduction d'une instance fiscale, sont, en application de l'article R.208-1 de ce livre, payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ; qu'il n'existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la requérante concernant lesdits intérêts ; que, dès lors, les conclusions de Melle Y... tendant au versement d'intérêts moratoires ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.8-1, de condamner l'Etat à verser à Melle Y... une somme de 10.000 F au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Les bases de l'impôt sur le revenu assignées à M. Y... au titre des années 1979, 1980, 1981 et 1982 sont réduites respectivement des sommes de 4.335 F, 8.416 F, 1.617 F et 3.150 F.
Article 2 : Melle Y... est déchargée des droits et pénalités correspondant à la réduction des bases d'imposition définie à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement nos 9204663/2 et 9207273/2 du tribunal administratif de Paris en date du 14 mai 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Melle Y... une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Melle Y... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA03380
Date de la décision : 12/10/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - DROIT DE COMMUNICATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION APPROFONDIE DE SITUATION FISCALE D'ENSEMBLE (OU ESFP).

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - PENALITES POUR MAUVAISE FOI.


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L50, L80 CA, L208, R208-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Loi 79-587 du 11 juillet 1979


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DUPOUY
Rapporteur public ?: M. BOSSUROY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2000-10-12;96pa03380 ?
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