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26/02/1998 | FRANCE | N°95PA00523

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2e chambre, 26 février 1998, 95PA00523


(2ème Chambre)
VU, enregistrée le 22 février 1995 au greffe de la cour, la requête présen-tée pour M. Jacques X..., demeurant ..., par Me Y..., avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 866130 du 20 octobre 1994 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il demeurait assujetti au titre des années 1978 à 1981, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la totalité de la réduction so

llicitée ;
3 ) de lui accorder le remboursement des frais d'instance à conc...

(2ème Chambre)
VU, enregistrée le 22 février 1995 au greffe de la cour, la requête présen-tée pour M. Jacques X..., demeurant ..., par Me Y..., avocat ; M. X... demande à la cour :
1 ) de réformer le jugement n 866130 du 20 octobre 1994 en tant que, par ce jugement, le tribunal administratif de Versailles n'a que partiellement fait droit à sa demande tendant à la réduction des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il demeurait assujetti au titre des années 1978 à 1981, ainsi que des pénalités y afférentes ;
2 ) de lui accorder la totalité de la réduction sollicitée ;
3 ) de lui accorder le remboursement des frais d'instance à concurrence de 46.394 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code général des impôts ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 1998 :
- le rapport de Mme TANDONNET-TUROT, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme MARTEL, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que M. X..., qui déclarait exercer à l'époque des faits les professions de gérant de sociétés et de comptable salarié, a fait l'objet en 1982 d'une vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble portant sur les années 1978 à 1981 à l'issue de laquelle divers redressements lui ont été notifiés ; que le requérant conteste le jugement du tribunal administratif de Versailles qui n'a que partiellement fait droit à sa demande concernant les redressements opérés dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, au titre d'une double activité de marchand de biens et d'agent immobilier ainsi que ceux effectués au titre de revenus d'origine indéterminée sur le fondement de l'article L.69 du livre des procédures fiscales ; qu'il critique également le refus d'admission de charges estimées non déductibles du revenu global ainsi que la compensation demandée par l'administration sur le fondement de l'article L.205 du livre des procédures fiscales à laquelle le tribunal a fait droit ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que, par une décision postérieure à l'introduction de la requête, le directeur chargé de la direction nationale de vérification des situations fiscales a prononcé en faveur de M. X... un dégrèvement de 4.500 F en droits et de 2.554 F en pénalités ; que, dans cette mesure, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête ;
Sur la demande de compensation présentée en première instance par l'administration au titre de l'année 1980 :
Considérant que, dans le dernier état de ses conclusions, l'administration déclare renoncer à se prévaloir de la compensation invoquée en première instance ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler l'article 4 du jugement attaqué par lequel le tribunal, faisant droit à cette demande, a compensé la décharge qu'il accordait au titre de l'année 1980 avec l'insuffisance d'imposition résultant de la non-imposition, au titre de cette même année, d'une plus-value à long terme ;
Sur le surplus des conclusions :
En ce qui concerne les charges déductibles du revenu global :
Considérant, d'une part, que l'omission, dans les notifications de redres-sements du 23 décembre 1982 et du 9 février 1983 relatives respectivement aux années 1978 et 1979 et à l'année 1980, de la mention du montant des redressements corres-pondant aux charges non admises en déduction du revenu global est, en l'espèce, sans influence sur la régularité de ces notifications dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce montant était celui dont le contribuable avait pratiqué la déduction sur ses déclarations ; que M. X... n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que lesdites notifications ne répondraient pas aux prescriptions de l'article L.76 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, d'autre part, que M. X... ne justifie pas l'état de besoin de la personne à qui il versait une pension alimentaire par la seule production d'une attestation établie par un expert-comptable américain ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que les sommes correspondantes ont été réintégrées dans son revenu global des années en cause ;
En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :
Sur la régularité de la procédure :

