(4ème chambre B)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 octobre 1997, présentée pour Mme Corinne Y... demeurant ... par Me X..., avocat ; Mme Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n s 9402568/5 et 9411128/5 en date du 17 juin 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision en date du 5 janvier 1994 du directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris refusant de l'autoriser à exercer une activité d'infirmière à titre privé, à ce que le tribunal ordonne à l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris de lui accorder cette autorisation, subsidiairement à la condamnation de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à lui verser à titre de dommages et intérêts la somme correspondant au montant du dédit de 156.658 F qui lui a été réclamé et enfin à l'annulation de la décision du 26 avril 1994 par laquelle le même directeur général l'a rendue redevable de ce dédit pour rupture de contrat ;
2 ) d'annuler les deux décisions susmentionnées des 5 janvier et 26 avril 1994, d'ordonner à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris de lui accorder ladite autorisation et de condamner l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris à lui verser les dommages et intérêts du montant susmentionné ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 ;
VU la loi n 86- du 9 janvier 1986 ;
VU le décret n 88- 978 du 13 octobre 1988 ;
VU le décret n 90-319 du 5 avril 1990 ;
VU l'arrêté du 25 août 1989 du directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris relatif au fonctionnement des écoles d'infirmières de l'administration générale de l'Assistance Publique à Paris ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu à l'audience publique du 8 juin 2000 :
- le rapport de Mme MILLE, premier conseiller,
- et les conclusions de M. LAMBERT, commissaire du Gouvernement ;
Considérant qu'après avoir suivi une formation d'infirmière et souscrit l'engagement de servir l'administration de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris pendant une période minimale de cinq ans après l'obtention de son diplôme d'Etat, Mme Y... a exercé ses fonctions à l'hôpital Saint-Louis à compter du 30 novembre 1991 et jusqu'au 31 mai 1993, date à laquelle elle a été, sur sa demande, mise en disponibilité, pendant une période de deux ans, pour élever ses enfants de moins de huit ans ; que le 5 janvier 1994, le directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris a rejeté sa demande, formulée le 29 décembre précédent, tendant à obtenir l'autorisation d'exercer son activité d'infirmière à titre libéral durant cette période ; que le 29 mars 1994, l'intéressée a déposé sa démission ; que par un arrêté du 26 avril 1994, le même directeur général a accepté celle-ci et déclaré l'intéressée redevable d'une indemnité de dédit pour rupture de contrat ; que Mme Y... fait appel du jugement en date du 1er juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions susmentionnées des 5 janvier et 26 avril 1994, tendant à ce qu'il soit ordonné à l'administration de lui délivrer l'autorisation litigieuse et tendant à la condamnation de celle-ci à lui verser des dommages et intérêts ; qu'elle demande également, à titre subsidiaire, que le montant de l'indemnité de dédit, fixé à la somme de 156.658 F, soit ramené à la somme de 67.999,50 F ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 5 janvier 1994 :
Considérant qu'aux termes de l'article 34 b) du décret susvisé du 13 octobre 1988 : "La mise en disponibilité est accordée de droit, sur la demande du fonctionnaire : ...b) Pour élever un enfant de moins de huit ans ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que l'exercice d'une activité professionnelle est incompatible avec la position du fonctionnaire mis en disponibilité dans le but d'élever un enfant de moins de huit ans ; que l'administration de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris était donc tenue de rejeter la demande de Mme Y... qui souhaitait exercer à titre libéral son activité d'infirmière alors qu'elle était placée en disponibilité au sens de l'article 34 b) précité ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens soulevés par la requérante, lesquels sont inopérants, il y a lieu de rejeter lesdites conclusions ;
Sur les conclusions dirigées contre la décision du 26 avril 1994 :
Considérant qu'aux termes de l'article 87 de la loi susvisée du 9 janvier 1986 : "La démission ne peut résulter que d'une demande écrite du fonctionnaire marquant sa volonté non équivoque de cesser ses fonctions. Elle n'a d'effet qu'autant qu'elle est acceptée par l'autorité investie du pouvoir de nomination et prend effet à la date fixée par cette autorité. La décision de l'autorité compétente doit intervenir dans le délai d'un mois. L'acceptation de la démission rend celle-ci irrévocable. ( ...) " ; que le décret susvisé du 5 avril 1990 prévoit en son article 7 : "Lorsque, à l'issue d'une formation prévue au b de l'article 2, l'agent qui a été rémunéré pendant sa formation obtient l'un des certificats ou diplômes lui donnant accès aux corps, grades ou emplois mentionnés dans les décrets n 62-1198 du 3 octobre 1962, n 88-1077 du 30 novembre 1988, n 89-609, n 89-613 du 1er septembre 1989 susvisés, il est tenu de servir dans un des établissements énumérés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 pendant une durée de cinq ans à compter de l'obtention de ce certificat ou diplôme. Dans le cas où l'agent quitte la fonction publique hospitalière avant la fin de cette période, il doit rembourser à l'établissement qui a assuré sa formation les sommes perçues pendant cette formation proportionnellement au temps de service qui lui restait à accomplir." ;
