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19/06/1996 | FRANCE | N°94PA00941;94PA00951

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4e chambre, 19 juin 1996, 94PA00941 et 94PA00951


(4ème Chambre)
VU I la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la cour le 8 juillet et le 28 septembre 1994 sous le n° 94PA00941 par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le ministre demande :
1°) l'annulation du jugement du 24 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser conjointement aux sociétés Peugeot et Talbot la somme de 145 millions de francs en réparation des préjudices que leur a causés le refus de concours de la force publique pour évacuer l'usine de Poissy entre le 22 juin et le 4

juillet 1982 ;
2°) que l'indemnité mise à la charge de l'Etat soit...

(4ème Chambre)
VU I la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la cour le 8 juillet et le 28 septembre 1994 sous le n° 94PA00941 par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE ; le ministre demande :
1°) l'annulation du jugement du 24 mars 1994 par lequel le tribunal administratif de Versailles l'a condamné à verser conjointement aux sociétés Peugeot et Talbot la somme de 145 millions de francs en réparation des préjudices que leur a causés le refus de concours de la force publique pour évacuer l'usine de Poissy entre le 22 juin et le 4 juillet 1982 ;
2°) que l'indemnité mise à la charge de l'Etat soit ramenée à 90,91 millions de francs ;
VU II la requête et le mémoire ampliatif enregistrés au greffe de la cour le 11 juillet et le 12 septembre 1994 sous le n° 94PA00951 présentés pour les sociétés AUTOMOBILES PEUGEOT société anonyme et TALBOT ET CIE dont les sièges sont situés ... Armée à Paris représentées par leurs représentants légaux par la SCP GATINEAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; les sociétés demandent 1°) la réformation du jugement du tribunal administratif de Versailles du 24 mars 1994 pour porter à 255,1 millions de francs le montant de l'indemnisation du préjudice que leur a causé le refus de concours de la force publique ; 2°) que cette somme soit assortie des intérêts légaux et de la capitalisation des intérêts aux dates auxquelles elle a été demandée ; 3°) que l'Etat soit condamné à leur verser 100.000 F en application des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et etdes cours administratives d'appel ; les sociétés soutiennent qu'un accord avec l'Etat sur les frais de siège à 27,9 millions de francs avait été acquis ; que le préjudice des filiales commerciales doit être porté à 16,2 millions de francs conformément à l'évaluation de l'expert ; que le préjudice commercial de Peugeot doit être porté à 136 millions de francs, le tribunal ayant fait une erreur dans le chiffre d'affaires à retenir et une autre en pratiquant un abattement en raison des liens industriels commerciaux et financiers qui unissaient les deux sociétés ;
VU les autres pièces du dossier ;
VU le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
VU la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 1996 :
- le rapport de M. LAMBERT, conseiller,
- les observations de la SCP GATINEAU, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation pour la société AUTOMOBILES PEUGEOT société anonyme et pour la société TALBOT ET CIE ;
- et les conclusions de M. LIBERT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes introduites par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE L'AMENAGEMENT DU TERRITOIRE et par la société anonyme AUTOMOBILES PEUGEOT ET TALBOT sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que la somme énoncée dans les motifs comme récapitulant l'ensemble des réparations successivement accordées pour chacun des chefs de préjudice préalablement examinés ne correspond pas au montant cumulé de celles-ci ; qu'ainsi le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'une contrariété dans ses motifs et à en demander l'annulation ; qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes formulées devant le tribunal administratif de Versailles par les sociétés PEUGEOT et TALBOT tendant à la réparation des conséquences dommageables résultant du refus de concours de la force publique nécessaire pour procéder à l'expulsion des occupants de l'usine de Poissy ordonnée le 3 juin 1982 par le président du tribunal de grande instance de Versailles, refus dont le tribunal administratif de Versailles par un jugement du 27 mars 1987 devenu définitif a décidé qu'il engageait la responsabilité de l'Etat pour la période du 22 juin 1982 au 4 juillet 1982 ;
