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18/05/1999 | FRANCE | N°97PA03489

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 18 mai 1999, 97PA03489


(2ème Chambre B)
VU le recours, enregistré le 12 décembre 1997 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9308883/2 en date du 19 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé M. et Mme X... des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils avaient été assujettis au titre des années 1986 et 1987 ;
2 ) de rétablir à la charge de M. et Mme X... les impositions susvisées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code géné

ral des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administrat...

(2ème Chambre B)
VU le recours, enregistré le 12 décembre 1997 au greffe de la cour, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ; le ministre demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9308883/2 en date du 19 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a déchargé M. et Mme X... des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils avaient été assujettis au titre des années 1986 et 1987 ;
2 ) de rétablir à la charge de M. et Mme X... les impositions susvisées ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mai 1999 :
- le rapport de Mme PERROT, premier conseiller,
- les observations de la SCP ARCIL, MARSAUDON et FISCHER, avocat, pour M. et Mme X...,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouver-nement ;

Considérant que M. et Mme X... ont contesté les compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils avaient été assujettis, au titre des années 1986 et 1987, en conséquence de la réintégration dans leurs bases d'imposition, sur le fondement des dispositions de l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts, de la dotation d'amortissement qu'ils avaient déduite de leurs bénéfices industriels et commerciaux à raison de leur part de copropriété du navire Nijinsky ; que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE fait appel du jugement en date du 19 décembre 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris leur a donné satisfaction ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : "L'administration adresse au contribuable une notification de redres-sements qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements qui a été adressée le 6 septembre 1988 à M. et Mme X... comportait l'indication de la règle, contenue à l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts, que le service entendait leur opposer et précisait, pour chacune des deux années en litige, en faisant référence aux déclarations catégorielles n 2031 N sur lesquelles les contribuables avaient indiqué des montants de produits et de charges qui n'étaient pas remis en cause, les conséquences chiffrées de son application auxdits montants, laquelle se soldait nécessairement par la réintégration de la totalité des dotations d'amortissement qui avaient été effectuées par les intéressés et dont les montants leur étaient rappelés ; que si M. et Mme X... entendent faire valoir que ces éléments chiffrés utilisés par l'administration fiscale pour pratiquer les redressements litigieux auraient été inexacts, une telle argumentation ne concernerait pas la motivation de la notification de redressements mais le bien-fondé des impositions ; que, dans ces conditions, les contribuables qui, d'ailleurs, avaient parfaitement cerné les éléments du litige ainsi qu'il ressort de celles qu'ils ont formulées en date du 24 septembre 1988, doivent être regardés comme ayant été mis en mesure par ladite notification de présenter utilement leurs observations ; qu'il suit de là que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que cette notification de redressements était irrégulière pour n'avoir pas satisfait aux dispositions précitées de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X... tant devant la cour que devant le tribunal administratif ;
Sur l'impôt sur le revenu :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que le redressement relatif à l'application de l'article 238 bis HA du code général des impôts a fait l'objet d'un dégrèvement de la part du MINISTRE DE L'ECONOMIE ET DES FINANCES ; que, par suite, le moyen soulevé concernant l'insuffisance de motivation de la notification de redressements en ce qui concerne ce chef de redressement est dépourvu d'objet ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que, dans sa réponse aux observations des contribuables en date du 7 novembre 1988, l'admi-nistration, en rappelant précisément sa conception du champ d'application de l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts, a répliqué de manière suffisante aux trois arguments présentés en observations par les contribuables ; que ces derniers ne peuvent assimiler à un défaut de motivation la circonstance que l'administration fiscale a décidé dans sa réponse de maintenir son interprétation du texte fiscal ;
Considérant, enfin, que si M. et Mme X... ont entendu soutenir que l'administration fiscale n'aurait pas, en ce qui concerne le redressement procédant de la limitation des amortissements sur le fondement de l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts, respecté les garanties de procédure prévues aux articles L.64 et R.64-1 du livre des procédures fiscales relatifs à la procédure de l'abus de droit, un tel moyen, alors que le différend ne porte que sur le champ d'application d'un texte fiscal et ne résulte en rien de la remise en cause de la portée d'actes juridiques, n'est pas fondé ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 8 quater du code général des impôts : "Chaque membre des copropriétés de navire régies par le chapitre IV de la loi n 67-5 du 3 janvier 1967 portant statut des navires et autres bâtiments de mer est personnellement soumis à l'impôt sur le revenu à raison de la part correspondant à ses droits dans les résultats déclarés par la copropriété" ; qu'en vertu de l'article 35-1 7 du même code, l'imposition se fait dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; qu'aux termes de l'article 39 E du code : "Pour la détermination des résultats des exercices ouverts à compter du 1er janvier 1978, chaque membre des copropriétés de navires mentionnées à l'article 8 quater amortit le prix de revient de sa part de propriété suivant les modalités prévues à l'égard des navires" ; qu'aux termes de l'article 61 A du code : "Les résultats à déclarer par les copropriétaires de navire ... sont déterminés dans les conditions prévues pour les exploitants industriels soumis au régime du bénéfice réel, avant déduction de l'amortissement du navire" ; que, d'autre part, aux termes de l'article 39 C du code général des impôts : "L'amortissement des biens donnés en location est réparti sur la durée normale d'utilisation suivant des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat" ; qu'aux termes de l'article 31 de l'annexe II à ce même code : "Si la location est consentie, directement ou indirectement, par une personne physique, le montant de l'amortissement ne peut excéder le montant du loyer perçu pendant l'exercice considéré diminué du montant des autres charges afférentes au bien donné en location" ;