Considérant que M. X... soutient que la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble dont il a fait l'objet, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, aurait été suivie d'une vérification de comptabilité irrégulière faute d'avoir été précédée de l'avis de vérification correspondant ; qu'il résulte cependant de l'instruction que les sommes portées au crédit des comptes bancaires de M. X... n'étaient pas, lors de ladite vérification approfondie de sa situation fiscale, identifiables comme des revenus de nature commerciale ; qu'il ne peut, dès lors, être fait grief à l'administration de n'avoir pas entrepris une vérification de comptabilité ;
Sur l'activité de marchand de biens :
Considérant qu'aux termes de l'article 35 du code général des impôts : "I. Présentent ... le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l'appli-cation de l'impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes désignées ci-après : 1 ) Personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de les revendre, des immeubles ..." ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. X... a acquis, au cours des années 1967 à 1972, onze appartements, onze parkings et quatorze chambres de service qu'il a revendus au cours des années 1972 à 1980, pour certains moins d'un mois après leur acquisition ; qu'eu égard au nombre et à la fréquence des transactions ainsi réalisées, M. X... ne peut, alors même qu'il aurait, ainsi qu'il le soutient sans d'ailleurs l'établir, donné ces immeubles en location, ou que certains de ces biens auraient été revendus pour contribuer à l'acquisition d'une résidence principale et à un investissement dans une société américaine, soutenir que l'administration n'établit pas l'intention spéculative au moment de l'achat de ces biens immobiliers ; qu'il suit de là que les opérations en cause entrent dans le champ d'application de l'article 35-I-1 précité du code général des impôts et que les profits en résultant ont été à bon droit imposés à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commer-ciaux ;
Sur l'activité d'agent d'affaires :
Considérant que M. X... ne conteste pas avoir, au cours des années en cause, exercé une activité commerciale d'agent d'affaires et avoir régulièrement fait l'objet d'une évaluation d'office à ce titre en l'absence de déclarations de ces résultats ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, postérieu-rement à l'envoi des demandes de justifications qui lui avaient été adressées dans le cadre de la vérification approfondie de situation fiscale d'ensemble dont il a fait l'objet au titre des années en cause, M. X... a, au cours d'entretiens qu'il a eus avec le vérificateur, ventilé lui-même entre ses différentes sources de revenus les crédits bancaires figurant sur ses comptes ; qu'il ne conteste pas avoir lui-même déterminé le montant des recettes correspondant à l'activité d'agent d'affaires qu'il avait exercée au cours des années 1978 et 1979 ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que la notification de redressements, qui reprenait exactement les montants qu'il avait lui-même ainsi indiqués, ne correspondrait pas aux prescriptions de l'article L.76 du livre des procédures fiscales ;

