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12/05/1998 | FRANCE | N°96PA01177

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 12 mai 1998, 96PA01177


(2ème Chambre) VU la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés respectivement au greffe de la cour les 23 avril, 19 juillet et 12 décembre 1996, présentés pour M. Jean Y..., demeurant ..., par Me X..., puis, celui-ci étant décédé, par Me Z..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9300764/1 en date du 13 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1986 et 1987 dans les rôles de la ville de Paris ;> 2 ) de le décharger des impositions contestées ;
3 ) d'ordonner le sursi...

(2ème Chambre) VU la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés respectivement au greffe de la cour les 23 avril, 19 juillet et 12 décembre 1996, présentés pour M. Jean Y..., demeurant ..., par Me X..., puis, celui-ci étant décédé, par Me Z..., avocat ; M. Y... demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 9300764/1 en date du 13 février 1996 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1986 et 1987 dans les rôles de la ville de Paris ;
2 ) de le décharger des impositions contestées ;
3 ) d'ordonner le sursis à exécution du jugement attaqué ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU la convention fiscale franco-togolaise du 24 novembre 1971 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 1998 :
- le rapport de Mme PERROT, premier conseiller, - et les conclusions de Mme MARTIN, commissaire du Gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :
Considérant que la demande dont M. Y... a saisi les premiers juges, qui tendait, en contestant notamment être tenu à une obligation fiscale illimitée en France, à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti, au titre des années 1986 et 1987, à la suite d'un examen de sa situation fiscale personnelle, comportait des moyens relatifs à la régularité de ce contrôle et impliquait que fût déterminé le domicile fiscal de l'intéressé ; qu'en s'abstenant de statuer sur ces deux points, le tribunal administratif de Paris a entaché son jugement susvisé en date du 13 février 1996 d'irrégularité ; que, par suite, ce jugement doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur le domicile fiscal :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 4 A du code général des impôts : "Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles d'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française" ; qu'aux termes de l'article 4 B du même code : "1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; b) Celles qui exercent en France une activité professionnelle, salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; c) Celles qui ont en France le centre de leurs intérêts économiques ..." ;
Considérant, d'autre part, que l'article 2 de la convention conclue le 24 novembre 1971 entre la France et le Togo en vue d'éviter les doubles impositions stipule : "I. Une personne physique est domiciliée, au sens de la présente convention, au lieu où elle a son "foyer permanent d'habitation", cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est-à-dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer le domicile d'après l'alinéa qui précède, la personne physique est réputée posséder son domicile dans celui des Etats contractants où elle séjourne le plus longtemps. En cas de séjour d'égale durée dans les deux Etats, elle est réputée avoir son domicile dans celui dont elle est ressortissante. Si elle n'est ressortissante d'aucun d'eux, les autorités administratives supérieures des Etats trancheront la difficulté d'un commun accord ..." ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction qu'ainsi qu'en attestent la régularité et le montant des dépenses de téléphone, d'électricité, d'alimentation et de train de vie courant exposées par M. Y... et son épouse en France au cours des années vérifiée, leur propriété située à Golfe-Juan (Alpes-Maritimes) constituait le lieu ou les intéressés, qui n'avaient plus alors d'enfants mineurs, habitaient normalement et avaient le centre des intérêts familiaux ; qu'ainsi, M. Y... doit être regardé comme ayant eu, au cours desdites années, son foyer en France au sens des dispositions précitées de l'article 4 B a du code général des impôts ; que, d'autre part, s'il fait valoir que leur résidence principale se serait en réalité trouvée à Lomé et que l'exercice au Togo, au cours de la même période, de sa profession de transporteur, à raison de laquelle il percevait la majeure partie de ses revenus, aurait exigé sa présence constante dans ce pays, où il acquittait des impôts, c'est sans l'établir par les pièces produites au dossier, alors que les documents bancaires collationnés par le vérificateur démontrent, au contraire, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, une utilisation effective et régulière de la résidence en France ; que, dans ces conditions, M. Y... ne peut être regardé comme ayant eu, au cours des années en cause, avec le Togo ses relations personnelles les plus étroites et donc dans ce pays son foyer permanent d'habitation, au sens des stipulations de la convention fiscale précitée ; que, par suite, ces dernières ne peuvent faire obstacle à l'obligation fiscale illimitée de M. Y... en France, conformément à ce qui a été dit ci-dessus ;
