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02/04/1998 | FRANCE | N°95PA02857

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, Pleniere, 02 avril 1998, 95PA02857


(Formation plénière)
VU la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 juillet et 9 octobre 1995 au greffe de la cour administrative d'appel, présentés pour la société HYDRO AGRI FRANCE, dont le siège social est ..., par Me X..., avocat ;
La société HYDRO AGRI FRANCE demande à la cour d'annuler le jugement n s 9314154/3 et 9409777/3 du 22 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception n 76-01 établi le 16 novembre 1992 par le directeur de l'Agence de l'environnement et

de la maîtrise de l'énergie et rendu exécutoire le 24 novembre 1992 par...

(Formation plénière)
VU la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 13 juillet et 9 octobre 1995 au greffe de la cour administrative d'appel, présentés pour la société HYDRO AGRI FRANCE, dont le siège social est ..., par Me X..., avocat ;
La société HYDRO AGRI FRANCE demande à la cour d'annuler le jugement n s 9314154/3 et 9409777/3 du 22 février 1995 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation du titre de perception n 76-01 établi le 16 novembre 1992 par le directeur de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie et rendu exécutoire le 24 novembre 1992 par le préfet de la Seine-Maritime pour le recouvrement de la somme de 31.985,25 F, correspondant au montant de la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990, à raison des émissions dans l'atmosphère du protoxyde d'azote provenant de l'établissement qu'elle exploite à Rogerville, ainsi qu'à l'annulation des décisions des 21 avril et 17 juin 1993 par laquelle le directeur général de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie a rejeté le recours préalable présenté contre cet état exécutoire ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU l'ordonnance n 59-2 du 2 janvier 1959 modifiée, portant loi organique relative aux lois de finances ;
VU la loi n 61-842 du 2 août 1961 modifiée par la loi n 80-513 du 7 juillet 1980, relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et aux odeurs ;
VU la loi n 90-1130 du 19 décembre 1990 portant création de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ;
VU le décret n 80-854 du 30 décembre 1980 relatif aux taxes parafiscales ;
VU le décret n 90-389 du 11 mai 1990 instituant une taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique ;
VU l'arrêté interministériel, en date du 11 mai 1990, relatif à la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 1998 :
- le rapport de Mme TRICOT, premier conseiller,
- les observations de Me X..., avocat, pour la société HYDRO AGRI FRANCE et celles de Me Y..., avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la société HYDRO AGRI FRANCE, qui exploite une usine de fabrication d'engrais azotés à Rogerville (Le Havre), a été assujettie, en raison du rejet dans l'atmosphère du gaz dénommé protoxyde d'azote (N2O), à la taxe sur les émissions de polluants instituée par le décret du 11 mai 1990 en faveur de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie ; qu'elle a contesté devant le tribunal administratif de Paris le titre de perception n 76-01 en date du 26 novembre 1992 émis par cet organisme en excipant de l'illégalité de ce décret ; qu'elle fait appel du jugement en date du 22 février 1995 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur le moyen tiré de ce que le décret du 11 mai 1990 qualifierait illéga-lement de polluant le protoxyde d'azote, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 3 du décret susvisé du 11 mai 1990, le fait générateur de la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique est l'émission dans l'atmosphère d'un polluant mentionné dans l'annexe au décret ; que, dans la liste des polluants inclus dans ladite annexe, figure l'oxyde d'azote et "les autres composants azotés", catégorie à laquelle appartient le protoxyde d'azote ; que la société HYDRO AGRI FRANCE soutient que le protoxyde d'azote n'est pas un polluant au sens de la loi du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques et les odeurs et, qu'en conséquence, c'est à tort que le protoxyde d'azote a été compris dans la liste des gaz dont l'émission donne lieu au paiement de la taxe ;
Considérant que, quand bien même le décret du 11 mai 1990 a été pris non sur le fondement de la loi du 2 août 1961 relative à la lutte contre les pollutions atmosphériques, mais sur celui des dispositions de l'ordonnance susvisée du 2 janvier 1959, la taxe qu'il institue ne peut cependant être regardée comme légale que pour autant que les "polluants" qui en constituent le fait générateur puissent effectivement être qualifiés comme tels au sens de la législation en vigueur à la date de ce décret ;
Considérant que la loi du 2 août 1961 précitée en vigueur à la date du 11 mai 1990 dispose, dans son article 1er, que "les établissements industriels ... devront être construits, exploités ou utilisés de manière à satisfaire aux dispositions prises en application de la présente loi afin d'éviter les pollutions de l'atmosphère et les odeurs qui incommodent la population, compromettent la santé ou la sécurité publique ..." et, par son article 2, renvoie à des décrets le soin de déterminer "1 ) les cas et conditions dans lesquels pourra être interdite ou réglementée l'émission dans l'atmosphère de fumées, suies, poussières ou gaz toxiques, corrosifs, odorants ou radioactifs" ;
Considérant qu'il est constant que le protoxyde d'azote n'est pas un gaz toxique, corrosif, odorant et radioactif ; que le fait que ce gaz contribue, dans une proportion d'ailleurs difficilement évaluable, à augmenter l'effet de serre d'origine humaine qui n'entre pas dans les prévisions de la loi du 2 août 1961, n'est pas de nature à faire entrer ce gaz dans la catégorie des polluants au sens de la loi de 1961 ; que, par suite, c'est par une erreur manifeste d'appréciation que le décret du 11 mai 1990 a compris au nombre des polluants donnant lieu à taxation le protoxyde d'azote ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué et l'annulation du titre de perception n 76-01 établi pour le recouvrement de la somme de 31.985,25 F correspondant au montant de la taxe parafiscale sur la pollution atmosphérique à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1990 à raison des émissions dans l'atmosphère du protoxyde d'azote provenant de l'établissement qu'elle exploite à Rogerville, ainsi que des décisions en date des 21 et 17 juin 1993 par lesquelles le directeur de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie a rejeté sa réclamation ;
En ce qui concerne les conclusions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie relatives à l'application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie succombe dans la présente instance ; que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce qu'une somme de 30.000 F lui soit allouée au titre des frais irrépétibles ;
Article 1er : Le jugement n s 9314154-3 et 9409777-3 en date du 22 février 1995 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : Le titre de perception n 76-01 en date du 16 novembre 1992 émis pour le recouvrement de la somme de 31.985,25 F correspondant au montant de la taxe parafiscale à laquelle la société HYDRO AGRI FRANCE a été assujettie au titre de l'année 1990, ensemble les décisions en date des 21 avril et 17 juin 1993 par lesquelles le directeur général de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie a rejeté le recours préalable de la société, sont annulés.
Article 3 : Il est accordé à la société HYDRO AGRI FRANCE décharge de l'obligation de payer la somme de 31.985,25 F résultant du titre de perception n 76-01 ci-dessus annulé.
Article 4 : Les conclusions de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie tendant au versement d'une somme de 30.000 F au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 95PA02857
Date de la décision : 02/04/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR MANIFESTE - EXISTENCE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - PARAFISCALITE - REDEVANCES ET TAXES DIVERSES - TAXES PARAFISCALES.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 90-389 du 11 mai 1990 art. 3, annexe
Loi 61-842 du 02 août 1961 art. 1
Ordonnance 59-2 du 02 janvier 1959


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme TRICOT
Rapporteur public ?: Mme MARTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-04-02;95pa02857 ?
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