Considérant qu'il résulte, d'une part, des dispositions insérées au chapitre IV de la loi n 67-5 du 3 janvier 1967, portant statut des navires et autres bâtiments de mer, et, en particulier, des articles 11 et 24 de cette loi, que les membres d'une copropriété de navire détiennent un droit de propriété direct sur celui-ci à proportion de leurs parts dans la copropriété, d'autre part, des dispositions, issues de l'article 73 de la loi de finances pour 1978, n 77-1467 du 30 décembre 1977, des articles 39 E et 61 A du code général des impôts qui énoncent, respectivement, que chaque membre des copropriétés de navires "amortit le prix de revient de sa part de copropriété suivant les modalités prévues à l'égard des navires ..." et que les résultats à déclarer par les copropriétés de navires sont déterminés dans les conditions prévues pour les exploitants individuels soumis au régime du bénéfice réel "avant déduction de l'amortissement du navire", que les membres des copropriétés de navires amortissent eux-mêmes leur part de copropriété, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 8 quater du même code, qui, bien qu'elles les soumettent personnellement à l'impôt sur le revenu "à raison de la part correspondant à (leurs) droits dans les résultats déclarés par la copropriété", n'ont ni pour objet, ni pour effet de les faire regarder comme les détenteurs de parts d'une société ; que le droit ainsi reconnu à chaque membre d'une copropriété de navire d'amortir sa part de copropriété ne peut toutefois s'exercer, lorsque le navire est donné en location, que dans la limite tracée par les dispositions, déjà citées, de l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts, issu de l'article 2 du décret n 65-1100 du 15 décembre 1965, dont, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X..., les auteurs n'ont pas excédé les limites de l'habilitation législative donnée au pouvoir réglementaire par l'article 39 C du même code ni contredit les dispositions de l'article 39 B relatives au mode de comptabilisation des amortissements et non à leur déductibilité fiscale ;
Considérant qu'aux termes de l'article 10 de la loi n 66-420 du 18 juin 1966, sur les contrats d'affrètement et de transports maritimes : "Par affrètement "coque nue", le fréteur s'engage, contre paiement d'un loyer, à mettre, pour un temps défini, à la disposition d'un affréteur, un navire déterminé, sans armement, équipement ou avec un équipement et un armement incomplets" ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. et Mme X... doivent, en tant que membres de la copropriété du navire Nijinsky ayant signé un contrat d'affrètement "coque nue", être regardés comme ayant eux-mêmes, avec les autres copropriétaires, donné en location ce navire et perçu, en proportion de leurs parts dans la copropriété, des revenus ayant le caractère de loyers ; que, dans ces conditions, M. et Mme X... ne sont pas fondés à reprocher à l'administration de leur avoir opposé les dispositions précitées de l'article 31 de l'annexe II au code général des impôts ;
Sur la contribution sociale de 0,4 % :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n 86-966 du 18 août 1986 : "Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France sont assujetties sur leurs revenus de 1985 et 1986 à une contribution dont le produit est versé à la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés." ; qu'aux termes de l'article 2 : "La contribution est égale à 0,4 p.100 du revenu net global de l'année considérée ..." ; qu'enfin, aux termes de l'article 5 : "Sous réserve des dispositions des articles 3 et 7, la contribution est établie et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes sûretés, privilèges et sanctions qu'en matière d'impôt sur le revenu ..." ; que, par ces dispositions, le législateur ne s'est pas borné à majorer un impôt existant, mais a créé une contribution nouvelle qui, si elle se rattache, sur un certain nombre de points, aux règles établies en matière d'impôt sur le revenu, n'en constitue pas moins un impôt distinct ; que cette contribution a été reconduite par les revenus de l'année 1987 en vertu des dispositions de la loi n 89-18 du 13 janvier 1989 ;
Considérant qu'ainsi qu'il n'est pas contesté par l'administration, la notification de redressements qui a été adressée à M. et Mme X... ne mentionnait pas la contribution sociale précitée parmi les impositions concernées par les redressements ; qu'ainsi, en l'absence d'une telle mention, cette notification n'a pu servir de fondement à l'établissement du complément de contribution assigné au requérant au titre des années 1986 et 1987 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE est, sauf en ce qui concerne la contribution sociale de 0,4 % qui a été irrégulièrement établie, fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a accordé à M. et Mme X... la décharge qu'il sollicitait ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. et Mme X... tendant à ce que l'Etat soit, en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, condamné à leur verser une somme au titre des frais qu'ils ont exposés ;
Article 1er : L'impôt sur le revenu auquel M. et Mme X... ont été assujettis au titre des années 1986 et 1987 est remis intégralement à leur charge.
Article 2 : Le jugement n 9308883/2 du tribunal administratif de Paris en date du 19 décembre 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du ministre et les conclusions de M. et Mme X... sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA03489
Date de la décision : 18/05/1999
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - REDRESSEMENT - NOTIFICATION DE REDRESSEMENT - MOTIVATION.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - MAJORATIONS EXCEPTIONNELLES D'IMPOT SUR LE REVENU.


Références :

CGI 238 bis HA, 8 quater, 35-1, 39, 61, 39 C, 39 E, 61 A
CGI Livre des procédures fiscales L57, L64, R64-1
CGIAN2 31
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 65-1100 du 15 décembre 1965 art. 2
Loi 66-420 du 18 juin 1966 art. 10
Loi 67-5 du 03 janvier 1967 art. 11, art. 24
Loi 77-1467 du 30 décembre 1977 art. 73 Finances pour 1978
Loi 86-966 du 18 août 1986 art. 1
Loi 89-18 du 13 janvier 1989


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme PERROT
Rapporteur public ?: Mme KIMMERLIN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-05-18;97pa03489 ?
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