Sur la procédure d'imposition :
Considérant qu'aux termes de l'article L.12 du livre des procédures fiscales : "L'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues au présent livre ... Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de l'ensemble de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période est prorogée du délai accordé, le cas échéant, au contribuable et, à la demande de celui-ci, pour répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications pour la partie qui excède les deux mois prévus à l'article L.16 A. Elle est également prorogée des trente jours prévus à l'article L.16 A et des délais nécessaires à l'administration pour obtenir les relevés de compte lorsque le contribuable n'a pas usé de sa faculté de les produire dans un délai de soixante jours à compter de la demande de l'administration ou pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger" ;
Considérant, en premier lieu, que M. Y... étant fiscalement domicilié en France, ainsi qu'il vient d'être dit, c'est, en tout état de cause, à bon droit que l'administration fiscale a pu engager à son encontre une procédure d'examen de situation fiscale personnelle ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition ne fait obstacle à ce qu'au cours d'un tel examen contradictoire et non contraignant, le vérificateur décide de recourir aux demandes de justifications et aux mises en demeure visées aux articles L.16 et L.16 A du livre des procédures fiscales ; que le moyen de M. Y... relatif à la nullité des mises en demeure qui lui ont été ainsi adressées ne peut, par suite, être accueilli ;
Considérant, en troisième lieu, que si M. Y... conteste la régularité du contrôle dont il a fait l'objet au motif qu'il aurait été irrégulièrement prolongé, il résulte de l'instruction que cette vérification, dont il a été avisé le 23 juin 1988, a été prorogée, ainsi qu'il lui a été indiqué par courrier du 19 juin 1989, de la durée correspondant, d'une part, au délai de trente jours pour mise en demeure prévu à l'article L.16 A et, d'autre part, au délai couru entre la demande que l'administration fiscale française a adressée le 14 novembre 1988 aux autorités du Togo et la réponse qu'elle en a reçu le 6 mars 1989 ; qu'ainsi, nonobstant les arguments inopérants de M. Y... relatifs au caractère inutile d'une demande d'assistance internationale dont l'opportunité relevait de la seule appréciation de l'administration française, la notification de redressements adressée à l'intéressé le 9 novembre 1989 est intervenue à l'issue d'un examen de situation fiscale personnelle dont la durée n'a pas excédé les limites prescrites par l'article L.12 susrapporté du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant, en premier lieu, qu'eu égard à la domiciliation fiscale en France du requérant, c'est à bon droit que l'administration a, d'une part, imposé en France les revenus de capitaux mobiliers perçus par M. Y... à Monaco et, d'autre part, appliqué, pour le calcul de l'imposition globale due en France par le contribuable, la règle dite du taux effectif visée à l'article 26 de la convention fiscale franco-togolaise susvisée ; que, contrairement à ce que soutient M. Y..., l'application de cette règle ne saurait avoir pour effet d'imposer deux fois les bénéfices industriels et commerciaux qu'il a perçus au Togo et qui n'ont été en réalité imposés que dans ce pays ;
Considérant, en second lieu, que si M. Y... soutient qu'il a été abusivement tenu compte d'une somme de 370.871,76 F, correspondant à des revenus togolais transférés en France en vue du règlement des dettes de son entreprise de transport, il n'apporte, alors que ces revenus n'ont, en tout état de cause, pas été imposés en France, aucune précision permettant d'apprécier la portée de ce moyen ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à demander la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1986 et 1987 ;
Article 1er : Le jugement n 9300764/1 du tribunal administratif de
Paris en date du 13 février 1996 est annulé. Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 96PA01177
Date de la décision : 12/05/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - LIEU D'IMPOSITION


Références :

CGI 4 A, 4 B
CGI Livre des procédures fiscales L12, L16, L16 A
Convention du 24 novembre 1971 France Togo art. 2


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme PERROT
Rapporteur public ?: Mme MARTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-05-12;96pa01177 ?
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