Sur la demande de la société TALBOT :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des rapports de l'expertise que le préjudice industriel subi au cours de la période de responsabilité de l'Etat par la société en nom collectif TALBOT s'établit à la somme de 55.300.000 F ; qu'il n'y a pas lieu d'en déduire le coût du sureffectif constaté pendant cette période ; que par suite ladite société est fondée à demander la condamnation de l'Etat à lui payer cette somme ;
Sur la demande de la société AUTOMOBILES PEUGEOT :
En ce qui concerne les préjudices autres que le préjudice commercial :
Considérant qu'il sera fait, eu égard aux constatations et conclusions de l'expert et aux pièces justificatives produites par la SOCIETE AUTOMOBILES PEUGEOT, une juste appréciation du préjudice industriel et de celui résultant des frais de siège qu'elle a subis au cours de la période de responsabilité de l'Etat du fait de la paralysie de la production affectant le site de Poissy et des répercussions directes de celle-ci sur l'activité des usines à Vieux-Condé, Valenciennes-Hourdain, La Rochelle, Sully-sur-Loire, Dijon fournissant les pièces destinées à l'assemblage des véhicules en fixant le montant de sa réparation à la somme de 41.300.000 F ;
En ce qui concerne le préjudice commercial :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce et notamment eu égard aux contextes économique et social affectant l'activité de la société anonyme PEUGEOT, il sera fait une juste appréciation du préjudice commercial supporté par cette dernière, y compris à raison de l'assistance financière apportée à ses filiales commerciales, subi au cours de la période de responsabilité de l'Etat, en fixant le montant de sa réparation à la somme de 20.000.000 F ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de condamner l'Etat à payer à la société anonyme PEUGEOT la somme de 61.300.000 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que la société en nom collectif TALBOT et la société anonyme AUTOMOBILES PEUGEOT ont chacune droit aux intérêts des sommes ci-dessus déterminées à compter du 4 octobre 1982, date de réception de leur demande préalable par l'administration ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que, la capitalisation des intérêts a été demandée par l'une et l'autre sociétés les 28 avril 1988, 11 mai 1989, 18 septembre 1991, 2 juillet 1992, 2 novembre 1992, 11 juillet 1994, 12 septembre 1994, 22 septembre 1995 ; qu'à chacune des dates suivantes : 28 avril 1988, 11 mai 1989, 18 septembre 1991, 2 novembre 1992, 11 juillet 1994, 22 septembre 1995 il était dû, au moins, une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit aux demandes formulées à ces dates et de rejeter le surplus ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant qu'il y a lieu, de mettre les frais d'expertise liquidés à la somme de 261.750 F par ordonnance du président du tribunal administratif de Versailles en date du 24 janvier 1992 à la charge de l'Etat ;
Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :
Considérant qu'il y a lieu de condamner l'Etat à payer sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, à chacune des sociétés, la somme de 25.000 F au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés tant en première instance qu'en appel ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à la société TALBOT la somme de 55.300.000 F et à la société AUTOMOBILES PEUGEOT la somme de 61.300.000 F avec intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 1982. Les intérêts échus les 28 avril 1988, 11 mai 1989, 18 septembre 1991, 2 novembre 1992, 11 juillet 1994 et 22 septembre 1995 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;
Article 3 : L'Etat supportera les frais d'expertise.
Article 4 : L'Etat est condamné à payer 25.000 F respectivement à la société AUTOMOBILES PEUGEOT et à la société en nom collectif TALBOT sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.
Article 5 : Le surplus des demandes présentées par les sociétés PEUGEOT et TALBOT est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 94PA00941;94PA00951
Date de la décision : 19/06/1996
Type d'affaire : Administrative

Analyses

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITE EN RAISON DES DIFFERENTES ACTIVITES DES SERVICES PUBLICS - SERVICES DE POLICE - SERVICES DE L'ETAT - EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE.

RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - REPARATION - EVALUATION DU PREJUDICE.


Références :

Code civil 1154
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. LAMBERT
Rapporteur public ?: M. LIBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;1996-06-19;94pa00941 ?
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