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27/06/2000 | FRANCE | N°96PA01935;97PA01021

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 27 juin 2000, 96PA01935 et 97PA01021


(1ère Chambre A)
VU I ) le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour le 10 juillet et le 23 septembre 1996 sous le n 96PA01935, présentés pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE ;
Le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n 955686 en date du 10 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à verser à l'association Le Garac une somme de 240.620,59 F en remboursement des cotisations de prévoyance dont l'établissement d'enseignement privé sous contrat s'ét

ait acquitté, en tant que cette somme excède le montant résultant d...

(1ère Chambre A)
VU I ) le recours et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour le 10 juillet et le 23 septembre 1996 sous le n 96PA01935, présentés pour le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE ;
Le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n 955686 en date du 10 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à verser à l'association Le Garac une somme de 240.620,59 F en remboursement des cotisations de prévoyance dont l'établissement d'enseignement privé sous contrat s'était acquitté, en tant que cette somme excède le montant résultant de l'application du taux de 0, 062 % fixé par le décret n 96-627 du 16 juillet 1996 et appliqué à la rémunération brute inférieure au plafond fixé pour les cotisations de sécurité sociale ;
2 ) de rejeter la demande de l'établissement en tant qu'elle porte sur une somme dépassant le montant résultant de l'application du taux précité ;
VU II ), enregistrée au greffe de la cour le 7 octobre 1996, la lettre en date du 3 octobre 1996 par laquelle le président du tribunal administratif de Versailles a transmis la demande, enregistrée au greffe du tribunal le 26 septembre 1996, de l'ASSOCIATION LE GARAC tendant à obtenir l'exécution du jugement n 955686 rendu le 10 mai 1996 par le tribunal administratif de Versailles ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
VU le code de la sécurité sociale ;
VU la loi n 59-1557 du 31 décembre 1959 modifiée ;
VU la loi n 72-1223 du 29 décembre 1972 modifiée ;
VU la loi de finances pour 1996 n 95-1346 du 30 décembre 1995, et, notamment, son article 107 ;
VU la loi n 89-486 du 10 juillet 1989 ;
VU le décret n 90-168 du 7 juin 1990 modifié ;
VU le décret n 96-627 du 16 juillet 1996 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 13 juin 2000 :
- le rapport de Mme LASTIER, premier conseiller ;
- et les conclusions de Mme MASSIAS, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que le recours du MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE, enregistré sous le n 96PA01935, est dirigé contre le jugement du 10 mai 1996 dont l'association Le Garac demande l'exécution par la requête enregistrée sous le n 97PA01021 ; qu'il y a lieu de joindre ce recours et cette requête pour statuer par un seul arrêt ;
Sur le recours du ministre :
Considérant que le MINISTRE DE L'EDUCATION NATIONALE, DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA RECHERCHE conteste le jugement du 10 mai 1996 du tribunal administratif de Versailles en tant qu'il a condamné l'Etat à payer à l'ASSOCIATION LE GARAC, en sa qualité d'organisme de gestion d'un établissement d'enseignement secondaire privé lié à l'Etat par un contrat d'association, une somme correspondant à l'intégralité des parts patronales de cotisations sociales versées par l'association, au titre des années 1993, 1994 et 1995, au régime de retraite et de prévoyance des cadres institué par la convention collective nationale du 14 mars 1947 ; que le ministre fait valoir que si l'article 7 de cette convention prévoit que les employeurs versent une cotisation égale à 1,50 % de la tranche de rémunération inférieure au plafond fixé pour les cotisations de sécurité sociale, le décret susvisé du 16 juillet 1996 portant application de l'article 107 de la loi de finances pour 1996 du 30 décembre 1995, qui fixe ce taux à 0,062 %, s'applique dans la présente affaire ; qu'en défense, l'association Le Garac excipe de l'illégalité de ce décret ;
En ce qui concerne la légalité externe du décret du 16 juillet 1996 :