Considérant, en second lieu, que M. X..., à qui il appartient, dès lors qu'il ne conteste pas avoir régulièrement fait l'objet d'une procédure d'évaluation d'office, d'apporter, conformément aux dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales la preuve de l'exagération des redressements qu'il conteste, n'établit pas que le montant des recettes, qui ont été reconstituées à partir de ses propres indications, par la différence entre les montants de loyers encaissés par chèques et ceux des loyers reversés aux propriétaires, serait supérieur au montant des sommes créditées sur ses comptes bancaires et que certaines de ces sommes auraient été reprises deux fois ; qu'il ne démontre pas, par une comptabilité reconstituée a posteriori, que l'administration aurait insuffisamment apprécié le montant, qu'il a lui-même indiqué, des reversements de loyers aux propriétaires ; que, notamment, il n'établit pas que les montants des loyers encaissés et reversés retenus par le service sont inexacts en se bornant à avancer des chiffres différents qui, selon lui, ressortiraient du dépouillement des quittances délivrées aux locataires et des reversements aux propriétaires ; qu'il ne justifie pas davantage la reconstitution qu'il propose d'effectuer en appliquant au montant des loyers qu'il prétend avoir encaissés au cours de chacune des années un pourcentage uniforme de commission de 6,5 % ; que, par suite, M. X... ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe de l'exagération des bénéfices évalués au titre de son activité de gérant d'immeuble ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :
Sur la régularité de la procédure :
S'agissant de l'année 1981 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable ... des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permet-tant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'alors que M. X... avait déclaré un montant de revenus de 410.983 F au titre de l'année 1981, l'administration a constaté que le total des crédits figurant sur ses comptes bancaires s'élevait à la somme de 3.072.256 F ; qu'en raison de l'importance de cette discordance, l'administration a estimé à bon droit que M. X... pouvait avoir disposé de revenus plus importants que ceux qu'il avait déclarés ; qu'elle était ainsi fondée à faire application des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales nonobstant la circonstance que l'excédent constaté pour le montant de 77.288 F des emplois d'espèces sur les ressources espèces connues serait d'un faible montant ;
S'agissant de l'année 1979 :
Considérant qu'aux termes de l'article L.69 du livre des procédures fiscales : "Sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L.16" ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la demande du 7 juillet 1982 par laquelle l'administration l'invitait à justifier un excédent d'emplois d'espèces par rapport aux ressources espèces connnues de 664.749 F au titre de l'année 1979, M. X... s'est borné à porter en marge des versements d'espèces détaillés à partir de ses divers comptes la mention "loyers et honoraires" sans fournir le moindre début de justifications à l'appui de cette allégation ; qu'en raison de cette imprécision et de l'absence de justifications, et alors que le contribuable ne manifestait pas son intention de fournir ultérieurement des justifications, cette réponse pouvait être assimilée à un défaut de réponse ; que l'administration était dès lors en droit, à l'expiration du délai de trente jours prévu à l'article L.16 du livre des procédures fiscales, de taxer d'office, par application des dispositions précitées de l'article L.69 du même livre, les sommes dont s'agit sans lui adresser une nouvelle demande les concernant ;
Sur le bien-fondé des redressements :
Considérant qu'il appartient à M. X... qui a, ainsi qu'il vient d'être dit, régulièrement fait l'objet d'une procédure de taxation d'office pour les années 1979 et 1981 et qui ne conteste pas la procédure suivie pour les années 1978 et 1980, d'établir l'exagération des redressements qu'il conteste, en application des dispositions de l'article L.193 du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en premier lieu, que si le requérant soutient que divers crédits se montant à 58.000 F en 1978, 13.000 F en 1980 et 26.500 F en 1981, proviennent d'avances effectuées par son beau-frère, il n'établit pas, par les seuls bordereaux de dépôt de chèques et par les chèques de remboursement qu'il produit, que ces sommes correspondraient à des avances de caractère familial alors qu'au surplus il avait, avec cette personne, associée des sociétés X... et Deltex dont lui-même était le gérant, des intérêts économiques communs ; qu'il ne justifie pas davantage que les chèques de 30.000 F en 1979 et de 102.600 F en 1981 représenteraient des avances de caractère familial consenties par son cousin par la seule production de bordereaux bancaires indiquant que ce dernier était la partie versante et par la photocopie recto-verso d'un chèque de 30.000 F qu'il aurait lui-même émis au profit dudit cousin en 1981 ; qu'il n'établit pas enfin, par la production d'une liste d'emprunteurs et de prêteurs et par des attestations établies par ces derniers postérieurement au contrôle, la réalité des prêts et emprunts allégués, à concurrence de 10.500 F et 89.200 F en 1979, de 164.000 F et 5.900 F en 1980 et de 361.000 F et 57.500 F en 1981 ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. X... soutient que, pour un montant de 817.176,09 F, les crédits en cause proviennent de la cession, en 1981, d'actions de la société "Paris Eyewear and Fashions" qu'il avait acquises en 1979, il se borne à produire à l'appui de cette allégation des documents bancaires anonymes, à l'exception d'un ordre de paiement à son nom pour un montant de 144.167,22 F, et une attestation établie postérieurement au contrôle et au surplus rédigée en langue étrangère et non traduite ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal n'a admis à ce titre la réalité que de la seule somme de 144.167,22 F ;

Considérant, en troisième lieu, qu'en ce qui concerne les dépenses de train de vie réglées en espèces et taxées d'office par l'administration, le tribunal a fait droit sur ce point à l'argumentation présentée devant lui par M. X... et retenu les montants admis par celui-ci de 90.000 F pour l'année 1979, 102.000 F pour l'année 1980 et 120.000 F pour l'année 1981 ; que M. X... n'apporte devant la cour aucun élément de nature à établir que ces montants seraient excessifs et proviendraient d'une surévaluation de ses dépenses courantes de train de vie ; qu'il n'établit pas davantage que les achats de bijoux qu'il ne conteste pas avoir lui-même déclarés au vérificateur pour le montant de 70.000 F au titre de l'année 1980 ne s'élèveraient en réalité qu'à 60.000 F et n'auraient pas été réglés au cours de cette année ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. X... n'est que partiellement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles n'a que partiellement fait droit à sa demande ;
En ce qui concerne les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. X... présentées sur le fondement de ces dispo-sitions ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. X... dans la limite du dégrèvement prononcé.
Article 2 : L'article 4 du jugement n 866130 du tribunal administratif de Versailles en date du 20 octobre 1994 est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 95PA00523
Date de la décision : 26/02/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GENERALITES - REGLES GENERALES D'ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - CONTROLE FISCAL - VERIFICATION DE COMPTABILITE - GARANTIES ACCORDEES AU CONTRIBUABLE.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - DETERMINATION DU REVENU IMPOSABLE.


Références :

CGI 35
CGI Livre des procédures fiscales L69, L205, L76, L193, L16
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme TANDONNET-TUROT
Rapporteur public ?: Mme MARTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1998-02-26;95pa00523 ?
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