(2ème chambre)
VU I, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 mars 1996 sous le n 96PA00890, présentée pour la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE, venant aux droits de la société Vita et domiciliée à l'adresse de son établissement français, ..., représentée par son mandataire général pour la France ; la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE demande à la cour ;
1 ) d'annuler le jugement n 92/00961.2 en date du 23 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en restitution d'une fraction de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1986 dans les rôles de la ville de Paris ;
2 ) de prononcer la restitution sollicitée ainsi que le remboursement des frais exposés ;
VU II, la requête, enregistrée au greffe de la cour le 9 mars 1996 sous le n 96PA00891, présentée pour la société suisse, ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE, venant aux droits de la société Vita et domiciliée à l'adresse de son établissement français, ..., représentée par son mandataire
C+ général pour la France ; la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 92/00882-2 en date du 23 novembre 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des compléments de retenue à la source auxquels elle a été assujettie au titre des exercices 1986 et 1987 dans les rôles de la ville de Paris ;
2 ) de prononcer la décharge sollicitée ainsi que le remboursement des frais exposés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
VU la convention fiscale du 9 septembre 1966, conclue entre la France et la Suisse et modifiée par l'avenant du 3 décembre 1969 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience :
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mai 1998 :
- le rapport de Mme MOUREIX, président,
- les observations du cabinet FIDAL, avocat, pour la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE,
- et les conclusions de Mme MARTEL , commissaire du Gouvernement ;
Considérant que les requêtes n 96PA00890 et 96PA00891 de la SOCIETE ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE émanent du même contribuable et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu, par suite, de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que la société Vita, société d'assurance sur la vie qui a son siège social en Suisse, dispose en France d'un établissement stable qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, laquelle a conduit à des redressements en matière de retenue à la source au titre des exercices 1986 et 1987 ; qu'elle a contesté le rappel d'imposition en résultant ainsi que l'imposition initiale spontanément acquittée au titre des mêmes exercices, en faisant valoir, à l'appui de ses prétentions, d'une part, que la retenue à la source opérée sur les bénéfices réalisés par son établissement avait été à bon droit calculée en proportion des dividendes distribués par rapport au bénéfice mondial de la société et, d'autre part, que le montant des plus-values à long terme réalisées par l'établissement français devait être exclu de l'assiette de l'imposition ; que la SOCIETE ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE, venant aux droits de la société Vita, fait appel des jugements lesquels le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de cette dernière ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 10-1 de la Convention franco-suisse susvisée, ratifiée en vertu de la loi n 66-995 du 26 décembre 1966 et publiée au Journal officiel de la République française du 10 octobre 1967 par le décret n 67-879 du 3 septembre 1967 : "Les sociétés qui sont des résidents de Suisse et qui possèdent un établissement stable en France restent soumises en France à la retenue à la source dans les conditions prévues par la législation interne française, étant toutefois entendu que le taux applicable est de 5 %" ; qu'aux termes de l'article 115 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction en vigueur lors des années d'imposition litigieuses : "1-Les bénéfices réalisés en France par les sociétés étrangères sont réputés distribués, au titre de chaque exercice, à des associés n'ayant pas leur domicile fiscal ou leur siège social en France. Les bénéfices visés à l'alinéa précédent s'entendent du montant total des résultats, imposables ou exonérés, après déduction de l'impôt sur les sociétés. 2- Toutefois, la société peut demander que la retenue à la source exigible en vertu des dispositions du 1 ... fasse l'objet d'une nouvelle liquidation dans la mesure où les sommes auxquelles elle a été appliquée excèdent le montant total de ses distributions effectives. L'excédent de perception lui est restitué ..." ; qu'aux termes de l'article 379 de l'annexe II au code général des impôts, pris pour l'application du 1 de l'article 115 quinquies : "1 - Les sociétés étrangères qui réalisent des bénéfices en France, sans y avoir leur siège social, sont tenues de souscrire une déclaration en vue de la liquidation de la retenue à la source exigible en vertu de l'article 115 quinquies. 2- Cette déclaration, souscrite sur des imprimés fournis par l'administration, fait apparaître distinctement le montant en monnaie française : - des bénéfices et plus-values à retenir pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés ; - de l'impôt correspondant ; - des bénéfices et plus-values réalisés en France et exonérés dudit impôt. 3 - Elle est accompagnée du versement de la retenue exigible." ; qu'aux termes enfin de l'article 380 de la même annexe, pris pour l'application du 2 de l'article 115 quinquies du code général des impôts : "1. La société peut demander que la retenue à la source acquittée dans les conditions définies à l'article 379 fasse l'objet d'une nouvelle liquidation sur la base de ses distributions effectives. Les distributions à retenir pour l'application de cette disposition s'entendent des distributions au sens des articles 109 et suivants du code général des impôts qui ont été effectuées au cours de la période de douze mois qui suit la clôture de l'exercice ... dont les résultats ont été retenus pour le calcul de la retenue à la source, quel que soit l'exercice auquel elles se rapportent ..." ;
En ce qui concerne la remise en cause du pourcentage appliqué :
S'agissant de la liquidation provisoire :
