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05/11/1998 | FRANCE | N°96PA03478

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5e chambre, 05 novembre 1998, 96PA03478


(5ème Chambre)
VU, enregistrés au greffe de la cour les 4 novembre 1996 et 6 janvier 1997, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par la SCP GATINEAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société PROTECTAS SA, dont le siège est ..., venant aux droits de la société à responsabilité limitée Société européenne de vigilance industrielle et privée (SEVIP) et représentée par son président en exercice ; la société PROTECTAS SA demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du 14 mai 1996 par lequel le tribunal admi-nistrat

if de Paris n'a que partiellement fait droit à la demande de la société SEVIP te...

(5ème Chambre)
VU, enregistrés au greffe de la cour les 4 novembre 1996 et 6 janvier 1997, la requête sommaire et le mémoire complémentaire présentés par la SCP GATINEAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour la société PROTECTAS SA, dont le siège est ..., venant aux droits de la société à responsabilité limitée Société européenne de vigilance industrielle et privée (SEVIP) et représentée par son président en exercice ; la société PROTECTAS SA demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement du 14 mai 1996 par lequel le tribunal admi-nistratif de Paris n'a que partiellement fait droit à la demande de la société SEVIP tendant, d'une part, à la réduction des compléments d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1981 et 1982 et, d'autre part, à la décharge des pénalités qui lui ont été assignées sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts ;
2 ) de prononcer la réduction d'imposition et la décharge des pénalités demandées et de condamner l'Etat à lui verser une somme de 15.000 F hors taxes au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours adminis-tratives d'appel ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 1998 :
- le rapport de M. DUPOUY, premier conseiller,
- et les conclusions de M. HAÏM, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société à responsabilité limitée Société européenne de vigilance industrielle et privée (SEVIP), qui exerçait une activité de gardiennage, a fait l'objet, à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 31 décembre 1981 et 1982, de divers redressements en matière d'impôt sur les sociétés, tenant à la réintégration dans ses bénéfices imposables de certaines sommes regardées par l'administration comme dépourvues d'intérêt pour l'entreprise, et a été assujettie à l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts ; que la société PROTECTAS SA, venant aux droits de la société SEVIP, fait appel du jugement du 14 mai 1996 par lequel le tribunal administratif n'a que partiellement fait droit à la demande de réduction des compléments d'impôt sur les sociétés et de décharge de l'amende fiscale présentée par la société SEVIP ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que, contrairement à ce que soutient la société PROTECTAS SA, le tribunal administratif n'était pas tenu de répondre à tous les arguments invoqués par la requérante pour tenter d'apporter la preuve du caractère injustifié des redressements maintenus par le service ; que, par suite, en adoptant une motivation fondée sur les données propres de l'affaire et ne faisant pas référence à la lettre du ministre chargé du budget en date du 9 avril 1987, le tribunal n'a entaché son jugement d'aucun défaut de motivation ;
Sur le bien-fondé des redressements contestés :
Considérant que la société requérante conteste la réintégration dans les bénéfices imposables des exercices vérifiés, à la fois de frais de déplacement et de réception exposés par son gérant, ainsi que de sommes exposées par ce dernier pour le compte de tiers et de bons d'achat remis par la société à des tiers dont l'admi-nistration a estimé qu'ils n'avaient pas été exposés dans l'intérêt de l'entreprise ;
Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1 Les frais généraux de toute nature ..." et que, selon le 5 du même article, dans sa rédaction applicable aux années en litige : "Lorsque les dépenses appartenant aux catégories ci-après excèdent les chiffres fixés par arrêté du ministre de l'économie et des finances, pris après consul-tation des professions intéressées, elles ne sont déductibles que si elles figurent sur le relevé visé à l'article 54 quater. Les dépenses visées à l'alinéa qui précède sont : ... b. Les frais de voyage et de déplacements exposés par ces personnes ; ... e. Les cadeaux de toute nature, à l'exception des objets de faible valeur conçus spécialement pour la publicité ; f. Les frais de réception, y compris les frais de restaurant et de spectacles ... Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise ..." ;