Considérant que si l'association Le Garac allègue que, lors de la séance plénière du 3 juillet 1996 consacrée en particulier à l'examen du projet devenu le décret du 16 juillet 1996, le conseil supérieur de l'éducation aurait siégé dans une formation comprenant d'anciens membres dont le mandat de trois ans était expiré, les arrêtés ministériels portant nomination au conseil supérieur de l'éducation en date des 2 septembre 1994, 23 décembre 1994, 27 septembre 1995, 20 février 1996 et 29 mars 1996 qui ont été régulièrement publiés au JO et la liste d'émargement de la séance du 3 juillet 1996 produits par l'administration ainsi que les précisions données par celle-ci suffisent à établir la validité de tous les mandats ; que, d'autre part, le législateur s'est borné à prévoir, à l'article 22 de la loi du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation, que les associations périscolaires et familiales sont représentées au sein du conseil supérieur de l'éducation en laissant au pouvoir réglementaire le soin de fixer le nombre de leurs représentants et les modalités de leur désignation ; qu'ainsi l'article 2 du décret du 7 juin 1990 relatif au conseil supérieur de l'éducation, qui dispose que les associations familiales sont représentées par un membre désigné par le ministre sur proposition des associations, n'a méconnu aucune prescription législative ; qu'enfin, le conseil supérieur de l'éducation ayant rendu son avis sur le projet de décret en formation plénière, l'association Le Garac ne saurait utilement soutenir que la section permanente de ce conseil serait irrégulièrement composée au motif, d'ailleurs erroné, que le représentant des associations familiales ne participerait pas à l'élection des membres de ladite section ; que, par suite, les moyens tirés de ce que l'avis sur le projet de décret aurait été rendu par une instance irrégulièrement composée ne peuvent être retenus ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les membres du conseil supérieur de l'éducation ont été régulièrement convoqués sur un ordre du jour où figure l'examen du projet de décret ; que leur délibération a été précédée de l'exposé introductif prévu par l'article 12 du décret du 7 juin 1990 et que le conseil était présidé par un représentant du ministre nommé à cet effet par un arrêté du 31 janvier 1996 publié au Journal officiel de la République française du 1er février 1996 ; que, conformément à l'article 10 du décret du 7 juin 1990, le quorum n'ayant pas été atteint lors de la séance plénière du 20 juin 1996, le conseil a siégé valablement le 3 juillet suivant sans avoir à respecter un quorum ; que, par suite, les moyens tirés de l'irrégularité de la consultation du conseil supérieur de l'éducation doivent être rejetés ;
En ce qui concerne la légalité interne du décret du 16 juillet 1996 :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1959 modifiée, l'Etat, à qui incombe la rémunération des maîtres contractuels ou agréés des établissements d'enseignement privés sous contrat, doit supporter les charges sociales légalement obligatoires afférentes à ces rémunérations dans la mesure où le taux des cotisations n'excède pas ce qui est nécessaire pour assurer l'égalisation des situations entre ces maîtres et les maîtres titulaires de l'enseignement public ; que l'article 107 de la loi du 30 décembre 1995 a pour objet, non de réduire rétroactivement les obligations financières de l'Etat à l'égard des organismes de gestion des établissements d'enseignement privés qui ont acquitté les cotisations patronales afférentes à l'assurance-décès prévue par la convention collective nationale du 14 mars 1947 dont bénéficient les maîtres ayant un statut de cadre, mais d'en réaffirmer l'étendue telle qu'elle a été définie par les prescriptions de l'article 15 ajouté à la loi du 31 décembre 1959 par la loi du 25 novembre 1977 et de permettre ainsi un règlement des dettes de l'Etat à l'égard des organismes de gestion conforme à ces prescriptions ; que ledit article 107, qui ne fait pas obstacle au droit des organismes à demander la compensation des conséquences du retard mis par le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires à une exacte application des prescriptions de l'article 15 de la loi du 31 décembre 1959 modifiée, ne peut être regardé comme portant atteinte au principe du droit à un procès équitable énoncé par les stipulations de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'association Le Garac n'est donc pas fondée à invoquer l'incompatibilité de l'article 107 de la loi du 30 décembre 1995 avec la convention européenne pour contester la légalité du décret pris pour l'application de cette disposition législative ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'Etat n'est tenu de supporter les charges sociales légalement obligatoires afférentes aux rémunérations des maîtres de l'enseignement privé que dans la mesure où le