Considérant que si, en refusant, par sa lettre du 5 janvier 1994, l'autorisation sollicitée, le directeur général de l'Assistance Publique-Hôpitaux de Paris expliquait à l'intéressée que, pour exercer une activité professionnelle à titre libéral, il lui faudrait démissionner, il ajoutait que cette solution n'était pas envisageable eu égard à l'engagement qu'elle avait souscrit et qu'elle ne pourrait rompre qu'en remboursant une somme proportionnelle au temps de service non effectué ; que, dans une lettre en date du 18 avril 1994 accusant réception de la lettre de démission de l'intéressée, le même directeur rappelait à Mme Y... que, sur les vingt trimestres dus, elle n'avait travaillé que durant six trimestres et qu'elle restait redevable de quatorze trimestres, circonstance qui le conduisait à transmettre son dossier à la direction du personnel en vue d'une mise en recouvrement ; qu'ainsi, la requérante ne peut sérieusement soutenir qu'elle a été contrainte à démissionner ni qu'aucun délai de réflexion suffisant, susceptible de la faire revenir sur sa décision, lui aurait été accordé ; qu'elle ne saurait dès lors exciper de l'illégalité de la décision du 26 avril 1994 susmentionnée par laquelle l'administration a accepté sa démission pour demander l'annulation de la décision du même jour la déclarant redevable d'un dédit ; qu'il s'ensuit que lesdites conclusions doivent être rejetées ;
Sur le montant de l'indemnité de dédit :
Considérant qu'aux termes du quatrième alinéa de l'article 17 de l'arrêté du directeur général de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris en date du 25 août 1989 relatif au fonctionnement des écoles d'infirmières de l'Assistance publique à Paris : " ... Les seules exceptions au principe du paiement d'une indemnité de dédit sont : ... - la mise en disponibilité accordée au fonctionnaire désirant élever un enfant de moins de huit ans ..." ;
Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, Mme Y..., qui avait l obligation de servir l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris durant 5 ans depuis le 30 novembre 1991, y a travaillé depuis cette date jusqu'au 31 mai 1993, date de sa mise en position de disponibilité qui a duré jusqu'au 26 avril 1994, date d'acceptation de sa démission ; que compte tenu des dispositions précitées, l'intéressée doit être regardée comme ayant accompli son obligation de servir l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris durant la période comprise entre le 30 novembre 1991 et le 26 avril 1994, soit 29 mois ; qu'en conséquence, elle est redevable d'une indemnité de dédit calculée sur la base des 21 mois non travaillés restant dus ; que cette somme s'élève à 117.105 F et non à la somme réclamée de 67.999,50 F ; qu'il y a lieu de ramener le montant exigible de ladite indemnité de 156.658 F à 117.105 F ;
Sur les conclusions à fin d'injonctions et à fin de dommages et intérêts :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ces conclusions, qui tendent à ce que la cour ordonne à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris de délivrer à la requérante l'autorisation de travailler à titre libéral durant sa mise en disponibilité et à ce que l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris lui verse des dommages et intérêts d'un montant égal à l'indemnité de dédit de 156.658 F qui lui a été réclamée, doivent être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris à verser à Mme Y... la somme de 8.000 F au titre des frais qu'elle a engagés dans cette instance ;
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que Mme Y..., qui n'est pas la partie perdante dans l'instance, soit condamnée à verser à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris une somme au titre de ces dispositions ;
Article 1er : La somme de 156.658 F que Mme Y... a été condamnée à verser à l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris par le jugement précité du tribunal administratif de Paris du 17 juin 1997 est ramenée à 117.105 F.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 17 juin 1997 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Assistance publique-Hôpitaux de Paris versera à Mme Y... une somme de 8.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme Y... est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris fondées sur l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.