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21/01/1997 | FRANCE | N°94PA00119

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1e chambre, 21 janvier 1997, 94PA00119


(1ère chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 février 1994, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-CHERON représentée par son maire en exercice, par la SCP MILON SIMON, avocat ; la COMMUNE DE SAINT-CHERON demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 16 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 1.400.000 F, majorée du montant des intérêts du prêt souscrit par elle, cette somme totale représentant le coût restant à sa charge des travaux de

changement de son réseau d'alimentation en eau potable, lesquels ont été...

(1ère chambre)
VU la requête, enregistrée au greffe de la cour le 4 février 1994, présentée pour la COMMUNE DE SAINT-CHERON représentée par son maire en exercice, par la SCP MILON SIMON, avocat ; la COMMUNE DE SAINT-CHERON demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement du 16 novembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité de 1.400.000 F, majorée du montant des intérêts du prêt souscrit par elle, cette somme totale représentant le coût restant à sa charge des travaux de changement de son réseau d'alimentation en eau potable, lesquels ont été rendus nécessaires par la pollution de la nappe phréatique ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 1.398.400 F correspondant audit coût restant à sa charge et de 40.303,25 F correspondant aux intérêts de l'emprunt contracté par elle ainsi que les intérêts de l'emprunt qu'elle devra contracter pour rembourser à l'Agence de l'Eau de Seine Normandie, l'avance de taxe sur la valeur ajoutée de 1.488.000 F ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU la loi du n 76-663 du 19 juillet 1976 ;
VU le décret n 77-1133 du 21 septembre 1977 ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 janvier 1997 :
- le rapport de Mme MILLE, conseiller,
- les observations de la SCP MILON-SIMON et associés, avocat, pour la COMMUNE DE SAINT-CHERON,
- et les conclusions de Mme PHEMOLANT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant qu'à l'occasion d'un prélèvement effectué en avril 1983, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l'Essonne a constaté la présence, en quantités excédant les normes admises par l'Organisation Mondiale de la Santé, de composés organochlorés volatils dans le point de captage alimentant en eau potable la COMMUNE de SAINT-CHERON et situé en aval du lieu d'implantation de la société Gerber qui exploitait, à Sermaise, une activité de régénération de solvants usés au titre de la législation sur les installations classées ; que s'étant trouvée dans l'obligation de modifier en 1992 sa source d'alimentation en eau potable et d'entreprendre à cet effet des travaux d'un montant de 8 millions de francs dont 1.398.400 F sont restés à sa charge, la COMMUNE de SAINT-CHERON a demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de ce montant ; qu'elle conteste le jugement du 16 novembre 1993 qui a rejeté sa demande ;
Sur la responsabilité de l'Etat :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'étude réalisée en octobre 1984 par la Compagnie de Prospection Géophysique Française à la demande de l'inspecteur des installations classées, que la nappe phréatique située sous le site de l'exploitation Gerber était polluée en plusieurs endroits en raison de la présence de fûts enterrés et corrodés contenant des solvants non dilués et qu'il convenait de faire procéder d'urgence à leur enlèvement ; que si le préfet de l'Essonne a, par un arrêté du 27 novembre 1984, ordonné à la société Gerber de "récupérer" ces fûts dans un délai de deux mois, il n'a pas pris les mesures qui s'imposaient pour faire respecter cette prescription qui n'a pas été suivie d'effet ; que malgré la mise en place, en octobre 1984, d'un dispositif épuratoire sur le captage alimentant de la COMMUNE DE SAINT-CHERON, les analyses effectuées à la fin de l'année 1991 ont fait apparaître une teneur aggravée en composés organochlorés volatils ; qu'ainsi la persistance et l'aggravation de la pollution de la nappe phréatique dont dépendait l'alimentation en eau potable de la COMMUNE DE SAINT-CHERON résultent du manquement fautif de l'administration à son obligation d'assurer le respect de la législation en vigueur ; que dès lors, la responsabilité de l'Etat est engagée à raison des conséquences dommageables en résultant pour la COMMUNE de SAINT-CHERON ;
Sur le préjudice :
Considérant que les travaux de raccordement de la COMMUNE DE SAINT-CHERON à la source de Brières-les-Scelles sur le plateau de Beauce sont en relation directe avec la faute de l'Etat ;
Considérant qu'en première instance, la commune a limité le montant de l'indemnité demandée à la somme restée à sa charge, soit 1.398.400 F, assortie des intérêts de l'emprunt souscrit pour faire effectuer lesdits travaux soit 40.303,25 F ; que ces sommes, dont le montant n'est pas contesté, entrent seules dans le préjudice indemnisable de la commune qui n'est pas recevable à présenter en appel une demande de 1.274.314,20 F correspondant aux intérêts de l'emprunt contracté pour le remboursement de l'avance de taxe sur la valeur ajoutée assise sur le montant total des travaux, ces conclusions étant nouvelles en appel ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE de SAINT-CHERON est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande ;
Article 1er : Le jugement du 16 novembre 1993 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la COMMUNE de SAINT-CHERON les sommes de 1.398.400 F et de 40.303,25 F.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la COMMUNE de SAINT-CHERON est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00119
Date de la décision : 21/01/1997
Sens de l'arrêt : Annulation, condamnation de l'état
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

NATURE ET ENVIRONNEMENT - INSTALLATIONS CLASSEES POUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT - RESPONSABILITE - Omission d'assurer l'exécution des prescriptions tendant à faire cesser la pollution d'une nappe phréatique.

44-02-03, 60-01-03-04 Constatation, en avril 1983, par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales de l'Essonne, de la présence en quantité excédant les normes admises par l'Organisation mondiale de la santé, de composés organochlorés volatils dans la nappe phréatique dont dépendait l'alimentation en eau potable d'une commune, en raison de la présence dans le sol de fûts provenant d'une société exploitant, au titre de la législation sur les installations classées, une activité de régénération de solvants usés. Constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'Etat l'abstention du préfet de l'Essonne de prendre les mesures nécessaires au respect de son arrêté du 27 novembre 1984 qui ordonnait à la société en cause de "récupérer" ces fûts dans un délai de deux mois, dès lors que les analyses de l'eau de la même nappe phréatique effectuées fin 1991 ont fait apparaître une teneur aggravée en composés volatils.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - FAITS SUSCEPTIBLES OU NON D'OUVRIR UNE ACTION EN RESPONSABILITE - AGISSEMENTS ADMINISTRATIFS SUSCEPTIBLES D'ENGAGER LA RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - OMISSIONS - Omission d'assurer l'exécution des prescriptions tendant à faire cesser la pollution d'une nappe phréatique.


Composition du Tribunal
Président : M. Marlier
Rapporteur ?: Mme Mille, c. du g.
Rapporteur public ?: Mme Phemolant, pdt.

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1997-01-21;94pa00119 ?
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