Considérant que, pour contester les redressements liés aux frais de dépla-cement, d'hôtellerie et de restauration remboursés au dirigeant de l'entreprise, la société requérante, à laquelle il appartient d'apporter la preuve de l'engagement dans l'intérêt de l'exploitation des sommes visées à l'article 39-5 précité, se borne à indiquer que le gérant de la société SEVIP effectuait de fréquents déplacements en province soit pour se rendre dans les agences régionales de la société, soit pour rencontrer des clients importants, notamment à l'occasion de la conclusion de nouveaux contrats ; qu'elle n'assortit toutefois cette affirmation d'aucune justi-fication ; que, de même, la requérante n'établit pas que les bons d'achat réintégrés dans les bénéfices imposables ont été remis à leurs bénéficiaires en contrepartie de services rendus à l'entreprise ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la facture du 10 octobre 1982 de la société Patines Anciennes, d'un montant de 4.000 F, correspond à un don effectué à une oeuvre d'intérêt général en application des dispositions de l'article 238 bis du code général des impôts ; que, dès lors que l'administration ne soutient pas que les versements déjà effectués par la société SEVIP à ce titre excédaient la limite alors applicable du millième de son chiffre d'affaires, la société
requérante est fondée à demander que ladite somme de 4.000 F soit déduite du bénéfice imposable de la société SEVIP au titre de 1982 ;
Considérant, enfin, que la société ne peut utilement se prévaloir de la lettre du ministre délégué chargé du budget en date du 9 avril 1987 adressée à l'avocat de la requérante qui, en confirmant expressément les redressements relatifs aux cadeaux d'usage, n'a pas entendu abandonner tous les redressements autres que ceux liés aux cadeaux d'usage, ni appliquer aux bons d'achat un traitement fiscal différent de celui appliqué à ces cadeaux ; que, dans sa réponse du 7 mai 1984 à la notification de redressements, la société SEVIP avait d'ailleurs admis que les bons d'achat consti-tuaient l'une des formes que pouvaient revêtir les cadeaux d'usage ;
Sur la pénalité fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : "Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1763 A" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'invitée par l'administration à lui faire connaître le nom et l'adresse des bénéficiaires des sommes réputées distribuées, la société SEVIP s'est référée, dans sa réponse parvenue à l'adminis-tration dans le délai imparti, aux indications qui figuraient dans ses observations en réponse à la notification de redressements du 5 avril 1984 en matière d'impôt sur les sociétés et qui mettaient l'administration en mesure de connaître l'identité de certains bénéficiaires des excédents de distribution ; que l'administration, qui ne prétend pas que les personnes désignées n'étaient pas les bénéficiaires réels des sommes en cause, n'était pas en droit d'exiger que la réponse de la société soit contresignée par lesdits bénéficiaires ; que, dès lors, il y a lieu de réduire la base de la pénalité qui a été assignée à la société SEVIP sur le fondement de l'article 1763 A du code général des impôts des sommes pour lesquelles elle a régulièrement justifié de l'identité des bénéficiaires ; qu'il en est ainsi de la somme de 3.500 F représentative de bons d'achat attribués en 1982, des sommes de 11.610 F en 1981 et 4.000 F en 1982 représentatives de cadeaux d'usage, ainsi que des remboursements de frais d'essence pour des montants de 106.687 F en 1981, 79.837 F et 9.566 F en 1982 ; que, par suite, l'assiette de la pénalité fiscale assignée à la société SEVIP doit être réduite des sommes de 118.287 F au titre de 1981 et, compte tenu de la réduction de 4.000 F de la base imposable, de 100.903 F au titre de 1982 ;
Considérant, par ailleurs, que la pénalité visée à l'article 1763 A du code général des impôts présente le caractère d'une sanction de nature pénale à laquelle doit être appliqué le principe de la loi nouvelle moins sévère ; qu'il y a lieu, dès lors, de substituer la pénalité prévue par les dispositions de l'article 1763 A dans leur rédaction issue de la loi du 8 juilllet 1987, égale à 100 % des sommes versées ou distribuées, à celle au taux de 120 % qui a été mise en recouvrement ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux admi-nistratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L.8-1 et de condamner l'Etat à verser à la société PROTECTAS SA une somme de 10.000 F au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La base de l'impôt sur les sociétés assignée au titre de 1982 à la société à responsabilité limitée SEVIP, aux droits de laquelle vient la société PROTECTAS SA, est réduite d'une somme de 4.000 F.
Article 2 : La base de la pénalité assignée à la société SEVIP est réduite de 118.287 F au titre de 1981 et de 100.903 F au titre de 1982.
Article 3 : La pénalité de 100 % des sommes versées ou distribuées est substituée à la pénalité de 120 % appliquée à ces mêmes sommes.
Article 4 : La société PROTECTAS SA est déchargée des droits et de la pénalité correspondant aux réductions des bases et du taux de pénalité définis aux articles 1er, 2 et 3.
Article 5 : Le jugement n 9212169/2 du tribunal administratif de Paris en date du 14 mai 1996 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : L'Etat versera à la société PROTECTAS SA une somme de 10.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours admi-nistratives d'appel.
Article 7 : Le surplus des conclusions de la requête de la société PROTECTAS SA est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA03478
Date de la décision : 05/11/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - AMENDES - PENALITES - MAJORATIONS - PENALITES POUR DISTRIBUTION OCCULTE DE REVENUS.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LES BENEFICES DES SOCIETES ET AUTRES PERSONNES MORALES - DETERMINATION DU BENEFICE IMPOSABLE.


Références :

CGI 1763 A, 39, 238 bis, 117
Instruction du 10 octobre 1982
Instruction du 05 avril 1984


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. DUPOUY
Rapporteur public ?: M. HAÏM

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-11-05;96pa03478 ?
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