(2ème chambre A)
VU, enregistrée le 18 octobre 1996 au greffe de la cour, la requête présentée par M. André NEUCHAT, demeurant ..., 92100, Neuilly-sur-Seine ; M. NEUCHAT demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9301693/2 du 14 mai 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1984, 1985 et 1986 ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la décharge sollicitée ;
3 ) de prononcer le sursis à exécuter de ce jugement ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 1999 :
- le rapport de Mme TANDONNET-TUROT, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la société CSG, dont Mme Neuchat possédait 499 des 500 parts composant le capital social, a été créée le 1er juillet 1984 avec pour objet les activités "d'application d'informatique comptable, de publication documentaire et de rédaction d'actes" ; que cette société, qui a opté pour le régime d'imposition des sociétés de personnes conformément à l'article 239 bis du code général des impôts alors en vigueur, a fait l'objet en 1987 d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les années 1984, 1985 et 1986 à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause l'application des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts ainsi que la déductibilité des dépenses afférentes aux rémunérations versées à M. Alexis Neuchat et à la prise en charge des frais d'études de ce dernier ; que M. NEUCHAT conteste ces redressements ;
Sur la régularité de la procédure :
Considérant que lorsque l'administration conteste la qualité d'entreprise nouvelle au regard des articles 44 quater et 44 bis du code général des impôts, elle ne requalifie pas un acte juridique et n'a donc pas l'obligation de recourir à la procédure de répression des abus de droit prévue par les dispositions de l'article L.64 du livre des procédures fiscales ; que M. NEUCHAT ne saurait, en tout état de cause, utilement invoquer l'instruction administrative 4 A 384 du 16 mars 1984 par laquelle l'administration a commenté le deuxième alinéa de l'article 44 quater du code général des impôts, cette instruction, qui est relative à la procédure d'imposition et ne comporte pas une interprétation de la loi fiscale, n'étant pas opposable à l'administration ;
Sur le bien-fondé des redressements :
En ce qui concerne l'application des dispositions de l'article 44 quater du code général des impôts :
Considérant qu'aux termes de l'article 44 quater du code général des impôts : "Les entreprises créées du 1er janvier 1983 au 31 décembre 1986, soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et répondant aux conditions prévues à l'article 44 bis II, 2 et 3 , et III, sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices industriels et commerciaux qu'elles réalisent à compter de la date de leur création jusqu'au terme du 35ème mois suivant celui au cours duquel cette création est intervenue ..." ; qu'aux termes du III de l'article 44 bis du même code : " ... Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration ou d'une restructuration d'activités préexistantes, ou pour la reprise de telles activités, ne peuvent bénéficier de l'abattement ci-dessus ..." ; qu'il résulte, par ailleurs, des travaux préparatoires de l'article 7 de la loi n 83-1179 du 29 décembre 1983 portant loi de finances pour 1984, dont sont issues les dispositions précitées de l'article 44 quater, que le législateur a entendu réserver le régime prévu audit article aux entreprises dont l'activité est de nature industrielle ou commerciale ;
Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que l'activité de prestations informatiques comptables de la société CGS, qui constituait l'essentiel des activités de cette société, consistait en un traitement à façon de fichiers informatiques comptables qui était réalisé, à partir du 1er juillet 1985, dans des locaux communs à la société FECNA, société d'expertise comptable dont M. et Mme X... détenaient 87 % du capital, et au cabinet d'expertise comptable de M.
X...
; que, s'agissant de cette activité de prestations informatiques, la presque totalité du chiffre d'affaires de la société CGS a été réalisée, pendant les années en cause, avec ces deux cabinets comptables pour des travaux à façon opérés sur les dossiers de leurs clients à partir de fichiers informatiques préexistant à la création de la société CGS ; que celle-ci, qui ne disposait d'aucun matériel informatique avant le 9 octobre 1984, ni de personnel spécialisé jusqu'au 30 juin 1985, n'a réalisé que grâce aux moyens en personnel et en matériel mis à sa disposition par les deux cabinets comptables les prestations d'informatique qu'elle a facturées dès sa création, sur des bases au surplus très sensiblement supérieures à celles pratiquées par des entreprises de travaux à façon informatique pour le même type de prestations ; que le seul salarié de la société CGS, employé en qualité d'opérateur informatique depuis le 30 juin 1985, était jusqu'à cette date salarié de la société FECNA, laquelle disposait depuis de nombreuses années d'un ordinateur et de logiciels spécialisés ; qu'enfin, la comptabilité de la société CGS était tenue par la société FECNA sans contrepartie financière ; que l'activité de la société CGS doit ainsi être regardée, en tant qu'elle porte sur des prestations informatiques, non comme une activité nouvelle, mais comme une reprise et une restructuration d'une activité préexistante ;
Considérant, d'autre part, que l'activité de rédaction d'actes prévue dès l'origine de la création de la société CGS par le pacte social, qui constitue pour elle une activité secondaire, n'est pas de nature industrielle ou commerciale ; qu'elle n'ouvre ainsi, en tout état de cause, pas droit aux allégements fiscaux prévus par les dispositions précitées de l'article 44 quater ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme X... ne peuvent bénéficier, au titre des années 1984, 1985 et 1986, de l'exonération d'impôt prévue audit article pour les bénéfices tirés des activités exercées par la société CGS ; que leurs conclusions sur ce point, doivent, en conséquence, être rejetées ;
En ce qui concerne les charges déductibles :
Considérant qu'aux termes de l'article 39-1-1 du code général des impôts : "I - Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment ... 1 Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire - Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu" ;
Considérant que l'administration a refusé la déductibilité des rémunérations versées à M. Alexis Neuchat par la société CGS ainsi que des dépenses afférentes à la prise en charge par cette société des frais d'études et de scolarité de celui-ci ; qu'il résulte de l'instruction que M. Alexis Neuchat, qui était gérant statutaire de la société depuis le 1er juillet 1985, était âgé de 18 ans seulement à cette date et poursuivait ses études d'abord en France, puis à compter du 1er septembre 1986 aux Etats-Unis ; qu'aucun contrat de travail ne le liait à la société et que son père possédait une procuration générale sur les comptes bancaires et signait l'ensemble des documents sociaux et fiscaux de la société ; que si, pour justifier de l'activité exercée par son fils, M. NEUCHAT fait valoir que celui-ci a essayé, à une date indéterminée, de créer aux Etats-Unis un service informatique ainsi qu'une filiale de la société CGS, il ne produit aucun document à l'appui de cette allégation ; qu'il n'établit pas davantage que les études suivies par son fils étaient en liaison directe avec l'activité propre de cette société ; que c'est, en conséquence, à bon droit que ces diverses charges n'ont pas été admises ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. NEUCHAT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Dans le cas de requête jugée abusive, son auteur encourt une amende qui ne peut excéder 20.000 F" ; qu'en l'espèce, la requête de M. NEUCHAT présente un caractère abusif ; qu'il y a lieu de condamner l'intéressé à payer une amende de 5.000 F ;
Article 1er : La requête de M. NEUCHAT est rejetée.
Article 2 : M. NEUCHAT est condamné à payer une amende de 5.000 F.