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16/05/2000 | FRANCE | N°98PA02179

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 16 mai 2000, 98PA02179


(2ème chambre B)
VU le recours, enregistré au greffe de la cour le 29 juin 1998, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9317008/1 en date du 27 novembre 1997 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Oxysynthèse la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel ladite société a été assujettie au titre de l'année 1986 et la réduction d'un montant de 1.279.522 F de l'impôt sur les sociétés mis à la charge de cette socié

té au titre de l'année 1987 ;
2 ) à titre principal, de remettre à la charge d...

(2ème chambre B)
VU le recours, enregistré au greffe de la cour le 29 juin 1998, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9317008/1 en date du 27 novembre 1997 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Paris a accordé à la société anonyme Oxysynthèse la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel ladite société a été assujettie au titre de l'année 1986 et la réduction d'un montant de 1.279.522 F de l'impôt sur les sociétés mis à la charge de cette société au titre de l'année 1987 ;
2 ) à titre principal, de remettre à la charge de la société Oxysynthèse les impositions litigieuses et de rejeter la requête de première instance ;
3 ) à titre subsidiaire, de rétablir par voie de compensation ladite société à l'impôt sur les sociétés à concurrence de 1.285.788 F en droits et de 308.589 F en intérêts de retard, au titre de l'année 1986 ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 mai 2000 :
- le rapport de M. HEU, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société anonyme Oxysynthèse, qui a pour objet la fabrication et le commerce de produits chimiques et notamment d'eau oxygénée, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 1986, 1987 et 1988 ; qu'à l'issue de ce contrôle, le service a, d'une part, procédé à la taxation, comme des plus-values provenant de la cession d'éléments d'actif immobilisé, des produits résultant de la cession à deux sociétés étrangères, en 1986 et 1987, de volumes d'une solution chimique nécessaire à la production d'eau oxygénée dite "solution de travail", d'autre part, refusé de reconnaître aux dépenses générées par la production de ces volumes le caractère de charges déductibles ; que la société anonyme Oxysynthèse a demandé au tribunal administratif la décharge de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été conséquemment assujettie au titre de l'année 1986 ainsi que la réduction de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de l'année 1987 ; que le tribunal administratif de Paris, dans son jugement en date du 27 novembre 1997, a fait droit à cette demande en estimant que les cessions litigieuses avaient porté, non sur des éléments de l'actif immobilisé comme le soutient le service, mais exclusivement sur des produits chimiques dont la fabrication et la commercialisation relèvent de l'activité normale et répondent à l'objet social de ladite société ; que l'administration, qui fait régulièrement appel de ce jugement, demande, à titre principal, le rétablissement de la totalité des impositions litigieuses à la charge de la société anonyme Oxysynthèse, aux droits de laquelle vient la société anonyme Atofina, et, à titre subsidiaire, un rétablissement à concurrence du moins de 1.285.788 F en droits et 308.589 F d'intérêts de retard, au titre de l'année 1986, par voie de compensation, en avançant, pour la première fois en appel, que les amortissements pratiqués par la société sur la "solution de travail", qui, inscrite au bilan, ne fait cependant l'objet d'aucune altération ou dépréciation, l'ont été irrégulièrement ;
Sur la demande de rétablissement des impositions litigieuses :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable pour la détermination des bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : "1 - Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. 2 - Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt ... L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ... 3 - Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient ..." ; qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "- 1 - Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1 Les frais généraux de toute nature ... 2 ... les amortissements réellement effectués par l'entreprise, dans la limite de ceux qui sont généralement admis d'après les usages de chaque nature d'industrie, de commerce ou d'exploitation ..." ; qu'enfin, aux termes de l'article 38 ter de l'annexe III au même code : "Le stock est constitué par l'ensemble des marchandises, des matières premières, des matières et fournitures consommables, des productions en cours, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels et des emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l'entreprise à la date de l'inventaire et dont la vente en l'état ou au terme d'un processus de production à venir ou en cours permet la réalisation d'un bénéfice d'exploitation ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Oxysynthèse, dont l'article 3 des statuts précise qu'elle a pour objet "la fabrication, le commerce, l'achat et la vente de tous produits chimiques de quelque nature que ce soit, notamment la fabrication d'eau oxygénée", ainsi que la réalisation de toutes opérations commerciales et industrielles se rattachant audit objet, procède à la fabrication, et la maintenance par ajout périodique d'alkylanthraquinone et de solvants, d'une "solution de travail" lui permettant de produire de l'eau oxygénée, qu'elle commercialise pour servir à la fabrication de lessives, au blanchiment de la pâte à papier ou au traitement d'effluents aqueux et gazeux ; que la société s'est livrée, au cours des exercices en litige, à la fabrication d'importantes quantités supplémentaires de cette "solution de travail", en sus du volume, inscrit à son bilan au titre des immobilisations, strictement nécessaire au processus de fabrication de l'eau oxygénée produite ; que cette opération a été réalisée en vue de la livraison des quantités de "solution de travail" ainsi obtenues aux sociétés Shin Y...
X... (Japon) et Oxychem Canada, dans le cadre des contrats de licence et d'assistance technique conclus, respectivement, les 7 décembre 1984 et 4 juillet 1985 ;

