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18/02/1999 | FRANCE | N°97PA03192

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 18 février 1999, 97PA03192


VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 novembre 1997, présentée par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9615112/4-3 - 9615113/4-3 SE -9615114/4-3 et 9615115/4-3 en date du 7 juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté ministériel en date du 21 mars 1996 interdisant à M. Oteiza X... de résider dans 31 départements ainsi que l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 25 juin 1996 en tant qu'il interdit à M. Oteiza X... de quitter ce département sans autor

isation ;
2 ) de rejeter la demande présentée par M.Oteiza X... de...

VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 19 novembre 1997, présentée par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ; le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9615112/4-3 - 9615113/4-3 SE -9615114/4-3 et 9615115/4-3 en date du 7 juillet 1997 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté ministériel en date du 21 mars 1996 interdisant à M. Oteiza X... de résider dans 31 départements ainsi que l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine en date du 25 juin 1996 en tant qu'il interdit à M. Oteiza X... de quitter ce département sans autorisation ;
2 ) de rejeter la demande présentée par M.Oteiza X... devant le tribunal administratif de Paris ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le Traité instituant la communauté européenne du 25 mars 1957 modifié ;
VU la directive n 64-221 du 25 février 1964 ;
VU le décret n 46-448 du 18 mars 1946 ;
VU le décret n 94-211 du 11 mars 1994 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 février 1999 :
- le rapport de Mme MONCHAMBERT, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme COROUGE, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté pris le 21 mars 1996 par le MINISTRE DE L'INTERIEUR qui interdit à M. Oteiza X... de résider dans 31 départements ainsi que l'arrêté en date du 25 juin 1996 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a interdit de se déplacer à l'extérieur du département sans autorisation au motif que ces décisions prises sur le fondement de l'article 2 alinéa 4 du décret du 18 mars 1946 susvisé méconnaissent les dispositions des articles 6 et 48 du Traité de Rome ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 A1 du Traité de Rome : "Tout citoyen de l'Union a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par le présent Traité et par les dispositions prises pour son application"; qu'aux termes de l'article 48 dudit Traité, article directement applicable à la situation de M. Oteiza X... dont il n'est pas contesté qu'il exerçait une activité salariée : "1. La libre circulation des travailleurs est assurée à l'intérieur de la Communauté au plus tard à l'expiration de la période de transition. 2. Elle implique l'abolition de toute discrimination, fondée sur la nationalité, entre les travailleurs des Etats membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail. 3. Elle comporte le droit, sous réserve des limitations justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique : a) de répondre à des emplois effectivement offerts, b) de se déplacer à cet effet librement sur le territoire des Etats membres, c) de séjourner dans un des Etats membres afin d'y exercer un emploi conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives régissant l'emploi des travailleurs nationaux, d) de demeurer dans des conditions qui feront l'objet de règlements d'application établis par la Commission sur le territoire d'un Etat membre, après y avoir occupé un emploi ( ...)" ; que la justification de mesures destinées à sauvegarder l'ordre public doit être appréciée au regard de toutes les règles du droit communautaire ayant pour objet d'une part, de limiter l'appréciation discrétionnaire des Etats membres en la matière, et d'autre part de garantir la défense des droits des personnes soumises, de ce chef, à des mesures restrictives ; que d'une part, il ne résulte d'aucune disposition de la directive du 25 février 1964 susvisée relative à la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique, qu'un Etat membre puisse restreindre la validité territoriale d'un titre de séjour ; que d'autre part, le principe de libre circulation reconnu aux citoyens de l'Union qui est défini par le Traité par référence au territoire global des Etats membres et non par référence à des subdivisions internes, implique nécessairement pour les intéressés le droit de séjourner librement sur le territoire de l'Etat d'accueil dans les mêmes conditions que les nationaux (Cour de justice des communautés européennes R. RUTILI contre ministère de l'intérieur 28 octobre 1975) ; qu'ainsi, dès lors que les mesures de surveillance prévues par l'article 2 du décret susvisé du 18 mars 1946 ne sont pas applicables aux ressortissants français, elles ne pouvaient être prononcées à l'égard de M. Oteiza X..., eu égard à sa qualité de citoyen de l'Union ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR à qui il appartient d'apprécier lors de l'instruction des titres de séjour, dans le cadre de la directive précitée du 25 février 1964, si le comportement personnel de l'intéressé justifie en dérogation au principe de libre circulation, un refus de titre de séjour, ne peut utilement invoquer la circonstance que M. Oteiza X... a bénéficié d'autorisations provisoires de séjour régulièrement renouvelées pour soutenir que la mesure d'interdiction prise à son encontre ne serait pas discriminatoire au sens des règles
communautaires applicables ; que par suite, le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a, par le jugement attaqué, annulé les arrêtés du 21 mars 1996 et du 25 juin 1996 ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner l'Etat à payer à M. Oteiza X... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête du MINISTRE DE L'INTERIEUR est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. Oteiza X... tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 97PA03192
Date de la décision : 18/02/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative

Analyses

- RJ1 - RJ2 COMMUNAUTES EUROPEENNES - REGLES APPLICABLES - LIBERTE DE CIRCULATION - LIBRE CIRCULATION DES PERSONNES - CAApplication aux ressortissants de la Communauté de l'article 2 du décret du 18 mars 1946 permettant l'assignation à résidence - Absence (1).

15-05-01-01, 335-01-04-01 Le principe de libre circulation reconnu aux citoyens de l'Union qui est défini par les articles 8A1 et 48 du Traité de Rome par référence au territoire global des Etats membres et non par référence à des subdivisions internes, implique nécessairement le droit de séjourner librement sur le territoire de l'Etat d'accueil dans les mêmes conditions que les nationaux. Il s'ensuit que, dès lors que les mesures de surveillance prévues par l'article 2 du décret n° 46-448 du 18 mars 1946 ne sont pas applicables aux ressortissants français, elles ne peuvent être prononcées à l'encontre d'un citoyen de l'Union (2).

- RJ1 - RJ2 ETRANGERS - SEJOUR DES ETRANGERS - RESTRICTIONS APPORTEES AU SEJOUR - ASSIGNATION A RESIDENCE - CAApplication de l'article 2 du décret du 18 mars 1946 aux ressortissants communautaires - Absence (1).


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 46-448 du 18 mars 1946 art. 2, art. 8, art. 48

1.

Cf. CJCE 1975-10-28, Roland Rutili c/ Ministre de l'intérieur, Affaire 36-75 (demande de question préjudicielle formée par le tribunal administratif de Paris), Rec. p. 1219. 2. Voir CE, 2000-12-29, Ministre de l'intérieur c/ Oteiza Olazabal, p. 659


Composition du Tribunal
Président : M. Schilte
Rapporteur ?: Mme Monchambert
Rapporteur public ?: Mme Corouge

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1999-02-18;97pa03192 ?
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