(4ème Chambre)
VU la requête et les mémoires complémentaires, enregistrés au greffe de la cour les 11 mai, 6 juin et 12 octobre 1995, présentés pour le DEPARTEMENT DU VAL-DE- MARNE, représenté par son président en exercice, représenté par la SCP LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; le DEPARTEMENT DU VAL-DE- MARNE demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 27 octobre 1994, par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, sur déféré du préfet du Val-de-Marne, la décision du président du conseil général du Val-de-Marne relative au recrutement de M. Y... Louis incluse dans le contrat d'engagement en date du 30 novembre 1992 ;
2 ) de rejeter le déféré du préfet du Val de Marne ;
3 ) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 11.860 F au titre des frais irrépétibles ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée notamment son article 4 ;
VU la loi n 86-53 du 26 janvier 1984 modifiée, notamment son article 3 ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
VU le décret n 90-126 du 9 février 1990, modifié ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 17 février 1998 :
- le rapport de M. AUPOIX, premier conseiller,
- les observations de la SCP LYON-CAEN-FABIANI-THIRIEZ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour le DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE et celles de Me X... pour le préfet du Val-de-Marne,
- et les conclusions de M. BROTONS, commissaire du Gouvernement ;
En ce qui concerne la recevabilité du déféré préfectoral :
Considérant, d'une part, que le tribunal administratif n'a pas annulé le contrat conclu entre le président du conseil général du DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE et M. Y..., mais la décision individuelle contenue dans ce contrat ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet n'aurait pas été recevable à demander, par la voie du déféré, l'annulation dudit contrat est, en tout état de cause, inopérant ;
Considérant, d'autre part, que par lettre en date du 24 décembre 1992, le préfet a invité le président du conseil général à réexaminer les conditions dans lesquelles M. Y... avait été recruté ; que, cette invitation constituait un recours gracieux qui a interrompu le délai de recours contentieux, lequel a commencé a courir le 16 avril 1993, date de réception par le préfet de la réponse à cette demande ; que, par suite, le déféré enregistré au greffe du tribunal administratif le 14 juin 1993 n'était pas tardif ;
En ce qui concerne la légalité de la décision de recruter M. Y... :
Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 4 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 et de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 que les emplois permanents de catégorie A de la fonction publique territoriale peuvent être occupés par des agents contractuels lorsque la nature des fonctions et les besoins du service le justifient ; qu'il ressort des pièces du dossier que le recrutement de M. Y... en qualité d'informaticien, chef de projet, chargé de la mise en place d'un système informatique propre à la direction des affaires sanitaires et sociales du DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE a, compte tenu de la nature des fonctions exercées, répondu aux besoins des services du département au sens des dispositions du 2 de l'article 3 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée ;
Considérant, par ailleurs, que la circonstance que les fonctions ainsi confiées à M. Y... auraient pu être confiées à des agents titulaires du cadre des ingénieurs territoriaux créé par le décret en date du 9 février 1990 susvisé ne saurait, à elle seule, faire regarder comme ayant été méconnues les dispositions de l'article 4 de la loi du 11 janvier 1984 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le DEPARTEMENT DU VAL-DE- MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler l'acte d'engagement en cause, le tribunal s'est fondé sur les deux moyens susanalysés ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par le préfet du Val-de-Marne devant le tribunal administratif ;
Considérant que le préfet soutient que l'acte d'engagement de M. Y..., en date du 30 novembre 1992, serait illégal du fait de sa rétroactivité à la date du 1er juillet 1991 ; qu'aux termes de l'article 45-I de la loi du 22 juillet 1982 modifiée : "I. Les actes pris par les autorités départementales sont exécutoires dès qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département" ; qu'il n'est pas contesté que l'acte de recrutement de M. Y..., en date du 30 novembre 1991, n'a été transmis au préfet du département du Val-de-Marne que le 7 décembre 1992 ; que la circonstance que la date d'effet fixée par le département au 1er juillet 1991 ait été déterminée afin de tenir compte du retrait du précédent contrat conclu avec l'intéressé est sans influence sur la date à compter de laquelle le contrat en question a revêtu un caractère exécutoire ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, d'annuler l'acte attaqué en tant qu'il fixe son entrée en vigueur à une date antérieure au 7 décembre 1992 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'acte d'engagement de M. Y..., qu'en tant qu'il concerne la période postérieure au 7 décembre 1992 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer au DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE une somme de 6.000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement n 9307386/5/CL et 9307387/5/SE du tribunal administratif de Paris en date du 27 octobre 1994 est annulé en tant qu'il annule l'acte d'engagement de M. Y... pour la période postérieure au 7 décembre 1992.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : L'Etat est condamné à verser au DEPARTEMENT DU VAL-DE-MARNE la somme de 6.000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.