(2ème Chambre B)
VU la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés au greffe de la cour respectivement les 13 août et 11 octobre 1996, présentés pour M. Georges X..., demeurant ..., par Mes KEROGUES et Y..., avocats ;
M. X... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9209541/1 en date du 3 juillet 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1981 et 1982 ;
2 ) de le décharger en droits et pénalités des impositions contestées ;
3 ) d'ordonner le sursis à l'exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 1998 :
- le rapport de Mme PERROT, premier conseiller,
- les observations de Me Z..., avocat, substituant Me Y..., avocat, pour M. X...,
- et les conclusions de Mme KIMMERLIN, commissaire du Gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête :
Sur le principe de l'assujettissement en France de M. X... à l'impôt sur le revenu :
Considérant qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à compter du 1er janvier 1977 : "Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus ..." ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : "1- Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b. Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c. Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques ..." ; que, pour l'application des dispositions du paragraphe a du 1 de l'article 4 B précité, le foyer s'entend du lieu où le contribuable habite normalement et a le centre de ses intérêts familiaux, sans qu'il soit tenu compte des séjours effectués temporairement ailleurs en raison des nécessités de la profession ou de circonstances exceptionnelles, et que le lieu du séjour principal du contribuable ne peut déterminer son domicile fiscal que dans l'hypothèse où celui-ci ne dispose pas de foyer ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pendant les années 1981 et 1982, si M. X... a exercé une activité professionnelle au Zaïre, il a continué de disposer de manière permanente d'un appartement, avenue Hoche puis avenue Foch, à Paris, dans lequel logeaient sa femme et son fils ; qu'il a, dans plusieurs des actes de la vie civile accomplis pendant cette période, déclaré être domicilié à Paris ; qu'il possédait des véhicules en France et qu'il a régulièrement effectué des dépenses courantes dans ce pays ; que, dans ces conditions, et alors même qu'il disposait au Zaïre d'un logement et d'une autorisation de résidence, et que les casinos dont il dit assurer l'exploitation se trouvaient situés dans ce pays, M. X... doit être regardé comme ayant eu, au cours des années 1981 et 1982, le centre de ses intérêts familiaux, et donc son foyer en France et comme ayant été, par suite, fiscalement domicilié dans ce pays au sens des dispositions de l'article 4 B précité ; que, pour s'opposer à l'obligation fiscale illimitée en France à laquelle il était par suite tenu, M. X..., qui d'ailleurs n'établit pas, comme il lui incomberait de le faire, que sa femme et lui auraient eu, au cours des années en cause, des résidences séparées, ne peut utilement invoquer le bénéfice des dispositions alors applicables de l'article 6-3 a du code général des impôts relatives au régime d'imposition distincte des époux en cas de séparation de biens, ni de celles des articles 164 et 164 A du code qui ne sont applicables qu'aux contribuables n'ayant pas leur domicile fiscal en France ;
Sur la procédure d'imposition :
En ce qui concerne l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle :
Considérant, en premier lieu, que ni les dispositions de l'article L.10 du livre des procédures fiscales ni celles de l'article L.12 du même livre modifié par l'article 31 de la loi n 96-1182 du 30 décembre 1996 applicable aux procédures en cours ne font obstacle à ce que l'administration fiscale puisse être regardée comme ayant régulièrement engagé à l'encontre de M. et Mme X..., tous deux domiciliés en France, une vérification approfondie de leur situation fiscale d'ensemble ;
Considérant, en second lieu, que si M. X... fait valoir qu'il n'a pu bénéficier du débat oral et contradictoire auquel il avait droit sur la question de son domicile fiscal, il résulte de l'instruction, d'une part, qu'il n'apporte aucun élément de nature à établir la pertinence de ce moyen en ce qui concerne le déroulement de la vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble dont il a fait l'objet et, d'autre part, qu'aucune disposition n'obligeait l'administration à engager un tel débat sur ce point dans le cadre de la mise en oeuvre de la procédure de demande de justifications de l'origine de crédits bancaires prévue à l'article L.16 du livre des procédures fiscales, laquelle concerne non le principe de l'imposition à l'impôt sur le revenu mais la détermination des éléments nécessaires à son établissement ;
En ce qui concerne la demande de justifications :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à l'espèce : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille, ainsi que des charges retranchées du revenu net global ou ouvrant droit à une réduction d'impôt sur le revenu en application des articles 156, 199 sexies et 199 septies du code général des impôts. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. ( ...) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et fixer à l'intéressé, pour fournir sa réponse, un délai qui ne peut être inférieur au délai de trente jours prévu à l'article L.11 ... " ;
Considérant qu'il est constant que si les déclarations n 2042 souscrites par Mme X... au titre des années 1981 et 1982 mentionnaient seulement des salaires perçus par elle pour, respectivement 48.524 F et 83.582 F, elles doivent, eu égard à la circonstance ci-dessus rappelée que les deux époux domiciliés tous deux en France ne remplissaient pas les conditions pour y bénéficier d'une imposition séparée de leurs revenus, être regardées comme ayant été souscrites pour l'ensemble du foyer fiscal ; que l'administration fiscale ayant recensé sur les comptes bancaires ouverts en France par M. X... des crédits bancaires s'élevant à 4.234.639 F pour l'année 1981 et à 6.632.758 F pour l'année 1982, elle était fondée, eu égard à l'écart constaté entre les revenus déclarés et ces crédits bancaires, à demander au contribuable des justifications en vertu des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte de l'instruction que les demandes adressées les 15 octobre 1985 et 20 octobre 1986 à M. X..., sur le fondement de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, tendaient exclusivement à la production de justifications relatives aux crédits bancaires relevés par le service et que M. X... s'est borné en réponse à indiquer qu'il n'était pas domicilié en France et que les crédits provenaient d'une société zaïroise ; que cette réponse ne pouvait qu'être assimilée, eu égard aux questions posées, à une absence de réponse de nature à justifier la taxation d'office des sommes en cause, sans qu'obligation fût faite à l'administration d'adresser au préalable au contribuable une demande de précisions complémentaires ;
En ce qui concerne la taxation d'office :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, faute de toute explication fournie par le contribuable, l'administration fiscale était fondée à procéder, sur le fondement des dispositions de l'article L.69 du livre des procédures fiscales, à la taxation d'office de ces crédits en tant que revenus d'origine indéterminée ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'en raison de la taxation d'office pratiquée à son encontre, il appartient à M. X..., en vertu des dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales, d'apporter la preuve de l'exagération des bases d'imposition qu'il conteste ;
Considérant que M. X... n'apporte aucun élément de nature à étayer de manière précise ses assertions selon lesquelles les différents crédits bancaires recensés correspondraient soit à des sommes appartenant à la société zaïroise Kinstib dont il est le gérant, ce qui ferait obstacle à leur imposition en France, soit à des investissements qui pourraient, selon lui, bénéficier, en vertu des stipulations de la convention signée le 5 octobre 1972 entre la France et le Zaïre pour la protection des investissements, d'une exonération fiscale ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.