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16/09/1999 | FRANCE | N°96PA02565

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 16 septembre 1999, 96PA02565


(2ème chambre B )
VU le recours, enregistré le 2 septembre 1996 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n 9110543/1 en date du 28 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la société anonyme Bearbull Rogier les intérêts moratoires sur la somme de 579.835 F représentant la retenue à la source acquittée à tort par cette société ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code civil ;
VU le décret n 67-879 du 13 septembre 1967, pub

liant la convention conclue entre la France et la Suisse le 9 septembre 1966 en...

(2ème chambre B )
VU le recours, enregistré le 2 septembre 1996 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; le ministre demande à la cour d'annuler le jugement n 9110543/1 en date du 28 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la société anonyme Bearbull Rogier les intérêts moratoires sur la somme de 579.835 F représentant la retenue à la source acquittée à tort par cette société ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code civil ;
VU le décret n 67-879 du 13 septembre 1967, publiant la convention conclue entre la France et la Suisse le 9 septembre 1966 en vue d'éviter les doubles impositions, et le décret n 70-1009 du 26 octobre 1970, publiant l'avenant à cette convention, du 3 décembre 1969 ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 septembre 1999 :
- le rapport de Mme PERROT, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 119 bis du code général des impôts : " ...2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par le 1 de l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. Un décret fixe les modalités et conditions d'application de cette disposition ..." ; et qu'aux termes de l'article 187 : "Le taux de la retenue à la source prévue à l'article 119 bis est fixé à : - 12 % pour les intérêts des obligations négociables ; toutefois ce taux est fixé à 10 % pour les revenus visés au 1 de l'article 118 et afférents à des valeurs émises à compter du 1er janvier 1965 ainsi que pour les lots et primes de remboursement visés au 2 de l'article 118 et afférents à des valeurs émises à compter du 1er janvier 1986 ; - 25 % pour tous les autres revenus ...." ; qu'aux termes de l'article 11 de la convention fiscale franco-suisse dans sa rédaction applicable à l'espèce : " 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat contractant à un résident de l'autre Etat contractant sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois, sous réserve des dispositions du paragraphe 3, ces dividendes peuvent être imposés dans l'Etat contractant dont la société qui les paie est un résident et selon la législation de cet Etat, mais l'impôt ainsi établi ne peut excéder : a) 15 % du montant brut des dividendes si le bénéficiaire des dividendes est une société qui dispose directement, au moment de la distribution, d'au moins 20 % du capital de la société qui paie les dividendes et si, dans la société bénéficiaire, des personnes qui ne sont pas des résidents de l'autre Etat ont un intérêt prépondérant direct ou indirect sous forme d'une participation ou d'une autre manière et que ni l'une ni l'autre des sociétés en cause n'ait son capital représenté par des actions cotées en bourse ou traitées sur le marché hors cote ; b) 5 % du montant brut des dividendes dans tous les autres cas. 3. Les dividendes payés par une société résidente de France qui donneraient droit à un avoir fiscal s'ils étaient reçus par des résidents de France ouvrent droit au paiement de l'avoir fiscal après déduction de la retenue à la source calculée au taux de 15 % sur le dividende brut constitué par le dividende mis en distribution augmenté de l'avoir fiscal ..." ; qu'enfin aux termes de l'article L.208 du livre des procédures fiscales : "Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration des impôts à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés ...." ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Bearbull Rogier a demandé le 23 février 1989 à l'administration fiscale de lui restituer, sur le fondement des stipulations de la convention fiscale précitée, l'excédent de retenue à la source versé par elle à raison de la distribution de dividendes opérée le 18 juin 1987 au profit notamment de ses actionnaires résidents en Suisse ; que cette demande tendait en l'espèce à obtenir le bénéfice du droit au plafonnement de la retenue à la source résultant d'une stipulation conventionnelle et non la réparation d'une erreur commise dans l'assiette et le calcul des impositions ; que si la société anonyme Bearbull Rogier soutient que le plafonnement de la retenue à la source lui était acquis dès le fait générateur de cette retenue, il est constant que l'administration fiscale ne disposait à cette date d'aucun élément lui permettant d'apprécier le montant des dividendes payés à des bénéficiaires dont il aurait été d'ores et déjà établi qu'ils étaient des résidents de Suisse au sens de la convention fiscale précitée, susceptibles comme tels d'entrer dans le champ d'application de son article 11 et que le bénéfice du plafonnement litigieux se trouvait de facto subordonné à la satisfaction ultérieure de la condition, que d'ailleurs les Etats contractants ont ajoutée à la convention par un avenant en date du 22 juillet 1997, que la société justifie de la qualité de résidents de Suisse des bénéficiaires en cause ; que, par suite, le dégrèvement de retenue à la source accordé le 1er octobre 1990 à la requérante par le directeur des services fiscaux, ni a fortiori le remboursement de l'avoir fiscal accordé par la même décision, n'avaient à être assortis du paiement d'intérêts moratoires sur le fondement des dispositions de l'article L.208 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, par ailleurs, que si la société anonyme Bearbull Rogier a entendu revendiquer, sur le fondement des dispositions de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, le bénéfice de la doctrine contenue dans la note 14-B-2353 de la documentation de base de la direction générale des impôts, c'est inutilement dès lors que le litige ne se rapporte pas au rehaussement d'imposition seul visé par ledit article ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la société anonyme Bearbull Rogier les intérêts moratoires se rapportant à la somme de 579.835 F qui lui a été restituée ;
Considérant, toutefois, qu'il y a lieu pour la cour de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres moyens soulevés par la société anonyme Bearbull Rogier devant le tribunal administratif ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.207 du livre des procédures fiscales : "Lorsqu'une réclamation contentieuse est admise en totalité ou en partie, le contribuable ne peut prétendre à des dommages-intérêts ou à des indemnités quelconques, à l'exception des intérêts moratoires prévus par l'article L.208." ; que ces dispositions font obstacle à ce que, en dehors du cas où la responsabilité de l'Etat est engagée à raison d'une faute commise par les services fiscaux dans l'assiette de l'impôt, le contribuable puisse obtenir des dommages et intérêts lorsqu'il a obtenu la restitution d'impositions auxquelles il avait été soumis ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société anonyme Bearbull Rogier, qui a demandé, à titre subsidiaire, devant le tribunal administratif, le versement des intérêts visés à l'article 1153 du code civil à raison du préjudice qu'elle aurait subi, se borne à invoquer à l'appui de ces conclusions le retard de paiement des sommes qui lui étaient dues ; que, ce faisant, elle ne peut être regardée comme établissant, dans les circonstances de l'espèce, l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat ; que ces conclusions ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;
Article 1er : Le jugement n 9110543/1 du tribunal administratif de Paris en date du 28 mars 1995 est annulé.
Article 2 : La demande de la société anonyme Bearbull Rogier est rejetée.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA02565
Date de la décision : 16/09/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-01-05-02-03 CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - RECOUVREMENT - PAIEMENT DE L'IMPOT - AUTRES QUESTIONS RELATIVES AU PAIEMENT DE L'IMPOT


Références :

CGI 119 bis, 187
CGI Livre des procédures fiscales L208, L80 A, L207
Code civil 1153


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme PERROT
Rapporteur public ?: Mme KIMMERLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-09-16;96pa02565 ?
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