taux des cotisations n'excède pas ce qui est nécessaire pour assurer l'égalisation des situations entre ces maîtres et les maîtres titulaires de l'enseignement public ; qu' il ressort des pièces du dossier que pour fixer, par le décret attaqué, le taux de prise en charge par l'Etat des cotisations patronales acquittées par les organismes de gestion des établissements d'enseignement privés sous contrat, au titre de l'assurance-décès dont bénéficient les maîtres de l'enseignement privé ayant un statut de cadre, le Gouvernement a retenu la valeur moyenne, sur une période de quatre ans et compte tenu du nombre annuel de décès de cadres du secteur privé chaque année, de la différence entre, d'une part, le montant du capital-décès, correspondant à un an de traitement moyen indiciaire, servi par l'Etat et, d'autre part, le montant du capital-décès correspondant à trois mois de rémunération moyenne mensuelle dans la limite du plafond, servi par le régime général de la sécurité sociale ; que le taux de prise en charge obtenu au terme de ce calcul s'élevant à 0,062 %, le Gouvernement n'a pas méconnu les prescriptions de l'article 4 de la loi du 31 décembre 1959 modifiée en retenant ce taux ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à l'association Le Garac une somme supérieure à celle résultant de l'application du taux de 0,062 % retenu par le décret du 16 juillet 1996 ;
En ce qui concerne les conclusions de l'association Le Garac tendant à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à l'association Le Garac la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Sur la requête de l'ASSOCIATION LE GARAC :
Considérant que, par une décision du 22 mai 1997 prise pour l'exécution du jugement du 10 mai 1996 du tribunal administratif de Versailles, le ministre de l'éducation nationale a alloué à l'ASSOCIATION LE GARAC une somme de 11.945, 65 F correspondant, à hauteur du montant de 9.945, 65 F, au remboursement des cotisations en cause sur la base du taux de 0, 062 % fixé par le décret du 16 juillet 1996, et, à hauteur du montant de 2.000 F, aux frais irrépétibles ; qu'au cas où le règlement de cette somme n'aurait pas été effectué, il y a lieu de prescrire à l'Etat de verser à L'ASSOCIATION LE GARAC, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, ladite somme, assortie, à hauteur du montant de 9.945, 65 F, des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'administration de la demande préalable, soit le 28 décembre 1994, sans préjudice des dispositions de l'article 3 de la loi n 75-619 du 11 juillet 1975 modifiée relative au taux de l'intérêt légal ; que, pour le surplus, la demande d'exécution du jugement du 10 mai 1996 présentée par l'ASSOCIATION LE GARAC doit être rejetée ;
Article 1er : La somme de 240.620, 59 F que l'Etat a été condamné à verser à l'association Le Garac par le jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 mai 1996 est ramenée à 9.945, 65 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 10 mai 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Au cas où le règlement de la somme de 11.945, 65 F n'aurait pas été effectué, il est prescrit à l'Etat de verser, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à L'ASSOCIATION LE GARAC cette somme, assortie, à hauteur du montant de 9.945, 65 F, des intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'administration de la demande préalable, soit le 28 décembre 1994, sans préjudice des dispositions de l'article 3 de la loi n 75-619 du 11 juillet 1975 modifiée relative au taux de l'intérêt légal.
Article 4 : Les conclusions de l'association Le Garac tendant, dans l'instance n 96PA01935, au bénéfice de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ainsi que le surplus de sa requête enregistrée sous le n 97PA01021, sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA01935;97PA01021
Date de la décision : 27/06/2000
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ENSEIGNEMENT - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFERENTES CATEGORIES D'ENSEIGNEMENT - ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT PRIVES - RELATIONS ENTRE LES COLLECTIVITES PUBLIQUES ET LES ETABLISSEMENTS PRIVES - CONTRIBUTION DE L'ETAT AUX DEPENSES DE FONCTIONNEMENT DES ETABLISSEMENTS PRIVES SOUS CONTRAT D'ASSOCIATION.

PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - MOYENS - EXCEPTION D'ILLEGALITE.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 90-168 du 07 juin 1990 art. 2, art. 12, art. 10
Décret 96-627 du 16 juillet 1996
Loi 59-1557 du 31 décembre 1959 art. 15, art. 4
Loi 75-619 du 11 juillet 1975 art. 3
Loi 89-486 du 10 juillet 1989 art. 22
Loi 95-1346 du 30 décembre 1995 art. 107 Finances pour 1996


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme LASTIER
Rapporteur public ?: Mme MASSIAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2000-06-27;96pa01935 ?
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