Considérant que les dépenses générées par l'ajout d'alkylanthraquinone et de solvants en quantités excédant celles nécessaires à la seule maintenance des propriétés chimiques et du volume de "solution de travail" exigés par sa production habituelle d'eau oxygénée présentent, comme le soutient la société intimée, le caractère de charges d'exploitation, dès lors qu'elles n'ont en rien pour objet d'assurer la conservation ou la prolongation de la durée d'utilisation de cette fraction minimale de "solution de travail" inscrite à son actif, mais de permettre, conformément aux contrats conclus, la fabrication de volumes supplémentaires destinés seulement à être vendus ; que corrélativement, les cessions au profit des sociétés Shin Y...
X... et Oxychem Canada de ces volumes supplémentaires de "solution de travail" ont constitué, pour la société anonyme Oxysynthèse, la cession non pas d'éléments corporels de son actif immobilisé, mais de produits chimiques divers constitutifs de stocks, conformément du reste à son objet social qui est, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la fabrication et la commercialisation non seulement d'eau oxygénée mais également de tous produits chimiques ; qu'enfin, contrairement à ce que soutient l'administration, la circonstance que les volumes de "solution de travail" ainsi obtenus et commercialisés ont présenté, pour les sociétés Shin Y...
X... et Oxychem Canada, le caractère d'éléments de leur propre actif immobilisé, dès lors que ces sociétés ont elles-mêmes pour activité principale la production et la commercialisation d'eau oxygénée suivant les mêmes procédés que la société intimée, est, en tout état de cause, sans incidence sur les qualifications à retenir pour le calcul des bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés de cette dernière ;
Considérant qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE n'est pas fondé à soutenir que les ventes de "solution de travail" auxquelles la société anonyme Oxysynthèse a procédé, au titre des années 1986 et 1987, devaient faire l'objet d'une taxation selon le régime des plus-values sur cessions d'immobilisations défini par les articles 39 duodecies à 39 quindecies du code général des impôts, ni à prétendre que les dépenses générées par l'ajout à la solution de base de substances chimiques, pour la production des quantités de "solution de travail" litigieuses exportées, ne seraient pas immédiatement déductibles au titre des charges de l'exercice en cours ; que, par suite, le ministre n'est pas fondé à demander le rétablissement des impositions dont le tribunal administratif de Paris a prononcé le dégrèvement au profit de la société anonyme Oxysynthèse ;
Sur la demande de compensation :
Considérant qu'aux termes de l'article L.203 du livre des procédures fiscales : "Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la "solution de travail" exploitée par la société anonyme Oxysynthèse pour la fabrication d'eau oxygénée, ne conserve les propriétés chimiques et le volume permettant la permanence du processus de fabrication de l'eau oxygénée que dans la mesure où la société procède à l'ajout régulier d'alkylanthraquinone et de solvants, qui viennent s'intégrer à la solution de base, selon des quantités et dans des conditions de délai strictement définies ; qu'ainsi, en se bornant à soutenir, à l'appui de sa demande présentée sur le fondement de l'article L.203 précité du livre des procédures fiscales, que cette "solution de travail" ne ferait l'objet d'aucune altération ou dépréciation du fait de l'usage et du temps, l'administration n'établit pas que la société n'aurait pu régulièrement pratiquer des amortissements sur la "solution de travail" inscrite à l'actif de son bilan au titre des immobilisations, ni par suite une insuffisance de taxation dont elle pourrait se prévaloir par voie de compensation ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours à fin de rétablissement des impositions dont le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 27 novembre 1987 a accordé la décharge et la demande de compensation présentés par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE doivent être rejetés ;
Article 1er : Le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 98PA02179
Date de la décision : 16/05/2000
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - COMPENSATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REVENUS ET BENEFICES IMPOSABLES - REGLES PARTICULIERES - BENEFICES INDUSTRIELS ET COMMERCIAUX - EVALUATION DE L'ACTIF.


Références :

CGI 38, 209, 39, 3, 39 duodecies à 39 quindecies
CGI Livre des procédures fiscales L203
CGIAN3 38 ter


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. HEU
Rapporteur public ?: Mme KIMMERLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2000-05-16;98pa02179 ?
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