Au regard de l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la société suisse Vita, devenue la SOCIETE ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE, qui était redevable de la retenue à la source à raison des bénéfices réalisés par son établissement stable situé à Paris, a déterminé les bases de la liquidation de la retenue à la source exigible au titre des exercices clos les 31 décembre 1986 et 31 décembre 1987 en appliquant aux résultats dudit établissement, diminués de l'impôt sur les sociétés, un pourcentage tiré du rapport existant au niveau de son bénéfice mondial entre le bénéfice réalisé et le bénéfice destiné à être distribué ; que ce mode de détermination méconnaît la présomption de distribution de tous les bénéfices réalisés, instituée par les dispositions précitées du 1 de l'article 115 quinquies du code général des impôts ; que, dès lors, au regard des dispositions législatives en cause, c'est par une exacte application desdites dispositions que l'administration a, à l'issue d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices concernés, redressé les bases de liquidation de la retenue à la source déclarées par la contribuable ;
Au regard de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :
Considérant, en premier lieu, que si la documentation administrative 4 J 2113 autorise les sociétés étrangères qui exercent une activité en France à limiter le versement de la retenue à la source au montant de l'impôt qui leur paraît définitivement exigible, compte tenu des perspectives de distribution et du domicile de leurs actionnaires, cette faculté est subordonnée à la condition que les sociétés intéressées en fassent expressément la demande et joignent celle-ci à leur déclaration servant à la liquidation provisoire de la retenue à la source ; qu'il est constant que la société Vita n'a produit, avec ses déclarations souscrites au titre des exercices 1986 et 1987, aucune demande aux fins d'obtenir le bénéfice de cette tolérance administrative ; que, dès lors, la SOCIETE ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE ne saurait se prévaloir de la limitation du versement prévue par la documentation administrative susvisée ;
Considérant, en second lieu, que si la requérante allègue que le mode de détermination des bases de la liquidation provisoire de la retenue à la source adopté par la société Vita aurait été approuvé par un ancien administrateur civil chargé des relations internationales au service de la législation fiscale, elle ne fournit aucune précision, ni ne produit de justificatif de nature à établir une prise de position formelle de l'administration dont elle puisse se prévaloir sur le fondement des article L.80 A ou L.80 B du livre des procédures fiscales ;
S'agissant de la liquidation définitive :
Considérant que dès lors que la SOCIETE ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE n'établit pas et ni même n'allègue que les distributions effectuées au cours de l'année 1987 d'une part, et de l'année 1988, d'autre part, n'excédaient pas les bases déclarées au titre respectivement de l'exercice 1986 et de l'exercice 1987, elle ne saurait prétendre à la révision de la liquidation qu'elle a provisoirement établie ;
En ce qui concerne l'inclusion des plus-values à long terme dans l'assiette de la retenue à la source :
Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions précitées du 1 de l'article 115 quinquies du code général des impôts et de l'article 379 de son annexe II que les résultats à retenir pour la liquidation de la retenue à la source s'entendent du montant total des bénéfices et plus-values réalisés en France, que ceux-ci soient imposables à l'impôt sur les sociétés au taux normal ou au taux réduit ou qu'ils soient exonérés de cet impôt ; qu'ainsi, c'est par une exacte application desdites dispositions que les plus-values à long terme, imposées à l'impôt sur les sociétés au taux de 16 %, que la société Vita avait portées, pour des montants respectifs de 983.357,42 F et de 810.027,81 F, sur ses déclarations de liquidation de la retenue à la source exigible au titre des exercices 1986 et 1987, ont été incluses dans l'assiette de ladite retenue et ce, alors même qu'elles avaient été inscrites, à la clôture desdits exercices, sur un compte de réserve au passif du bilan de l'établissement français ;
Considérant, d'autre part, que la requérante, qui n'établit pas, ni même n'allègue, comme il a été dit ci-dessus, que les distributions effectives auxquelles elle a procédé au cours de la période de référence définie par l'article 380-1 susvisé de l'annexe II au code général des impôts ont été inférieures aux bases déclarées, ne saurait utilement, en tout état de cause, se prévaloir a contrario des dispositions de l'article 109-1-1 du code général des impôts, selon lesquelles "sont considérés comme revenus distribués tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital", pour soutenir que les plus-values à long terme dont s'agit ne pouvaient être regardées comme des revenus distribués et demander, en conséquence, pour ce seul motif, une nouvelle liquidation des bases ayant servi à la détermination de la retenue à la source exigible au titre des exercices 1986 et 1987 ;
En ce qui concerne l'existence d'une discrimination illégale :
Considérant qu'aux termes de l'article 26, alinéa premier, de la convention franco-suisse susvisée : "Les nationaux d'un Etat contractant ne sont soumis dans l'autre Etat contractant à aucune imposition ou obligation y relative, qui est autre ou plus lourde que celle à laquelle sont ou pourront être assujettis les nationaux de cet autre Etat se trouvant dans la même situation" ; qu'aux termes de l'article 10-1) de la même convention : "les sociétés qui sont des résidents de Suisse et qui possèdent un établissement stable en France restent soumises en France à la retenue à la source dans les conditions prévues par la législation interne française, étant toutefois entendu que le taux applicable est de 5 %" ;
Considérant que la requérante soutient que l'interprétation par l'administration fiscale de l'article 115 quinquies du code général des impôts et des articles 379 et 380 de son annexe II introduit une discrimination contraire aux stipulations de l'article 26, alinéa premier de la convention franco-suisse susvisée ; que, toutefois, dès lors que l'administration a fait, comme il a été dit ci-dessus, une application conforme des dispositions des articles concernés et que l'article 10-1) précité de ladite convention déroge expressément à l'égalité de traitement prévue par l'article 26, alinéa premier en ce qui concerne la retenue à la source, le moyen tiré de l'existence d'une discrimination illégale ne peut qu'être écarté ;
Sur l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'à supposer même qu'en demandant à la cour de prononcer le remboursement des frais exposés, la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE entende solliciter l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, les dispositions dudit article s'opposent à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, soit condamné à rembourser à la requérante les frais irrépétibles, au surplus non chiffrés, que celle-ci a exposés à l'occasion des présentes instances ;
Article 1er : Les requêtes n 96PA00890 et n 96PA00891 de la société ZURICH D'ASSURANCE SUR LA VIE sont rejetées.