(2ème Chambre A)
VU I), enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 21 juin 1996 sous le n 96PA01776, la requête présentée par la société à responsabilité limitée HA GIANG, dont le siège social est situé ... ; la société à responsabilité limitée HA GIANG demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9108427/2 en date du 1er février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1984 ;
2 ) de prononcer le sursis à exécution du même jugement ;
3 ) de lui accorder la décharge desdits compléments de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités dont ils sont assortis ;
4 ) d'ordonner une expertise de sa comptabilité ;
VU II), enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 21 juin 1996 sous le n 96PA01777, la requête présentée par la société à responsabilité limitée HA GIANG, dont le siège social est situé ... ; la société à responsabilité limitée HA GIANG demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9108425/2 en date du 1er février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices ... ;
2 ) de prononcer le sursis à exécution du même jugement ;
3 ) de lui accorder la décharge desdits compléments d'impôt sur les sociétés et des pénalités dont ils sont assortis ;
4 ) d'ordonner une expertise de sa comptabilité ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 juillet 1999 :
- le rapport de M. MORTELECQ, premier conseiller ;
- les observations de M. Dang X..., gérant de la société HA GIANG,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la société à responsabilité limitée HA GIANG, qui a exercé jusqu'au 30 septembre 1984, date à laquelle elle a donné son fonds de commerce en location-gérance, une activité de ventes de glaces et sorbets en gros auprès de restaurants et au détail dans une boutique à Paris, a fait l'objet en 1986 d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des compléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge pour les années 1982 à 1984 ; que les requêtes qu'elle a présentées à la cour, qui tendent au sursis à exécution et à l'annulation du jugement nos 9108425/2 et 9108427/2 en date du 1er février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes en décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 1982, 1983 et 1984, et à ce qu'il soit ordonné une expertise de sa comptabilité, présentent à juger des questions semblables ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
S'agissant de la régularité du jugement attaqué :
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de l'examen du dossier de première instance qu'une convocation à l'audience a été adressée à la société requérante le 11 décembre 1995, à l'adresse de son siège social ... ; que malgré un avis du service des postes du 15 décembre 1995, cette convocation n'a pas été retirée par la société et a été retournée au tribunal administratif avec la mention "non réclamé - retour à l'envoyeur" ; que, dès lors, le moyen présenté par la société à responsabilité limitée HA GIANG selon lequel elle n'aurait pas été convoquée à l'audience doit être écarté ;
Considérant, en second lieu, que le jugement attaqué, après avoir estimé que la procédure de rectification d'office mise en oeuvre était régulière et que la société HA GIANG supportait dès lors la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste, relève, d'une part, que la société n'apporte aucun justificatif à l'appui de ses prétentions selon lesquelles il y aurait lieu de pondérer les différentes ventes de sorbets et de glaces en fonction des sorbets alcoolisés, qui, dégageant le coefficient le plus élevé, ne représentent que 10 % des ventes totales et, d'autre part, que, contrairement aux affirmations de la requérante, les rabais consentis sur les ventes aux restaurants ont été pris en compte dès lors que le vérificateur ne s'est pas fondé sur les tarifs des ventes mais sur les factures des ventes aux restaurants ; qu'ainsi, le tribunal administratif, qui n'est pas tenu de demander la production de pièces justificatives aux parties, a implicitement mais nécessairement rejeté la demande d'expertise présentée par la société à responsabilité limitée HA GIANG ; que, dès lors, les moyens tirés de la circonstance qu'il ne lui a pas été demandé de présenter des justificatifs pour le calcul de ses coefficients de marge brute et qu'il a été omis de statuer sur sa demande d'expertise, doivent être écartés ;
S'agissant des conclusions aux fins de décharge des compléments d'impôt sur les sociétés et de taxe sur la valeur ajoutée :
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par décision en date du 9 juin 1997, postérieure à l'introduction des requêtes, le directeur des services fiscaux de Paris-Sud a prononcé le dégrèvement de la totalité des pénalités afférentes au complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la société à responsabilité limitée HA GIANG a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1984 ; que les conclusions de la requête de la société à responsabilité limitée HA GIANG relatives à cette imposition sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne la régularité de la mise en oeuvre de la procédure de rectification d'office et la charge de la preuve :
Considérant qu'aux termes de l'article L.75 du livre des procédures fiscales alors en vigueur : "Les bénéfices ou les éléments qui servent au calcul des taxes sur le chiffre d'affaires déclarés par les contribuable, peuvent être rectifiés d'office dans les cas suivants : ... b. Lorsque des erreurs, omissions ou inexactitudes graves et répétées sont constatées dans la comptabilisation des opérations effectuées par les contribuables ; ..." ; qu'aux termes de l'article L.193 du même livre : "Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction et, notamment, de l'avis émis le 29 février 1988 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de Paris, que les documents comptables présentés par la société HA GIANG au vérificateur ne donnaient pas la ventilation des recettes payées par chèques et en espèces, ni leur ventilation en fonction du taux de taxe sur la valeur ajoutée applicable ; qu'aucun brouillard de caisse n'était tenu ; que le montant des achats de glaces ne correspondait pas à celui facturé ; qu'un montant de 290.238 F a été extourné au 31 décembre 1984 du compte "achats" sans justification ;
Considérant que si la requérante fait valoir qu'elle a tenu un livre de caisse au jour le jour dont elle a conservé toutes les bandes de contrôle de caisse enregistreuse et qu'il n'existe aucune différence entre le montant des achats comptabilisés et celui des achats facturés elle ne produit cependant aucune pièce justificative à l'appui de ces allégations ; que, dans ces conditions, en raison des lacunes graves et répétées entachant la comptabilité de la société à responsabilité limitée HA GIANG, le vérificateur a pu à bon droit écarter cette comptabilité comme non probante et procéder, en application des dispositions précitées alors en vigueur de l'article L.75 du livre des procédures fiscales, à la rectification d'office des recettes et des résultats imposables de la société ; que, par voie de conséquence, en application des dispositions précitées de l'article L.193 du livre des procédures fiscales, la société à responsabilité limitée HA GIANG supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions qu'elle conteste ;
En ce qui concerne la régularité de l'avis de mise en recouvrement :
Considérant qu'aux termes de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales : "L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : 1 Les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2 Les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard, qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement ..." ;
Considérant que la société HA GIANG soutient que l'avis de mise en recouvrement émis le 21 février 1989 par le receveur principal de Paris 13ème est irrégulier car, en méconnaissance de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales, le montant de 34.218 F de droits en principal mis en recouvrement ne correspond pas à celui de 80.138 F mentionné dans la notification de redressements qui lui a été adressée le 24 octobre 1986 ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'avis de mise en recouvrement du 21 février 1989 fait référence à la notification de redressements du 24 octobre 1986 et contient l'indication de la nature de la taxe établie, du montant des droits en principal rappelés et de la période concernée ; que les redressements initialement notifiés le 24 octobre 1986 ont été ultérieurement réduits par l'administration afin de se conformer à l'avis émis le 28 février 1988 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de Paris et que le montant des droits en principal mis en recouvrement correspond exactement aux éléments découlant de cet avis, dont la société à responsabilité limitée HA GIANG a eu précisément connaissance par la notification qui lui a en été faite ; que, par suite, l'avis de mise en recouvrement du 21 février 1989 n'est pas irrégulier au regard des dispositions précitées de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour reconstituer le montant des ventes de sorbets et de glaces réalisées par la société HA GIANG auprès des restaurants, l'administration a retenu en définitive, conformément à l'avis émis le 28 février 1988 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires de Paris, un coefficient de reconstitution de ces ventes toutes taxes comprises à partir des achats hors taxes de 1,50 ; que la requérante soutient que ce coefficient est excessif et doit être ramené à 1,37 ;
Considérant, en premier lieu, que si la société HA GIANG soutient que les ventes de sorbets et de glaces alcoolisés qu'elle réalise auprès de restaurants ne représentaient que 10 % de la totalité de ses ventes alors que le vérificateur a retenu à ce titre une pondération de 25 % en se bornant à faire une moyenne arithmétique des quatre coefficients relatifs aux sorbets exotiques, aux sorbets classiques, aux glaces aux oeufs et aux sorbets et glaces alcoolisés, elle n'apporte aucun élément justificatif permettant d'établir cette allégation ; qu'à supposer même que cette pondération de 10 % puisse être retenue, il résulte des coefficients de reconstitution non contestés de 1,52 pour les sorbets exotiques, de 1,57 pour les sorbets classiques, de 1,30 pour les glaces aux oeufs et de 1,92 pour les sorbets et les glaces alcoolisés, que leur moyenne pondérée s'élève à 1,509, soit un coefficient légèrement supérieur à celui de 1,50 retenu en définitive par l'administration ;
Considérant, en deuxième lieu, que si la société à responsabilité limitée HA GIANG soutient qu'il n'aurait pas été tenu compte des rabais de 20 % qu'elle accorde sur toutes ses ventes aux "grandes chaînes" il résulte de l'instruction que les coefficients en cause ont été calculés à partir des factures de ventes qui incluent les rabais et remises consentis ; qu'ainsi, ce moyen manque en fait ;
Considérant enfin, en troisième lieu, que si la société à responsabilité limitée HA GIANG soutient qu'elle peut justifier que le coefficient de reconstitution de ses ventes de sorbets et de glaces aux restaurants est de 1,37, elle ne produit aucune pièce permettant d'établir cette allégation ; que si, par ailleurs, elle fait valoir que ce coefficient a été admis par le vérificateur dans un document qu'elle produit en annexe de sa requête, rien ne permet de tenir pour acquis que le document en cause, à supposer qu'il émane effectivement du vérificateur, aurait la portée que lui prête la requérante ; que ces moyens doivent donc être écartés ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner l'expertise sollicitée, la société HA GIANG n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes ;
Article 1er : A concurrence de la somme de 23.392 F, en ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel la société à responsabilité limitée HA GIANG a été assujettie au titre de la période allant du 1er janvier 1982 au 31 décembre 1984, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.
Article 2 : Le surplus des conclusions des requêtes de la société à responsabilité limitée HA GIANG est rejeté.